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27/06/2023 | FRANCE | N°19NC01647

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 27 juin 2023, 19NC01647


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien, M. P... A..., M. E... J..., Mme O... U..., Mme Q... K..., M. B... L..., M. C... M..., M. N... G..., Mme W... I..., M. Y..., Mme H... R... et M. X... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, par une première requête, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le préfet des Ardennes a délivré à la société Ferme éolienne de la Hotte une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation de huit éoliennes et troi

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien, M. P... A..., M. E... J..., Mme O... U..., Mme Q... K..., M. B... L..., M. C... M..., M. N... G..., Mme W... I..., M. Y..., Mme H... R... et M. X... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, par une première requête, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le préfet des Ardennes a délivré à la société Ferme éolienne de la Hotte une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation de huit éoliennes et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Fraillicourt, Rocquigny, Rubigny et Vaux-lès-Rubigny et, par une seconde requête, d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2018 par lequel le préfet des Ardennes a modifié l'autorisation délivrée le 3 octobre 2017.

Par une ordonnance n°s 1800258, 1901030 du 27 mai 2019, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a renvoyé ces demandes à la cour administrative d'appel de Nancy, qui les a enregistrées le 28 mai 2019 sous le n° 19NC01647 concernant la requête relative à l'arrêté du 3 octobre 2017 et sous le n° 19NC01648 concernant la requête relative à l'arrêté du 28 décembre 2018.

Par une ordonnance n°s 19NC01647, 19NC01648 du 6 décembre 2019, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Nancy a donné acte à l'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien Z... du désistement de leurs requêtes en application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative.

Par une décision du 4 octobre 2021, le Conseil d'Etat a annulé l'ordonnance n°s 19NC01647, 19NC01648 du 6 décembre 2019 de la cour administrative d'appel de Nancy en tant qu'elle prononce le désistement d'office de l'association Plein ciel en Thiérache et Porcien Z... dans l'instance n° 19NC01647, soit dans le dossier relatif à l'arrêté du préfet des Ardennes du 3 octobre 2017, et a renvoyé dans cette mesure le jugement de l'affaire à cette cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés initialement devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 5 février 2018, le 8 mars 2018, le 18 juillet 2018, le 24 janvier 2019 et le 15 mars 2019, ainsi par des mémoires enregistrés devant la cour sous le n° 19NC01647 avant cassation, le 27 septembre 2019, le 11 janvier 2021 et le 15 février 2021 et, enfin, par des mémoires enregistrés sous ce même numéro après cassation le 20 mai 2022, le 24 mars 2023, le 13 avril 2023 et le 4 mai 2023, Mme U..., l'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien, M. A..., M. J..., Mme K..., M. L..., M. M..., M. G..., Mme I..., M. T..., Mme R... et M. S..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2017 par lequel le préfet des Ardennes a délivré à la société Ferme éolienne de La Hotte une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation de huit éoliennes et trois postes de livraison sur le territoire des communes de Fraillicourt, Rocquigny, Rubigny et Vaux-lès-Rubigny ou, à titre subsidiaire, d'annuler cet arrêté en tant qu'il ne comporte pas la dérogation prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement et de suspendre l'exécution de l'arrêté jusqu'à la délivrance de cette dérogation ;

2°) de prescrire à la société Ferme éolienne de la Hotte de compenser les destructions d'espèces protégées occasionnées par le fonctionnement de son parc éolien ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Ferme éolienne de La Hotte la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable et ils ont notamment intérêt à agir contre l'autorisation litigieuse ;

- l'arrêté est entaché d'incompétence ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que l'avis du ministre chargé de l'aviation est entaché d'incompétence ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure car il n'a pas été sollicité l'accord des services de la zone aérienne de défense pourtant exigé par l'article 8 du décret du 2 mai 2014 ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que le plan masse du projet architectural ne mentionne pas les modalités de raccordement électrique du parc ;

- il est entaché d'un vice de procédure en ce que les dispositions du XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010, qui sont directement applicables en l'espèce dès lors que l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme est superfétatoire et de plus illégal, imposaient de recueillir l'avis de l'ensemble des communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes du périmètre du projet ; en tout cas, la commune de Vaux-lès-Rubigny, qui est limitrophe de la parcelle d'implantation de l'éolienne E4 n'a pas été consultée ;

- les avis des propriétaires ne pouvaient pas être uniquement ceux disposant de parcelles dans un rayon de dix mètres autour des éoliennes et des postes de livraison, mais devaient inclure tous les propriétaires de parcelles supportant les chemins d'accès aux éoliennes, ainsi que des parcelles sous lesquelles les câbles du réseau interne sont enterrées, dès lors que l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 est illégal et devait être écarté ; le dossier de demande ne contient pas l'ensemble des avis des propriétaires des parcelles d'implantation du projet, notamment pas l'avis des propriétaires du chemin d'exploitation n°6 situé sur la commune de Fraillicourt, des parcelles ZC 23 et 24, 27 et 28 de la commune de Fraillicourt, de la voie communale n° 10 située sur les communes de Fraillicorut et de Vaux-les-Rubingy, de la voie départemantale n° 378, de la parcelle ZB7 à Vaux-lès-Rubigny, de la parcelle A41 à Rubigny, et des parcelles A266 et A647 à Rocquigny ; en l'absence de relevé de propriétés au dossier, il n'est pas possible de s'assurer que tous les propriétaires aient bien été consultés ; les avis transmis sont irréguliers car ils sont tous rédigés de manière identique et car ils sont insuffisamment précis et, concernant les éoliennes E4, E6 et E11, car il n'est pas indiqué qui les a signés ;

- le dossier de demande ne présente pas la nature des garanties financières visant à couvrir les opérations de démantèlement et de remise en état des parcelles en méconnaissance des exigences de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- le dossier de demande ne présente pas les accords pour engager la procédure d'autorisation d'occupation du domaine public que doivent accorder les gestionnaires des voies routières sous lesquelles passent le câblage du parc ;

- l'étude paysagère est insuffisante dès lors, premièrement, que les photomontages sont d'un format inadapté, deuxièmement, que de nombreux photomontages ont été réalisés à partir de clichés pris dans des conditions météorologiques permettant d'atténuer l'impact visuel des machines, troisièmement, que des photomontages ont été pris derrière des obstacles visuels et enfin que, quatrièmement, il n'a pas été réalisé un photomontage permettant d'apprécier la vue sur le parc litigieux depuis l'église de Rozoy-sur-Serre ;

- l'étude chiroptérologique est insuffisante car, premièrement, les résultats de l'inventaire sont insuffisants en l'absence de précision sur la rareté des espèces dans les deux régions intéressées par le projet, deuxièmement, aucune recherche de gîte en période hivernale n'a été réalisée, troisièmement, aucun inventaire en hauteur n'a été réalisé, quatrièmement, le nombre de sorties au sol et la répartition des périodes ne sont pas satisfaisants, cinquièmement, il n'est pas présenté les résultats bruts de chaque prospection et il n'est pas mentionné les horaires précis des prospections, sixièmement, il n'a pas été justifié le choix de se départir des recommandations Eurobat et il n'a pas été présenté les courbes d'accumulation ou de raréfaction des inventaires sur l'ensemble de zone d'étude et par milieu du site du projet ;

- l'étude avifaunistique est superficielle et insuffisante eu égard à l'intérêt que présente le site pour l'avifaune et en l'absence de saisine de la Ligue pour la protection des oiseaux ;

- l'étude acoustique n'a pas été réalisée à partir du modèle le plus bruyant d'aérogénérateur susceptible d'être implanté sur le parc, mais elle est, de plus, entachée de plusieurs erreurs dans les calculs des niveaux d'émergence et elle dissimule le fait que, malgré l'optimisation du parc, le projet ne respectera pas les exigences légales ; la contre-expertise produite permet de contester la pertinence de cette étude ;

- l'avis de l'autorité environnementale est irrégulier dès lors que, en méconnaissance des exigences de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 et des articles L. 122-1 et R. 122-6 du code de l'environnement, il n'existait pas de garantie d'une réelle séparation entre le service qui prépare l'avis portant sur la qualité de l'étude d'impact et celui qui instruit la demande d'autorisation ;

- l'arrêté est entaché d'un vice de procédure dès lors que la publicité par voie de presse de l'enquête publique a été insuffisante ; les exigences de l'article 6 de l'arrêté inter-préfectoral du 1er février 2017 relatives tant à l'affichage de l'avis d'enquête publique sur le site du projet, qu'à l'affichage de l'avis dans les communes n'ont été respectées ; ces irrégularités ont d'ailleurs abouti à une très faible participation locale à l'enquête publique ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors que seules douze des trente-et-une communes devant été consultées en application du III de l'article R. 512-14 du code de l'environnement et de l'arrêté d'ouverture de l'enquête publique, ont donné leur avis sur la demande d'autorisation conformément aux exigences de l'article R. 512-20 du code de l'environnement et qu'il n'est pas justifié que les autres communes aient été régulièrement invitées à rendre un avis sur le projet ; les avis émis par ces douze communes sont de plus irréguliers ;

- il est entaché d'un vice de procédure et d'une erreur d'appréciation dès lors que la pétitionnaire ne justifie pas avoir les capacités financières exigées par les articles L. 512-1 et R. 512-3 du code de l'environnement, qui sont seuls applicables, car les nouvelles dispositions issues articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement n'ont pas été précédées d'une évaluation environnementale et méconnaissent le principe de non-régression, de sorte qu'elles doivent être écartés ;

- le montant des garanties financières de démantèlement et de remise en état du site, prévu par l'annexe I à l'arrêté du 26 août 2011 pris pour l'application de l'article R. 553-1 du code de l'environnement, est inadapté et est manifestement insuffisant ; le préfet aurait dû écarter l'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 et imposer à la pétitionnaire de constituer des garanties financières adaptées; le préfet devait au moins prévoir, dans son arrêté, un coût unitaire initial de 90 000 euros par machine et a, à défaut, méconnu les dispositions de l'annexe 1 de l'arrêté du 26 août 2011 précité ;

- les mesures de démantèlement et de remise en état du site sont insuffisantes ; les dispositions prévues à cet effet par l'arrêté du 26 août 2011 sont illégales parce qu'elles émanent d'une autorité incompétente et prévoient des mesures insuffisantes ; le préfet aurait dû écarter l'application de l'arrêté du 26 août 2011 et imposer le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien ; l'arrêté contesté, en ce qu'il n'impose pas l'excavation de la totalité des fondations, ni ne conditionne un éventuel démantèlement partiel des fondations des aérogénérateurs à la production préalable d'une étude, méconnaît les articles R. 515-106 du code de l'environnement et 29 de l'arrêté du 26 août 2011 ;

- il méconnaît les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, ainsi que des articles L. 181-3 du code de l'environnement et L. 511-1 du même code dès lors que le projet porte atteinte aux paysages environnants et au patrimoine culturel et que les prescriptions de l'arrêté litigieuses sont insuffisantes ;

- l'autorisation attaquée méconnaît les articles L. 511-1 et L. 181-3 du code de l'environnement dès lors que le projet est de nature à porter atteinte à l'avifaune et aux chiroptères ; les atteintes aux espèces protégées n'ont pas été compensées comme l'imposaient pourtant les dispositions combinées des articles L. 110-1, 122-1-1 et L. 511-1 du code de l'environnement ;

- l'autorisation attaquée méconnaît les articles L. 511-1 et L. 181-3 du code de l'environnement en raison des nuisances sonores engendrées par le parc ;

- une demande de dérogation aurait dû être déposée et obtenue en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

Par un mémoire, enregistré le 9 janvier 2020 devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, Mme R... déclare se désister de l'instance

Par un mémoire, enregistré le 24 juin 2022 devant la cour, Mme K... déclare se désister de l'instance.

Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2018 devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et un mémoire enregistré le 26 avril 2022 devant la cour, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés devant la cour le 10 août 2019, le 11 janvier 2021, le 26 avril 2022, le 7 juin 2022, le 5 avril 2023 et le 18 avril 2023, la société Ferme éolienne de la Hotte, représentée par Me Cambus, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de Mme U... Z... ;

2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement pour une durée de 18 mois et d'enjoindre à l'administration de reprendre l'instruction de sa demande initiale afin qu'il soit constaté la régularisation des éventuels vices entachant l'arrêté, sans suspendre l'exécution de l'autorisation litigieuse ;

3°) de mettre à la charge de chacun des requérants la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable car les personnes physiques requérantes n'ont pas intérêt à agir ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une lettre du 30 mai 2023, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, dans l'attente de la délivrance d'une autorisation modificative régularisant les vices tirés de l'inexactitude de l'étude acoustique versée au dossier de demande, de l'insuffisante présentation des capacités financières de la société pétitionnaire dans le dossier de demande, de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale, de l'insuffisance du montant de la garantie financière prévue à l'annexe 1 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, de l'absence de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et, enfin, de l'impact excessif du projet sur les espèces protégées en l'absence de mesures compensatoires suffisantes.

Par un mémoire, enregistré le 2 juin 2023, la société Ferme éolienne de la Hotte a présenté des observations en réponse à ce courrier.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale ;

- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marchal,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Monamy pour Mme U... Z... et de Me Cambus pour la société Ferme éolienne de la Hotte.

Deux notes en délibérés, présentées pour Mme U..., ont été enregistrées les 16 et 23 juin 2023.

Considérant ce qui suit :

1. La société Ferme éolienne de la Hotte a sollicité le 27 novembre 2015 la délivrance d'une autorisation pour la construction et l'exploitation d'un parc de douze éoliennes et quatre postes de livraison sur le territoire des communes de Fraillicourt, de Rocquigny, de Rubigny, de Vaux-lès-Rubigny et de Rozoy-sur-Serre. Par une lettre du 18 juillet 2017, cette société a informé l'administration qu'elle revenait sur sa demande en tant qu'elle portait sur les éoliennes E1, E2, E3 et E5, mais qu'elle la maintenait pour le reste des éoliennes. Par un arrêté du 3 octobre 2017, le préfet des Ardennes a délivré à la société Ferme éolienne de la Hotte une autorisation pour la construction et l'exploitation de huit éoliennes, ainsi que de trois postes de livraison. Par un arrêté du 28 décembre 2018, le préfet des Ardennes a autorisé de légers déplacements du lieu d'implantation de certaines éoliennes, ainsi que la modification du modèle des aérogénérateurs devant être implantés sur le site. Mme O... U..., l'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien, M. P... A..., M. E... J..., , Mme Q... K..., M. B... L..., M. C... M..., M. N... G..., Mme W... I..., M. Y..., Mme H... R... et M. X... ont demandé à la cour administrative d'appel de Nancy, par une première requête, d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2017 du préfet des Ardennes, puis, par une seconde requête, d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2018 du même préfet. Par une ordonnance du 6 décembre 2019, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Nancy a donné acte à l'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien Z... du désistement de leurs requêtes en application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative. Par une décision du 4 octobre 2021, le Conseil d'Etat a annulé cette ordonnance en tant qu'elle prononce le désistement d'office de Mme U... Z... dans le dossier relatif à l'arrêté du 3 octobre 2017 du préfet des Ardennes et a renvoyé l'affaire à la cour dans cette mesure.

Sur les désistements :

2. Mme R..., ainsi que Mme K... ont, par des mémoires enregistrés respectivement le 9 janvier 2020 et le 24 juin 2022, déclaré se désister de l'instance. Ces désistements sont purs et simples. Rien ne fait obstacle à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société défenderesse :

3. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci./ Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 ainsi que les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les associations agréées de pêcheurs professionnels justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément ".

4. L'association Plein Ciel en Thiérache et Porcien a notamment pour objet de veiller sur le territoire du canton de Signy-L'abbaye, qui comprend les différentes communes d'implantation du parc éolien de la Hotte, à la protection de l'environnement contre tout projet, public ou privé, d'aménagement et notamment les projets de parcs éoliens. Elle justifie ainsi d'un intérêt pour demander l'annulation de l'autorisation en litige délivrée pour l'exploitation d'un parc éolien composé de huit aérogénérateurs. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de la requête collective sont recevables sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité en tant qu'elles émanent de chacun des autres demandeurs.

Sur la légalité externe de l'arrêté du 3 octobre 2017 :

5. Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...) ". Sous réserve des dispositions de son article 15, l'article 16 de la même ordonnance a abrogé les dispositions de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014.

6. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation. Toutefois, en vertu du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017, les demandes d'autorisation régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017. La légalité de telles autorisations doit donc être appréciée, pour ce qui concerne la forme et la procédure, au regard des règles applicables avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 26 janvier 2017.

En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'arrêté :

7. Par un arrêté du 29 septembre 2017, publié le jour même au recueil des actes administratifs de la préfecture des Ardennes, le préfet de ce département a donné délégation à M. Clowez, secrétaire général de la préfecture, afin de signer tous arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département des Ardennes à l'exception de certaines décisions, au nombre desquelles ne figurent pas les autorisations pour l'exploitation d'un parc éolien. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté doit être écarté.

En ce qui concerne la régularité de l'accord délivré par le ministre chargé de l'aviation civile :

8. D'une part, aux termes de l'article 8 du décret du 2 mai 2014 susvisé : " Le cas échéant, le dossier de demande mentionné à l'article 4 est complété par les pièces suivantes, lorsque le demandeur les détient : / 1° L'autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense, lorsque le projet porte sur une construction susceptible, en raison de son emplacement et de sa hauteur, de constituer un obstacle à la navigation aérienne en application de l'article L. 6352-1 du code des transports (...) ". Aux termes de l'article 10 de ce décret : " (...) II. - Le représentant de l'Etat dans le département : (...) 3° Sollicite les accords mentionnés à l'article 8, lorsque le dossier ne les comporte pas. Ces accords sont délivrés dans les deux mois. Ils sont réputés donnés au-delà de ce délai. Les désaccords sont motivés ".

9. D'autre part, aux termes de l'article R. 244-1 du code de l'aviation civile, dont certaines des dispositions du premier alinéa ont été abrogées à compter du 1er décembre 2010 pour être reprises à l'article L. 6352-1 du code des transports : " À l'extérieur des zones grevées de servitudes de dégagement en application du présent titre, l'établissement de certaines installations qui, en raison de leur hauteur, pourraient constituer des obstacles à la navigation aérienne est soumis à une autorisation spéciale du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre de la défense. / Des arrêtés ministériels déterminent les installations soumises à autorisation ainsi que la liste des pièces qui doivent être annexées à la demande d'autorisation. (...) ". L'article 1er de l'arrêté du 25 juillet 1990 relatif aux installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation dispose que : " Les installations dont l'établissement à l'extérieur des zones grevées de servitudes aéronautiques de dégagement est soumis à autorisation du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des armées comprennent : / a) En dehors des agglomérations, les installations dont la hauteur en un point quelconque est supérieure à 50 mètres au-dessus du niveau du sol ou de l'eau (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que l'accord du ministre chargé de l'aviation civile a été donné le 22 février 2016 par M. D... F..., chef du département de la surveillance et de la régulation de la direction de la sécurité de l'aviation civile du Nord-Est. M. F... disposait, en vertu de l'article 4 d'une décision du directeur de la sécurité de l'aviation civile du 17 décembre 2015, d'une délégation à " l'effet de signer, au nom du ministre chargé des transports, tous actes, arrêtés et décisions, à l'exception des décrets, dans la limite des attributions du département surveillance et régulation " de la direction de la sécurité de l'aviation civile du Nord-Est. Or, l'article 28 de l'arrêté du 7 décembre 2015 portant organisation de la direction de la sécurité de l'aviation civile prévoit, dans sa version applicable, que les départements de la surveillance et de la régulation des directions interrégionales de la sécurité de l'aviation civile sont notamment chargés de prendre les actions, les mesures et les décisions requises à l'égard des personnes et des organismes ou concernant des systèmes ou des matériels dans les matières de sécurité et de sûreté. Par suite, le moyen tiré de ce que M. D... F... n'a pu régulièrement signer l'accord donné le 22 février 2016 doit être écarté.

En ce qui concerne l'absence d'accord des services de la zone aérienne de défense :

11. Aux termes de l'article 8 du décret du 2 mai 2014 : " Le cas échéant, le dossier de demande (...) est complété par les pièces suivantes lorsque le demandeur les détient : (...) / 4° L'accord des services de la zone aérienne de défense compétente concernant la configuration de l'installation, pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent (...) ". Aux termes de l'article 10 de ce décret : " (...) II - Le représentant de l'Etat dans le département : (...) / 3° sollicite les accords mentionnés à l'article 8, lorsque le dossier ne les comporte pas. (...) ".

12. Il résulte de l'instruction que l'accord exigé par les dispositions précitées a été accordé le 11 mars 2014 par le commandant de la zone aérienne de défense Nord. Cet accord a été versé à son dossier de demande par la société pétitionnaire. Par suite, le moyen tiré de l'absence de l'accord exigé par les dispositions du 4° de l'article 8 du décret du 2 mai 2014 doit être écarté.

En ce qui concerne le dossier de demande :

13. Ainsi qu'il a été indiqué au point 6 du présent arrêt, il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et à la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme, qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation. Les obligations relatives à la composition du dossier de demande d'autorisation d'une installation classée relèvent des règles de procédure. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant ce dossier ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d'entacher d'irrégularité l'autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Eu égard à son office, le juge du plein contentieux des installations classées peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, que de telles irrégularités ont été régularisées.

S'agissant du projet architectural :

14. Aux termes du I de l'article 4 du décret susvisé du 2 mai 2014 : " Le dossier accompagnant la demande d'autorisation comporte : (...) / 3° Le projet architectural mentionné au b de l'article R.* 431-7 du code de l'urbanisme. (...) ". Aux termes de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : (...) / b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12 ". Aux termes de l'article R. 431-9 de ce code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. (...) " .

15. Si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par le code de l'urbanisme, le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation accordée pour le projet objet de la demande, si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier la légalité du projet au regard de l'ensemble des dispositions d'urbanisme applicables.

16. Le dossier de demande présenté par la société pétitionnaire expose le tracé du câblage entre les éoliennes et les postes de livraison du projet et précise les principales caractéristiques de ce réseau enterré. Le dossier indique également que le raccordement du parc au réseau public se fera par des câbles souterrains, qui relieront les postes de livraison 1 et 2 au poste source de Lislet et les postes de livraison 3 et 4 au poste source de Liart. Si le projet architectural ne traite pas spécifiquement la question de l'arrivée de l'électricité dans chaque poste de livraison, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle alimentation relèverait d'un raccordement distinct du réseau reliant les postes de livraison et le poste source. Ainsi, le dossier de demande permet à l'autorité administrative d'apprécier, en toute connaissance de cause, l'insertion du projet dans son environnement, y compris s'agissant du raccordement des postes de livraison au réseau électrique. Ce moyen doit, par suite, être écarté.

S'agissant la consultation des communes et établissements publics de coopération intercommunale :

17. Aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 20 mars 2014 : " L'autorisation unique est instruite et délivrée dans les conditions applicables à l'autorisation prévue aux articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de l'environnement. ". Le 3° de l'article 4 de cette même ordonnance prévoit toutefois que le projet reste soumis, " lorsque l'autorisation unique tient lieu de permis de construire, aux dispositions du chapitre Ier, du chapitre II, de la section 1 du chapitre V du titre II et du chapitre Ier du titre III du livre IV du code de l'urbanisme. ".

18. L'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme, inséré au chapitre III du titre II du livre IV de ce code, dispose, dans sa rédaction alors applicable : " Dans le cas d'un projet éolien soumis à permis de construire et situé en dehors d'une zone de développement de l'éolien définie par le préfet, l'autorité compétente recueille, conformément aux dispositions prévues au XI de l'article 90 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet ". Aux termes du XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010, dans sa version applicable : " Hors des zones de développement de l'éolien définies par le préfet, pour les projets éoliens dont les caractéristiques les soumettent à des autorisations d'urbanisme, les communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes du périmètre de ces projets sont consultés pour avis dans le cadre de la procédure d'instruction de la demande d'urbanisme concernée. ".

19. Il résulte des dispositions citées ci-dessus de l'ordonnance du 20 mars 2014 que ni la loi du 12 juillet 2010, ni l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme ne figurent parmi les dispositions auxquelles est soumise l'autorisation unique lorsqu'elle tient lieu de permis de construire et que l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet n'est donc pas requis. Par suite, le moyen tiré de ce que la demande d'autorisation unique n'a pas été soumise à l'avis des communes et des établissements publics de coopérations intercommunale limitrophes des communes d'implantation et le moyen tiré de ce que la commune de Vaux-lès-Rubigny n'a pas été saisie doivent être écartés.

S'agissant de l'avis des propriétaires et des collectivités sur le démantèlement et la remise en état du site :

20. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " I. - À chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; (...) ". Aux termes de l'article R. 553- 6 du code de l'environnement, alors en vigueur : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / a) Le démantèlement des installations de production ; b) L'excavation d'une partie des fondations ; / c) La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / d) La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ". Aux termes des dispositions alors applicables de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, modifié par l'arrêté du 6 novembre 2014 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévues à l'article R. 553-6 du code de l'environnement comprennent : / 1. Le démantèlement des installations de production d'électricité, des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. (...) "

Quant à la régularité des avis émis :

21. En premier lieu, les avis présentent de manière suffisamment précise l'identité de leurs signataires et renvoient aux conditions de remise en état prévues par l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement alors en vigueur, de sorte que, même si ces avis ont été rédigés dans des termes identiques et qu'ils ne mentionnent pas explicitement la parcelle précise qu'ils concernent, les éléments portés sur ces derniers permettent non seulement de déterminer les parcelles intéressées, mais aussi de s'assurer de l'accord des propriétaires sur les mesures de démantèlement et de remise en état prévues. Dans ces conditions, alors que les requérants ne se prévalent notamment pas de ce qu'un des signataires n'avait pas qualité pour émettre l'avis visé par le 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, le moyen tiré de l'irrégularité des avis émis doit être écarté.

Quant à l'absence de l'avis de certains propriétaires :

22. En premier lieu, si les requérants soutiennent qu'il n'est pas possible de s'assurer que l'ensemble des propriétaires concernés ont été consultés, faute de relevé de propriétés dans le dossier de demande d'autorisation, un tel relevé de propriétés n'avait pas à être obligatoirement produit au soutien de la demande d'autorisation unique.

23. En second lieu, à considérer même que les avis des propriétaires de parcelles n'accueillant que des chemins d'accès aux éoliennes ou des câbles souterrains doivent être sollicités, cette obligation de consultation ne saurait valoir, au regard des dispositions précitées, que pour les propriétaires des parcelles accueillant des chemins ou câbles situés dans un rayon de 10 mètres autour d'une éolienne ou d'un poste de livraison. Or, il résulte de l'instruction que tant le chemin d'exploitation n°6 situé sur le territoire de la commune de Fraillicourt, que la voie communale n° 10 marquant la frontière entre les communes de Fraillicourt et Vaux lès Rubigny, qu'enfin, les parcelles ZC23, ZC24, ZC27 et ZC28 situées sur le territoire de la commune de Fraillicourt n'accueillent pas d'éoliennes ou de postes de livraison et ne sont pas situés dans un rayon de 10 mètres autour de l'une de ces installations, de sorte que les propriétaires de ces voies et parcelles, bien qu'elles accueillent des câbles souterrains, n'avaient, en tout état de cause, pas à être consultés en application du 7° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement. Les requérants ne sauraient pas plus faire valoir que l'avis du propriétaire de la parcelle d'implantation du poste de livraison n° 2 n'a pas été recueilli, alors que le propriétaire de cette parcelle, sur laquelle s'implante également l'éolienne E5, a régulièrement émis un avis sur la remise en état de la parcelle. En revanche, il résulte de l'instruction et notamment des plans de localisation cadastrale du projet que des câbles du projet passent sous la route départementale n° 978 et qu'une partie de ce câblage est située dans un rayon de 10 mètres autour du poste de livraison n°4 implanté sur la commune de Rocquigny. Par ailleurs, aucun avis du propriétaire de cette route n'est versé au dossier. Il n'est également pas versé au dossier l'avis ou la preuve de la saisine des propriétaires des parcelles d'implantation des postes de livraison n° 3 et n° 4.

24. Toutefois, la consultation prévue par les dispositions citées au point 20 porte exclusivement sur les mesures de démantèlement des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent. Elle peut, le cas échéant, permettre aux propriétaires d'exprimer leur volonté sur la faculté qui leur est ouverte par l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 de demander le maintien en l'état des installations. Aucune disposition ne fait toutefois obstacle à ce que cette faculté puisse être exercée postérieurement à la délivrance de l'autorisation d'exploiter, ni à ce que l'autorité administrative puisse, postérieurement à cette délivrance, prescrire les mesures de démantèlement qu'elle estime appropriées, notamment au regard des observations éventuellement exprimées par les propriétaires ou dans leur intérêt. Dans ces conditions, le recueil de l'avis des propriétaires et leur consignation dans le dossier de demande d'autorisation ne peut être regardé comme constituant une garantie. De plus, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de recueil formel de l'avis du département de Ardennes, en sa qualité de propriétaire de la route départementale n°978, ait été de nature, en l'espèce, à exercer une influence sur le sens de la décision du préfet relative à la demande d'autorisation d'exploiter. L'absence au dossier de demande de l'avis des propriétaires des parcelles d'implantation des postes de livraison n°s 3 et 4 n'a pas été davantage de nature à entraîner un tel effet. Ainsi, soit sans qu'il soit besoin d'examiner à ce stade le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 modifié, le moyen doit être écarté.

S'agissant de l'autorisation d'occupation du domaine public :

25. Aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. ". Aux termes de l'article R. 421-4 du même code : " Sont également dispensés de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature, les canalisations, lignes ou câbles, lorsqu'ils sont souterrains. ".

26. Il résulte de ces dispositions que les câbles souterrains destinés à raccorder les éoliennes entre elles ou au poste de livraison qui permet d'acheminer l'électricité produite vers le réseau public de distribution ne sont pas une construction au sens des dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme. Par suite, la circonstance que des travaux sur le domaine public de plusieurs communes et du département des Ardennes seraient nécessaires pour enfouir les câbles destinés à assurer le raccordement des éoliennes du parc entre elles, au poste de livraison puis au réseau public de distribution n'imposait pas de faire figurer au dossier de demande du permis de construire une pièce exprimant l'accord du gestionnaire de la voirie pour engager une procédure d'autorisation d'occupation du domaine public.

S'agissant de l'étude d'impact :

Quant à l'étude paysagère :

27. En premier lieu, il résulte de l'instruction que soixante photomontages ont été intégrés dans le volet paysager pour apprécier l'impact du projet sur son environnement immédiat, rapproché et lointain. Ces photomontages, réalisés par un bureau d'étude spécialisée, prennent pour chaque point de vue, sélectionné en fonction des centres d'intérêt du secteur et de la sensibilité du paysage et des monuments, la forme d'un montage panoramique, ainsi que dans les cas de visibilité du parc, d'un zoom sur celui-ci. Ils sont reproduits au sein de l'étude dans un format suffisant pour appréhender l'impact du projet. Ces photomontages, qui sont accompagnés des indications relatives à la position exacte de la prise de vue et de la distance par rapport à l'éolienne la plus proche pour permettre d'appréhender précisément l'impact du projet, n'apparaissent avoir été obtenus ni par un cadrage volontairement faussé des photographies pour atténuer la visibilité des éoliennes, ni par des prises de vue dans des conditions météorologiques permettant de minorer l'impact du projet sur son environnement. Les requérants ne sont par suite pas fondés à soutenir que la méthode retenue pour le volet paysager permet généralement de minorer l'impact du projet.

28. En deuxième lieu, si l'étude d'impact présente de manière complète l'impact paysager prévisible sur l'église de Rozoy-sur-Serre en évoquant notamment à ce titre son classement, sa situation géographique, ainsi que sa proximité au parc en litige et plus précisément aux éoliennes E1, E2 et E3, l'étude ne comporte pas de photomontages depuis cette église alors notamment que l'autorité environnementale a souligné l'impact des trois éoliennes précitées sur ce monument. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'au vu des critiques émises, la société pétitionnaire a finalement abandonné avant l'adoption de l'arrêté en litige la construction des éoliennes E1, E2 et E3. Dans ces conditions, l'absence de photomontage réalisé depuis l'Eglise de Rozoy-sur-Serre, qui est située à une distance importante des autres éoliennes, n'a, en tout état de cause, pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et n'a pas été de nature à exercer une influence sur le sens de la décision de l'autorité administrative. Le moyen doit ainsi être écarté.

Quant au volet chiroptérologique :

29. Il résulte de l'instruction qu'après avoir évalué l'intérêt du site au regard des éléments bibliographiques disponibles, le bureau d'étude ayant réalisé le volet chiroptérologique de l'étude d'impact a retenu que, au regard des données bibliographiques disponibles, le projet ne présentait pas un risque majeur pour les chiroptères et a, à ce titre, souligné que les aérogénérateurs s'implantaient en dehors des axes de migration identifiés par le schéma régional de l'éolien et n'étaient pas non plus situés dans une zone de forte sensibilité signalée. Au regard de ce constat, il a été choisi de réaliser uniquement des inspections en sol. Si les requérants font valoir qu'il aurait dû être procédé à des études en altitude en s'appuyant notamment sur les dires d'un expert mandaté par leur soin, ainsi qu'à une recherche de gîtes hivernaux, ils ne contestent pas utilement le constat de l'étude quant à l'intérêt limité du site au vu de la bibliographie disponible et ne font globalement valoir aucune circonstance particulière justifiant que le recours à des écoutes au sol aurait été insuffisant. Il résulte également de l'instruction que les prospections au sol ont été menées selon deux méthodes. D'une part, il a été recouru à des écoutes en des points fixes par des enregistreurs automatiques laissés pendant l'intégralité de deux nuits de septembre. Ces enregistrements ont été effectués en quatre points de la zone d'étude, répartis de façon à couvrir au mieux la zone concernée. Cette première série d'écoutes a été complétée par quatorze sorties d'écoutes réalisées entre le mois de mai et celui d'octobre, qui ont ainsi couvert les principales périodes d'activités des chiroptères, soit le printemps, l'été et l'automne, même si elles n'ont pas débuté dès le mois de mars. Ces sorties ont permis d'étudier l'intérêt de 29 points répartis sur le secteur d'étude. Aucun élément au dossier ne permet de retenir que ces prospections, alors même qu'elles n'ont pas intégré une recherche des gîtes d'hivernation, sont insuffisantes. Au regard de ces enregistrements, dont les données brutes, notamment les horaires de rencontres des différents spécimens de chiroptères, n'avaient pas nécessairement à être annexées à l'étude d'impact, l'étude a identifié de manière cohérente les différentes espèces de chiroptères rencontrées. Après avoir, contrairement à ce que soutiennent les requérants, présenté la rareté des espèces en Picardie et en Champagne, l'étude procède à l'évaluation des impacts du projet sur les chiroptères, sans que les appréciations ainsi portées soient contestées par les requérants. Dans ces conditions, en dépit de ce que cette étude n'intègre pas des courbes d'accumulation ou de raréfaction et ne respecte pas l'ensemble des recommandations de la Société française pour l'étude et la protection des mammifères, qui n'ont pas valeur réglementaire, l'étude chiroptérologique n'est pas insuffisante.

Quant au volet avifaunistique :

30. Alors que la consultation de l'association Ligue pour la protection des oiseaux ou d'une autre association n'est pas exigée par les textes pour établir le volet avifaunistique de l'étude d'impact, les requérants, qui se bornent à souligner que le site présente un intérêt pour l'avifaune sans établir, ni même alléguer, que l'étude aurait insuffisamment pris en compte cet intérêt, ne sont pas fondés à soutenir que le volet avifaunistique de l'étude serait superficiel ou insuffisant.

Quant à l'étude acoustique :

31. En premier lieu, il résulte du dossier de demande qu'il était envisagé d'implanter dans le parc soit des aérogénérateurs de modèle Nordex N117 d'une puissance unitaire de 2,4 mégawatts, soit des éoliennes de modèle Senvion 122 d'une puissance unitaire de 3 mégawatts. Si l'étude acoustique procède à une estimation de l'impact sonore du parc en retenant l'hypothèse d'une implantation d'éoliennes de modèle Nordex N117, il n'est nullement justifié que les aérogénérateurs Senvion 122 auraient un potentiel de troubles acoustiques plus important et que l'étude, en procédant à une simulation à partir du modèle Nordex N117, n'ait pas retenu le scénario présentant le risque sonore le plus important.

32. En second lieu, aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement : " Au sens du présent arrêté, on entend par : (...) / Emergence : la différence entre les niveaux de pression acoustiques pondérés A du bruit ambiant (installation en fonctionnement) et du bruit résiduel (en l'absence du bruit généré par l'installation). (...) ". L'article 26 du même arrêté précise que dès lors que le niveau de bruit ambiant est supérieur à 35 décibels, l'émergence admissible du parc litigieux ne peut être de plus de 5 décibels en période diurne et de 3 décibels en période nocturne. Au contraire, aucune limite d'émergence n'est imposée en cas de bruit ambiant inférieur à 35 décibels.

33. Au regard des résultats d'enregistrements sonores, l'étude acoustique détermine le bruit résiduel en quatorze points du site pour les différentes classes de vent, puis elle procède, par une modélisation de l'impact acoustique du parc, à une évaluation du niveau de bruit ambiant et en déduit ainsi l'émergence engendrée par le projet en ces différents points. L'étude procède également à l'évaluation en ces différents points des résultats de " dépassement ", qui correspondent, selon les indications de l'étude d'impact, à la valeur la plus faible devant permettre de respecter les seuils légaux, soit en terme de bruit ambiant, soit en terme d'émergence. Si la contre-expertise acoustique produite par les requérants ne suffit pas à remettre en cause l'étude acoustique, il résulte néanmoins de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté par la société pétitionnaire que les résultats d'émergence et de dépassement en période nocturne pour certaines classes de vent présentés par l'étude d'impact sont incorrects et que de telles inexactitudes existent également pour les résultats après prise en compte de l'optimisation. Ainsi, en période nocturne et en cas de vents de 6 m/s de direction sud-ouest ou de direction nord-ouest, l'émergence au point 7 a été sous-évaluée et le résultat de dépassement n'était pas nul, de sorte que l'étude conclut à tort, au moins pour ce point et ces classes de vents, que la procédure de bridage proposée permettra de respecter les seuils règlementaires. De telles inexactitudes ont été de nature à exercer une influence sur la décision du préfet. Par suite, le moyen doit être retenu.

Quant à l'insuffisante présentation des garanties financières constituées en vue du démantèlement du parc :

34. Aux termes du I de l'article R. 553-1 alors applicable du code de l'environnement : " La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre de l'article L. 512-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 553-6. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation ". Aux termes de l'article R. 512-5 du même code, alors applicable : " Lorsque la demande d'autorisation porte sur une installation mentionnée à l'article R. 516-1 ou R. 553-1, elle précise, en outre, les modalités des garanties financières exigées à l'article L. 516-1, notamment leur nature, leur montant et les délais de leur constitution ".

35. Il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation présentée par la société Ferme éolienne de la Hotte mentionne le montant des garanties, calculé conformément aux dispositions alors applicables de l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, et expose les conditions d'actualisation de ce montant. La nature des garanties financières exigées par les dispositions citées au point précédent n'est cependant pas précisée par le dossier de demande.

36. Toutefois, l'insuffisance entachant la composition du dossier n'est susceptible de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de ce dossier, que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elle a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. Eu égard à l'objet et à l'étendue de l'obligation prescrite par les dispositions ci-dessus reproduites de l'article R. 512-5 du code de l'environnement et au stade de la procédure auquel elle s'applique et alors, en premier lieu, qu'il appartient à l'arrêté d'autorisation de déterminer le montant des garanties financières et, en second lieu, que la mise en service du parc éolien ne peut intervenir avant leur constitution, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de précision, dans le dossier de demande, sur la nature de ces garanties aurait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur la décision prise ou de nuire à l'information complète de la population.

Quant à la présentation des capacités financières :

37. En vertu du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de délivrance de l'autorisation attaquée, la demande d'autorisation mentionne " les capacités techniques et financières de l'exploitant ". Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités techniques et financières. Si cette règle a été ultérieurement modifiée par le décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale, qui a créé l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement en vertu duquel le dossier comprend une description des capacités techniques et financières dont le pétitionnaire dispose ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour en justifier, l'exploitant devant, dans ce dernier cas, adresser au préfet les éléments justifiant de ses capacités techniques et financières au plus tard à la mise en service de l'installation, cette évolution de la règle de droit ne dispense pas le pétitionnaire de l'obligation de régulariser une irrégularité dans la composition du dossier au vu des règles applicables à la date de délivrance de l'autorisation.

38. Il résulte de la demande d'autorisation d'exploitation que la société Ferme éolienne de la Hotte est une société de projet créée par la société Energieteam et que cette société a vocation à être cédée dans son intégralité à la société Compagnie nationale du Rhône (C.N.R), investisseur pressenti du projet, après l'obtention des autorisations nécessaires à son exploitation. Le dossier indique également que le montant total de l'investissement nécessaire à la réalisation du projet d'un parc éolien de douze aérogénérateurs, tel que conçu initialement, est de 64 800 000 euros. Il est indiqué que la société CN'Air, société filiale de la société C.N.R, financera le projet, mais qu'un prêt pouvant aller jusqu'à 80 % du coût du projet pourrait être sollicité. Un plan d'affaires est également joint au dossier de demande intégrant l'hypothèse du recours à un prêt pour 80 % du montant du projet. Pour autant, il n'était versé au dossier aucun engagement financier de la société CN'Air ou d'un établissement financier. De plus, s'il était produit des éléments financiers justifiant de la solidité financière de la société C.N.R, il n'était pas apporté de tels éléments pour la société CN'Air, dont il était uniquement mentionné, sans justification, son chiffre d'affaires en 2013 et son résultat net sur cette même année. Ainsi, les informations figurant dans le dossier de demande d'autorisation d'exploiter n'étaient pas suffisamment précises et étayées quant aux capacités financières de la société pétitionnaire.

39. Devant la cour, afin de régulariser ce vice, la société pétitionnaire a produit, dans un premier temps, une attestation non datée de la société "FE Zukunfttenergien AG " (FEAG) précisant qu'elle est la société mère de la société Energieteam et qu'elle s'engage, dans l'hypothèse où la société CN'Air déciderait de ne pas acquérir la société Ferme éolienne de la Hotte, à mettre à la disposition de la société de projet les moyens financiers pour permettre de réaliser le projet de " Gourgé ", qui n'est pas le projet litigieux. De plus, pour justifier des capacités financières de la société FEAG, il n'est versé qu'une attestation d'un établissement bancaire indiquant qu'elle est digne de confiance et qu'elle dispose d'une somme supérieure à 64 800 000 euros, mais il n'était joint aucun bilan ou aucun compte de résultats pour justifier de la capacité de cette société à financer le projet. Si la société pétitionnaire a également produit dans un second temps un plan d'affaires actualisé, les comptes sociaux pour les années 2020, 2021 et 2022 ainsi que différents autres documents relatifs à sa capacité financière à exploiter le projet pour l'avenir, ces productions n'ont trait qu'aux capacités financières actuelles de la société pétitionnaire et ne permettent donc pas de régulariser le vice tiré de l'insuffisante présentation des capacités financières.

40. En tout état de cause, le juge du plein contentieux des installations classées ne peut prendre en compte la circonstance, appréciée à la date à laquelle il statue, qu'une irrégularité liée au dossier de demande a été régularisée, que sous réserve que cette irrégularité n'ait pas eu pour effet de nuire à l'information complète du public. Or, eu égard notamment à la modification des modalités de financement par l'engagement financier d'une nouvelle société et à l'intérêt manifesté par plusieurs intervenants à l'enquête publique quant aux enjeux liés au financement du projet, les lacunes entachant initialement le dossier de demande d'autorisation ont eu pour effet de nuire à la complète information du public. Par suite, cette irrégularité constitue un vice de procédure entachant d'illégalité l'autorisation délivrée par la préfète des Ardennes.

En ce qui concerne l'avis de l'autorité environnementale :

41. L'article L. 122-1 du code de l'environnement, modifié pour la transposition des articles 2 et 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011, dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I. ' Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) III. ' Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement (...) ". En vertu du IV de l'article R. 122-6 du même code, dans sa version alors en vigueur : " (...) Dans les cas ne relevant pas du I, du II ou du III, l'autorité environnementale mentionnée à l'article L. 122-1 est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet doit être réalisé. Lorsque le projet est situé sur plusieurs régions, la décision d'examen au cas par cas en application de l'article R. 122-3 ou l'avis sont rendus conjointement par les préfets de région concernés ".

42. La directive 2001/42/CE du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement et la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ont pour finalité commune de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des plans et programmes ou sur l'étude d'impact des projets, publics ou privés, susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation des dispositions de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, et à la finalité identique des dispositions des deux directives relatives au rôle " des autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement ", il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet ou en assurer la maîtrise d'ouvrage soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce qu'une entité administrative, interne à celle-ci, dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui sont propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée et de donner un avis objectif sur le projet concerné.

43. Lorsque le préfet de région est l'autorité compétente pour autoriser le projet, en particulier lorsqu'il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région, ou dans les cas où il est en charge de l'élaboration ou de la conduite du projet au niveau local, si la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, définie par le décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable et les articles R. 122-21 et R. 122-25 du code de l'environnement, peut être regardée comme disposant, à son égard, d'une autonomie réelle lui permettant de rendre un avis environnemental dans des conditions répondant aux exigences résultant de la directive, il n'en va pas de même des services placés sous son autorité hiérarchique, comme en particulier la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL).

44. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

45. En l'espèce, l'avis de l'autorité environnementale a été émis, le 16 décembre 2016, par le préfet de la région Grand-Est et le préfet de la région des Hauts-de-France, tandis que l'autorisation litigieuse a été délivrée par le préfet des Ardennes, qui n'avait pas qualité de préfet de région. Toutefois, l'avis émis a été préparé par la DREAL de la région Grand-Est, qui a également instruit l'autorisation litigieuse. Si la société pétitionnaire fait valoir que l'avis aurait cependant été préparé par le service d'appui à la mission régionale d'autorité environnementale ayant été créé au sein du service de l'évaluation environnementale de la DREAL en mai 2016, il résulte de l'instruction que l'avis a été préparé par l'unité départementale des Ardennes et les éléments au dossier ne permettent pas de retenir que cette unité départementale disposait d'une autonomie réelle et, notamment, qu'elle était pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres. Par suite, les requérants sont fondés à soutenir que l'avis de l'autorité environnementale est irrégulier.

46. L'évaluation environnementale a pour objet d'assurer un niveau élevé de protection de l'environnement afin de respecter notamment les objectifs de la directive du 13 décembre 2011 mentionnée ci-dessus. Compte tenu du rôle joué par l'autorité environnementale au début du processus d'évaluation, de l'autonomie dont cette autorité doit disposer et de la portée de l'avis qu'elle rend, cette autorité et ses avis constituent une garantie pour atteindre les objectifs en question. En l'espèce, compte tenu des conditions dans lesquelles l'avis a été émis, cette garantie ne peut être regardée comme ayant été assurée et, en particulier, il ne résulte pas de l'instruction qu'une autre autorité disposant d'une autonomie réelle aurait rendu un avis sur l'étude d'impact du projet.

En ce qui concerne l'information des conseils municipaux :

47. Aux termes de l'article R. 512-20 du code de l'environnement : " Le conseil municipal de la commune où l'installation projetée doit être implantée et celui de chacune des communes mentionnées au III de l'article R. 512-14 sont appelés à donner leur avis sur la demande d'autorisation dès l'ouverture de l'enquête. (...) ". L'article R. 512-14 du même code vise les communes concernées par les risques et inconvénients dont le projet peut être la source.

48. Il résulte de l'instruction que l'article 13 de l'arrêté du préfet des Ardennes du 7 mai 2018 portant ouverture de l'enquête publique a invité les conseils municipaux des communes visées par le III de l'article R. 512-14 du code de l'environnement à émettre un avis sur la demande d'autorisation et il n'est ni établi, ni même soutenu que cet arrêté n'aurait pas été communiqué à l'ensemble des communes concernées. Dans ces conditions, la circonstance que l'une des communes n'ait pas exprimé son avis dans le délai prescrit par l'article R. 512-20 du code de l'environnement n'est pas de nature à établir que les communes n'ont pas été régulièrement consultées. Il est en de même concernant le fait qu'une des communes a justifié de l'adoption d'un avis en se limitant à produire une attestation de son maire. Enfin, si les requérants font valoir que les avis émis sont tous irréguliers dès lors que les conseillers municipaux de ces communes n'ont pas bénéficié d'une note explicative de synthèse, ils n'apportent aucun élément probant au soutien de leurs allégations. En tout état de cause, à considérer même que les conseils municipaux des communes intéressées se seraient prononcés dans des conditions irrégulières, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité l'autorisation contestée dès lors qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier que les irrégularités alléguées, à les supposer établies, auraient privé les tiers d'une garantie ou exercé une influence sur la décision de délivrer cette autorisation.

En ce qui concerne la publicité de l'avis d'enquête publique :

49. Aux termes de l'article R. 123-11 du code de l'environnement : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. Pour les projets d'importance nationale et les plans et programmes de niveau national, cet avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale quinze jours au moins avant le début de l'enquête. / II. - L'avis mentionné au I est publié sur le site internet de l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête. Si l'autorité compétente ne dispose pas d'un site internet, cet avis est publié, à sa demande, sur le site internet des services de l'Etat dans le département. Dans ce cas, l'autorité compétente transmet l'avis par voie électronique au préfet au moins un mois avant le début de la participation, qui le met en ligne au moins quinze jours avant le début de la participation. / III. - L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne le ou les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tout autre procédé. (...). / Cet avis est publié quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et pendant toute la durée de celle-ci. (...) ".

50. L'avis d'enquête publique relatif au projet litigieux a fait l'objet d'une publication dans les journaux " L'Ardennais " et " Agri-Ardennes ", qui sont habilités à publier les annonces légales dans le département des Ardennes, ainsi que dans le journal " L'Aisne Nouvelle ", qui est habilité à publier de telles annonces dans le département de l'Aisne. Si le journal " Agri-Ardennes ", qui n'est pas distribué exclusivement par la voie d'abonnements, est destiné principalement aux agriculteurs, il résulte toutefois de l'instruction que le projet doit être implanté dans un secteur à dominante rurale, de sorte que le choix de ce journal était pertinent. De plus, en dépit des irrégularités affectant certains certificats d'affichage, la société pétitionnaire verse au débat des constats d'huissiers établissant que les différentes communes tenues d'afficher l'avis d'enquête publique ont respecté cette obligation pendant le délai imposé par les textes. Ces constats d'huissiers témoignent également de ce qu'il a été dûment assuré un affichage aux abords du site d'implantation du projet. Enfin, il n'est pas contesté que l'avis d'enquête publique a été régulièrement publié sur les sites internet des préfectures de l'Aisne et des Ardennes et il résulte de l'instruction que les communes de Fraillicourt, Rubigny et Rozoy-sur-Serre ont relayé l'information quant à la tenue de l'enquête publique dans leurs lettres d'information distribuées à leurs habitants. Dans ces conditions, alors que 133 observations ont été émises dans le cadre de l'enquête publique, ce qui témoigne d'une participation significative des citoyens, la circonstance que seul le journal " L'Aisne Nouvelle " était habilité à diffuser des annonces légales dans le département de l'Aisne est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, dès lors qu'elle n'a ni privé d'une garantie les intéressés, ni été de nature à avoir une influence sur la décision adoptée par le préfet. Le moyen tiré de l'insuffisante publicité de l'avis d'enquête publique doit ainsi être écarté.

Sur la légalité interne de l'autorisation :

En ce qui concerne les capacités financières :

51. Aux termes de l'article L. 181-27 du code de l'environnement : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en œuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité. ". Selon l'article D. 181-15-2 du même code : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : (...) / 3° Une description des capacités techniques et financières mentionnées à l'article L. 181-27 dont le pétitionnaire dispose, ou, lorsque ces capacités ne sont pas constituées au dépôt de la demande d'autorisation, les modalités prévues pour les établir au plus tard à la mise en service de l'installation ; (...) ".

52. Les articles L. 181-27 et D. 181-15-2 du code de l'environnement modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 de ce code. Il en résulte qu'une autorisation d'exploiter une installation classée ne peut légalement être délivrée, sous le contrôle du juge du plein contentieux des installations classées, si les conditions qu'ils posent ne sont pas remplies. Lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation après la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités financières et techniques du pétitionnaire ou, le cas échéant, de l'exploitant auquel il a transféré l'autorisation.

S'agissant de l'exception d'inconventionnalité de l'ordonnance et des décrets du 26 janvier 2017 :

53. Il résulte de l'article 3 de la directive du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, notamment dans ses arrêts du 11 septembre 2012 (C - 43/10), " Nomarchiaki Aftodioikisi Aitoloakarnanias " et du 27 octobre 2016 (C - 290/15) " Patrice d'Oultremont contre Région wallonne ", que la notion de " plans et programmes " se rapporte à tout acte qui établit, en définissant des règles et des procédures de contrôle applicables au secteur concerné, un ensemble significatif de critères et de modalités pour l'autorisation et la mise en œuvre d'un ou de plusieurs projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. Si, selon la Cour de justice, la notion de " plans et programmes " peut ainsi recouvrir, au sens de la directive, des actes normatifs adoptés par la voie législative ou réglementaire, c'est à la condition toutefois que ces actes concernent des secteurs déterminés et qu'ils définissent le cadre dans lequel la mise en œuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 peut être autorisée.

54. L'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, qui détermine les règles applicables aux projets relevant de l'ensemble des secteurs soumis auparavant à la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement et qui a notamment modifié les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement prévues par l'article L. 512-1 du code de l'environnement, n'a pas pour objet de définir le cadre dans lequel peuvent être mis en œuvre des projets déterminés dans un secteur particulier. Cette ordonnance ne relève pas, par conséquent, de la notion de " plans et programmes " au sens de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001. Il en va de même des deux décrets du 26 janvier 2017 relatifs à l'autorisation environnementale. Ainsi, ni l'ordonnance du 26 janvier 2017, ni le décret pris pour son application, d'où sont issues les dispositions précitées du code de l'environnement fixant le régime de l'autorisation environnementale, n'entrent dans le champ de la directive 2001/42/CE et n'avaient, en tout état de cause, à faire l'objet d'une évaluation environnementale en application de l'article L. 122-4 du code de l'environnement ou de la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001.

S'agissant de la méconnaissance du principe de non-régression :

55. Aux termes du 9° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, les autorités s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du " principe de non-régression ", selon lequel " la protection de l'environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l'environnement, ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment ".

56. D'une part, les requérants ne peuvent utilement invoquer à l'encontre de l'article L. 181-27 du code de l'environnement le principe de non-régression prévu par le 9° du II de l'article L. 110-1 du même code qui n'a pas, par lui-même, de valeur supérieure à l'article L. 181-27.

57. D'autre part, le principe de non-régression, qui est directement invocable contre les actes réglementaires, interdit l'édiction d'une réglementation ayant pour effet de diminuer le niveau effectif de protection de l'environnement. Cependant, les dispositions de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, prises pour l'application de l'article L. 181-27 du même code, n'ont ni pour objet, ni pour effet de supprimer l'obligation pour le pétitionnaire de justifier de ses capacités techniques et financières, mais lui permettent seulement d'adresser au préfet les éléments justifiant de la constitution effective des capacités techniques et financières au plus tard lors de la mise en service de l'installation. Elles ne peuvent être regardées, en conséquence, comme privant d'effectivité l'obligation de justifier des capacités techniques et financières de l'exploitant ou comme ayant, par elles-mêmes, pour effet de diminuer le niveau effectif de protection de l'environnement.

S'agissant de la suffisance des capacités financière :

58. Il résulte de l'instruction que le parc en litige a été mis en service au courant de l'année 2020 et est finalement exploité directement par la société Ferme éolienne de la Hotte. Cette société justifie par la production d'un plan d'affaires actualisé au regard des modifications du nombre d'éoliennes construites et de leurs capacités que le projet redimensionné demeure rentable et que le remboursement progressif de la dette constituée pour la construction et la mise en exploitation du parc ne s'oppose pas à ce qu'un résultat net positif soit dégagé. La production des bilans sociaux de cette société pour les années 2020, 2021 et 2022 confirme ce point et permet, en prenant également en compte les différentes attestations de garanties financières, de justifier du caractère suffisant des capacités financières actuelles de la société pétitionnaire. Par suite, le moyen doit être écarté

En ce qui concerne le montant des garanties financières de démantèlement et de remise en état du site :

59. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. (...) ".

60. L'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 modifié par l'arrêté du 10 décembre 2021, applicable depuis le 1er janvier 2022, fixe le montant de la garantie financière par aérogénérateur à 50 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 mégawatts (MW). Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est de 50 000 euros + 25 000 * (P-2). Ce montant est assorti d'une formule d'actualisation fixée à l'annexe II de l'arrêté du 26 août 2011 modifié.

61. En se bornant à se référer au coût estimé pour un autre projet de parc éolien ou à un rapport rendu par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, les requérants n'apportent pas d'éléments suffisants permettant de considérer que les dispositions introduites par l'arrêté du 10 décembre 2021, applicable au présent litige, ou celles de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 seraient entachées d'illégalité en ce qu'elles modulent le montant de la garantie exigée au regard de la puissance unitaire de l'aérogénérateur ou en ce que le montant des garanties financières exigé par les nouvelles dispositions, qui prend en compte les bénéfices liés à la revente des matériaux, ne serait pas suffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état de leur site d'implantation. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 26 août 2011 modifié et l'autorisation en litige ont sous-évalué le coût du démantèlement et de la remise en état.

62. Toutefois, il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières, fixé à 412 323 euros par l'article 6 de l'arrêté en litige, a été calculé conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté du 26 août 2011 visé ci-dessus, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, sur la base d'un coût forfaitaire de 50 000 euros par éolienne quelle que soit sa puissance. Ces dispositions ont cependant été abrogées par l'arrêté du 10 décembre 2021 ayant modifié l'arrêté du 26 août 2011 et remplacées, s'agissant des éoliennes d'une puissance supérieure à 2 MW, comme en l'espèce, par des dispositions fixant un montant de garanties variable selon leur puissance, calculé selon des modalités rappelées au point 60. Dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que les garanties financières fixées par l'arrêté attaqué sont insuffisantes dans la mesure où elles sont inférieures au montant résultant de l'annexe I de l'arrêté du 11 août 2011 modifié le 10 décembre 2021.

En ce qui concerne les mesures de démantèlement et de remise en état du site :

63. Aux termes du I de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité mécanique du vent : " Les opérations de démantèlement et de remise en état prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement comprennent :/ - le démantèlement des installations de production d'électricité ; / - le démantèlement des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison. Dans le cadre d'un renouvellement dûment encadré par arrêté préfectoral, les postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison peuvent être réutilisés ; (...) ".

64. En prévoyant, à l'article R. 515-106 du code de l'environnement, qu'un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixerait les conditions techniques de remise en état d'un site après exploitation, le pouvoir règlementaire a nécessairement entendu confier à ce ministre le soin de fixer, par arrêté, l'ensemble des conditions de réalisation des opérations mentionnées à cet article, ce qui inclut la détermination des modalités des opérations de démantèlement et de remise en état. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en prévoyant, à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 modifié, les modalités des opérations de démantèlement, le ministre de l'environnement aurait excédé les pouvoirs qu'il détenait de l'article R. 515-106. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des dispositions de l'arrêté du 6 août 2011 pour vice d'incompétence ne peut qu'être écarté.

65. L'article R. 515-106 du code de l'environnement ne prévoit pas que les obligations de démantèlement et de remise en état des parcs éoliens pesant sur l'exploitant comportent la suppression de l'ensemble du réseau électrique. Par suite, Mme U... Z... ne sont pas fondés à soutenir qu'en se bornant à imposer, à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée, le démantèlement des câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, règle figurant désormais à l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 à la suite de sa modification par celui du 22 juin 2020, le ministre chargé de l'environnement aurait méconnu les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement. En se bornant à se référer à un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable recommandant l'organisation d'une concertation avec les exploitants en vue de modifier les exigences de remise en état des sites éoliens, les requérants ne justifient pas plus que l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que le préfet était tenu d'écarter l'application de ces dispositions et qu'il aurait dû prévoir dans son arrêté le démantèlement des câbles au-delà de 10 mètres autour des aérogénérateurs.

66. Aux termes du I de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié par l'arrêté du 22 juin 2020 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état (...) comprennent : (...) - l'excavation de la totalité des fondations jusqu'à la base de leur semelle, à l'exception des éventuels pieux. Par dérogation, la partie inférieure des fondations peut être maintenue dans le sol sur la base d'une étude adressée au préfet démontrant que le bilan environnemental du décaissement total est défavorable, sans que la profondeur excavée ne puisse être inférieure à 2 mètres dans les terrains à usage forestier au titre du document d'urbanisme opposable et 1 mètre dans les autres cas. (...) ". Ces dispositions règlementaires sont applicables par elles-mêmes et s'imposent à l'exploitation autorisée sans qu'importe la circonstance qu'elles n'aient pas été reprises par le préfet parmi les prescriptions de l'autorisation en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué, en ce qu'il n'impose pas l'excavation de la totalité des fondations, ni ne conditionne un éventuel démantèlement partiel des fondations des aérogénérateurs à la production préalable d'une étude, méconnaît l'article R. 515- 106 du code de l'environnement et l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne l'impact paysager :

67. Aux termes du I de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) "

68. Il résulte de ces dispositions que, pour statuer sur une demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, il appartient au préfet de s'assurer que le projet ne méconnaît pas, notamment, l'exigence de protection des paysages. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage de nature à fonder un refus d'autorisation ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de cette autorisation, il appartient au préfet d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel l'installation est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette installation, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

69. Le site d'implantation du parc éolien de la Hotte se situe sur les entités paysagères du Haut-Porcien et de la Thiérache ardennaise et est borné au sud par la vallée de la Malacquise et au nord par la vallée de la Serre. Ce paysage se caractérise par de vastes plaines agricoles majoritairement vallonnées et ponctuées par des boisements et des villages. L'environnement du parc éolien accueille plusieurs parcs éoliens, dont notamment les parcs de Renneville et de Terre de Beaumont, de sorte que le site est déjà partiellement anthropisé. Ainsi ce paysage, sans être dépourvu de qualité, au regard notamment de la présence de plusieurs monuments historiques, ne présente toutefois pas un intérêt particulier.

70. Dans ce contexte, les aérogénérateurs du projet, d'une hauteur maximale de 180 mètres et implantés au sein d'une vallée faiblement vallonnée, seront nécessairement largement perceptibles depuis les alentours du site du projet. Pour autant, il résulte de l'instruction et notamment des photomontages versés par les parties, qui permettent d'appréhender la situation du parc à la date du présent arrêt dès lors que l'autorisation modificative ne comporte qu'une modification marginale de l'emplacement des éoliennes, que les vues plus importantes du parc depuis la vallée de la Serre ont été minorées par l'abandon des éoliennes E1, E2, E3 et E5 et que généralement l'impact propre du parc sur le paysage, bien que marqué, reste acceptable. De plus, les requérants ne démontrent pas l'existence de covisibilité notable entre le parc et les églises Sainte-Q... à Mainbressy et Saint-Christophe à Rocquigny et les photomontages versés témoignent d'une covisibilité très limitée du parc et de l'église Notre-Dame de Fraillicourt. Si, depuis l'une des rues menant à l'église Saint-Sébastien à Vaux-lès-Rubigny, l'une des éoliennes est visible derrière l'édifice, cette église ne bénéficie d'aucune protection et la covisibilité reste limitée à une unique éolienne, de sorte que les requérants ne sauraient se prévaloir d'un impact excessif sur cet édifice, ni généralement sur les différentes églises précitées et ne peuvent pas plus soutenir qu'en raison de ces covisibilités, le parc a un impact excessif sur la route touristique du Porcien ou sur la route dite des églises fortifiées de Thiérache. Les requérants se prévalent également de la densification importante en matière d'éoliennes du secteur dans lequel s'implante le parc de la Hotte et exposent que plusieurs communes, dont celles de Rubigny, de Vaux-les-Rubigny, de Logny-lès-Chaumont et de Fraillicourt, présentent un risque d'encerclement. Toutefois, en dépit de la production de cartes d'encerclement, qui ne font état que d'un encerclement théorique de ces communes dès lors qu'elles ne peuvent permettre de prendre en compte les reliefs, les boisements et les autres masques naturels susceptibles de réduire l'impact visuel des parcs éoliens depuis les villages concernés, il ressort des éléments versés au dossier et notamment des photomontages des parties qu'à l'exception du parc de Thiérache, qui a été conçu comme un prolongement du parc litigieux, les covisibilités du projet avec les autres parcs éoliens sont limitées. Les requérants ne justifient pas que les parcs autorisés postérieurement au projet litigieux se trouveraient, en dépit de leur éloignement du parc de la Hotte, dans une situation de covisibilité marquée avec ce dernier parc ou qu'ils contribueraient à une densification excessive du paysage en raison des nouvelles vues créées. En revanche, il résulte de l'instruction que, si les aérogénérateurs du projet sont visibles depuis plusieurs axes de circulation, voire depuis certaines habitations, les vues depuis les lieux de vie et notamment dans les cœurs de village demeurent modérées, même pour les communes les plus proches du parc comme Rubigny, Vaux-lès-Rubigny, Fraillicourt, Wadimon et Rocquigny, y compris ses hameaux des Duizettes et de Ribauville. Dans ces conditions, alors que la suppression par le pétitionnaire des éoliennes E1, E2, E3 et E5 a contribué à réduire l'impact visuel du projet sur le paysage et les villages environnants et que les riverains du hameau des Duizettes ont la possibilité de solliciter la plantation de végétaux occultants, il ne résulte pas de l'instruction que l'arrêté, en raison de son impact sur les paysages et sur le patrimoine ou en raison de la sur-densification de la zone et des risques d'effets d'encerclement, méconnaîtrait les dispositions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement. Pour les mêmes motifs, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté litigieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne l'impact sonore :

71. Si, ainsi qu'il a été indiqué au point 33, l'étude acoustique produite au soutien de la demande de la société pétitionnaire est entachée d'erreurs, qui ont abouti à ce qu'il soit à tort conclu que le projet initial respecte les exigences légales en matière d'impact sonore, il résulte de l'instruction que cette étude a été effectuée en prenant en compte l'implantation de douze éoliennes de modèle Nordex N117, alors que le projet, tel que modifié par l'arrêté du 28 décembre 2018, ne porte que sur 8 éoliennes d'un modèle différent de celui pris en compte par l'étude et dont rien ne permet de considérer qu'il serait aussi bruyant que le modèle Nordex N117. Ainsi l'étude acoustique, eu égard aux modifications apportées au projet initial, ne saurait être représentative de l'impact sonore du parc finalement implanté. Dans ces circonstances, les requérants, qui se bornent à se prévaloir de l'irrégularité de cette étude, ne sont pas fondés à soutenir que le projet aurait un impact sonore excessif. De plus, la société pétitionnaire verse au dossier une étude acoustique réalisée le 15 septembre 2019, après la mise en service du parc, témoignant de ce qu'avec le nouveau plan de bridage présenté dans ce document, le parc respecte les exigences de l'arrêté du 26 août 2011 mentionné ci-dessus. Alors qu'il n'est nullement contesté le caractère probant de cette étude, ni la suffisance ou la réalité des mesures de bridage prévues, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté méconnaît les dispositions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement en raison de l'impact sonore du parc de la Hotte.

En ce qui concerne la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement :

72. Aux termes du I de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits: / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) ". Aux termes du I de l'article L. 411-2 du même code: " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; / b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ; / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; / d) A des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ; / e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié de certains spécimens (...) "

73. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus, qui concerne les espèces de mammifères terrestres et d'oiseaux figurant sur les listes fixées par les arrêtés du 23 avril 2007 et du 29 octobre 2009, impose d'examiner si l'obtention d'une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l'espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l'applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l'état de conservation des espèces protégées présentes.

74. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation relative aux espèces protégées si le risque que le projet comporte pour ces espèces est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une telle dérogation.

75. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les différentes opérations de prospection ont permis de relever la présence sur le site du projet de plusieurs espèces protégées de chiroptères, dont notamment la sérotine commune, la noctule de Leisler et la pipistrelle commune, qui est l'espèce la plus représentée dans le secteur d'implantation. Ces différentes espèces protégées présentent des risques importants de collision avec les éoliennes. Or, en dépit des légères modifications de l'implantation des aérogénérateurs retenues par l'autorisation modificative du 8 décembre 2018, plusieurs des éoliennes du projet demeurent à proximité de bois et de haies. Les suivis de mortalité réalisés au titre de l'année 2021 ont permis d'estimer qu'entre 424 et 456 chiroptères sont décédés en raison du fonctionnement du parc, mais il résulte également de l'instruction que la société pétitionnaire n'avait pas respecté, pendant cette période, les mesures de bridage pourtant imposées par l'autorisation accordée. Après l'adoption de mesures d'urgence, le préfet a, par un arrêté du 13 avril 2022, imposé un nouveau plan de bridage de l'ensemble des éoliennes du parc, qui doivent ainsi être arrêtées dès le coucher du soleil et jusqu'à son lever pendant les mois d'avril à octobre, dès lors que la température excède 10°C et que la vitesse du vent est inférieure à 5 m/s ou à 5,6 m/s pour le mois de septembre. Les résultats du suivi de mortalité pour l'année 2022 ont démontré l'efficacité de ces mesures du fait de la réduction importante du nombre de chiroptères impactés par le parc et notamment concernant la sérotine commune et la noctule de Leisler. Toutefois, eu égard à l'intérêt que présente le site pour les pipistrelles communes, lequel ressort de l'étude de mortalité réalisée pour l'année 2021, mais aussi en raison du maintien en 2022 de décès pour cette espèce, le risque pour la pipistrelle commune est suffisamment caractérisé pour justifier la nécessité d'obtenir une dérogation relative aux espèces protégées. La circonstance évoquée par la société pétitionnaire qu'elle aurait légèrement renforcé son programme de bridage ne suffit pas à justifier que cette mesure permettrait de réduire suffisamment les risques pour cette espèce. Ainsi, l'autorisation doit être subordonnée à une obtention, au moins pour cette espèce de chiroptères, de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Le moyen doit par suite être retenu.

76. En second lieu, les prospections réalisées sur le site du parc éolien dans le cadre de l'étude d'impact ont permis de révéler notamment la présence de milans royaux, de grues cendrées, de busards Saint-Martin, de faucons pèlerins, de buses variables, d'éperviers d'Europe et de faucons crécerelles. Ces espèces patrimoniales présentent des risques importants de collision avec des éoliennes, tout particulièrement le milan royal, et elles seront également impactées, mais à un degré moindre, par les efforts de contournement induits par l'implantation du parc litigieux à proximité immédiate de celui de Thiérache. Toutefois, concernant le milan royal, la grue cendrée, le busard Saint-Martin, le faucon pèlerin et l'épervier d'Europe, seul le busard Saint-Martin pourrait être nicheur à proximité du site d'implantation et les observations pour ces espèces ont été d'une importance mesurée. Le milan royal et la grue cendrée n'ont ainsi été observés qu'à une seule reprise et les effectifs de chaque espèce lors des observations étaient alors également réduits. Les résultats des études de mortalité menées pour les années 2021 et 2022 ne témoignent d'aucun cas de décès pour ces espèces sauf concernant l'épervier d'Europe, mais aucun individu de cette espèce n'est décédé par collision avec une éolienne en 2021 et sa mortalité a été limitée à deux individus en 2022. Ces résultats permettent de confirmer que, au vu de la présence mesurée de ces espèces sur le site ainsi que des mesures prévues pour limiter et réduire l'impact prévu, le risque pour ces espèces ne peut être regardé comme suffisamment caractérisé pour imposer au pétitionnaire d'obtenir une dérogation relative aux espèces protégées. En revanche, les résultats des études de mortalité démontrent des cas de décès de buses variables et de faucons crécerelles tant en 2021 qu'en 2022. Il s'ensuit que le risque pour la buse variable et le faucon crécerelle est suffisamment caractérisé et impose d'obtenir, au moins pour ces deux espèces d'oiseaux, la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

En ce qui concerne l'impact sur la faune :

77. Aux termes de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " I. - Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sons et odeurs qui les caractérisent, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l'air, la qualité de l'eau, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. Ce patrimoine génère des services écosystémiques et des valeurs d'usage. (...) / II. Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu'ils fournissent sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : (...) / 2° Le principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. Ce principe implique d'éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu'elle fournit ; à défaut, d'en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n'ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ; (...) ". Aux termes du deuxième alinéa du I de l'article L. 122-1-1 du code de l'environnement : " La décision de l'autorité compétente est motivée au regard des incidences notables du projet sur l'environnement. Elle précise les prescriptions que devra respecter le maître d'ouvrage ainsi que les mesures et caractéristiques du projet destinées à éviter les incidences négatives notables, réduire celles qui ne peuvent être évitées et compenser celles qui ne peuvent être évitées ni réduites. Elle précise également les modalités du suivi des incidences du projet sur l'environnement ou la santé humaine. "

S'agissant de l'impact sur l'avifaune :

78. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'en dépit de l'absence d'observations récentes de la cigogne noire sur le site du projet, la société pétitionnaire a fait réaliser une étude spécifique à cette espèce en raison du recensement en 2015 par un naturaliste local d'un couple nicheur à Rumigny, à plus de 11 kms de l'éolienne du parc en cause la plus proche. Les nouvelles sorties réalisées n'ont pas permis d'observer des cigognes noires à proximité du site du projet et la consultation des bases de données recensant les observations des naturalistes locaux n'ont mentionné qu'une unique observation réalisée à Résigny, à 3,5 kilomètres des éoliennes les plus proches. Les résultats des études de suivi réalisées postérieurement à la mise en service du parc n'ont permis d'observer la cigogne noire qu'à deux reprises pendant les années 2021 et 2022 et à chaque fois à des distances d'au moins un kilomètre des machines. En dépit du caractère craintif et rare de cette espèce, les requérants ne justifient pas, en se prévalant d'une lettre d'un membre d'une association pour la protection des oiseaux soulignant généralement la présence de cette espèce dans les Ardennes, ainsi que d'une photographie sans preuve du lieu où elle a été prise, que l'étude d'impact n'aurait pas retenu pertinemment l'intérêt faible du site pour cette espèce et que l'impact que générera le parc pour les cigognes noires serait excessif.

79. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que pour apprécier l'intérêt du site du projet puis l'impact attendu de ce dernier sur l'avifaune, la société pétitionnaire a pris en compte, dans le volet avifaunistique de l'étude d'impact, l'existence d'un axe de migration secondaire, ainsi que l'accroissement des risques de collision et des efforts de contournement en raison de l'implantation à proximité immédiate du projet du parc de Thiérache. Si les résultats des études de suivi réalisées après la mise en service du parc témoignent de l'existence de plusieurs décès d'oiseaux liés à la présence du parc, les requérants, en se bornant à produire une lettre de l'association Ligue de la protection des oiseaux soulignant l'existence de cet axe migratoire et l'impact cumulé avec le projet du parc de Thiérache, ne démontrent pas l'existence d'un impact résiduel du projet tel qu'il s'opposerait à l'autorisation sollicitée.

80. En troisième lieu, en se bornant à produire une photographie d'un groupe d'oiseaux non identifiables, sans justifier de l'endroit de la prise de vue, et à affirmer sans autre justificatif que des grues cendrées et des milans royaux seraient présents à proximité du site de projet, les requérants ne justifient pas que l'impact du projet pour ces deux espèces s'oppose à la délivrance de l'autorisation litigieuse, alors que l'étude d'impact n'a pas occulté la présence de ces deux espèces sur le site du projet, mais a déduit pertinemment un impact faible notamment au vu de la fréquentation limitée du site et que les résultats des suivis de mortalité ne font état d'aucun décès pour ces deux espèces.

81. En quatrième et dernier lieu, ainsi qu'il a été indiqué au point 76 du présent arrêt, les résultats des études de suivi après le début du fonctionnement du parc témoignent que, en dépit des mesures déjà mises en place pour éviter et réduire l'impact sur la buse variable et le faucon crécerelle, qui sont des espèces protégées, les risques pour ces deux espèces sont significatifs dès lors que le parc a engendré plusieurs cas de décès pour ces deux espèces pendant les deux années de suivi. En l'absence de mesures compensatoires permettant de limiter l'impact résiduel du parc sur deux espèces, les requérants sont fondés à soutenir que le parc en litige engendre un impact excessif sur ces dernières en méconnaissance des exigences combinées des dispositions des articles L.110-1, L. 122-1-1 et L. 511-1 du code de l'environnement.

S'agissant de l'impact sur les chiroptères :

82. Il résulte de l'instruction que les différentes écoutes au sol ont permis de révéler la présence sur le site du projet de plusieurs espèces protégées de chiroptères, dont principalement la pipistrelle commune. Cette espèce, bien que dans un état de conservation moins inquiétant que d'autres chiroptères, est protégée et présente des risques de collision importants avec les éoliennes. De plus, en dépit des légères modifications de l'implantation des aérogénérateurs retenues par l'autorisation modificative du 8 décembre 2018, plusieurs des éoliennes du projet demeurent à proximité de bois et de haies. S'il appartient au juge du plein contentieux des autorisations environnementales d'apprécier le respect des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, de sorte que les requérants ne sauraient utilement se prévaloir des atteintes portées aux espèces protégées en raison de la méconnaissance au cours de l'année 2021 des obligations de bridage des éoliennes du parc, les résultats de mortalité sur cette année témoignent néanmoins d'un intérêt de la pipistrelle commune pour le site. Or, bien que le préfet ait, par un arrêté du 13 avril 2022, imposé un nouveau plan de bridage de l'ensemble des éoliennes du parc, qui a permis globalement, ainsi qu'en témoignent les résultats du suivi de mortalité pour l'année 2022, une réduction marquée du nombre de chiroptères impactés, la mortalité engendrée par le parc reste excessive pour la pipistrelle commune en dépit des mesures d'évitement et de réduction. La circonstance évoquée par la société pétitionnaire qu'elle aurait légèrement renforcé son programme de bridage ne permet pas de justifier que les atteintes à cette espèce ne demeureraient pas excessives. Il s'ensuit qu'en l'absence de mesures compensatoires permettant de limiter l'impact résiduel du parc en litige sur cette espèce, les requérants sont fondés à soutenir que ce parc engendre un impact excessif sur cette dernière en méconnaissance des exigences combinées des dispositions des articles L.110-1, L. 122-1-1 et L. 511-1 du code de l'environnement.

Sur les conséquences à tirer du vice entachant d'illégalité l'arrêté en litige :

83. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement dans leur version applicable à l'espèce : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".

84. Les dispositions précitées du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement prévoient que le juge peut, après avoir constaté que les autres moyens dont il est saisi ne sont pas fondés, surseoir à statuer pour permettre la régularisation devant lui de l'autorisation environnementale attaquée lorsque le ou les vices dont elle est entachée sont susceptibles d'être régularisés par une décision modificative, en rendant un arrêt avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation. Le juge peut préciser, par son arrêt avant dire droit, les modalités de cette régularisation.

85. Il résulte de ce qui précède que l'autorisation en litige est entachée de plusieurs vices tirés de l'inexactitude de l'étude acoustique versée au dossier de demande, de l'insuffisante présentation des capacités financières de la société pétitionnaire dans le dossier de demande, de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale, de l'insuffisance du montant de la garantie financière au regard des exigences de l'annexe 1 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, de l'absence de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et, enfin, de l'impact excessif du projet sur des espèces protégées d'oiseaux et de chiroptères. Ces illégalités peuvent toutefois être régularisées.

En ce qui concerne la régularisation des vices tirés de l'inexactitude de l'étude acoustique et de l'insuffisante présentation des capacités financières de la société pétitionnaire :

86. Afin de régulariser ces vices, la société Ferme éolienne de la Hotte transmettra au préfet des Ardennes un dossier qui sera soumis au public pendant une durée d'un mois et qui contiendra l'ensemble des éléments attestant des capacités financières de la société pétitionnaire. Ce dossier devra contenir des précisions quant aux modalités financières finalement retenues pour la construction du parc éolien et des éléments justifiant de ses capacités actuelles à exploiter le parc, notamment un plan d'affaires actualisé du projet. Ce dossier devra également comporter les éléments justifiant des actuels impacts sonores du parc et pourrait à ce titre contenir notamment l'étude acoustique post-implantation du 15 septembre 2019.

87. Le préfet des Ardennes assurera, avec le concours des communes et de la société pétitionnaire, la publication d'un avis annonçant l'organisation et les modalités de cette consultation du public, au moins quinze jours avant le début de la mise à disposition du dossier, dans deux journaux régionaux ou locaux, sur le site internet de la préfecture des Ardennes, ainsi que par affichage en mairie des communes de Fraillicourt, Rocquigny, Rubigny et Vaux lès Rubigny. La société Ferme éolienne de la Hotte prendra en charge les frais de cette phase d'information du public. Dans le cadre de cette mise à disposition des informations relatives aux capacités financières de la société pétitionnaire et à l'impact acoustique du parc, le public pourra présenter ses observations dans un registre ouvert dans les mairies des communes de Fraillicourt, Rocquigny, Rubigny et Vaux lès Rubigny ou par courriers adressés à ces mairies, qui seront ensuite annexés au registre. Le préfet des Ardennes devra, après avoir recueilli les avis et remarques du public figurant dans les registres, les transmettre à la société exploitante pour recueillir ses éventuelles observations en réponse.

En ce qui concerne la régularisation du vice affectant l'avis de l'autorité environnementale :

88. L'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale peut être régularisée par la consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises.

89. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAe) du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) compétente pour la région Grand Est. Ce nouvel avis devra être rendu au regard d'informations actualisées sur le parc concernant notamment les mesures pour éviter, réduire et compenser l'impact sur les espèces protégées possiblement envisagées par la société pétitionnaire, ainsi que les informations relatives à la demande de dérogation relative aux espèces protégées et à son instruction.

90. Lorsque ce nouvel avis aura été rendu, ou lorsqu'il sera constaté que la mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région Grand Est n'a pas émis d'observations dans le délai qui lui est imparti par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point précédent, ce nouvel avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises par la mission régionale sera mis en ligne sur un site internet suffisamment accessible et ayant une notoriété suffisante, tels que le site de la préfecture de la région Grand Est ou celui de la préfecture des Ardennes, de manière à ce qu'une information suffisante du public soit assurée et que celui-ci ait la possibilité, par des cadres définis et pouvant accepter un nombre suffisant de caractères, de présenter ses observations et propositions. L'accessibilité de cet avis implique également qu'il soit renvoyé à son contenu intégral par un lien hypertexte figurant sur la page d'accueil du site en cause.

91. Dans l'hypothèse où, après avoir tenu compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait, ce nouvel avis indiquerait, comme le faisait l'avis irrégulièrement émis le 16 décembre 2016 que le dossier de création du parc éolien de la société Ferme éolienne de la Hotte est assorti d'une étude d'impact de qualité suffisante, le préfet des Ardennes pourra, après qu'il aura été satisfait aux exigences liées à la régularisation des autres vices, décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant ces vices initiaux. Le préfet pourra procéder de manière identique en cas d'absence d'observations de l'autorité environnementale émises dans le délai requis par les dispositions du code de l'environnement.

92. Dans l'hypothèse où, à l'inverse, le nouvel avis émis par la mission régionale de l'autorité environnementale différerait substantiellement de celui qui avait été émis le 16 décembre 2016, une enquête publique complémentaire devra être organisée, selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, dans le cadre de laquelle sera soumis au public, outre l'avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d'éventuels vices révélés par le nouvel avis. Au vu des résultats de cette nouvelle enquête organisée comme indiqué précédemment, le préfet des Ardennes pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant les vices entachant l'autorisation initiale.

En ce qui concerne la régularisation des vices relatifs au montant insuffisant des garanties financières, de l'absence de demande de dérogation relative aux espèces protégées et de l'impact excessif du projet sur des espèces protégées :

93. Les vices résultant de l'insuffisance du montant des garanties financières, de l'absence de demande de dérogation en application du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement et de l'impact excessif du projet sur certaines espèces protégées d'oiseaux et de chiroptères pourront être régularisés par une décision modificative du préfet des Ardennes. Cette décision devra actualiser le montant des garanties financières prévu par l'article 6 de l'autorisation litigieuse et prévoir des mesures adaptées d'évitement, de réduction voire de compensation pour limiter l'impact du projet de manière suffisante pour les espèces protégées visées aux points 81 et 82 du présent arrêt. La société pétitionnaire peut proposer au préfet les mesures qu'elle estime permettre une telle réduction de l'impact, au besoin en justifiant du caractère adapté de ses propositions par la production d'une étude à l'administration. En l'absence de propositions ou s'il n'estime pas les mesures proposées suffisantes, le préfet pourra imposer les mesures nécessaires pour réduire de manière suffisante l'impact du parc sur les espèces protégées. Enfin, sauf à ce que les mesures pour éviter et réduire l'impact du projet sur les espèces protégées soient suffisantes pour limiter suffisamment les risques pour ces espèces de sorte à ce qu'une dérogation concernant les espèces protégées ne soit plus nécessaire, la décision modificative devra statuer sur la dérogation prévue par le 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement au vu de la demande présentée en ce sens par la société pétitionnaire. Les informations relatives à l'éventuelle demande de dérogation, ainsi que celles relatives aux possibles propositions de mesures pour éviter, réduire et compenser l'impact devront être présentées au public dans le cadre soit de la procédure de mise à disposition prévue au point 87, soit, si elle est mise en œuvre, de la procédure d'enquête publique complémentaire prévue au point 92.

94. Il est sursis à statuer sur la présente requête jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et la cohésion des territoires ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté par le préfet des Ardennes ou, à défaut, jusqu'à l'expiration d'un délai de 18 mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur l'adoption de mesures temporaires :

95. Bien que les vices précédemment mentionnés affectent uniquement une partie de l'autorisation, l'exploitation du parc dans ses conditions actuelles de fonctionnement ne peut être maintenue en raison de son atteinte aux espèces protégées mentionnées aux points 81 et 82 du présent arrêt et de l'absence de la dérogation prévue au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. S'il résulte des dispositions du II de l'article L. 181-18 du code de l'environnement que, dans un tel cas, le juge peut suspendre l'exécution de l'intégralité de l'autorisation, le juge de plein contentieux de l'autorisation environnementale dispose également de la possibilité de prescrire lui-même des mesures complémentaires temporaires permettant la poursuite de l'activité dans des conditions permettant d'éviter tout risque d'atteinte excessive auxdites espèces protégées.

96. Ainsi, en raison de l'impact actuel du parc sur la pipistrelle commune, il y a lieu, d'une part, d'imposer sur l'ensemble des éoliennes du parc des mesures de bridage renforcé pour limiter les risques de mortalité pour cette espèce. Au regard notamment des indications de l'étude d'impact, reprenant sur ce point plusieurs études référencées, sur les conditions d'activité des chiroptères, mais aussi de l'insuffisance des mesures actuelles de bridage, les éoliennes du parc devront être arrêtées une heure avant le coucher du soleil et jusqu'à son lever du début du mois d'avril à la fin du mois d'octobre, dès lors que la température excède 7°C, que la vitesse du vent est inférieure à 6,5 m/s et qu'il ne pleut pas.

97. D'autre part, pour réduire les risques d'impact sur les espèces protégées d'oiseaux mentionnées au point 81, il doit être implanté des dispositifs permettant de détecter les oiseaux en vol à proximité des éoliennes et d'arrêter les aérogénérateurs en cas de risque de collision. Dans l'attente de la mise en place des systèmes de détection et d'arrêt, ainsi que du nouveau programme de bridage des éoliennes, l'exploitation du parc doit être suspendue. Avant toute remise en service du parc, la société pétitionnaire justifiera auprès du préfet des Ardennes de la mise en place du nouveau plan de bridage et des dispositifs de détection et d'arrêt des éoliennes décrits ci-dessus. Les exigences de l'autorisation accordée à la société Ferme éolienne de la Hotte sont maintenues sauf celles concernant le programme de bridage.

98. Ces mesures temporaires prendront fin soit par la délivrance par le préfet de l'autorisation modificative mentionnée au point 93 de l'arrêt, soit à la date de l'arrêt à intervenir de la Cour constatant l'absence de régularisation des vices entachant d'illégalité l'autorisation litigieuse.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de Mme U... Z... jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et la cohésion des territoires ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté par le préfet des Ardennes après le respect des différentes modalités définies aux points 83 à 94 du présent arrêt ou, à défaut, jusqu'à l'expiration d'un délai de 18 mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 2 : L'exécution de l'autorisation est suspendue jusqu'à la mise en œuvre des mesures complémentaires temporaires prévues aux points 95 à 98 du présent arrêt.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme U..., représentante unique en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Ferme éolienne de la Hotte et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président de chambre,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé : S. MARCHAL

Le président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 19NC01647 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01647
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HAUDIER
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-06-27;19nc01647 ?
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