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06/06/2023 | FRANCE | N°22NC03133

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 06 juin 2023, 22NC03133


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 20 septembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 2202836 du 11 octobre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Fritsch, demande à la cour : <

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler la décision du 20 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 20 septembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.

Par un jugement n° 2202836 du 11 octobre 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Fritsch, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler la décision du 20 septembre 2022 du préfet de la Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle a été prise en méconnaissance de la procédure contradictoire prévue aux articles L. 121-1 et L.122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît son droit d'être entendu consacré à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors que sa demande d'asile présentée au Pays-Bas était encore en cours d'instruction ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2022, modifiée par une décision du 16 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marchal a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien, est entré, selon ses déclarations, en France en 2020. Le 7 février 2022, il a été condamné par le tribunal judiciaire de Val de Briey, pour des faits de vol et des violences, à une peine de douze mois d'emprisonnement, ainsi qu'à une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de cinq ans. Par une décision du 20 septembre 2022, le préfet de la Moselle a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé. M. A... fait appel du jugement du 11 octobre 2022, par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, il y a lieu d'adopter les motifs circonstanciés, retenus à bon droit par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte.

3. En deuxième lieu, la décision litigieuse, qui n'avait pas à reprendre tous les éléments de la situation personnelle du requérant, précise les dispositions légales sur lesquelles elle s'appuie et rappelle les principales considérations relatives à la situation de M. A..., notamment sa condamnation à une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de cinq ans, mais aussi sa situation administrative et familiale. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision doit être écarté. En outre, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que le préfet a procédé à un examen de la situation individuelle de l'intéressé.

4. En troisième lieu, la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger frappé d'une peine d'interdiction du territoire français présente le caractère d'une mesure de police qui doit être motivée en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et est soumise notamment aux dispositions des articles L. 121-1 et suivants de ce code selon lesquelles l'administration doit mettre à même la personne intéressée de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales en ayant la faculté de se faire assister par un conseil de son choix.

5. Par un courrier du 9 septembre 2022, le préfet de la Moselle a invité M. A... à présenter des observations sur la décision administrative qu'il envisageait de prononcer à son encontre. M. A... a répondu à ce courrier, par l'envoi du formulaire joint, à l'invitation du préfet. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant, qui était libre de présenter toutes les observations qu'il jugeait nécessaires, n'a, en raison du format du formulaire, pas pu présenter de manière suffisante ses observations. De plus, M. A... a été entendu par un fonctionnaire de la direction zonale de la police aux frontières de l'Est, le 20 septembre 2022 et a pu présenter des observations sur la mesure envisagée. Cette audition, qui a permis à M. A... de présenter à nouveau sa position sur la décision à adopter, n'a été ni sommaire, ni stéréotypée. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue par les articles L. 121-1 et L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu de M. A... tel que consacré à l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit, en tout état de cause, être écarté.

6. En troisième lieu, M. A... soutient qu'il a présenté une demande d'asile devant les autorités néerlandaises, de sorte qu'il ne pourrait être renvoyé dans un autre pays. Toutefois, il n'apporte aucun élément au soutien de cette allégation, alors qu'il a déclaré lors de son audition administrative ne pas avoir sollicité l'asile dans ce pays. Le moyen doit donc être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est célibataire et sans enfant, est entré récemment sur le territoire français. S'il fait valoir que plusieurs membres de sa famille sont présents sur le territoire français, il n'apporte aucun élément pour établir la réalité de ces allégations et ne justifie en tout état de cause pas de l'intensité des liens qu'il entretiendrait avec ces derniers. Ainsi, alors que M. A... n'apporte aucun autre élément justifiant une éventuelle intégration sociale ou professionnelle en France, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

10. M. A... se borne à indiquer qu'il a dénoncé des faits de torture et de violence. Toutefois, il n'apporte aucun élément quant aux risques qu'il encourrait en cas de retour en Algérie. M. A... n'établit ainsi pas qu'il encourrait effectivement des risques de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Algérie. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il pourrait être éloigné serait intervenue en violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Haudier, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé : S. MARCHALLa présidente,

Signé : G. HAUDIER

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 22NC03133


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC03133
Date de la décision : 06/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HAUDIER
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : FRITSCH

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-06-06;22nc03133 ?
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