La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2023 | FRANCE | N°20NC02868

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 06 juin 2023, 20NC02868


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 2 octobre 2020, sous le n° 20NC02868, et un mémoire, enregistré le 25 février 2022, la société anonyme (SA) Mercialys, représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté n° PC 25112 19 C0012 du 13 août 2020 par lequel le maire de la commune de Chalezeule a délivré à la société civile immobilière de construction-vente (SCCV) Chalezeule un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un ensemble commercial composé de 9 magasins

, d'une surface de vente de 3 618 m², sur un terrain situé ZAC des Marnières à Chale...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 2 octobre 2020, sous le n° 20NC02868, et un mémoire, enregistré le 25 février 2022, la société anonyme (SA) Mercialys, représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté n° PC 25112 19 C0012 du 13 août 2020 par lequel le maire de la commune de Chalezeule a délivré à la société civile immobilière de construction-vente (SCCV) Chalezeule un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un ensemble commercial composé de 9 magasins, d'une surface de vente de 3 618 m², sur un terrain situé ZAC des Marnières à Chalezeule ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Chalezeule et de l'Etat le versement, chacun, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la SCCV Chalezeule a réduit de manière excessive la délimitation de la zone de chalandise de son projet, qui aurait dû, notamment, inclure la commune où se situe le centre commercial qu'elle-même exploite ou, à tout le moins, venir en chevauchement de la zone de chalandise de son centre commercial ; ainsi, elle justifie d'un intérêt à contester le permis de construire délivré et c'est à tort que la Commission nationale d'aménagement commercial a estimé son recours irrecevable ; en outre, cette erreur de délimitation entache d'illégalité ce permis de construire ;

- ayant saisi la Commission nationale d'aménagement commercial d'un recours contre l'avis de la Commission départementale d'aménagement commercial du Bas-Rhin, elle justifie d'un intérêt à demander l'annulation du permis de construire litigieux :

- la cour administrative d'appel est compétente pour connaître de sa requête, en application de l'article R. 311-3 du code de justice administrative ;

- faute d'avoir transmis le nom des enseignes devant occuper l'importante surface de vente, le pétitionnaire n'a pas évalué l'impact de son projet sur les commerces de la zone de chalandise ;

- c'est irrégulièrement que le président du Grand Besançon Métropole, qui n'était plus alors maire de Besançon et n'était habilité qu'à gérer les affaires courantes de l'établissement public de coopération intercommunale, a été auditionné par la Commission nationale d'aménagement commercial et sa participation à la réunion de cette commission a, en l'espèce, eu une influence sur le sens de l'avis rendu ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial n'est pas motivé conformément à l'exigence de l'article R. 752-16 du code de commerce ;

- le dossier présenté par la SCCV Chalezeule devant la Commission nationale d'aménagement commercial était incomplet quant aux effets du projet sur l'animation et le développement économique des centres-villes voisins, les flux de circulation et le développement durable, en méconnaissance de l'article R. 752-6 du code de commerce ; il ne comportait pas l'étude d'impact exigée par l'article L. 752-6 de ce même code ;

- le projet est incompatible avec les objectifs du SCOT en ce qu'il permet des achats occasionnels dans une commune périphérique où l'installation de commerce d'achats occasionnels n'est pas prévue par ce schéma ;

- le projet porte atteinte aux intérêts énoncés aux articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, dès lors qu'il a un impact négatif sur l'animation de la vie urbaine, les flux de circulation, la consommation de l'espace, les enjeux de qualité environnementale, l'insertion du projet dans l'environnement, la préservation des centres urbains, la variété de l'offre et de la valorisation des filières de production locale ;

- la pétitionnaire s'est soustraite à l'obligation de soumettre son projet, relevant de la rubrique 41 du tableau annexé à l'article R. 122-1 du code de l'environnement, à l'appréciation de l'autorité environnementale.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 15 février 2021 et 14 mars 2022, la SCCV Chalezeule, représentée par Me Mailhe, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit mis à la charge de la SA Mercialys la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la société requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2021, la commune de Chalezeule représentée par Me Suissa, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit mis à la charge de la SA Mercialys la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la société requérante ne justifie pas d'un intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 février 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mars 2022 à 12 h 00.

Un mémoire complémentaire, enregistré le 9 mai 2023 a été présenté pour la SA Mercialys et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Wallerich, président,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Ducros pour la SA Mercialys, de Me Clément, pour la commune de Chalezeule ainsi que celles de Mme B..., représentant la SCCV Chalezeule.

Considérant ce qui suit :

1. Le 31 octobre 2019, la SCCV Chalezeule a sollicité du maire de la commune de Chalezeule la délivrance d'un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale en vue de la création d'un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 6 818 m² comprenant un magasin existant à l'enseigne " Brico Dépôt " de 3 200 m² de surface de vente, et de 9 magasins d'une surface de vente totale de 3 618 m², sur un terrain situé au sein de la ZAC des Marnières à Chalezeule. Le 20 janvier 2020, la Commission départementale d'aménagement commercial du Doubs a émis un avis favorable à ce projet. Sur le recours des sociétés Mercialys et Carrefour Hypermarchés, la Commission nationale d'aménagement commercial a également émis un avis favorable le 9 juillet 2020. Par un arrêté du 13 août 2020, dont la SA Mercialys demande l'annulation, le maire de Chalezeule a délivré à la SCCV Chalezeule le permis de construire sollicité.

Sur la légalité de l'arrêté du 13 août 2020 :

En ce qui concerne la régularité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. En premier lieu, lorsque, saisie du recours d'un concurrent contre l'avis favorable émis par une commission départementale d'aménagement commercial, la Commission nationale d'aménagement commercial, a porté une appréciation erronée sur l'intérêt à agir de ce professionnel, l'ayant conduite à rejeter comme irrecevable le recours de ce dernier, ce rejet pour irrecevabilité entache d'irrégularité la procédure de délivrance du permis de construire tenant lieu d'autorisation d'aménagement commercial. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie d'un moyen en ce sens, d'apprécier, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et, notamment, de la teneur des autres recours le cas échéant examinés sur le fond par la Commission nationale d'aménagement commercial, si cette irrégularité est susceptible d'avoir eu une incidence sur le sens de la décision attaquée, l'obligation de saisir préalablement la Commission nationale d'aménagement commercial avant toute introduction d'un recours contentieux ne constituant pas, en tout état de cause, une garantie pour les personnes intéressées.

3. Dans son avis du 9 juillet 2020, la Commission nationale d'aménagement commercial a rejeté comme irrecevable le recours formé par la SA Mercialys contre l'avis favorable émis le 28 janvier 2020 par la Commission départementale d'aménagement commercial du Doubs sur le projet de la SCCV Chalezeule de création d'un ensemble commercial, au motif que la SA Mercialys n'exerçait pas son activité dans la zone de chalandise de ce projet. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial a par ailleurs examiné au fond le recours formé contre l'avis de la Commission départementale d'aménagement commercial du Doubs par la société Carrefour hypermarchés. Examinant ce recours, la commission s'est prononcée, au vu notamment des avis favorables des ministres en charge de l'urbanisme et du commerce, sur les effets du projet de la SCCV Chalezeule sur les objectifs d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce, ainsi que sur la compatibilité de ce projet avec le schéma de cohérence territoriale. Dans ces circonstances, il ne ressort pas des pièces du dossier que le rejet pour irrecevabilité du recours de la SA Mercialys, au demeurant non versé au dossier, est susceptible d'avoir eu une incidence sur le sens de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial et, partant, sur le sens de la décision du maire de Chalezeule. Ainsi, en tout état de cause, la SA Mercialys n'est pas fondée à contester l'appréciation portée par la Commission nationale d'aménagement commercial sur son intérêt à agir.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 752-38 du code de commerce : " (...) L'avis ou la décision [de la Commission nationale d'aménagement commercial] est motivé (...) ". L'avis favorable émis par la Commission nationale d'aménagement commercial le 9 juillet 2020 énonce en termes suffisamment précis les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, notamment les raisons pour lesquelles elle estime le recours de la SA Mercialys irrecevable et celles pour lesquelles le projet de la SCCV Chalezeule lui paraît prendre en compte les intérêts visés à l'article L. 752-6 du code de commerce. Il satisfait ainsi à l'obligation de motivation par l'article R. 752-38.

5. En troisième lieu, il résulte certes des dispositions de l'article L. 5211-8 du code général des collectivités territoriales que l'organe délibérant d'un établissement public de coopération intercommunale, à la suite du renouvellement général des conseils municipaux des communes membres de cet établissement, ne peut que gérer les affaires courantes jusqu'à l'installation du nouvel organe délibérant issu de ce renouvellement. Ces dispositions ne faisaient toutefois pas obstacle, entre le renouvellement général des conseils municipaux en 2020 et l'installation du nouveau conseil de la Communauté urbaine Grand Besançon Métropole, à ce que M. Jean-Louis Fousseret, président de cette communauté urbaine, soit entendu en cette qualité par la Commission nationale d'aménagement commercial, dès lors que cette audition n'impliquait, en tout état de cause, aucune décision du conseil de la communauté urbaine ou de son président et que seul M. A... était en mesure d'être entendu par la Commission nationale d'aménagement commercial en qualité de président de cette communauté urbaine compte tenu de la date à laquelle la commission avait fixé sa réunion. Par suite, le moyen tiré de ce que l'audition de ce dernier aurait entaché d'irrégularité l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :

S'agissant de la complétude du dossier :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " (...) III. -La commission se prononce au vu d'une analyse d'impact du projet, produite par le demandeur à l'appui de sa demande d'autorisation. Réalisée par un organisme indépendant habilité par le représentant de l'Etat dans le département, cette analyse évalue les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre, ainsi que sur l'emploi, en s'appuyant notamment sur l'évolution démographique, le taux de vacance commerciale et l'offre de mètres carrés commerciaux déjà existants dans la zone de chalandise pertinente, en tenant compte des échanges pendulaires journaliers et, le cas échéant, saisonniers, entre les territoires (...) ". Aux termes de l'article 166 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 : " (...) II. -L'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction résultant du I du présent article, est applicable aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale déposées à compter du 1er janvier 2019 ".

7. Aux termes de l'article R. 752-6 du même code, pris pour l'application de l'article L. 752-6 " I. -La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6 (...) II. - L'analyse d'impact comprend, après un rappel des éléments mentionnés au 1° du I, les éléments et informations suivants : (...) 2° Présentation de la contribution du projet à l'animation des principaux secteurs existants, notamment en matière de complémentarité des fonctions urbaines et d'équilibre territorial ; en particulier, contribution, y compris en termes d'emploi, à l'animation, la préservation ou la revitalisation du tissu commercial des centres-villes de la commune d'implantation et des communes limitrophes incluses dans la zone de chalandise définie pour le projet, avec mention, le cas échéant, des subventions, mesures et dispositifs de toutes natures mis en place sur les territoires de ces communes en faveur du développement économique (...) ". L'article 12 du décret n° 2019-331 du 17 avril 2019 relatif à la composition et au fonctionnement des commissions départementales d'aménagement commercial et aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale prévoit que les dispositions de l'article 4 de ce même décret, codifiées à l'article R. 752-6 précité, sont applicables aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale déposées à compter du 1er janvier 2020.

8. Il résulte des dispositions législatives, citées ci-dessus, de l'article L. 752-6 du code de commerce, lesquelles sont suffisamment précises pour être entrées en vigueur sans attendre l'intervention d'un décret d'application, et de celles de l'article 166 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, que les demandes d'autorisation d'exploitation commerciale déposées à compter du 1er janvier 2019 devaient être accompagnées d'une analyse d'impact du projet réalisée par un organisme indépendant habilité par le représentant de l'Etat dans le département, ayant pour objet d'évaluer les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre, ainsi que sur l'emploi. A cet égard, si les dispositions réglementaires de l'article R. 752-6 du code de commerce, qui précisent le contenu de l'analyse d'impact, sont uniquement applicables aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale déposées à compter du 1er janvier 2020, il n'en résulte pas que les demandes d'autorisation d'exploitation commerciale déposées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2019 étaient dispensées de l'obligation de production d'une analyse d'impact.

9. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la SCCV Chalezeule a joint au dossier présenté à la Commission nationale d'aménagement commercial une étude d'impact réalisée par un organisme habilité, qui a notamment pour objet d'évaluer les effets du projet sur l'animation et le développement économique du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale concerné, ainsi que sur l'emploi. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ce document n'aurait pas procédé à une évaluation insuffisante de ces effets. Par suite, le moyen tiré de ce que la demande d'autorisation d'exploitation commerciale de la SCCV Chalezeule aurait été incomplète en l'absence de cette analyse d'impact.

10. En deuxième lieu, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à la société pétitionnaire de mentionner les enseignes des magasins susceptibles d'occuper ces cellules du futur ensemble commercial. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de précision en la matière aurait fait obstacle à ce que les commissions d'aménagement commercial porte leur appréciation sur les impacts du projet de la SCCV Chalezeule. Au demeurant, l'article R. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au projet de la SCCV Chalezeule, imposait seulement de faire figurer au dossier de demande la surface de vente et le secteur d'activité de chacun des magasins de plus de 300 mètres carrés de surface de vente ainsi que l'estimation du nombre de magasins de moins de 300 mètres carrés de surface de vente et de la surface de vente totale de ces magasins. A cet égard, il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande de la SCCV Chalezeule répondait à ces exigences.

11. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le dossier de demande de la SCCV Chalezeule n'aurait pas comporté les informations suffisantes pour permettre à la Commission nationale d'aménagement commercial de se prononcer sur l'impact du projet sur les flux de circulation ou le développement durable.

S'agissant du respect des objectifs mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce :

12. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / f) Les coûts indirects supportés par la collectivité en matière notamment d'infrastructures et de transports ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs (...) ". L'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par ces dispositions.

13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le projet de la SCCP Chalezeule tend à la création d'un ensemble commercial en périphérie Est de l'agglomération bisontine, au sein de la ZAC des Marnières, à 4 kilomètres du centre-ville de Besançon, sur un site en friche, dont il contribuera à la requalification, dans le prolongement de la zone commerciale existante. Il ressort du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale, ainsi que des avis émis par les ministres en charge du commerce et de l'urbanisme que ce projet, soutenu par les autorités locales, aura pour effet de rééquilibrer l'offre commerciale à l'échelle de l'agglomération commerciale par rapport aux autres pôles commerciaux situés au centre de Besançon ou en périphérie et offrira une variété de nouveaux commerces et services dans une zone désormais mieux intégrée à l'agglomération urbaine sans pénaliser l'animation du centre-ville.. Il doit en outre contribuer à la rénovation urbaine de l'entrée de ville Est de l'agglomération bisontine. Si la SA Mercialys évoque l'impact négatif que ce projet pourrait avoir sur les commerces de centres-villes et les zones commerciales périphériques existantes, elle n'apporte pas d'élément de nature à étayer cette analyse, alors que le taux de vacance commercial en centre-ville est faible, que la nature et la taille des commerces du centre-ville de Besançon sont différents de ceux des unités commerciales du projet en cause et que le déséquilibre commercial actuel dont souffre la périphérie Est de l'agglomération bisontine n'est pas sérieusement contredite. Ainsi, les effets négatifs du projet sur l'animation urbaine ne sont pas démontrés.

14. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le parc de stationnement du futur ensemble commercial doit comporter 177 places et être mutualisé avec l'ensemble des enseignes de cet ensemble commercial. Il ne ressort pas des éléments fournis au dossier que le nombre de places de stationnement excèderait les besoins des clients des diverses enseignes commerciales appelées à s'installer.

15. En troisième lieu, l'étude de trafic d'octobre 2019, versée au dossier de demande de la SCCV Chalezeule, indique que le projet augmentera le trafic de 116 véhicules en heure de pointe, sans porter atteinte aux capacités résiduelles des infrastructures existantes. En se bornant à soutenir que l'imprécision sur la nature des commerces susceptibles d'occuper les cellules du futur ensemble commercial ne permet pas d'estimer fidèlement l'impact du projet sur le trafic routier, la société requérante n'établit pas que cet impact serait supérieur à celui estimé dans l'étude de trafic, d'ailleurs non remise en cause dans les avis des ministres en charge du commerce et de l'urbanisme, ni qu'il serait de nature à compromettre l'objectif de limitation des flux de circulation. Il n'est par ailleurs pas sérieusement discuté que le projet est bien desservi par les transports collectifs, notamment par le tram, dont un arrêt est situé à 20 mètres du futur ensemble commercial, et accessible en outre par une voie piétonne et cycliste, tandis que des circulations piétonnes doivent être aménagées dans l'enceinte du site, en façade des bâtiments et seront connectées avec les trottoirs de la ZAC.

16. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que la superficie du projet consacrée aux espaces verts est de 3 615 m², soit 20,2 % de l'emprise foncière, tandis que 64 arbres de haute-tige doivent être plantés, qu'une toiture végétalisée de 1 850 m² doit être installée, que les bâtiments seront conformes aux exigences de la réglementation technique 2012. Si la société requérante fait valoir qu'aucune borne de recharge pour véhicule électrique n'est prévue et que seules 3 places de stationnement perméables ont été conçues en pavés drainants, ces seuls éléments, au regard des atouts environnementaux du projet, ne sont pas de nature à compromettre le respect de l'objectif de développement durable.

17. En dernier lieu, l'avis du ministre en charge du commerce évoque " l'arrivée d'un bâtiment neuf à l'architecture soignée ". Si la société requérante fait au contraire valoir que le projet présente des façades très communes, cubiques aux teintes austères sans aucun attrait, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce projet, par son aspect extérieur, compromettrait l'objectif d'insertion paysagère et architecturale.

S'agissant de la compatibilité avec le schéma de cohérence territoriale :

18. S'agissant des achats occasionnels, le schéma de cohérence territoriale de l'agglomération bisontine prévoit que les communes relais et la commune relais en devenir pourront s'équiper, en complément des surfaces existantes, de moyennes ou grandes surfaces d'une taille maximale de 1 500 m² ayant pour objet la satisfaction de besoins occasionnels de biens banalisés et qu'à Besançon, de telles moyennes ou grandes surfaces seront autorisées à l'extérieur du centre-ville si par la nature de leur offre marchande ou la nécessité des conditions d'accessibilité de ces marchandises, celles-ci s'avèrent peu compatibles avec la configuration du centre ancien. Si, en revanche, le schéma de cohérence territoriale ne comporte pas de disposition sur l'offre d'achats occasionnels dans les communes périphériques qu'il identifie, au nombre desquelles figure la commune de Chalezeule, il n'en résulte pas que les auteurs du schéma de cohérence territoriale auraient entendu exclure la création de surfaces de ventes dédiées aux achats occasionnels dans ces communes périphériques, alors que ce schéma prévoit expressément que la zone des Marnières pourra même accueillir des surfaces commerciales consacrées aux achats exceptionnels. Par suite, le projet de la SCCV Chalezeule, qui répond par ailleurs à l'objectif du schéma de cohérence territoriale de réduire les friches commerciales, ne saurait être regardé comme incompatible avec ce schéma.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Mercialys n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 13 août 2020 par lequel le maire de Chalezeule a délivré à la SCCV Chalezeule un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.

S'agissant du défaut de consultation de l'autorité environnementale :

20. Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 600-1-4 du code de l'urbanisme que, lorsque le juge est saisi par un professionnel dont l'activité est susceptible d'être affectée par un projet d'aménagement commercial d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du même code, les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables. Dès lors, si l'article R. 423-55 du code de l'urbanisme stipule que " Lorsque le projet est soumis à étude d'impact, l'autorité compétente recueille l'avis de l'autorité environnementale en vertu de l'article L. 122-1 du code de l'environnement (...) projet ", la société requérante n'est pas recevable à se prévaloir de l'absence de consultation de l'autorité environnementale, qui constitue un moyen relatif au permis de construire litigieux en tant qu'il vaut autorisation de construire.

Sur les frais liés à l'instance :

21. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

22. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Chalezeule et de l'Etat, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le montant des frais d'instance exposés par la SA Mercialys et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière le versement à la SCCV Chalezeule et à la commune de Chalezeule d'une somme de 2 000 euros pour chacune au titre des frais d'instance qu'elle a elle-même exposés.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SA Mercialys est rejetée.

Article 2 : La SA Mercialys versera à la SCCV Chalezeule une somme de 2 000 euros et à la commune de Chalezeule une somme de 2 000 euros également au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Mercialys, à la SCCV Chalezeule, à la commune de Chalezeule et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et au préfet du Doubs.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Sibileau, premier conseiller,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juin 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. WallerichL'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : J.-B. Sibileau

La greffière,

Signé : V. Firmery

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

V. Firmery

2

N° 20NC02868


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02868
Date de la décision : 06/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : CONCORDE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-06-06;20nc02868 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award