Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 23 mai 2022 par lequel le préfet du Territoire de Belfort a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de onze mois et l'a assigné à résidence.
Par un jugement n° 2200864 du 1er juin 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a renvoyé les conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et les conclusions aux fins d'injonction devant une formation collégiale de jugement et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2022, M. A..., représenté par Me Maillard-Salin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er juin 2022 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 23 mai 2022 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision en litige est illégale dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en application de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de refus de titre de séjour étant entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 47 du code civil et de l'article 1er du décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger, dès lors qu'il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance avant ses 16 ans ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est entachée d'insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2022, le préfet du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par un courrier du 17 avril 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de ce que l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à l'annulation, prononcée par un jugement du 22 juillet 2022, de la décision de refus de titre de séjour opposée à M. A... implique l'annulation par voie de conséquence des décisions subséquentes adoptées dans l'arrêté du 23 mai 2022 en litige.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Brodier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., né en 2003 selon ses déclarations et de nationalité ivoirienne, est entré irrégulièrement en France au début de l'année 2019. Il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance le 21 juin 2019. Le 29 octobre 2021, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 23 mai 2022, le préfet du Territoire de Belfort a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé son assignation à résidence. M. A... relève appel du jugement du 1er juin 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a, après avoir renvoyé devant une formation collégiale les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, rejeté les conclusions tendant à l'annulation des décisions subséquentes lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, portant interdiction de retour sur le territoire français et celle fixant le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ".
3. En raison des effets qui s'y attachent, l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, emporte, lorsque le juge est saisi de conclusions recevables, l'annulation par voie de conséquence des décisions administratives consécutives qui n'auraient pu légalement être prises en l'absence de l'acte annulé ou qui sont en l'espèce intervenues en raison de l'acte annulé. Il en va ainsi, notamment, des décisions qui ont été prises en application de l'acte annulé et de celles dont l'acte annulé constitue la base légale.
4. Il incombe au juge de l'excès de pouvoir, lorsqu'il est saisi de conclusions recevables dirigées contre de telles décisions consécutives, de prononcer leur annulation par voie de conséquence, le cas échéant en relevant d'office un tel moyen qui découle de l'autorité absolue de chose jugée qui s'attache à l'annulation du premier acte.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par un jugement n° 2200864 du 22 juillet 2022, le tribunal administratif de Besançon a annulé la décision du 23 mai 2022 par laquelle le préfet du territoire de Belfort a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A.... Ce jugement est devenu définitif. La décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français, qui a été prise sur le fondement des dispositions précitées du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'aurait pas pu légalement être prise en l'absence de la décision de refus de titre de séjour. Ainsi, l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 23 mai 2022 refusant au requérant un titre de séjour emporte, par voie de conséquence, l'annulation de la décision du même jour portant obligation de quitter le territoire français, de même que, par voie de conséquence également, celle des décisions lui refusant un délai de départ volontaire, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et fixant le pays de destination.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 23 mai 2022 portant obligation de quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, interdiction de retour sur le territoire français et fixation du pays de destination.
Sur les frais de l'instance :
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Diaz d'une somme au titre des frais que M. A... aurait exposés s'il n'avait pas été admis à l'aide juridictionnelle.
D E C I D E :
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2200864 du 1er juin 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon est annulé.
Article 2 : Les décisions du 23 mai 2022 par lesquelles le préfet du Territoire de Belfort a fait obligation à M. A... de quitter le territoire français, sans délai, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de 11 mois et a fixé le pays de destination sont annulées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Diaz et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Territoire de Belfort.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Agnel, président,
Mme Brodier, première conseillère,
Mme Mosser, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.
La rapporteure,
Signé : H. Brodier Le président,
Signé : M. Agnel
La greffière,
Signé : L. Kara
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
L. Kara
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N° 22NC01717