La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2023 | FRANCE | N°22NC02558

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 11 mai 2023, 22NC02558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... D... A... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2022 par lequel le préfet du Doubs lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 2200206 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une re

quête enregistrée le 18 octobre 2022, Mme A... D... A... E..., représentée par Me Clemang, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... D... A... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 12 janvier 2022 par lequel le préfet du Doubs lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 2200206 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2022, Mme A... D... A... E..., représentée par Me Clemang, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiante " valable du 12 janvier 2022 au 15 octobre 2022 puis du 15 octobre 2022 au 15 octobre 2023 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de séjour méconnaît l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle justifie du sérieux de ses études compte tenu des difficultés liées à la situation épidémique durant l'année 2020-2021 et de la nécessité de se réorienter compte tenu du niveau d'exigence en mathématique, réorientation qui est donc en cohérence avec ses aptitudes ;

- l'obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de séjour.

Par un mémoire enregistré le 25 novembre 2022, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme A... D... A... E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 septembre 2022.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la constitution ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n° 2020-1370 du 10 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... D... A... E..., ressortissante marocaine née en 2001, entrée en France le 3 septembre 2019 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " mineure scolarisée ", valable du 20 août 2019 au 18 octobre 2020, a obtenu un titre de séjour en qualité d'étudiante valable jusqu'au 19 octobre 2021. Par un arrêté du 12 janvier 2022, le préfet du Doubs a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... D... A... E... relève appel du jugement du 5 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an ". Il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement de carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", d'apprécier, sous le contrôle du juge, si l'intéressé peut être regardé comme poursuivant effectivement ses études. Le renouvellement de ce titre de séjour est ainsi subordonné à la réalité et au sérieux des études entreprises, appréciés en fonction de l'ensemble du dossier du demandeur, et notamment au regard de sa progression dans le cursus universitaire, de son assiduité aux cours et de la cohérence de ses choix d'orientation.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir été inscrite deux fois en première année de licence " économie gestion " à l'université de Besançon en 2020 puis en 2021, Mme A... D... A... E... s'est inscrite, au titre d'une réorientation, en première année de licence en langues étrangères appliquées pour l'année 2021-2022. Il ressort des pièces du dossier qu'elle a validé cette première année et qu'elle est inscrite en deuxième année au titre de l'année universitaire 2022-2023, au cours de laquelle elle a obtenu d'excellentes notes à ses examens partiels. Dès lors, en estimant, au seul vu des échecs successifs de l'intéressée au titre des années universitaires 2019-2020 et 2020-2021 et de son changement d'orientation, qu'elle ne justifiait d'aucune progression dans ses études et n'établissait pas leur caractère sérieux, le préfet du Doubs a inexactement apprécié le caractère effectif de ses études. Par suite, Mme A... D... A... E... est fondée à demander l'annulation de la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour ainsi que, par voie de conséquence, des autres décisions contenues dans l'arrêté attaqué.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Dès lors que Mme A... D... A... E... est inscrite dans un établissement d'enseignement supérieur et sous réserve d'éléments de fait ou de droit nouveaux, l'annulation ci-dessus prononcée, eu égard à ses motifs, implique nécessairement que le préfet du Doubs délivre à la requérante une carte de séjour portant la mention " étudiante ". Il y a lieu, par suite, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet d'y procéder selon les modalités figurant au dispositif du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

5. Mme A... D... A... E... ayant été admise à l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Clemang, sous réserve de sa renonciation au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique, de la somme de 1 500 euros au titre des frais que Mme A... D... A... E... aurait exposés dans la présente instance si elle n'avait été admise à l'aide juridictionnelle.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... D... A... E... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 2200206 du 5 mai 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Doubs du 12 janvier 2022 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à Mme A... D... A... E... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiante " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Clemang la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... D... A... E..., à Me Clemang et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie du présent arrêt sera transmise au préfet du Doubs.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 22NC02558

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02558
Date de la décision : 11/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : SCP CLEMANG ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-05-11;22nc02558 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award