Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 5 février 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2102463 du 29 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 29 avril 2022, M. B..., représenté par Me Snoeckx, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 juillet 2021 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 5 février 2021 de la préfète du Bas-Rhin ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour correspondant à sa situation dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et subsidiairement de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
sur la décision portant refus de titre de séjour :
- elle méconnaît la circulaire du 28 novembre 2018 du ministre de l'intérieur dont il est fondé à se prévaloir pour solliciter son admission exceptionnelle au séjour en tant que salarié ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de cette circulaire et du pouvoir général d'appréciation du préfet ; il est depuis plus de trois ans en France, il justifie d'une expérience et d'une activité professionnelle de plus de 15 mois sur les 18 derniers mois et perçoit un salaire d'environ 1 300 euros ;
sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'une erreur de droit et subsidiairement d'une erreur manifeste d'appréciation ;
sur la décision fixant le pays de renvoi :
- elle devra être annulée du fait de l'annulation de la décision précédente.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2023, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens de M. B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 9 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 27 mars 2023 à 12h00.
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant algérien né en 1977, serait en France depuis septembre 2017. Il a sollicité le 9 septembre 2020 son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 5 février 2021, la préfète du Bas-Rhin a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 29 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 5 février 2021 :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration institue une garantie au profit de l'usager en vertu de laquelle toute personne qui l'invoque est fondée à se prévaloir, à condition d'en respecter les termes, de l'interprétation, même illégale, d'une règle contenue dans un document que son auteur a souhaité rendre opposable, en le publiant dans les conditions prévues aux articles R. 312-10 et D. 312-11 du code des relations entre le public et l'administration, tant qu'elle n'a pas été modifiée. En outre, l'usager ne peut bénéficier de cette garantie qu'à la condition que l'application d'une telle interprétation de la règle n'affecte pas la situation de tiers et qu'elle ne fasse pas obstacle à la mise en œuvre des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement. Les mentions accompagnant la publication de ce document ont pour objet de permettre de s'assurer du caractère opposable de l'interprétation qu'il contient.
3. En instituant le mécanisme de garantie de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, le législateur n'a pas permis de se prévaloir d'orientations générales dès lors que celles-ci sont définies pour l'octroi d'une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit, alors même qu'elles ont été publiées sur l'un des sites mentionnés à l'article D. 312-11 du même code. S'agissant des lignes directrices, le législateur n'a pas subordonné à leur publication sur l'un de ces sites la possibilité pour toute personne de s'en prévaloir, à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif.
4. Dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, il ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, dite circulaire Valls, est inopérant et doit être, pour ce motif, écarté.
5. En deuxième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant algérien qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour.
6. M. B... soutient résider en France depuis plus de trois ans à la date de la décision litigieuse mais ne produit aucun élément de nature à étayer ses allégations. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été embauché comme travailleur saisonnier en tant que monteur-échafaudeur à compter du mois d'avril 2019 jusqu'au mois de juillet 2019, puis qu'il a bénéficié de contrats à durée déterminée, jusqu'au mois de décembre 2019, et qu'il a travaillé de mars à août 2020 pour le compte de la même entreprise, dont il justifie d'une promesse d'embauche du 28 février 2020 pour un contrat à durée indéterminée. Toutefois, ces seuls éléments, au regard de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé, ne permettent pas de démontrer qu'en refusant de régulariser le requérant, le préfet aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Si le requérant soutient que cette décision est entachée d'une erreur de droit et subsidiairement d'une erreur manifeste d'appréciation, ces moyens ne sont pas assortis des précisions nécessaires permettant au juge d'en apprécier leur bien-fondé. Il y a en conséquence lieu de les écarter.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ne peut pas être accueilli.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,
- Mme Roussaux, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mai 2023.
La rapporteure,
Signé : S. D...La présidente,
Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,
Signé : M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
M. C...
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N° 22NC01059