La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/04/2023 | FRANCE | N°22NC01454

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 13 avril 2023, 22NC01454


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2200240 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une req

uête enregistrée le 5 juin 2022, M. B..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2200240 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juin 2022, M. B..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- La décision refusant le titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;

- L'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- La décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant congolais, est entré sur le territoire français le 20 mai 2016 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 18 décembre 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 14 juin 2018. Le 3 juillet 2019, il a fait l'objet d'un refus de titre de séjour pour raisons de santé et d'une obligation de quitter le territoire français. Le 21 octobre 2020, il a sollicité à nouveau la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'est vu remettre une autorisation provisoire de séjour du 8 avril 2021 au 8 décembre 2021 dont le renouvellement sera ensuite refusé. Par un arrêté du 9 décembre 2021, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. B... fait appel du jugement du 5 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... réside en France depuis le 20 mai 2016, vit en union libre avec une compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2025 et sa fille mineure, que ses parents sont décédés et qu'une grande partie de sa famille, son frère, trois oncles, trois cousins, une cousine et deux nièces résident régulièrement en France ce qui démontre suffisamment qu'il est dépourvu de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine. Par ailleurs, même s'il a travaillé uniquement dans le cadre de missions d'intérim entre juin et août 2021, période pendant laquelle il bénéficiait d'autorisations provisoires de séjour, il a montré sa volonté d'insertion professionnelle en suivant deux formations entre septembre et décembre 2021, l'une de préparation au métier de poseur de sols et l'autre de sensibilisation au risque lié à la réalisation d'interventions ou activités susceptibles de provoquer l'émission de fibres d'amiante. Dans ces conditions, la décision attaquée a porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a ainsi méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

4. L'illégalité de cette décision entraîne par voie de conséquence, celle de la décision l'obligeant à quitter le territoire ainsi que de la décision fixant le pays de destination, qui en procèdent.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. B... un titre de séjour. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Airiau avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Airiau de la somme de 1500 euros.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°2200240 du 5 mai 2022 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté en date du 9 décembre 2021 par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. B... et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination sont annulés.

Article 2: Il est enjoint au préfet du Bas-Rhin de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Airiau, avocat de M. B..., une somme de 1500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Airiau renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à, Me C... B..., Me Airiau et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin

Délibéré après l'audience du 7 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Agnel, président de chambre,

- Mme Picque, première conseillère,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 22NC01454


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01454
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-13;22nc01454 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award