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11/04/2023 | FRANCE | N°20NC02488

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 11 avril 2023, 20NC02488


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les amis de l'abbaye de Septfontaines, l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, Mme D... H..., Mme I... B..., Mme C... J..., M. G... J... et Mme K... F... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Marne a autorisé la société Eoliennes de Dahlia à construire et à exploiter un parc éolien de cinq aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territ

oire de la commune de Cirey-lès-Mareilles.

Par un jugement n° 1600257 du 28 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les amis de l'abbaye de Septfontaines, l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, Mme D... H..., Mme I... B..., Mme C... J..., M. G... J... et Mme K... F... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2015 par lequel le préfet de la Haute-Marne a autorisé la société Eoliennes de Dahlia à construire et à exploiter un parc éolien de cinq aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Cirey-lès-Mareilles.

Par un jugement n° 1600257 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a sursis à statuer sur leur requête, en application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, afin que le préfet de la Haute-Marne régularise l'autorisation délivrée.

Par un jugement n° 1600257 du 23 mars 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur requête au vu de l'arrêté modificatif du 7 octobre 2019 du préfet de la Haute-Marne.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 24 août 2020, le 21 avril 2021, le 24 janvier 2022, le 24 février 2022 et le 25 mars 2022, Mme D... H..., l'association Les amis de l'abbaye de Septfontaines, l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et Mme I... B..., représentées par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler les jugements du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 14 mars 2019 et du 23 mars 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Marne du 8 octobre 2015 ou, à titre subsidiaire et en cas d'annulation partielle, de suspendre l'exécution de l'autorisation délivrée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes de Dahlia la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- leur requête est recevable en tant qu'elle est dirigée contre le jugement avant dire droit du 23 mars 2019 ;

S'agissant de la régularité des jugements :

- les jugements attaqués n'ont pas été signés par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, en méconnaissance des exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- dans leur jugement avant dire droit du 23 mars 2019, les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact qui résulte de l'absence de développements sur le lien existant entre le projet litigieux, les activités touristiques dans le secteur, les monuments historiques et le développement économique de la zone ;

- le jugement avant dire droit du 23 mars 2019 est irrégulier dès lors que la réponse apportée au moyen tiré de l'insuffisante motivation des conclusions du commissaire-enquête est stéréotypée et ne répond pas aux arguments développés en première instance ;

S'agissant de l'arrêté du 8 octobre 2015 du préfet de la Haute-Marne :

- le dossier de demande ne présente pas la nature des garanties financières visant à couvrir les opérations de démantèlement et de remise en état des parcelles, en méconnaissance des exigences de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- les accords des propriétaires des parcelles d'implantation et de la commune de Cirey-lès-Mareilles ne satisfont pas aux exigences de l'article R. 512-6 du code de l'environnement dès lors qu'ils ne font mention que d'un démantèlement partiel des câbles ;

- le dossier de demande ne contient pas les avis de l'ensemble des propriétaires des parcelles d'implantation du projet, et, notamment, des propriétaires des parcelles d'implantation des éoliennes et du poste de livraison, ceux des parcelles où sont implantées des voies de circulation permettant l'accès aux éoliennes, et ceux des parcelles sous lesquelles les câbles du réseau électrique doivent être enterrés ; il manque ainsi au dossier l'avis du conseil général de la Haute-Marne, propriétaire de la route départementale n°37, sous laquelle passe le câble électrique reliant les éoliennes E2 et E3, mais aussi l'avis des propriétaires du chemin du Prélot et des parcelles ZK15 et ZK16, sous lesquelles le câblage inter-éolien du projet passe ; en l'absence de relevé de propriété, il ne peut être vérifié que tous les propriétaires ont été consultés ;

- l'étude chiroptérologique est insuffisante dès lors qu'aucune d'investigation de terrain ou d'enregistrement n'a été réalisée lors des mois de mars et avril, qui sont pourtant des périodes de transit, de chasse, voire de migration ;

- l'étude paysagère est insuffisante dès lors que les photomontages sont d'un format inadapté, que de nombreux photomontages ont été réalisés à partir de clichés pris dans des conditions météorologiques permettant d'atténuer l'impact visuel des machines, que des photomontages ont été pris derrière des obstacles visuels, qu'il n'a pas été produit de photomontages réalisés à partir de clichés pris en hiver, lorsque les arbres ont perdu leurs feuillages, et enfin, que l'impact du projet sur l'abbaye de Septfontaines est manifestement minimisé par les photomontages, ainsi qu'en atteste la comparaison avec la contre-étude paysagère et la note critique produites ;

- l'étude d'impact n'évoque pas le lien existant entre le projet et les activités touristiques dans le secteur, les monuments présents sur le territoire et le développement économique de la zone ;

- l'avis de l'autorité environnementale est irrégulier dès lors que, en méconnaissance des exigences de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 et des articles L. 122-1 et R. 122-6 du code de l'environnement, il n'existait pas de garantie d'une réelle séparation entre le service qui a préparé l'avis portant sur la qualité de l'étude d'impact et celui qui a instruit la demande d'autorisation ;

- l'affichage de l'avis d'enquête publique n'a pas été réalisé dans la commune de Rimaucourt ; l'affichage réalisé dans les autres communes n'a pas commencé 15 jours avant l'enquête publique et n'a pas perduré jusqu'à sa fin ; l'affichage n'a pas non plus été effectué sur le site internet de la préfecture de la Haute-Marne ; l'avis d'enquête publique n'a été affiché qu'en un point du site d'implantation du projet ;

- les conclusions du commissaire-enquêteur sont insuffisamment motivées ;

- le montant des garanties financières de démantèlement et de remise en état du site, prévu par l'annexe I de l'arrêté du 26 août 2011 pris pour l'application de l'article R. 553-1 du code de l'environnement, est insuffisant et inadapté ; le préfet aurait dû écarter ces dispositions et imposer à la pétitionnaire de constituer des garanties financières adaptées ; l'arrêté méconnaît ainsi les exigences de l'article R. 515-101 du code de l'environnement ;

- les mesures de démantèlement et de remise en état du site sont insuffisantes ; les dispositions prévues à cet effet par l'arrêté du 26 août 2011 émanent d'une autorité incompétente et prévoient des mesures insuffisantes et sont ainsi illégales ; le préfet aurait dû écarter l'application de l'arrêté du 26 août 2011 et imposer le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien ; l'arrêté contesté, en ce qu'il n'impose pas l'excavation de la totalité des fondations, ni ne conditionne un éventuel démantèlement partiel des fondations des aérogénérateurs à la production préalable d'une étude, méconnaît les articles R. 515-106 du code de l'environnement et 29 de l'arrêté du 26 août 2011 ;

- l'autorisation attaquée méconnaît les articles L. 511-1 et L. 181-3 du code de l'environnement dès lors que le projet porte atteinte aux paysages environnants et au patrimoine culturel et que les prescriptions de l'arrêté litigieux sont insuffisantes ;

- une demande de dérogation aurait dû être déposée et obtenue en application de l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut de rejeter la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par des mémoires, enregistrés le 29 novembre 2021, le 7 janvier 2022, le 24 février 2022, le 11 mars 2022, et par un mémoire, enregistré le 8 avril 2022 et non communiqué, la société Eoliennes de Dahlia, représentée par Me Cambus, conclut au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, Elle demande également à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérantes, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par une lettre du 14 mars 2023, la cour a informé les parties qu'elle était susceptible de surseoir à statuer, en application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, dans l'attente de la délivrance d'une autorisation modificative régularisant un vice tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Monamy pour Mme H... et autres et de Me Cambus pour la société Eoliennes de Dahlia.

Considérant ce qui suit :

1. La société Eoliennes de Dahlia a présenté, le 3 janvier 2012, une demande d'autorisation pour l'exploitation d'un parc éolien de cinq aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Cirey-lès-Mareilles. Par un premier jugement du 25 novembre 2014, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé le refus opposé par le préfet de la Haute-Marne à cette demande et a enjoint à ce dernier de délivrer l'autorisation sollicitée, en l'assortissant des prescriptions de nature à prévenir les dangers ou inconvénients du projet. Par un arrêté du 5 octobre 2015, le préfet de la Haute-Marne a délivré l'autorisation sollicitée. L'association Les amis de l'abbaye de Septfontaines, l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, Mme H..., Mme B..., Mme J..., M. J... et Mme F... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler cet arrêté. Par un jugement avant dire droit du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a sursis à statuer sur leur requête, en application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, afin que le préfet régularise l'autorisation délivrée. Après transmission d'une autorisation modificative édictée le 7 octobre 2019 par le préfet de la Haute-Marne, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, par un jugement du 23 novembre 2020, rejeté la requête. Mme H..., l'association Les amis de l'abbaye de Septfontaines, l'association Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France et Mme B... font appel de ces deux derniers jugements.

Sur la régularité des jugements :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que, tant la minute du jugement avant dire droit du 14 mars 2019, que celle du jugement du 23 novembre 2020, sont signées par le président de la formation, par le rapporteur et le greffier d'audience. Le moyen tiré de l'absence de signature des jugements attaqués manque ainsi en fait et doit être écarté.

4. En deuxième lieu, les requérantes se sont prévalues en première instance de ce que l'étude d'impact était insuffisante, car elle ne prenait pas pleinement en compte les conséquences touristiques et financières de la visibilité du parc depuis les monuments historiques et de valeur. Les premiers juges ont, dans le jugement avant dire droit attaqué, explicitement écarté le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude paysagère, dont l'objet est d'évaluer l'impact visuel du projet et ses différentes conséquences. Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a ainsi répondu par une motivation suffisante au moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact, dont il était saisi.

5. En troisième lieu, le tribunal a, par son jugement avant dire droit attaqué, répondu, de manière suffisante et non-stéréotypée, au moyen tiré de l'insuffisante motivation des conclusions du commissaire-enquêteur, en rappelant notamment que ce dernier avait exposé les raisons pour lesquelles il se prononçait en faveur du projet porté par la société Eoliennes de Dahlia. Le moyen tiré de ce que les premiers juges n'auraient pas répondu à ce moyen doit ainsi être écarté.

Sur la légalité de l'arrêté du 8 octobre 2015 :

En ce qui concerne la légalité externe :

S'agissant du dossier de demande :

Quant à l'avis des propriétaires et des collectivités sur le démantèlement et la remise en état du site :

6. Aux termes du I de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) / 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; (...) ". Aux termes de l'article R. 553-6 de ce code, alors applicable : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / a) Le démantèlement des installations de production ; / b) L'excavation d'une partie des fondations ; / c) La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / d) La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ". Selon l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dans sa version initiale : " Les opérations de démantèlement et de remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent prévues à l'article R. 553-6 du code de l'environnement comprennent : / 1. Le démantèlement des installations de production d'électricité, y compris le " système de raccordement au réseau. (...) ".

7. En premier lieu, à considérer même que, comme le soutiennent les requérantes, les dispositions combinées de l'article L. 512-6 du code de l'environnement et de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 imposent un démantèlement de l'ensemble du câblage, en l'espèce les propriétaires des parcelles d'implantation de l'installation ont donné leur accord à un démantèlement des câbles du projet limité à ceux présents dans un rayon de 10 mètres autour des éoliennes et du poste de livraison, soit à un démantèlement moins favorable que celui qui aurait été effectué en application des textes applicables. Dans ces conditions et en tout état de cause, cette irrégularité n'a pas pu avoir d'influence sur le sens de la décision prise et n'a pas pu nuire à l'information complète de la population. Le moyen doit ainsi être écarté.

8. En deuxième lieu, sans que les requérantes puissent utilement se prévaloir des prescriptions de l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 et de l'article R. 553-6 du code de l'environnement, l'article R. 512 6 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige, n'implique nullement que l'avis des propriétaires de parcelles supportant uniquement des câbles souterrains ou des voies de circulation permettant l'accès aux éoliennes soient consultés. Par suite, le moyen tiré de l'absence d'avis de ces propriétaires et notamment du conseil départemental de la Haute-Marne et des propriétaires des parcelles cadastrées ZK15 et ZK 16 ainsi du chemin du Prélot doit être écarté.

9. En troisième lieu, si les requérantes soutiennent qu'il n'est pas possible de s'assurer que l'ensemble des propriétaires concernés ont été consultés, faute de relevés de propriété dans le dossier de demande d'autorisation, ces documents n'avaient pas à être obligatoirement produits au soutien de la demande d'autorisation. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'ensemble des propriétaires concernés n'auraient pas donné leur accord aux conditions de remise en état.

Quant à l'insuffisante présentation des garanties financières constituées en vue du démantèlement du parc :

10. Aux termes du I de l'article R. 553-1 de ce code alors applicable : " La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre de l'article L. 512-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 553-6. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation ". Aux termes de l'article R. 512-5 du même code alors applicable : " Lorsque la demande d'autorisation porte sur une installation mentionnée à l'article R. 516-1 ou R. 553-1, elle précise, en outre, les modalités des garanties financières exigées à l'article L. 516-1, notamment leur nature, leur montant et les délais de leur constitution ".

11. Il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation présentée par la société Eoliennes de Dahlia mentionne le montant des garanties, calculé conformément aux dispositions alors applicables de l'arrêté du 26 août 2011, relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, et expose les conditions d'actualisation de ce montant. S'il est également joint au dossier de demande une copie d'un acte de cautionnement réalisé pour un autre parc, il n'est pas indiqué que la société pétitionnaire entend recourir à un procédé identique pour constituer les garanties financières pour le projet litigieux. Ainsi, la nature des garanties exigées par les dispositions citées au point précédent n'est pas précisée par le dossier de demande.

12. Toutefois, l'insuffisance entachant la composition du dossier n'est susceptible de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de ce dossier, que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elle a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. En l'espèce, eu égard à l'objet et à l'étendue de l'obligation prescrite par les dispositions précitées de l'article R. 512-5 du code de l'environnement et au stade de la procédure auquel elle s'applique et alors, d'une part, qu'il appartient à l'arrêté d'autorisation de déterminer le montant des garanties financières et, d'autre part, que la mise en service du parc éolien ne peut intervenir avant leur constitution, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de précision, dans le dossier de demande, sur la nature de ces garanties aurait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou de nuire à l'information complète de la population.

S'agissant de l'étude d'impact :

Quant à l'étude paysagère :

13. En premier lieu, il résulte de l'instruction que plus de cinquante photomontages ont été annexés à l'étude d'impact, pour apprécier l'impact du projet sur ses environnements immédiat, rapproché et intermédiaire. Ces photomontages ont été réalisés à partir de photographies réalisées avec une distance focale comprise entre 35 et 50 millimètres sur lesquelles ont pu être intégrés les aérogénérateurs par l'utilisation du logiciel professionnel Wind Pro. Pour chacun des points de vue, lesquels ont été sélectionnés en fonction des centres d'intérêts du secteur et de la sensibilité du paysage et des monuments, ces photomontages prennent la forme d'un montage panoramique, ainsi que d'un zoom sur le parc et sont reproduits au sein de l'étude dans un format suffisant pour appréhender l'impact du projet. Ces photomontages, qui sont accompagnés des indications relatives à la position exacte de la prise de vue e à la distance par rapport à l'éolienne la plus proche pour appréhender précisément l'impact du projet, n'apparaissent avoir été obtenus ni par un cadrage volontairement faussé des photographies pour atténuer la visibilité des éoliennes, ni par des prises de vue dans des conditions météorologiques permettant de minorer l'impact du projet sur son environnement. Ils ne sont pas plus trompeurs en raison des dates auxquelles les photographies ont été prises. Les requérantes ne sont, par suite, pas fondées à soutenir que la méthodologie de l'étude paysagère permet généralement de minorer l'impact du projet.

14. En deuxième lieu, l'étude paysagère opère une présentation de l'abbaye de Septfontaines et rappelle ainsi succinctement son histoire, sa composition, mais également la protection dont elle bénéficie. L'étude, qui précise que l'impact sur l'abbaye est l'un des facteurs à prendre en compte pour déterminer la variante d'implantation du parc à privilégier, comporte une section spécifique à cette abbaye, avec de nombreux photomontages pour apprécier tant la visibilité du parc depuis l'abbaye que les co-visibilités entre l'abbaye et le parc. Il n'apparaît pas que l'absence de photomontages depuis le " chemin menant de Septfontaines à Andelot ", dont les requérantes ne justifient au demeurant pas de l'intérêt particulier, empêcherait d'appréhender l'impact du parc sur ce monument. De plus, ces photomontages, qui sont reproduits dans une taille et un format permettant une appréhension de l'impact du projet, ont été réalisés par un cabinet d'étude spécialisé en utilisant un logiciel professionnel. Ces photomontages n'apparaissent ainsi pas avoir procédé à une minoration de l'impact empêchant d'apprécier les incidences du parc sur l'abbaye. Dans ces conditions, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l'étude paysagère ne prendrait pas suffisamment en compte l'abbaye de Septfontaines et que son contenu ne permettrait pas d'appréhender l'impact réel du projet sur ce monument.

15. En troisième lieu, les requérantes font valoir que l'étude d'impact n'évalue pas pleinement les conséquences touristiques et financières de la visibilité du parc depuis les monuments historiques et de valeur, dès lors qu'elle ne présente pas le lien existant entre les activités touristiques, les différents monuments présents à proximité du site du projet, dont notamment l'abbaye de Septfontaines et le développement économique du secteur. Pour autant, il résulte de l'instruction que l'étude paysagère, qui évalue les impacts directs et indirects liés à la visibilité du projet depuis son environnement, rappelle l'intérêt touristique de certains des monuments présents dans le secteur d'étude. L'étude souligne par ailleurs les conséquences que peut avoir le projet sur les sites touristiques et leurs fréquentations. Dans ces conditions, le moyen ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

Quant à l'étude écologique :

16. Il résulte du volet chiroptérologique de l'étude écologique que, pour déterminer l'état initial du site, il a été réalisé des sorties d'écoutes au détecteur à ultrasons en vingt-six points jugés favorables à la présence de chauves-souris et couvrant ainsi l'intégralité du site. Ces sorties se sont déroulées entre le mois de mai et celui d'octobre. Ainsi et alors même qu'elles n'ont pas débuté dès le mois de mars, elles ont couvert les principales périodes d'activités des chiroptères, soit le printemps, l'été et l'automne. De plus, ces études ont été complétées non seulement par la recherche de gîtes et lieux favorables aux chiroptères à proximité du site, mais également par la pose d'enregistreur " voice-boxes " sur différents points du parc lors de quatre nuits et de l'utilisation du système " batcorders " pendant dix nuits. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que le volet chiroptérologique de l'étude écologique est insuffisant.

S'agissant de l'avis de l'autorité environnementale :

17. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement : " Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. À cet effet, les États membres désignent les autorités à consulter, d'une manière générale ou au cas par cas. (...) ". L'article L. 122-1 du code de l'environnement dispose, dans sa rédaction applicable en l'espèce, que : " I. ' Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements publics et privés qui, par leur nature, leurs dimensions ou leur localisation sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine sont précédés d'une étude d'impact. (...) / III. ' Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. (...) / IV. ' La décision de l'autorité compétente qui autorise le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage à réaliser le projet prend en considération l'étude d'impact, l'avis de l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement et le résultat de la consultation du public. (...) ".

18. En vertu du III de l'article R. 122-1-1 du même code, dans sa version applicable à l'espèce, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement mentionnée à l'article L. 122-1, lorsqu'elle n'est ni le ministre chargé de l'environnement, dans les cas prévus au I de cet article, ni la formation compétente du Conseil général de l'environnement et du développement durable, dans les cas prévus au II de ce même article, est le préfet de la région sur le territoire de laquelle le projet de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement doit être réalisé. En vertu de l'article R. 122-25 du code de l'environnement, issu du décret du 28 avril 2016 portant réforme de l'autorité environnementale, et dont les dispositions ont par la suite été transférées à l'article R. 122-21 du même code, les agents du service régional chargé de l'environnement qui apportent leur appui à la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil régional de l'environnement et de développement durable, sont placés, pour l'exercice de cet appui, sous l'autorité fonctionnelle du président de la mission régionale d'autorité environnementale.

19. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

20. Lorsque le préfet de région est l'autorité compétente pour autoriser le projet, en particulier lorsqu'il agit en sa qualité de préfet du département où se trouve le chef-lieu de la région, ou dans les cas où il est chargé de l'élaboration ou de la conduite du projet au niveau local, si la mission régionale d'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable, définie par le décret du 2 octobre 2015 relatif au Conseil général de l'environnement et du développement durable et les articles R. 122-21 et R. 122-25 du code de l'environnement, peut être regardée comme disposant, à son égard, d'une autonomie réelle lui permettant de rendre un avis environnemental dans des conditions répondant aux exigences résultant de la directive, il n'en va pas de même des services placés sous son autorité hiérarchique, comme en particulier la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL).

21. Lorsque le projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la DREAL et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis n'ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.

22. En l'espèce, il résulte de l'instruction que la demande d'autorisation présentée par la société Eoliennes de Dahlia a été instruite, pour le compte du préfet de la Haute-Marne, par la subdivision de la Haute-Marne de l'unité territoriale de l'Aube / Haute-Marne de la DREAL Champagne-Ardenne. Or, il résulte également de l'instruction que l'avis de l'autorité environnementale émis par le préfet de la région Champagne-Ardenne a été préparé par le service " Grenelle environnement - Evaluation environnementale " de la même DREAL. Cet avis a été rendu le 6 novembre 2012, soit à une date antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 28 avril 2016 mentionné au point 18, de sorte qu'il n'a pu être rendu par la mission régionale d'autorité environnementale. Dans ces conditions, quand bien même l'avis et l'arrêté n'ont pas été préparés par les mêmes services de la DREAL Champagne-Ardenne, les requérantes sont fondées à soutenir que l'avis de l'autorité environnementale est irrégulier.

23. L'évaluation environnementale a pour objet d'assurer un niveau élevé de protection de l'environnement afin de respecter notamment les objectifs de la directive du 13 décembre 2011. Compte tenu du rôle joué par l'autorité environnementale au début du processus d'évaluation, de l'autonomie dont cette autorité doit disposer et de la portée de l'avis qu'elle rend, cette autorité et ses avis constituent une garantie pour atteindre les objectifs en question. En l'espèce, compte tenu des conditions dans lesquelles l'avis a été émis, cette garantie ne peut être regardée comme ayant été assurée. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction qu'une autre autorité disposant d'une autonomie réelle aurait rendu un avis sur l'étude d'impact du projet.

24. Il résulte de ce qui a été dit aux points 17 à 23 que l'irrégularité de l'avis émis par l'autorité environnementale entache d'illégalité l'arrêté du 8 octobre 2015.

S'agissant de la publicité de l'avis d'enquête publique :

25. Aux termes de l'article R. 123-11 du code de l'environnement dans sa version applicable à l'espèce : " I. - Un avis portant les indications mentionnées à l'article R. 123-9 à la connaissance du public est publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. (...) / II. - L'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête désigne les lieux où cet avis doit être publié par voie d'affiches et, éventuellement, par tout autre procédé. / Pour les projets, sont au minimum désignées toutes les mairies des communes sur le territoire desquelles se situe le projet. Pour les plans et programmes de niveau départemental ou régional, sont au minimum désignées les préfectures et sous-préfectures. / Cet avis est publié quinze jours au moins avant l'ouverture de l'enquête et pendant toute la durée de celle-ci. (...) / III.- En outre, dans les mêmes conditions de délai et de durée, et sauf impossibilité matérielle justifiée, le responsable du projet procède à l'affichage du même avis sur les lieux prévus pour la réalisation du projet. (...) ".

26. S'il appartient à l'autorité administrative de conduire l'enquête publique dans les conditions fixées par les dispositions du code de l'environnement, la méconnaissance de ces dispositions n'est toutefois de nature à vicier la procédure et donc à entraîner l'illégalité de la décision prise à l'issue de l'enquête publique que si elle n'a pas permis une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération ou si elle a été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête et, par suite, sur la décision de l'autorité administrative.

27. Il résulte de l'instruction que non seulement l'avis d'enquête publique a été publié dans les journaux " Voix de la Haute-Marne " et " le Journal de la Haute-Marne ", mais qu'il a également été régulièrement affiché sur le site du projet. Si les requérantes contestent le choix du lieu d'affichage et évoquent que d'autres points d'affichage auraient dû être prévus sur le site, elles ne démontrent pas que le lieu choisi était inapproprié et ne suffisait pas, au vu de l'ampleur limité du projet et de son implantation, à satisfaire aux exigences de l'article R. 123-11 précité. De plus, par les attestations versées par la société pétitionnaire en première instance et celles produites par le ministre à hauteur d'appel, il est justifié de l'affichage de cet avis dans quinze des seize mairies visées par l'arrêté préfectoral du 21 novembre 2012 désignant les lieux d'affichages de l'avis. Si les mentions des dates d'affichage présentes sur certaines attestations sont imprécises et ne permettent pas de connaître la date exacte de l'affichage réalisé, les éléments produits permettent, pour la majorité des communes, de s'assurer d'un affichage ayant débuté quinze jours avant l'avis d'enquête publique et ayant été maintenu jusqu'à la fin de cette enquête. Ainsi, à considérer même que, ainsi que le soutiennent les requérantes, l'avis n'a pas été affiché à la mairie de Rimaucourt et n'a pas été publié sur le site internet de la préfecture, ces absences n'ont pas privé les personnes intéressées d'une bonne information sur la procédure et n'ont pas plus été de nature à exercer une influence sur les résultats de l'enquête, au vu des justifications apportées quant à la réalisation des autres formalités d'affichage. Le moyen doit, par suite, être écarté.

S'agissant des conclusions du commissaire-enquêteur :

28. L'article R. 123-19 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors en vigueur, énonce que : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. (...) ".

29. Il résulte de ces dispositions que les conclusions émises par le commissaire enquêteur à l'issue de l'enquête publique doivent être motivées. Ces règles imposent à la commission d'enquête ou au commissaire enquêteur d'indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis, mais ne l'obligent pas à répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête. Ses réponses peuvent, en outre, revêtir une forme synthétique.

30. Il résulte de l'instruction qu'après avoir indiqué dans son rapport toutes les observations émises dans le cadre de l'enquête publique, le commissaire-enquêteur a, dans ses conclusions, répondu aux critiques récurrentes émises à l'encontre du projet, dont notamment celles concernant l'impact paysager des éoliennes sur leur environnement. A ce titre, le commissaire-enquêteur, qui a signalé le caractère particulièrement propice du secteur à l'éolien, a évoqué l'impact limité du projet sur les principaux monuments à proximité du secteur d'implantation, en mentionnant notamment de la distance existante avec le parc et de l'enfouissement du câblage. Plus généralement, le commissaire-enquêteur, qui n'a pas réfuté l'existence d'atteinte visuelle sur l'environnement du projet, a souligné la bonne prise en compte des enjeux paysagers par la société pétitionnaire et a, en émettant un avis favorable, nécessairement considéré que ces atteintes étaient moindres que les intérêts environnementaux et économiques du projet. Le commissaire-enquêteur a ainsi suffisamment motivé ses conclusions. Le moyen doit, par suite, être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de la constitution de garanties financières :

31. Aux termes du I de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. ". Aux termes de l'article 30 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 10 décembre 2021 : " Le montant des garanties financières mentionnées à l'article R. 515-101 du code de l'environnement est déterminé selon les dispositions de l'annexe I du présent arrêté. Ce montant est réactualisé par un nouveau calcul lors de leur première constitution avant la mise en service industrielle ". L'annexe 1 de cet arrêté prévoit que : " CALCUL DU MONTANT INITIAL DE LA GARANTIE FINANCIÈRE / I. Le montant initial de la garantie financière d'une installation correspond à la somme du coût unitaire forfaitaire (Cu) de chaque aérogénérateur composant cette installation : / M = ' (A...) / où : -M est le montant initial de la garantie financière d'une installation ; -Cu est le coût unitaire forfaitaire d'un aérogénérateur, calculé selon les dispositions du II de l'annexe I du présent arrêté. Il correspond aux opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement. / II. Le coût unitaire forfaitaire d'un aérogénérateur (Cu) est fixé par les formules suivantes : / a) lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2,0 MW : / Cu = 50 000 / b) lorsque sa puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est supérieure à 2,0 MW : / Cu = 50 000 + 25 000 × (P-2) / où : / -Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; / -P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW) (...) ".

32. Les requérantes se prévalent, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'annexe 1 de l'arrêté du ministériel du 26 août 2011 en tant qu'il retient un coût fixe de 50 000 euros pour le démantèlement des éoliennes d'une puissance égale ou inférieure à 2,0 MW. Pour autant, en se bornant à faire référence au coût estimé pour un autre projet de parc éolien ou à un rapport rendu récemment par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, les requérantes n'apportent aucun élément permettant de considérer que le montant de 50 000 euros serait inadapté ou insuffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état du site d'implantation. Les requérantes ne sont ainsi pas fondées à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'annexe 1 de l'arrêté du ministériel du 26 août 2011. Elles ne sont pas davantage fondées à soutenir qu'en n'écartant pas l'application de ces dispositions, le préfet a méconnu les exigences de l'article R. 515-101 du code de l'environnement et a plus généralement entaché l'autorisation d'illégalité.

S'agissant des mesures de démantèlement et de remise en état du site :

33. En premier lieu, l'article R. 515-106 du code de l'environnement prévoit que : " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / 1° Le démantèlement des installations de production ; / 2° L'excavation de tout ou partie des fondations ; / 3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; (...) / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de démantèlement et de remise en état, ainsi que le référentiel auquel doit se conformer l'entreprise mentionnée au 5°, les modalités d'audit mises en œuvre par les organismes certificateurs, accrédités à cet effet, pour délivrer cette certification, et les conditions d'accréditation des organismes certificateurs et notamment les exigences attendues permettant de justifier des compétences requises. (...) ". Aux termes du I de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre en charge de l'environnement relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité mécanique du vent : " Les opérations de démantèlement et de remise en état prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement s'appliquent également au démantèlement des aérogénérateurs qui font l'objet d'un renouvellement. Elles comprennent : (...) / - le démantèlement des postes de livraison ainsi que les câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison (...) ".

34. D'une part en prévoyant, à l'article R. 515-106 du code de l'environnement, qu'un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixerait les conditions techniques de remise en état d'un site après exploitation, le pouvoir règlementaire a nécessairement entendu confier à ce ministre le soin de fixer, par arrêté, l'ensemble des conditions de réalisation des opérations mentionnées à cet article, ce qui inclut la détermination des modalités des opérations de démantèlement et de remise en état. Dès lors, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en prévoyant à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011, les modalités des opérations de démantèlement, le ministre de l'environnement aurait excédé les pouvoirs qu'il détenait de l'article R. 515-106. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité des dispositions de l'arrêté du 26 août 2011 pour vice d'incompétence ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

35. D'autre part, l'arrêté du 26 août 2011 modifié précise l'étendue des obligations de démantèlement et de remise en état des parcs éoliens pesant sur l'exploitant, lesquelles n'exigent pas la suppression de l'ensemble du réseau électrique. Par suite et alors même que le Conseil général de l'environnement et du développement durable aurait recommandé l'organisation d'une concertation avec les exploitants en vue de modifier les exigences de remise en état, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en se bornant à imposer, à l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté litigieux, le démantèlement des câbles dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison, règle figurant désormais à l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 à la suite de sa modification par celui du 22 juin 2020, le ministre chargé de l'environnement aurait méconnu les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement. Elles ne sont pas davantage fondées à soutenir que le préfet était tenu, en raison de cette méconnaissance, d'écarter l'application de ces dispositions et de prévoir dans son arrêté le démantèlement des câbles au-delà de 10 mètres autour des aérogénérateurs.

36. En seconds lieu, aux termes du I de l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011 modifié par l'arrêté du 10 décembre 2021 : " Les opérations de démantèlement et de remise en état prévues à l'article R. 515-106 du code de l'environnement s'appliquent également au démantèlement des aérogénérateurs qui font l'objet d'un renouvellement. Elles comprennent : (...) / - l'excavation de la totalité des fondations jusqu'à la base de leur semelle, à l'exception des éventuels pieux. Par dérogation, la partie inférieure des fondations peut être maintenue dans le sol sur la base d'une étude adressée au préfet et ayant été acceptée par ce dernier démontrant que le bilan environnemental du décaissement total est défavorable, sans que la profondeur excavée ne puisse être inférieure à 2 mètres dans les terrains à usage forestier au titre du document d'urbanisme opposable et 1 m dans les autres cas. (...) ".

37. Ces dispositions règlementaires sont applicables par elles-mêmes et s'imposent à l'exploitation autorisée sans qu'importe la circonstance qu'elles n'aient pas été reprises par la préfète parmi les prescriptions de l'autorisation en litige. Par suite, le moyen, tiré de ce que l'arrêté attaqué, en ce qu'il n'impose pas l'excavation de la totalité des fondations, ni ne conditionne un éventuel démantèlement partiel des fondations des aérogénérateurs à la production préalable d'une étude, méconnaît l'article R. 515- 106 du code de l'environnement et l'article 29 de l'arrêté du 26 août 2011, ne peut qu'être écarté.

S'agissant de l'impact paysager :

38. Aux termes du I de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 511-1 du même code : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ".

39. Il résulte de ces dispositions que, pour statuer sur une demande d'autorisation d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement, il appartient au préfet de s'assurer que le projet ne méconnaît pas, notamment, l'exigence de protection des paysages. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage de nature à fonder un refus d'autorisation ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de cette autorisation, il appartient au préfet d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel l'installation est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette installation, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

40. Il résulte de l'instruction que le projet litigieux s'implante sur le plateau de Mareilles. Ce plateau, est constitué par de vastes plaines agricoles ponctuées de quelques communes et est limité par des espaces boisés, ainsi que, au nord du site d'implantation, par la Côte de Meuse. Le schéma régional éolien identifie le secteur du parc comme propice à l'implantation d'éoliennes. Ce paysage, sans être dépourvu de qualités, au regard notamment de la présence de plusieurs constructions protégées au titre de la législation sur les monuments historiques, ne présente toutefois pas un intérêt particulier.

41. Dans ce contexte, les aérogénérateurs du parc, d'une hauteur de 145 mètres et implantés au sein d'une plaine, sont largement perceptibles depuis les alentours du site. Les différents éléments produits au dossier témoignent notamment de l'existence d'un impact visuel du parc sur l'abbaye de Septfontaines, qui est inscrite à l'inventaire des monuments historiques et qui est située à trois kilomètres de la première éolienne du parc. Pour autant, les aérogénérateurs litigieux n'entrent en covisibilité marquée avec l'abbaye que depuis la Côte de Meuse, laquelle est largement boisée et où il n'est justifié que de l'existence d'un chemin en terre menant à la nécropole du fort Bevaux. Sur ce chemin, l'abbaye est alors partiellement protégée par plusieurs rangées d'arbres permettant alors d'atténuer l'impact. Bien que les éoliennes soient également visibles depuis la cour de l'abbaye, à l'étage de l'un de ses bâtiments, mais aussi, au bénéfice du relief du terrain, depuis la partie nord de la propriété, l'arrêté litigieux impose à la pétitionnaire de planter des arbres, qui, par leur emplacement, permettront d'éviter les vues depuis la cour et de réduire très largement la vue existante depuis l'étage de la bâtisse, ainsi qu'en témoignent les simulations versées au dossier. L'impact visuel sur l'abbaye demeure ainsi, après prise en compte des mesures pour atténuer l'impact, mesuré. Aussi l'impact sur les autres monuments d'intérêt situés à proximité du site demeure également acceptable. De plus, s'il résulte de l'instruction que les aérogénérateurs du parc sont visibles depuis plusieurs axes de circulation, voire depuis certaines habitations, les vues sur les éoliennes depuis les lieux de vie et notamment dans les cœurs de village demeurent modérées, y compris pour les communes de Mareilles et de Cirey-lès-Mareilles. Enfin, alors qu'aucun élément au dossier ne permet de considérer que les balises lumineuses des éoliennes litigieuses et celles du parc de Biesles, situé à dix kilomètres du parc litigieux, sont visibles simultanément, il ne résulte pas de l'instruction que les dispositifs lumineux du projet sont susceptibles d'occasionner des troubles visuels d'une importance telle qu'ils auraient dû conduire le préfet à refuser l'autorisation sollicitée. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code l'environnement doit être écarté

S'agissant de la dérogation prévue au 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement :

42. Aux termes du I de l'article L. 411-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits: / 1° La destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ; (...) ". Aux termes du I de l'article L. 411-2 du même code : " Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : (...) / 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; / b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ; / c) Dans l'intérêt de la santé et de la sécurité publiques ou pour d'autres raisons impératives d'intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique, et pour des motifs qui comporteraient des conséquences bénéfiques primordiales pour l'environnement ; / d) A des fins de recherche et d'éducation, de repeuplement et de réintroduction de ces espèces et pour des opérations de reproduction nécessaires à ces fins, y compris la propagation artificielle des plantes ; / e) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d'une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention d'un nombre limité et spécifié de certains spécimens (...) ".

43. Le système de protection des espèces résultant des dispositions citées ci-dessus, qui concerne les espèces de mammifères terrestres et d'oiseaux figurant sur les listes fixées par les arrêtés du 23 avril 2007 et du 29 octobre 2009, impose d'examiner si l'obtention d'une dérogation est nécessaire dès lors que des spécimens de l'espèce concernée sont présents dans la zone du projet, sans que l'applicabilité du régime de protection dépende, à ce stade, ni du nombre de ces spécimens, ni de l'état de conservation des espèces protégées présentes.

44. Le pétitionnaire doit obtenir une dérogation " espèces protégées " si le risque que le projet comporte pour les espèces protégées est suffisamment caractérisé. A ce titre, les mesures d'évitement et de réduction des atteintes portées aux espèces protégées proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte. Dans l'hypothèse où les mesures d'évitement et de réduction proposées présentent, sous le contrôle de l'administration, des garanties d'effectivité telles qu'elles permettent de diminuer le risque pour les espèces au point qu'il apparaisse comme n'étant pas suffisamment caractérisé, il n'est pas nécessaire de solliciter une dérogation " espèces protégées ".

45. En l'espèce, il résulte de l'instruction et notamment de l'étude avifaunistique, dont le contenu n'est pas sérieusement contesté par les requérantes, que le site du projet accueille notamment des faucons crécerelles et des milans royaux, qui sont des espèces protégées et qui présentent des risques de collision avec les éoliennes. Pour autant, le site ne s'implante pas dans un couloir de migration recensé et les prospections menées ont abouti au constat d'une fréquentation limitée du site par le faucon crécerelle, qui n'a été observé qu'à dix-neuf reprises pendant l'intégralité des périodes de prospection. L'étude et la synthèse de l'étude produite à hauteur d'appel précisent que cette espèce utilise le site principalement comme territoire de chasse et vole alors à basse altitude, mais qu'en revanche, aucun nid n'a été retrouvé à proximité immédiate des éoliennes, de sorte que le risque de collision est limité pour cette espèce. Les contacts avec le milan royal ont également été faibles, dès lors que seuls 28 représentants de l'espèce ont été aperçus sur ce site. Ces contacts ont néanmoins, pour leur quasi-totalité, été recensés sur la période de migration post-nuptiale, alors que l'aire du site était utilisée par ces rapaces pour rechercher de la nourriture, de sorte que l'étude conclut de manière pertinente à l'existence d'un risque de collision modéré à fort pour cette espèce, mais limité dans le temps à la période du passage automnale à la mi-octobre.

46. Plusieurs mesures pour éviter et réduire les risques sont prévues pour limiter les possibles collisions. L'implantation du parc a ainsi été choisi pour s'implanter en parallèle de l'axe de circulation en migration du milan royal afin d'éviter tout effet barrière. De plus, il a été imposé l'absence, sous les mâts, de toute végétation rudérale, de friche, de bande enherbée, pour limiter le caractère attractif de l'entourage des éoliennes. Aussi, un plan de bridage des éoliennes a été mis en place du 1er octobre au 10 novembre, lorsque des travaux agricoles sont réalisés autour des éoliennes et que les vents sont inférieurs à 10 mètres par seconde. Ce bridage permet ainsi, sur la période postnuptiale, de réduire les risques de collision lorsque les abords de la parcelle sont attrayants pour les rapaces en quête de nourriture. En outre, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que les limites temporelles, ainsi que celles liées à la vitesse du vent, conduiraient à une inefficacité de la mesure de bridage, la société pétitionnaire, qui n'avait pas à réaliser une étude de faisabilité de cette mesure, justifie avoir conclu des conventions pour être avertie, en amont, des travaux agricoles à intervenir et pour pouvoir ainsi réaliser en temps utile le bridage des éoliennes. Dans ces conditions, quand bien même la mesure de détection et d'effarouchement, qui n'avait qu'une finalité expérimentale et qui ne devait être mise en œuvre que sur une des éoliennes du parc et que lors de rares sorties de prospection en période de nidification, ne serait pas efficace, les requérantes ne démontrent pas que le projet aurait un impact significatif, contrairement à ce que retient l'étude d'impact, confirmée en ce point par un courrier d'un bureau d'étude. Ainsi, eu égard à la fréquentation limitée du site et aux mesures adaptées mises en place pour éviter et réduire les dangers de collision, le risque que le projet comporte pour le milan royal et le faucon crécerelle ne peut être apprécié comme suffisamment caractérisé pour imposer au pétitionnaire d'obtenir une dérogation " espèces protégées ". Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la société pétitionnaire était tenue de solliciter, sur le fondement de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, une dérogation aux interdictions de destruction d'espèces protégées prévues à l'article L. 411-1 du même code en raison des risques de collision pour le milan royal et le faucon crécerelle doit être écarté.

47. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, la seule mise en place d'un système d'effarouchement ponctuel pour éviter les collisions des oiseaux avec les éoliennes ne saurait imposer l'obtention d'une dérogation sur le fondement du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement, dès lors que ce procédé n'est pas au nombre de ceux interdits par les dispositions de l'article L. 411-1 du même code.

Sur les conséquences à tirer du vice entachant d'illégalité l'arrêté en litige :

48. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations ".

49. Les dispositions précitées du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement prévoient que le juge peut, après avoir constaté que les autres moyens dont il est saisi ne sont pas fondés, surseoir à statuer pour permettre la régularisation devant lui de l'autorisation environnementale attaquée lorsque le ou les vices dont elle est entachée sont susceptibles d'être régularisés par une décision modificative, en rendant un arrêt avant dire droit par lequel il fixe un délai pour cette régularisation. Le juge peut préciser, par son arrêt avant dire droit, les modalités de cette régularisation.

50. Il résulte de ce qui a été dit aux points 17 à 23, que l'avis émis par l'autorité environnementale était irrégulier dès lors qu'il a été rendu dans des conditions ne permettant de s'assurer du respect des exigences de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011. Cette illégalité peut toutefois être régularisée par la consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises.

51. Pour que cette régularisation puisse être effectuée, ce nouvel avis devra être rendu dans les conditions définies aux articles R. 122-6 à R. 122-8 et R. 122-24 du code de l'environnement, applicables à la date de l'émission de cet avis ou de la constatation de l'expiration du délai requis pour qu'il soit rendu, par la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAe) du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) compétente pour la région Champagne-Ardenne.

52. Lorsque ce nouvel avis aura été rendu, ou lorsqu'il sera constaté que la mission régionale de l'autorité environnementale du Conseil général de l'environnement et du développement durable compétente pour la région Champagne-Ardenne n'a pas émis d'observations dans le délai qui lui est imparti par les dispositions du code de l'environnement mentionnées au point précédent, ce nouvel avis ou l'information relative à l'absence d'observations émises par la mission régionale sera mis en ligne sur un site internet suffisamment accessible et ayant une notoriété suffisante, tels que le site de la préfecture de la région Champagne-Ardenne ou celui de la préfecture de la Haute-Marne, de manière à ce qu'une information suffisante du public soit assurée et que celui-ci ait la possibilité, par des cadres définis et pouvant accepter un nombre suffisant de caractères, de présenter ses observations et propositions. L'accessibilité de cet avis implique également qu'il soit renvoyé à son contenu intégral par un lien hypertexte figurant sur la page d'accueil du site en cause.

53. Dans l'hypothèse où ce nouvel avis indiquerait, après avoir tenu compte d'éventuels changements significatifs des circonstances de fait, que, tout comme l'avis irrégulier émis le 26 novembre 2012, le dossier de création du parc éolien de la société Eoliennes de Dahlia est assorti d'une étude d'impact de qualité suffisante permettant la prise en compte des enjeux environnementaux et paysagers du projet, le préfet de la Haute-Marne pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant ce vice initial. Le préfet pourra procéder de manière identique en cas d'absence d'observations de l'autorité environnementale émises dans le délai requis par les dispositions du code de l'environnement.

54. Dans l'hypothèse où, à l'inverse, le nouvel avis émis par la mission régionale de l'autorité environnementale différerait substantiellement de celui qui avait été émis le 26 novembre 2012, une enquête publique complémentaire devra être organisée à titre de régularisation, selon les modalités prévues par les articles L. 123-14 et R. 123-23 du code de l'environnement, dans le cadre de laquelle seront soumis au public, outre l'avis recueilli à titre de régularisation, tout autre élément de nature à régulariser d'éventuels vices révélés par le nouvel avis, notamment une insuffisance de l'étude d'impact. Au vu des résultats de cette nouvelle enquête organisée comme indiqué précédemment, le préfet de la Haute-Marne pourra décider de procéder à l'édiction d'un arrêté modificatif régularisant le vice entachant la procédure initiale d'enquête publique.

55. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 53, le préfet devrait organiser une simple procédure de consultation publique du nouvel avis émis par la mission régionale de l'autorité environnementale avant de décider de prendre un arrêté de régularisation, il sera sursis à statuer sur la présente requête, pendant un délai de neuf mois à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires transmette à la cour les actes de régularisation adoptés par le préfet de la Haute-Marne pris à la suite de cette procédure.

56. Dans l'hypothèse où, comme rappelé au point 54, le préfet devrait organiser une nouvelle enquête publique, il sera sursis à statuer sur la présente requête pendant un délai d'un an à compter de la notification du présent arrêt, jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires transmette à la cour les actes de régularisation adoptés par le préfet de la Haute-Marne pris à la suite de cette procédure.

D E C I D E :

Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête jusqu'à ce que le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation édicté par le préfet de la Haute-Marne après le respect des différentes modalités définies aux points 51 à 56 du présent arrêt ou, à défaut, jusqu'à l'expiration d'un délai de neuf mois à compter de la notification du présent arrêt lorsqu'il n'aura été fait usage que de la procédure définie au point 55 et jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an lorsque, à l'inverse, l'organisation d'une nouvelle enquête publique sera nécessaire comme indiqué au point 56.

Article 2 : Tous droits et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... H..., représentant unique, en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la société Eoliennes de Dahlia et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Marne.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Haudier, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2023.

Le rapporteur,

Signé : S. E...

La présidente,

Signé : G. HAUDIERLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 20NC02488

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC02488
Date de la décision : 11/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HAUDIER
Rapporteur ?: M. Swann MARCHAL
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-11;20nc02488 ?
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