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06/04/2023 | FRANCE | N°22NC02404

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 06 avril 2023, 22NC02404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 19 avril 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2201489 du 23 août 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 septembre 2022, Mme C..., représentée par Me Lemonnier

, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 19 avril 2022 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2201489 du 23 août 2022, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 septembre 2022, Mme C..., représentée par Me Lemonnier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour, à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jour à compter de l'arrêt et sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de séjour : est insuffisamment motivé ; repose sur appréciation erronée de sa situation au regard de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'elle justifie du sérieux de ses études et de son inscription dans un établissement d'enseignement supérieur dont l'enseignement requiert sa présence en France dès lors qu'il s'agit d'un cursus en alternance et qu'elle justifie de ressources suffisantes ; fait une inexacte application de l'article L. 433-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle remplit les conditions de l'article L. 422-1 ; méconnaît l'article 26 de la déclaration universelle des droits humains, le premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire a été prise en violation du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisque c'est à tort que le renouvellement de sa carte de séjour lui a été refusé ;

- la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 novembre 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise à l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 octobre 2022

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la constitution ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- et les observations de Me Lemonnier assistant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante gabonaise née le 29 avril 1994, est entrée en France le 2 octobre 2016, sous couvert d'un visa long séjour. Une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " lui a été régulièrement délivrée et renouvelée. Par un courrier du 18 janvier 2022, elle en a demandé le renouvellement. Par un arrêté du 19 avril 2022, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 23 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an ". Aux termes de l'annexe 10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le demandeur d'une carte de séjour portant la mention " étudiant " doit produire au préfet un " justificatif de moyens d'existence suffisants (sauf pour les titulaires du visa de court séjour " étudiant concours "). Si l'étranger est " boursier du gouvernement français ou bénéficiaire de programmes européens ", il doit fournir : " un justificatif de cette situation " et s'il est boursier dans son pays d'origine : " l'attestation de bourse de l'organisme payeur du pays d'origine précisant le montant et la durée de la bourse ". Si l'étrange travaille, il doit transmettre ses trois dernières fiches de paie. S'il est pris en charge par un tiers, il doit produire le " justificatif d'identité du tiers ; les attestations bancaires de la programmation de virements réguliers ou une attestation sur l'honneur de versement des sommes permettant d'atteindre le montant requis (615 € mensuels). Enfin, si l'étranger dispose de ressources suffisantes, il transmet : " l'attestation bancaire de solde créditeur suffisant ".

3. Pour refuser de renouveler le titre de séjour de Mme C... en qualité d'étudiante, le préfet s'est fondé sur les circonstances qu'elle ne disposait pas de moyens d'existence suffisants et qu'elle ne justifiait pas de l'inscription dans une formation qui nécessitait sa présence en France.

4. Il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'admet désormais l'administration, qu'à la date de la décision attaquée Mme C... satisfaisait à la condition de ressources exigée par les dispositions ci-dessus reproduites.

5. Alors que le caractère réel et sérieux des études que la requérante a suivies en France n'est pas contesté, le préfet a estimé que le diplôme de master pour lequel elle s'était inscrite au titre de l'année 2022-2023 dans l'école de commerce Iscod ne nécessitait pas sa présence en France dès lors que l'enseignement était entièrement délivré à distance. Il ressort toutefois des pièces produites que s'agissant d'un cursus en alternance, s'il est exact que l'enseignement théorique est délivré à distance, il n'en demeure pas moins que l'étudiant doit être présent en entreprise quatre jours par semaine pour les besoins de sa formation et qu'il doit conclure avec cette entreprise un contrat de travail en alternance " partout en France ". Par suite, c'est à tort qu'afin de refuser le renouvellement du titre de séjour étudiant, le préfet s'est fondé sur le motif que sa présence en France pour les besoins de sa formation n'était pas nécessaire.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2022.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. L'annulation ci-dessus prononcée implique nécessairement que le préfet de Meurthe-et-Moselle délivre à Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant. Il y a lieu par suite, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui enjoindre d'y procéder selon les modalités figurant au dispositif du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Mme C... ayant été admise à l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Lemonnier, sous réserve de sa renonciation au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique, de la somme de 1 500 euros au titre des frais que Mme C... aurait exposés dans la présente instance si elle n'avait été admise à l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 août 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 19 avril 2022 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de délivrer à Mme C... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiante " dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Lemonnier la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., à Me Lemonnier et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie du présent arrêt sera transmise au préfet de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 22NC02404

5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02404
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : LEMONNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-06;22nc02404 ?
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