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04/04/2023 | FRANCE | N°21NC00196

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 04 avril 2023, 21NC00196


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 7 janvier 2019 par laquelle le président du conseil départemental du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande de versement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles et d'enjoindre au département de lui verser cette indemnité.

Par un jugement n° 1901809 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 19...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 7 janvier 2019 par laquelle le président du conseil départemental du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande de versement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles et d'enjoindre au département de lui verser cette indemnité.

Par un jugement n° 1901809 du 5 novembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 19 janvier 2021 et 6 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Bloch, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 7 janvier 2019 du président du conseil départemental du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au département du Bas-Rhin de lui verser l'indemnité prévue par les dispositions de l'article R. 422-21, alinéa 2 du code de l'action sociale et des familles et calculée conformément aux dispositions de l'article D. 423-4 du même code, assortie des intérêts légaux à compter du 4 décembre 2018 ;

4°) de mettre à la charge du département du Bas-Rhin le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une erreur de fait, la décision de mettre fin à l'accueil d'un mineur ne résultant pas de sa décision de demander sa mise à la retraite ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il ne saurait être regardé comme ayant été à l'initiative de la rupture du contrat de travail dès lors qu'il a été induit en erreur en ce que les stipulations du contrat conclu avec le département lient, en méconnaissance des dispositions du 1er alinéa de l'article L. 421-16 du code de l'action sociale et des familles, la rupture du contrat d'accueil à celle du contrat de travail ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que la décision contestée était entachée d'erreur de droit, en retenant que l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles était applicable aux seuls licenciements et non en cas de mise à la retraite ; il a droit à une indemnité sur le fondement du deuxième alinéa de ces dispositions ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ;

- la décision contestée est entachée d'incompétence ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision du 27 août 2018 par laquelle le président du conseil départemental du Bas-Rhin a prononcé son admission à la retraite.

Par deux mémoires enregistrés les 7 mai 2021 et 19 décembre 2022, la collectivité européenne d'Alsace conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme, portée à 4 000 euros dans le dernier état de ses écritures, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... bénéficie depuis le 3 décembre 2001 d'un agrément en qualité d'assistant maternel, délivré par le département du Bas-Rhin et transformé en agrément d'assistant familial à compter du 3 décembre 2006. M. B... a fait valoir ses droits à la retraite et a bénéficié d'une pension à taux plein à compter du 1er mars 2004 ainsi que d'une pension de retraite complémentaire à compter du 1er novembre 2013. Il a néanmoins continué à exercer son activité d'assistant familial. Par un courrier du 24 août 2018, après avoir déclaré qu'il ne souhaitait plus accueillir le mineur qui avait été placé à son domicile en raison de graves difficultés, il a indiqué demander sa mise à la retraite et solliciter le versement d'une indemnité de départ à la retraite. Le département du Bas-Rhin ayant refusé de faire droit à cette dernière demande par une décision du 29 août 2018, M. B... a formé un recours gracieux par courrier du 3 décembre 2018, qui a été rejeté par une décision expresse du 7 janvier 2019. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 29 août 2018 et 7 janvier 2019.

Sur la régularité du jugement :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. B... ne peut donc utilement se prévaloir d'une erreur de fait qu'aurait commis le premier juge pour demander l'annulation du jugement attaqué.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction :

3. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la décision statuant sur le recours gracieux aurait été signée par une autorité incompétente est inopérant dès lors que les vices propres d'une telle décision ne peuvent être utilement invoqués, l'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position.

4. En deuxième lieu, M. B... soutient que le refus d'indemnité serait illégal en raison de l'illégalité de la décision du 27 août 2018 par laquelle le président du conseil départemental du Bas-Rhin a prononcé son admission à la retraite. Toutefois, le refus d'indemnité n'a pas été pris pour l'application de cette admission à la retraite, qui n'en constitue pas la base légale. Le moyen tiré de l'exception d'illégalité est, dans de telles conditions, inopérant.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles, applicable aux assistants familiaux en vertu de l'article R. 422-1 du même code : " Sauf lorsque le licenciement intervient soit pour faute grave ou lourde, soit au cours ou à l'expiration d'une période d'essai, une indemnité de licenciement calculée dans les conditions fixées par l'article D. 773-1-5 du code du travail est due à l'assistant maternel justifiant d'une ancienneté d'au moins deux ans au service du même employeur : / 1° Qui a fait l'objet d'un licenciement dans les conditions prévues aux articles L. 773-7 et L. 773-12 du code du travail ; / 2° Qui, engagé à terme fixe, a été licencié avant ce terme ; / 3° Qui a été licencié dans les conditions prévues à l'article R. 422-11. / L'assistant maternel dont le contrat de travail a été rompu postérieurement à l'entrée en jouissance d'une pension au taux plein du régime général d'assurance vieillesse de la sécurité sociale bénéficie de l'indemnité prévue à l'alinéa précédent s'il justifie d'une ancienneté d'au moins deux ans au service du même employeur et s'il n'a pas été l'objet d'un licenciement pour faute grave ou lourde ".

6. Ces dispositions insérées dans la section 4 intitulée " licenciement ", fixent les cas dans lesquels l'assistant maternel ou l'assistant familial employé par des personnes de droit public peut bénéficier d'une indemnité de licenciement. Constituant les seules dispositions figurant à la section 4 intitulée " licenciement ", elles doivent être regardées, y compris en ce qui concerne le dernier alinéa, comme fixant les cas de licenciement et les conditions dans lesquels l'assistant maternel ou l'assistant familial employé par des personnes de droit public, et le cas échéant, déjà titulaire d'une pension de retraite, peut bénéficier d'une indemnité de licenciement.

7. Ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, ces dispositions ne sauraient ouvrir un droit à indemnité lorsque l'assistant familial ne fait pas l'objet d'un licenciement.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a sollicité son admission à la retraite et qu'il est à l'origine de la cessation de ses fonctions. Il ressort de la teneur même des courriers qu'il a adressés au département, et en particulier de son recours gracieux, qu'il avait conscience que le fait de rompre le contrat d'accueil d'un mineur n'impliquait pas pour autant la fin du contrat de travail. Il ne saurait, dans ces conditions, sérieusement soutenir qu'il n'aurait sollicité la rupture de son contrat de travail qu'en raison de l'ambiguïté de ce dernier quant au lien entre fin du contrat d'accueil à l'initiative de l'assistant familial et démission de ce dernier. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été induit en erreur par la rédaction de son contrat, pour contester être à l'initiative de la rupture de son contrat de travail, ainsi que l'a relevé à juste titre le tribunal. Il ne saurait, par suite, solliciter la requalification de sa démission.

9. Par ailleurs, si le requérant évoque une différence de traitement entre les assistants familiaux ayant sollicité eux-mêmes leurs droits à pension et ceux admis à la retraite sur décision du département, aucune de ces deux hypothèses ne relève du licenciement. Les considérations qu'il invoque sont donc sans incidence sur la légalité du refus de lui accorder une indemnité sur le fondement des dispositions citées au point 5, dès lors que cette indemnité n'est due qu'en cas de licenciement.

10. De même, si M. B... fait valoir qu'il aurait été licencié s'il n'avait pas sollicité son admission à la retraite, une telle circonstance est sans incidence sur le fait qu'en l'espèce, il n'a pas fait l'objet d'un licenciement.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B..., qui ne saurait être regardé comme ayant fait l'objet d'un licenciement, ne peut bénéficier de l'indemnité de départ à la retraite sur le fondement du deuxième alinéa de l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles.

12. En dernier lieu, le requérant ne peut utilement soutenir que l'administration aurait accordé l'indemnité en question à des personnes n'ayant pas fait l'objet d'un licenciement, dès lors qu'une telle circonstance n'est pas de nature à lui ouvrir droit au versement de cette indemnité alors qu'il n'en remplit pas les conditions d'attribution.

13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande, tendant à l'annulation de la décision refusant de lui verser l'indemnité de départ à la retraite mentionnée au second alinéa de l'article R. 422-21 du code de l'action sociale et des familles, ainsi que du rejet de son recours gracieux, et à ce qu'il soit enjoint à la collectivité qui l'employait de lui verser la somme en question.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la collectivité européenne d'Alsace, venant aux droits du département du Bas-Rhin, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. B... la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la collectivité européenne d'Alsace.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la collectivité européenne d'Alsace au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la collectivité européenne d'Alsace.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2023.

La rapporteure,

Signé : A. C...La présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne à la préfète du Bas-Rhin, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N°21NC00196


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00196
Date de la décision : 04/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : ADVEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-04-04;21nc00196 ?
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