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02/03/2023 | FRANCE | N°21NC02798

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 02 mars 2023, 21NC02798


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 13 juillet 2021 par lesquels le préfet de l'Aube leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2101731,2101732 du 24 septembre 2021, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leu

rs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 octobre 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne d'annuler les arrêtés du 13 juillet 2021 par lesquels le préfet de l'Aube leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2101731,2101732 du 24 septembre 2021, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 octobre 2021 sous le numéro 21NC02798, M. B..., représenté par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 septembre 2021 en ce qui le concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2021 pris à son encontre par le préfet de l'Aube ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet s'est estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de rejet de sa demande d'asile ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2022, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 26 octobre 2021 sous le numéro 21NC02799, Mme B..., représentée par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 24 septembre 2021 en ce qui la concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2021 pris à son encontre par le préfet de l'Aube ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet s'est estimé lié par la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides de rejet de sa demande d'asile ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2022, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy en date du 26 avril 2022, M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B..., ressortissants albanais, sont entrés sur le territoire français, selon leurs déclarations, le 9 septembre 2019 afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) statuant selon la procédure accélérée par deux décisions du 17 mai 2021. Par deux arrêtés du 13 juillet 2021, le préfet de l'Aube leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai. M. et Mme B... font appel du jugement du 24 septembre 2021 par lequel le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, pour obliger M. et Mme B... à quitter le territoire français, le préfet de l'Aube, après avoir visé les stipulations et dispositions pertinentes de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment l'article L. 611-1 4°, a rappelé les principaux éléments de leurs situations, en indiquant notamment qu'ils étaient entrés sur le territoire français le 9 septembre 2019, que leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Ofpra statuant selon la procédure accélérée par deux décisions du 17 mai 2021 et que dès lors, ils ne bénéficiaient plus du droit de se maintenir sur le territoire français. Le préfet a également noté que M. et Mme B... n'établissaient pas être démunis de toute attache dans leur pays d'origine, ni y être exposés à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les décisions attaquées comportent ainsi l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui en constituent le fondement. Cette motivation témoigne par ailleurs de ce que le préfet, qui soutient sans être contesté que la présence sur le territoire français des enfants de M. et Mme B... et la grossesse de cette dernière n'ont jamais été portées à sa connaissance, a procédé à un examen particulier de la situation des intéressés, sans se considérer en situation de compétence liée au regard des décisions de l'Opfra. Par suite, les moyens tirés du défaut de motivation, du défaut d'examen particulier et de l'erreur de droit ne peuvent qu'être écartés.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B..., qui ont déclaré être entrés sur le territoire français le 9 septembre 2019, ne séjournaient en France que depuis un peu moins de deux ans à la date des décisions attaquées. Ils font l'un et l'autre l'objet d'une mesure d'éloignement. S'il est constant que leurs deux enfants ont été placés à l'aide sociale à l'enfance jusqu'au 31 mai 2022, M. et Mme B... ne fournissent aucun élément de nature à établir que leurs enfants ne pourraient repartir avec eux en Albanie à l'expiration de la durée de leur placement, le préfet s'étant engagé à ne pas mettre à exécution les décisions faisant obligation aux requérants de quitter le territoire français dans l'intervalle. Les requérants n'établissent donc pas que la cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Albanie. Si Mme B... soutient être enceinte, elle ne l'établit pas. Elle n'établit pas davantage que son état de grossesse ferait obstacle à son éloignement. Enfin, M. et Mme B... ne justifient d'aucune attache familiale et personnelle en France et n'établissent pas être démunis de telles attaches en Albanie. Dans ces conditions, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Aube aurait porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ainsi que, pour les mêmes motifs, celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation.

5. En troisième et dernier lieu, M. et Mme B... reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, ni critiquer utilement les motifs de rejet qui leur ont été opposés par le premier juge, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le premier juge.

Sur les décisions fixant le pays de reconduite :

6. M. et Mme B... reprennent en appel, sans apporter d'élément nouveau, ni critiquer utilement les motifs de rejet qui leur ont été opposés par le premier juge, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile reprenant celles, désormais abrogées, de l'article

L. 513-2 du même code. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le premier juge.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Mme C... B..., au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et à Me Gaffuri.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 9 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Laubriat, président,

M. Meisse, premier conseiller,

Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 mars 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : A. D... L'assesseur le plus ancien,

Signé : E. Meisse

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

N. Basso

2

Nos 21NC02798,21NC02799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02798
Date de la décision : 02/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAUBRIAT
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-03-02;21nc02798 ?
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