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31/01/2023 | FRANCE | N°20NC00917

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 31 janvier 2023, 20NC00917


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler les quatre titres exécutoires émis par le principal du collège Louis Grignon de Fagnières les 20 décembre 2018 et 28 novembre 2018 pour obtenir le paiement des loyers des mois de septembre, octobre, novembre et décembre 2018, afférents au logement qu'il occupe au sein du collège, et, d'autre part, de le décharger de l'obligation de payer la somme de 3 000 euros correspondant aux quatre loyers dus.

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n jugement n° 1900514 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Châlons-e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler les quatre titres exécutoires émis par le principal du collège Louis Grignon de Fagnières les 20 décembre 2018 et 28 novembre 2018 pour obtenir le paiement des loyers des mois de septembre, octobre, novembre et décembre 2018, afférents au logement qu'il occupe au sein du collège, et, d'autre part, de le décharger de l'obligation de payer la somme de 3 000 euros correspondant aux quatre loyers dus.

Par un jugement n° 1900514 du 4 février 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 avril 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 13 octobre 2022, M. B... A..., représenté par Me Thomas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 4 février 2020 ;

2°) d'annuler les titres exécutoires émis par la principale du collège Louis Grignon pour le paiement des loyers de septembre à décembre 2018 du logement qu'il occupe ;

3°) en tout état de cause, de le décharger de l'obligation de payer la somme de 3 000 euros correspondant aux loyers litigieux ;

4°) de mettre à la charge du département de la Marne la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- par une décision du 5 décembre 2014, la commission permanente du conseil général de la Marne a décidé de maintenir la concession dont il était bénéficiaire à titre gratuit, alors même qu'il n'en remplissait plus les conditions légales, jusqu'à sa mutation ; le département ne pouvait pas revenir sur cette décision créatrice de droit ; en application des articles L 242-1 et L 242-2 du code des relations entre le public et l'administration, cette décision créatrice de droit ne pouvait être retirée ou abrogée que dans le délai de quatre mois après son édiction ; faute d'avoir été abrogée ou retirée dans ce délai, elle s'imposait tant au président du conseil départemental qu'à la principale du collège, jusqu'à sa mutation effective, peu importe qu'il n'en remplisse plus les conditions ; les premiers juges ont considéré que le logement faisait partie du domaine public et qu'ainsi son occupation était nécessairement précaire et révocable de sorte qu'il a pu être mis fin à tout moment à l'occupation gratuite consentie ; toutefois, ce n'est pas l'occupation elle-même qui a été remise en cause, mais ses conditions financières, sur lesquelles l'administration a pu régulièrement s'engager dès lors qu'une occupation privative peut être consentie à titre gratuit, en vertu des dispositions de l'article L. 2125-1 du Code général de la propriété des personnes publiques ; en tout état de cause, le conseil départemental ne justifie pas d'une délibération qui priverait les conseillers principaux d'éducation ou le priverait d'un logement pour nécessité de service ;

- les titres exécutoires contestés ont été émis illégalement, en l'absence de l'avis préalable du service des domaines requis en vertu des dispositions de l'article L. 216-17 du code de l'éducation ; il est recevable à exciper de l'illégalité de la convention et l'avenant signés le 7 janvier 2019, lesquels ne constituent pas des actes règlementaires ;

- le montant de la redevance fixé par référence à la valeur locative du logement est excessif par rapport à la redevance d'un logement de fonction de type F6 de même surface, situé dans le collège Nicolas Appert à Châlons-en-Champagne, à environ 1 kilomètre du collège Louis Grignon, fixée à 500 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2020, le département de la Marne et le collège Louis Grignon, représentés par Me Schidlowsky, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par le département de la Marne et non compris dans les dépens.

Ils font valoir qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. Ninove, conseiller principal d'éducation (CPE) au collège Louis Grignon de Fagnières depuis septembre 1989, a bénéficié, à compter du mois de janvier 1995, d'une concession de logement pour nécessité absolue de service. Lors de sa réunion du 5 décembre 2014, la commission permanente du conseil général de la Marne a examiné l'état des concessions de logements dans les collèges publics du département et a constaté que le collège Louis Grignon logeait en surnombre un agent de catégorie A par nécessité absolue de service, ce logement correspondant au poste de conseiller principal d'éducation. Elle a décidé de maintenir la concession de logement par nécessité de service à un agent de catégorie A jusqu'à la mutation de la personne affectée sur le poste de conseiller principal d'éducation. Par un courrier du 5 mai 2017, M. A... a été informé que, lors de sa réunion du 7 avril 2017, la commission permanente avait décidé de mettre fin à la concession dudit logement à compter de la rentrée 2017/2018. Il a finalement été décidé de ne pas appliquer cette décision pour cette année scolaire. Par un courrier du 1er décembre 2017, le président du conseil départemental a indiqué à M. A... qu'à la suite d'une nouvelle étude des effectifs, le maintien de la concession du logement pour nécessité absolue de service n'était toujours pas justifié et que la commission permanente, lors de sa réunion du 1er décembre, avait décidé de mettre fin à la concession dudit logement à compter de la rentrée 2018/2019. Par une délibération du 29 juin 2018, la commission permanente du conseil départemental de la Marne a notamment décidé qu'il était " mis fin pour la rentrée 2018-2019 au maintien de logements pour nécessité de service aux collèges Louis Grignon et Nicolas Appert à Châlons-en-Champagne et de louer ces logements à deux agents de l'éducation nationale par le biais d'une convention d'occupation à titre précaire ". Il a ainsi été décidé que le logement de type F5 de 120 m² du collège Louis Grignon serait loué pour un loyer de 750 euros hors charges. Une convention d'occupation précaire de ce logement a alors été adressée à M. A.... En application de cette délibération, quatre titres exécutoires, chacun d'un montant de 750 euros et relatifs aux mois de septembre à décembre 2018, ont par ailleurs été émis par le collège Louis Grignon à l'encontre de M. A..., en l'absence de tout paiement de loyers de la part de l'intéressé. M. A... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de ces titres et à la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondantes. Il relève appel du jugement du 4 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, la délibération du 5 décembre 2014 par laquelle la commission permanente du conseil général de la Marne a notamment décidé de maintenir la concession de logement par nécessité de service à un agent de catégorie A au collège Louis Grignon qui était en surnombre jusqu'à la mutation de la personne affectée sur le poste de conseiller principal d'éducation revêt un caractère réglementaire. Cette délibération pouvait ainsi être abrogée ou modifiée à tout moment selon ce que l'intérêt général exige. M. A... n'avait ainsi aucun droit à son maintien. Ce dernier ne saurait utilement faire valoir à cet égard que la délibération du 5 décembre 2014 dont il se prévaut serait illégale en tant qu'elle a constaté que l'emploi de conseiller principal d'éducation au collège Louis Grignon ne nécessitait pas de concession de logement par nécessité absolue de service.

3. Ainsi, la délibération du 5 décembre 2014 ne faisait pas obstacle à ce que, par sa délibération du 29 juin 2018, la commission permanente du conseil départemental de la Marne modifie la liste des emplois dont les titulaires bénéficient d'une concession de logement par nécessité absolue de service et en exclue, notamment, l'agent occupant l'appartement situé au collège Louis Grignon mentionné dans cette délibération.

4. En deuxième lieu, si M. A... soutient que les titres exécutoires contestés sont illégaux, en l'absence de l'avis préalable du service des domaines prévu par les dispositions de l'article L. 216-17 du code de l'éducation, ces dispositions n'existent pas. En tout état de cause, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, si, dans le cadre d'une contestation d'un acte règlementaire par voie d'exception, la légalité des règles fixées par l'acte réglementaire, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir peuvent être utilement critiquées, il n'en va pas de même des conditions d'édiction de cet acte, et notamment des vices de forme et de procédure dont il serait entaché. De telles vices ne peuvent être utilement invoqués que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'acte réglementaire lui-même et introduit avant l'expiration du délai de recours contentieux. M. A... ne peut, ainsi, utilement faire valoir que la procédure ayant précédé l'adoption de la délibération du 29 juin 2018 serait irrégulière en l'absence de consultation du service des domaines. Il ne peut pas davantage invoquer utilement l'absence de proposition du conseil d'administration de l'établissement. Par ailleurs, contrairement à ce que semble soutenir M. A..., aucune disposition législative et réglementaire n'imposait que la convention d'occupation à titre précaire qui lui a été adressée ou son avenant, prévoyant des versements plus faibles et plus échelonnés, soient soumis préalablement à un avis du service des domaines.

5. En troisième lieu, le logement en cause, situé à Fagnières, est constitué d'une maison mitoyenne de 120 m² comprenant quatre chambres, un garage et un jardin de 100 m². Si M. A... fait valoir que le loyer qui lui est demandé est excessif, notamment par rapport au montant de la redevance fixée pour un logement de la même superficie dont le loyer a été fixé à 500 euros, il n'établit pas que les deux logements, situés dans deux communes différentes, présenteraient les mêmes caractéristiques. Dans ces conditions et alors qu'il ressort du tableau produit par le département que le loyer demandé n'est pas excessif par rapport aux loyers demandés pour des biens similaires, Il n'est pas établi qu'en fixant à 750 euros le montant de la redevance due par M. A..., la commission permanente du conseil départemental de la Marne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des titres exécutoires émis à son encontre et à la décharge de l'obligation de payer les sommes correspondantes.

Sur les frais d'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Marne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par le département de la Marne au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département de la Marne présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au département de la Marne et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président de chambre,

- Mme Haudier, présidente assesseure,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu publique par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2023.

La rapporteure,

Signé : G. C...Le président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 20NC00917


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00917
Date de la décision : 31/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ACG REIMS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-01-31;20nc00917 ?
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