La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/01/2023 | FRANCE | N°21NC00392

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 26 janvier 2023, 21NC00392


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer, en droits et pénalités, la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés qui lui a été assigné au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1904652 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 février 2021, la SARL B..., représentée par Me Schott, demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de la décharger des impositions et pénalités contestées ;

3°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer, en droits et pénalités, la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés qui lui a été assigné au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1904652 du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 février 2021, la SARL B..., représentée par Me Schott, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de la décharger des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du 6 décembre 2016 a prononcé la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 2010 à hauteur de la plus-value de cession de son fonds de commerce ; cette plus-value étant de 179 537,45 euros, le calcul du dégrèvement effectué par l'administration sur une base de 113 379 euros est en conséquence insuffisant et il y a lieu de prononcer un complément de décharge ;

- les bilans des exercices 2009 et 2010 n'ayant jamais été remis en cause et étant intangibles, l'administration ne saurait soutenir que la plus-value de cession serait d'un montant inférieur à la somme ressortant de sa comptabilité.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande tendant à obtenir un complément de décharge est irrecevable dès lors que le contribuable a épuisé les voies de recours concernant tant le contentieux de l'exécution du jugement du 6 décembre 2016 que le contentieux de l'interprétation dudit jugement, les décisions ayant rejeté la demande en interprétation et la demande en exécution de ce jugement étant devenues définitives ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Schott, représentant la SARL B....

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Boulangerie Pâtisserie B... a été créée le 21 novembre 2009 afin de reprendre un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie appartenant à ses deux associés M. et Mme B.... Par acte du 2 août 2010, la SARL B... a cédé ce fonds de commerce à une SARL Brückner moyennant le prix de 240 000 euros. La SARL B... n'ayant pas déposé sa déclaration de résultat au titre de l'année 2010, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au cours de l'année 2011. Par une proposition de rectification du 22 février 2011, l'administration, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, a déterminé l'impôt sur les sociétés de l'année 2010, correspondant au bénéfice imposable de l'exercice compris entre le 1er novembre 2009 et le 30 novembre 2010, sur la base du résultat fiscal déclaré par la société le 2 février 2011, à hauteur de 181 452 euros, auquel elle a apporté des rehaussements afin de porter le résultat imposable à 187 977 euros. Le résultat ainsi déterminé comprenait la plus-value résultant de la cession du fonds de commerce. En conséquence de cette procédure, l'administration a mis en recouvrement le 29 juin 2011, une cotisation d'impôt sur les sociétés de 57 379 euros assortie de l'intérêt de retard et de la pénalité pour retard dans le dépôt d'une déclaration à hauteur de 6 197 euros. Estimant, par une réclamation du 29 juin 2012, que la plus-value de cession du fonds de commerce était exonérée en vertu de l'article 238 quindecies du code général des impôts, la SARL B... en a vainement demandé le bénéfice à l'administration, qui a rejeté cette demande par décision du 13 décembre 2012. Saisi du litige, le tribunal administratif de Strasbourg, par un jugement du 6 décembre 2016, devenu définitif, a réduit les bases de l'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société au titre de l'exercice clos en 2010 " à hauteur du montant de la plus-value réalisée lors de la cession du fonds de commerce ". En exécution de ce jugement, l'administration a prononcé un dégrèvement de 37 793 euros en droits et de 4 082 euros au titre des majorations. Ce dégrèvement a été porté à la connaissance de la société par une mise en demeure du 6 mars 2017. Estimant que le montant de ce dégrèvement était insuffisant, la SARL B... a saisi l'administration d'une réclamation en date du 24 octobre 2017 tendant à ce que le dégrèvement dû en exécution du jugement du 6 décembre 2016 soit calculé sur la base d'une plus-value de 179 537,45 euros. Par ailleurs, la requête en interprétation du jugement du 6 décembre 2016 présentée par la société requérante a été rejetée par une ordonnance du 4 août 2017, elle-même confirmée en appel par une ordonnance du 6 novembre 2018, tandis que, par décision du 11 mars 2019, la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a classé administrativement la demande d'exécution de ce jugement formée par la SARL B... sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative. Par une décision du 3 juin 2019, l'administration fiscale, estimant avoir correctement exécuté le jugement du 6 décembre 2016, a rejeté la réclamation susmentionnée du 24 octobre 2017. La SARL B... relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à obtenir une décharge supplémentaire en droits et pénalités au titre de la cotisation d'impôt sur les sociétés laissée à sa charge due pour l'année 2010.

2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1 (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ". Aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : / (...) c. Pour les immobilisations apportées à l'entreprise par des tiers, de la valeur d'apport ".

3. L'inscription au bilan de la valeur d'un élément d'actif acquis à titre onéreux ne constitue pas une décision de gestion définitive opposable à l'administration. La circonstance que le bien ait été inscrit au bilan au cours d'un exercice prescrit, en application des dispositions de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, ne fait pas obstacle, dès lors qu'il figure toujours au bilan d'un exercice ultérieur, à ce que l'administration rectifie la valeur qui lui est attribuée, sans qu'elle doive pour cela prouver, ou même invoquer, l'existence d'une libéralité ou l'intention délibérée de la société de minorer la valeur de cette immobilisation, et sans qu'y fasse non plus obstacle le fait qu'aucun " événement " ni aucune écriture comptable n'ait concerné le bien au cours de l'exercice au titre duquel l'administration rectifie sa valeur au bilan.

4. Il ressort des écritures de la société requérante qu'elle a inscrit dans sa comptabilité les immobilisations corporelles et incorporelles constituant le fonds de commerce qu'elle a reçu en apport de M. B... au mois de novembre 2009 pour des sommes correspondant à la valeur comptable de ces immobilisations figurant au bilan de l'entreprise individuelle de l'apporteur soit pour la somme totale de 61 462,55 euros. Or, il n'est pas contesté que l'apport de ce fonds de commerce a été valorisé pour la somme de 130 000 euros, valeur qui figure dans l'acte constitutif de la SARL B... et qui est reprise dans l'acte de cession du fonds de commerce du 2 août 2010. En vertu du c) de l'article 38 quinquies de l'annexe III au code général des impôts, la SARL B... aurait dû inscrire ce fonds de commerce pour cette somme de 130 000 euros à l'actif de son bilan. En conséquence c'est par une exacte application des dispositions ci-dessus reproduites que l'administration a calculé le montant de la plus-value devant être déduite du bénéfice imposable de l'année 2010, en exécution du jugement du 6 décembre 2016, sur la base d'un prix de revient égal à la valeur d'apport de ce fonds de commerce. Ce faisant, l'administration, qui était en droit, par la décision de dégrèvement litigieuse prise afin d'exécuter le jugement du 6 décembre 2016, de retenir la valeur pour laquelle cet élément d'actif aurait dû être inscrit en comptabilité en vertu des règles rappelées au point précédent, n'a apporté aucun rehaussement au bénéfice de l'année 2010 qui avait été arrêté à la somme de 187 977 euros et que ce jugement n'a pas remis en cause. Par suite, la SARL B... ne saurait utilement soutenir que l'administration ne pouvait écarter la valeur inscrite dans sa comptabilité afin de déterminer le prix de revient du fonds de commerce devant servir au calcul de la plus-value litigieuse afin d'exécuter l'article 1er du jugement du 6 décembre 2016.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre en défense, que la SARL B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président de chambre,

M. Agnel, président assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2023.

Le rapporteur,

Signé : M. AgnelLe président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

N° 21NC00392

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00392
Date de la décision : 26/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : JUDICIA CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2023-01-26;21nc00392 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award