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08/12/2022 | FRANCE | N°22NC00141

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 08 décembre 2022, 22NC00141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Yonne a retiré sa carte de résident et a décidé de l'éloigner à destination de la Côte d'Ivoire.

Par un jugement n° 2106852 du 11 octobre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Stocco de

mande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 octobre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Yonne a retiré sa carte de résident et a décidé de l'éloigner à destination de la Côte d'Ivoire.

Par un jugement n° 2106852 du 11 octobre 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Stocco demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 octobre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Yonne a retiré sa carte de résident et a décidé de l'éloigner à destination de la Côte d'Ivoire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté du 27 septembre 2021 contient une décision implicite d'éloignement qui par suite méconnaît l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2022, le préfet de l'Yonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 13 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Barrois, première conseillère,

- et les observations de Me Morel, pour le préfet de l'Yonne.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né en 1999, titulaire d'une carte de résident valable du 25 mars 2017 au 24 mars 2027, a fait l'objet d'une interdiction du territoire français de dix ans, à titre de peine complémentaire de la peine d'emprisonnement de dix-huit mois prononcée, en raison de faits d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans, par un jugement du 3 novembre 2020 du tribunal judiciaire de Lons-le-Saunier. Par un arrêté du 27 septembre 2021, le préfet de l'Yonne a retiré la carte de résident de M. A... et a décidé de l'éloigner à destination de la Côte d'Ivoire. Par la présente requête, fait appel du jugement du 11 octobre 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite d'éloignement contenue dans l'arrêté du 27 septembre 2021 :

2. Dans le cas où un étranger est placé en rétention en vue de son éloignement à raison d'une interdiction judiciaire du territoire, il appartient au président du tribunal administratif ou au magistrat qu'il délègue de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision de placement en rétention et sur celles dirigées contre la décision fixant le pays de destination, notifiée à l'intéressé en même temps que la mesure de placement en rétention.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné par jugement du tribunal correctionnel de Lons-Le-Saunier du 3 novembre 2020 à 10 ans d'interdiction du territoire français pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans à titre de peine complémentaire de la peine d'emprisonnement de dix-huit mois prononcée. En application de cette mesure d'éloignement prononcée par l'autorité judiciaire, le préfet est seulement tenu de pourvoir à son exécution en édictant à l'encontre du requérant une décision motivée fixant son pays de destination. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation d'une décision implicite d'éloignement qu'aurait prise le préfet ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

4. D'une part, aux termes de l'article L. 641-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La peine d'interdiction du territoire français susceptible d'être prononcée contre un étranger coupable d'un crime ou d'un délit est régie par les dispositions des articles 131-30, 131-30-1 et 131-30-2 du code pénal. " et de l'article L. 641-2 du même code : " Il ne peut être fait droit à une demande de relèvement d'une interdiction du territoire que si le ressortissant étranger réside hors de France. Cette condition ne s'applique pas : 1° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d'emprisonnement ferme ; 2° Lorsque l'étranger fait l'objet d'une décision d'assignation à résidence prise en application des articles L. 731-3, L. 731-4 ou L. 731-5. ". Aux termes de l'article 131-30 du code pénal : " Lorsqu'elle est prévue par la loi, la peine d'interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable d'un crime ou d'un délit. / L'interdiction du territoire entraîne de plein droit la reconduite du condamné à la frontière, le cas échéant, à l'expiration de sa peine d'emprisonnement ou de réclusion. / Lorsque l'interdiction du territoire accompagne une peine privative de liberté sans sursis, son application est suspendue pendant le délai d'exécution de la peine. Elle reprend, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la privation de liberté a pris fin. / (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative fixe, par une décision distincte de la décision d'éloignement, le pays à destination duquel l'étranger peut être renvoyé en cas d'exécution d'office d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une décision de mise en œuvre d'une décision prise par un autre État, d'une interdiction de circulation sur le territoire français, d'une décision d'expulsion, d'une peine d'interdiction du territoire français ou d'une interdiction administrative du territoire français. " et de l'article L. 721-4 du même code : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'aussi longtemps que la personne condamnée n'a pas obtenu de la juridiction qui a prononcé la condamnation pénale le relèvement de sa peine d'interdiction du territoire, l'autorité administrative est tenue de pourvoir à son exécution en édictant à son encontre une décision motivée fixant son pays de destination, sous réserve qu'une telle décision n'expose pas l'intéressé à être éloigné à destination d'un pays dans lequel sa vie ou sa liberté serait menacée, ou d'un pays où il serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En l'espèce, M. A..., qui se borne à faire état, de manière non circonstanciée, de l'existence de risques en cas de retour dans son pays d'origine, n'établit ni la réalité ni l'actualité de ces risques. Dès lors, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M.Michael A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Goujon-Fischer, président-assesseur,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC00141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00141
Date de la décision : 08/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : STOCCO

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-08;22nc00141 ?
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