La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2022 | FRANCE | N°21NC00864

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 08 décembre 2022, 21NC00864


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 août 2020, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2006478 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2021, Mme A..., r

eprésentée par Me Snoeckx, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 août 2020, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2006478 du 8 décembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 mars 2021, Mme A..., représentée par Me Snoeckx, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 août 2020, par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle méconnaît les articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 18 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante togolaise, est entrée sur le territoire français le 19 août 2016 sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités allemandes afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile du 13 octobre 2016 a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 mars 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 5 décembre 2019. Le 30 décembre 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de membre de famille d'un ressortissant de l'Union européenne. Par un arrêté du 12 août 2020, la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Mme A... fait appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; /2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; (...) / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; " et de l'article L. 121-3 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé aux 4° ou 5° de l'article L. 121-1 selon la situation de la personne qu'il accompagne ou rejoint, ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l'ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois (...). ".

3. Ainsi, un ressortissant d'un État tiers ne dispose d'un droit au séjour en France en qualité d'ascendant direct à charge d'un ressortissant de l'Union européenne en application des dispositions combinées des articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que dans la mesure où son descendant direct remplit lui-même les conditions fixées au 1° ou au 2° de l'article L. 121-1 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont alternatives et non cumulatives. L'Etat membre d'accueil, qui doit assurer aux citoyens de l'Union la jouissance effective des droits que leur confère ce statut, ne peut refuser à l'enfant mineur, citoyen de l'Union, et à son parent, le droit de séjourner sur son territoire que si l'une au moins de ces deux conditions, dont le respect permet d'éviter que les intéressés ne deviennent une charge déraisonnable pour ses finances publiques, n'est pas remplie. Dans pareille hypothèse, l'éloignement forcé du ressortissant de l'Etat tiers et de son enfant mineur ne pourrait, le cas échéant, être ordonné qu'à destination de l'Etat membre dont ce dernier possède la nationalité ou de tout Etat membre dans lequel ils seraient légalement admissibles.

4. En l'espèce, Mme A... est la mère d'un enfant né le 30 décembre 2019 d'un père ressortissant allemand qui compte-tenu de son jeune âge n'est pas en mesure d'exercer une activité professionnelle en France, ni dès lors de disposer de ressources suffisantes alors en outre que son père ne verse pour son éducation et son entretien que 100 euros de manière discontinue. De plus, la circonstance que Mme A... et son fils bénéficient de l'aide médicale d'Etat, qui est une aide sociale prévue par l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles, ne permet pas de la regarder comme disposant d'une assurance maladie au sens du 2° de l'article L. 121-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 121-1 et L. 121-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ". Par ailleurs, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Enfin, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

6. En l'espèce, le père de son enfant, marié avec une autre femme, réside et travaille en Allemagne et il n'est pas établi qu'il entretiendrait des liens affectifs avec son enfant. De plus, Mme A... ne peut se prévaloir d'aucune attache familiale en France dès lors que l'ensemble de sa famille et notamment sa fille mineure vivent au Bénin ou aux Etats-Unis. Il en résulte que la décision n'a pas méconnu les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et droit d'asile ni les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales citées au point 5 et que la préfète du Bas-Rhin n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme A....

7. En troisième lieu, les moyens tirés de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ne sont pas assortis de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé. Ils doivent par suite être écartés. Par voie de conséquence, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- M. Goujon-Fischer, président-assesseur,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 décembre 2022.

La rapporteure,

Signé : M. BarroisLe président,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 21NC00864


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00864
Date de la décision : 08/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : SNOECKX

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-08;21nc00864 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award