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06/12/2022 | FRANCE | N°22NC01505

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 06 décembre 2022, 22NC01505


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une aut

orisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans pendant le temps de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et enfin de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Par un jugement n° 2201653 du 3 mai 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 22NC01505 le 10 juin 2022, M. B..., représenté par Me Andréini, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et, dans pendant le temps de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

s'agissant du refus de titre de séjour :

- cette décision méconnaît l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Goujon-Fischer, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant cambodgien, est entré en France le 13 mars 2020 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au 13 juin 2020. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de son visa et a sollicité, le 5 mai 2021, la délivrance d'une carte de séjour temporaire en qualité de visiteur sur le fondement des dispositions de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 9 décembre 2021, la préfète du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 3 mai 2022, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 décembre 2021 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an. / Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle. / Par dérogation à l'article L. 414-10, cette carte n'autorise pas l'exercice d'une activité professionnelle. (...) " et, d'autre part, aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ".

3. D'une part, comme l'ont rappelé à bon droit les premiers juges, il est constant qu'à la date à laquelle le préfet a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire en qualité de visiteur, M. B... ne justifiait pas détenir un visa de long séjour, de sorte que la préfète du Bas-Rhin pouvait légalement, pour ce seul motif, refuser de faire droit à sa demande. Il résulte de l'instruction qu'elle aurait pris la même décision en se fondant sur ce seul motif.

4. D'autre part, si M. B... indique qu'étant moine bouddhiste, il bénéficie d'un hébergement gratuit dans un logement au sein de la pagode appartenant à l'Association des amis de la civilisation cambodgienne, ainsi que de dons de la part des fidèles couvrant notamment ses besoins en matière alimentaire, d'hygiène et santé et mène par ailleurs une vie d'ascèse inhérente à sa qualité de moine, il ne justifie pas, en tout état de cause, disposer par cette prise en charge, dont la régularité est au demeurant incertaine, de ressources d'un montant au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel. En outre, il est constant qu'il ne pouvait pas justifier, à la date de l'arrêté contesté, d'une assurance maladie. Dès lors, en refusant de faire droit à sa demande de carte de séjour en qualité de visiteur, la préfète du Bas-Rhin n'a, en tout état de cause, pas fait une inexacte application de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Enfin, en se bornant à faire état du rôle spirituel qu'il joue au sein de la communauté bouddhiste auprès de laquelle il intervient, il n'établit pas que la préfète aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France en 2020, alors âgé de 27 ans et s'y est maintenu irrégulièrement. S'il se prévaut de ses liens, au demeurant récents, avec les membres de la communauté cambodgienne de Strasbourg, il est constant qu'il est célibataire, sans enfant et n'est pas dépourvu d'attaches personnelles et familiales dans son pays d'origine où résident toujours ses parents, ses frères et sa sœur. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressé sur le territoire français, la préfète du Bas-Rhin, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu, dès lors, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi :

6. M. B... n'ayant pas démontré l'illégalité de la décision lui ayant refusé un titre de séjour, il n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français, ni par suite à se prévaloir de l'illégalité de cette dernière décision à l'encontre de la décision fixant son pays de renvoi.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. B....

Sur les frais liés à l'instance :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Goujon-Fischer, président,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 décembre 2022.

Le président-rapporteur,

Signé : J. -F. Goujon-Fischer

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau

Signé : E. Meisse

La greffière,

Signé : V. Firmery

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

V. Firmery

2

N° 22NC01505


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC01505
Date de la décision : 06/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GOUJON-FISCHER
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : ELEOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-12-06;22nc01505 ?
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