Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui ont été assignés au titre des années 2012, 2013 et 2014.
Par un jugement n° 1900785 du 23 mars 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 mai 2020, M. B..., représenté par Me Laurent-Sorel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de le décharger, en droits et pénalités, des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration ayant fondé la détermination des bénéfices industriels et commerciaux de l'EURL Gis Protection, sur lesquels il a été imposé, sur le montant des salaires imposés chez ses salariés, il lui incombait, sur le fondement de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales de lui adresser copies des propositions de rectifications adressées à ces salariés en réponse à la demande qu'il a faite en ce sens dans sa réclamation du 3 janvier 2017 ; en l'absence de transmission de ces documents, la procédure est irrégulière ;
- la facture Feel Up de 7 150 euros est déductible du bénéfice imposable en ce qu'elle est appuyée des justificatifs nécessaires tandis que l'administration ne rapporte pas la preuve de l'absence de contreparties ;
- les dépôts d'espèce sur son compte personnel au titre de l'année 2013 sont justifiés, s'agissant des versements de 1 150 euros le 24 février 2012 par un retrait sur le compte courant d'associé de 10 000 euros, de 5 100 euros le 22 mars 2013 par des retraits d'espèces de la même nature, de 1 300 euros par le remboursement d'un prêt accordé à son frère, de 1 000 euros par la vente de biens personnels, de 200 euros par un présent pour son fils ;
- les dépôts d'espèce sur son compte personnel au cours de l'année 2012 s'expliquent par une remise de 1 000 euros provenant de son coffre, la vente d'une tondeuse pour 500 euros, la vente d'un ordinateur pour 300 euros, la vente de biens personnels pour 800 euros et la remise de 3 000 euros d'espèces provenant d'une opération de change en dollars qui avaient été conservés dans son coffre.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- et les conclusions de Mme Stenger, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Gis Protection, dont le gérant et associé unique est M. B... et sur les bénéfices de laquelle il est imposé à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, qui exerce une activité de prestataire de sécurité privée, a fait l'objet de deux vérifications de comptabilité au titre des années 2012-2013 et 2014. A l'issue de ces contrôles, par deux propositions de rectification du 22 septembre 2015 et du 16 octobre 2015, le service a procédé, selon la procédure contradictoire, à des rehaussements en matière de bénéfices industriels et commerciaux, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et à des rappels de contribution sur les activités privées de sécurité pour l'ensemble des périodes vérifiées. Par jugement n°1701102 du 8 novembre 2018, devenu définitif, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête de la société tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et de contribution sur les activités privées de sécurité. M. B... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2012 et 2013. Par des propositions de rectification des 22 septembre, 16 octobre et 15 décembre 2015, l'administration fiscale a procédé, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, à des rehaussements de ses bénéfices industriels et commerciaux des années 2012, 2013 et 2014 et selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du même livre, à l'imposition de sommes en tant que revenus d'origine indéterminée au titre des années 2012 et 2013. Après avis favorable de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 8 mars 2017, les suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assortis de pénalités pour manœuvres frauduleuses, ont été mis en recouvrement le 11 mai 2017. Les réclamations des 4 juillet et 3 novembre 2017 de M. B... ont été admises partiellement, notamment par la substitution de la pénalité pour manquement délibéré à celle pour manœuvres frauduleuses, par décision du 26 décembre 2017, tandis que sa réclamation du 6 juin 2018 a été intégralement rejetée le 8 février 2019. M. B... relève appel du jugement du 23 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions laissées à sa charge.
Sur la régularité de la procédure :
2. Aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts(...), les rectifications correspondantes sont effectuées suivant la procédure de rectification contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A./Cette procédure s'applique également lorsque l'administration effectue la reconstitution du montant déclaré du bénéfice industriel ou commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires déterminé selon un mode réel d'imposition ". Aux termes de l'article L. 76 B du même code : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
3. Il résulte de l'instruction qu'après avoir écarté la comptabilité de la société Gis Protection comme étant entachée de graves irrégularités tenant notamment à l'utilisation de comptes bancaires professionnels non comptabilisés ainsi qu'à des recettes non comptabilisées, le service a reconstitué les produits imposables en se fondant sur les renseignements communiqués par l'Urssaf, les établissements bancaires et certains de ses clients. S'agissant des charges déductibles des bénéfices, le service s'est borné à remettre en cause la déduction d'une facture de prestation de service du fournisseur Feel Up de 7 150 euros hors taxes. Ce n'est qu'en cours de procédure que M. B..., dans ses observations aux propositions de rectification, a demandé que soient admises en déduction les sommes versées à titre de salaires aux personnes ayant travaillé pour le compte de la société Gis Protection. Le service a accepté le principe de la déduction de ces sommes et a indiqué dans sa réponse aux observations de M. B... du 25 mars 2016 qu'il admettait en déduction des bénéfices les sommes de 52 760 euros en 2012, 71 820 euros en 2013 et 50 090 en 2014. Le service précisait que ces sommes correspondaient aux indications de M. B... et qu'elles avaient donné lieu à des propositions de rectification adressées aux personnes salariées qu'il avait désignées, n'étant retenues en déduction que les sommes admises par les destinataires. Cette position du service a notamment été rappelée à l'occasion d'une entrevue avec le supérieur hiérarchique du vérificateur le 8 décembre 2015 ayant donné lieu à un compte-rendu motivé et détaillé du 25 mars 2016. Il résulte, en premier lieu, de ces éléments que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait ainsi méconnu les principes propres à la procédure contradictoire de rectification. Il résulte, en second lieu, de ces mêmes circonstances, que si le montant des bénéfices retenus en dernier lieu par l'administration a bien été déterminé en fonction des réponses apportées par les salariés aux propositions de rectification qu'ils ont reçues, il ressort des lettres de réponse aux observations du contribuable que la teneur de ces documents a effectivement été indiquée à l'intéressé et il lui appartenait s'il le croyait utile d'en demander les copies. Or, il ne résulte pas de l'instruction que M. B... ait demandé communication de ces documents avant la mise en recouvrement des impositions. S'il soutient avoir effectué une telle demande le 7 janvier 2017, il n'en justifie pas. Par suite, M. B... n'est pas davantage fondé à soutenir que l'administration aurait méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
4. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts applicable à la détermination des bénéfices industriels et commerciaux : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment :/1° Les frais généraux de toute nature ".
5. Il résulte de l'instruction que la société Gis Protection a comptabilisé en charge le 29 août 2012 une somme de 7 150 euros au nom du fournisseur Feel Up Inc se rapportant à des honoraires d'études de marché en vue d'une extension de son activité aux Etats Unis. Afin de justifier de la déductibilité de cette somme M. B..., qui ne produit au demeurant pas de facture, produit un devis d'un cabinet d'avocat américain et une facture d'acompte de 9 630 dollars établis le 3 juillet 2014. Par ces documents qui ne sont pas contemporains de l'écriture litigieuse et qui ne concernent pas les mêmes montants, M. B... ne justifie pas du principe même de la déductibilité de cette somme de 7 150 euros au regard des dispositions du 1° du 1 de l'article 39 du code général des impôts.
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
6. Aux termes des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 69 du même livre " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ". Aux termes de l'article L. 192 de ce livre : " (...) La charge de la preuve (...) incombe également au contribuable (...) en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ".
7. Dans le cadre de l'examen de sa situation fiscale personnelle, M. B... a reçu une demande d'éclaircissements le 11 septembre 2015 à laquelle il a répondu le 2 novembre 2015. Des sommes perçues par l'intéressé au cours des années 2012 et 2013 étant demeurées inexpliquées, il lui a été notifié le 14 novembre 2015 une mise en demeure d'avoir à les justifier à laquelle il a répondu le 11 décembre 2015. Estimant que cette dernière réponse n'était pas satisfaisante, le service a taxé d'office les sommes de 4 800 euros au titre de l'année 2012 et 8 450 euros au titre de l'année 2013.
8. M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués devant le tribunal administratif s'agissant de l'origine et de la nature de ces sommes. Il y a lieu d'écarter ces moyens en adoptant les motifs retenus à juste titre par les premiers juges.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 22 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2022.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 20NC01119
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