Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 8 juin 2021 par laquelle le président de l'université de Reims Champagne-Ardenne a refusé de l'admettre en première année du master " Réseaux et télécommunication ", parcours " Administration et sécurité des réseaux ".
Par un jugement n° 2101764 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 janvier 2022, M. A... C..., représenté par Me Verdier, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2101764 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 novembre 2021 ;
2°) d'annuler la décision du président de l'université de Reims Champagne-Ardenne du 8 juin 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'université de Reims Champagne-Ardenne la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'université de Reims Champagne-Ardenne ne l'a pas informé, ni au stade de sa candidature, ni lors de la notification de la décision en litige, de l'existence d'une délibération prise en conseil d'administration fixant les capacités d'accueil et les modalités de sélection en master ;
- la décision en litige est dépourvue de base légale dès lors que, d'une part, la délibération du 1er décembre 2020, sur le fondement de laquelle elle a été prise, ne précise pas les critères de sélection des dossiers de candidature en master, d'autre part, il n'est pas démontré que cette délibération serait régulièrement entrée en vigueur en l'absence de publicité adéquate et suffisante, de la justification de sa mise en ligne sur le site internet de l'université et de celle de sa transmission au recteur aux fins du contrôle de légalité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2022, l'université de Reims Champagne-Ardenne, représenté par Me Dreyfus, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. C... de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés.
Un mémoire complémentaire, présenté pour M. C... par Me Verdier, a été reçu le 24 juin 2022, postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 28 mars 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,
- et les observations de Me Verdier pour M. C... et de Me Bajn pour l'université de Reims Champagne-Ardenne.
Considérant ce qui suit :
1. Après avoir obtenu, à l'université de Besançon, une licence d'informatique à l'issue de l'année universitaire 2019-2020, M. A... C... a présenté sa candidature en vue de son admission, pour l'année universitaire 2021-2022, en première année du master " Réseaux et télécommunication ", parcours " Administration et sécurité des réseaux " de l'université Reims Champagne-Ardenne. Par une décision du 8 juin 2021, le président de cette université a rejeté la candidature de l'intéressé au motif que la qualité de son dossier a été jugée insuffisante pour suivre la formation sollicitée. M. C... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 8 juin 2021. Il relève appel du jugement n° 2101764 du 16 novembre 2021, qui rejette sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 719-7 du code de l'éducation : " Les décisions des présidents des universités et des présidents ou directeurs des autres établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ainsi que les délibérations des conseils entrent en vigueur sans approbation préalable, à l'exception des délibérations relatives aux emprunts, prises de participation et créations de filiales mentionnées à l'article L. 719-5 et sous réserve des dispositions du décret prévu à l'article L. 719-9. Toutefois, les décisions et délibérations qui présentent un caractère réglementaire n'entrent en vigueur qu'après leur transmission au recteur de région académique, chancelier des universités. " Aux termes de l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration : " L'entrée en vigueur d'un acte réglementaire est subordonnée à l'accomplissement de formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d'une publication ou d'un affichage, sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d'autres formalités préalables. / Un acte réglementaire entre en vigueur le lendemain du jour de l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa, sauf à ce qu'il en soit disposé autrement par la loi, par l'acte réglementaire lui-même ou par un autre règlement. Toutefois, l'entrée en vigueur de celles de ses dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures. "
3. Il résulte de ces dispositions que l'entrée en vigueur des actes à caractère réglementaire du conseil d'administration d'une université est subordonnée à l'accomplissement de formalités adéquates de publicité et à leur transmission au recteur de la région académique. En l'absence d'obligation, résultant d'un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française, de publier un acte réglementaire dans un recueil autre que le journal officiel, la publication dans un tel recueil n'est pas, en principe, de nature à fait courir le délai du recours contentieux. Il n'en va autrement que si le recueil dans lequel le texte est publié peut, eu égard à l'ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision. En particulier, en l'absence de dispositions prescrivant une formalité de publicité déterminée, les délibérations ayant un caractère réglementaire d'un établissement public sont opposables aux tiers à compter de la date de leur publication au bulletin officiel de cet établissement ou de celle de leur mise en ligne, dans des conditions garantissant sa fiabilité, sur le site internet de cette personne publique.
4. D'une part, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté que la délibération n° 56-2020 du conseil d'administration de l'université Reims Champagne-Ardenne du 1er décembre 2020, portant approbation des capacité d'accueil en master au titre de l'année universitaire 2021-2022, a été publiée le 7 décembre 2020 au recueil des actes administratifs de l'année 2020, lequel est directement accessible à partir de la page " Présentation " du site internet de l'université. Cette délibération est complétée en annexe par un tableau déterminant, pour chaque master proposé, la capacité d'accueil et les licences dont l'obtention est conseillée et par un document relatif à la campagne de sélection en première année de master, qui précise notamment les modalités de candidature et de sélection, ainsi que les dates d'inscription définitive. Dans ces conditions, alors qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que les conditions de leur mise en ligne sur le site internet de l'université n'étaient pas de nature à garantir la fiabilité de la publication, la délibération litigieuse et ses annexes, eu égard à l'ampleur et aux modalités de leur diffusion, doivent être regardées comme aisément consultables par les personnes intéressées et, notamment, par les étudiants extérieurs à l'université.
5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la délibération n° 56-2020 du 1er décembre 2020 porte la mention " extrait transmis au recteur, chancelier des universités : le 7 décembre 2020 ". Si M. C... conteste la réalité de cette transmission, ses allégations, qui ne sont assorties d'aucun élément circonstancié, ne sont pas de nature à remettre en cause une telle mention, laquelle fait foi jusqu'à preuve du contraire. Dans ces conditions et alors que l'université de Reims Champagne-Ardenne produit en défense deux courriels du 7 décembre 2020 faisant état de la transmission aux services du rectorat de la région académique Grand Est des délibérations adoptées par son conseil d'administration le 1er décembre 2020, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la délibération litigieuse n'aurait pas été transmise au recteur et qu'elle n'est par suite pas entrée en vigueur, par application des dispositions du premier alinéa de l'article L. 719-7 du code de l'éducation.
6. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision en litige du 8 juin 2021 se trouverait dépourvue de base légale à raison de l'inopposabilité aux tiers de la délibération n° 56-2020 du 1er décembre 2020 doit être écarté dans ses deux branches.
7. En second lieu, aux termes de l'article L. 712-1 du code de l'éducation : " Le président de l'université par ses décisions, le conseil d'administration par ses délibérations et le conseil académique, par ses délibérations et avis, assurent l'administration de l'université. ". Aux termes du quatrième paragraphe de l'article L. 712-3 du même code : " Le conseil d'administration détermine la politique de l'établissement. À ce titre : (...) 8° Il délibère sur toutes les questions que lui soumet le président (...). ". Aux termes de l'article L. 612-1 du même code : " Le déroulement des études supérieures est organisé en cycles. (...) Au cours de chaque cycle sont délivrés des diplômes nationaux ou des diplômes d'établissement sanctionnant les connaissances, les compétences ou les éléments de qualification professionnelle acquis. Les grades de licence, de master et de doctorat sont conférés respectivement dans le cadre du premier, du deuxième et du troisième cycle. / (...) ". Aux termes de l'article L. 612-6 du même code : " Les formations du deuxième cycle sont ouvertes aux titulaires des diplômes sanctionnant les études du premier cycle ainsi qu'à ceux qui peuvent bénéficier de l'article L. 613-5 ou des dérogations prévues par les textes réglementaires. / Les établissements peuvent fixer des capacités d'accueil pour l'accès à la première année du deuxième cycle. L'admission est alors subordonnée au succès à un concours ou à l'examen du dossier du candidat. / (...) / Les capacités d'accueil fixées par les établissements font l'objet d'un dialogue avec l'Etat. / (...) ". Aux termes de l'article D. 612-36-2 du même code : " Les établissements autorisés par l'Etat à délivrer le diplôme national de master peuvent organiser un processus de recrutement conformément aux dispositions de l'article L. 612-6. Les refus d'admission sont notifiés. Les motifs pour lesquels l'admission est refusée sont communiqués aux candidats qui en font la demande dans le mois qui suit la notification de ce refus. ".
8. Il résulte des dispositions précitées que, lorsqu'une université décide de limiter les capacités d'accueil pour l'accès à la première année du deuxième cycle, le deuxième alinéa de l'article L. 612-6 du code de l'éducation lui fait obligation d'organiser une sélection des candidats, soit par l'organisation d'un concours, soit par l'examen des dossiers de candidature. En revanche, alors que, en application de l'article D. 612-36-2 du même code, les motifs pour lesquels l'admission en master est refusée sont communiqués aux candidats qui en font la demande dans le mois suivant la notification de ce refus, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe, n'imposent au conseil d'administration qui aurait opté pour le second mode de sélection de définir les critères de sélection au regard desquels seront examinés ces dossiers. Dans ces conditions, en limitant à trente-deux étudiants la capacité d'accueil du master " Administration et sécurité des réseaux " et en précisant que l'admission " se fera sur dossier avec ou sans entretien d'admission selon les filières " et que ces modalités " pourront être adaptées selon leur spécificité (attente de contrat pro, alternance avant la réponse favorable définitive) ", le conseil d'administration de l'université de Reims Champagne-Ardenne n'a pas méconnu les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 612-6 du code de l'éducation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du président de l'Université de Reims Champagne-Ardenne du 8 juin 2021, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Sur les frais de justice :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'université de Reims Champagne-Ardenne, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. C... au titre des frais exposés par lui et non compris les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la défenderesse sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'université de Reims Champagne-Ardenne en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à l'université de Reims Champagne-Ardenne.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président de la chambre,
- M. Meisse, premier conseiller,
- M. Marchal, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juillet 2022.
Le rapporteur,
Signé : E. B...
Le président,
Signé : C. WURTZ
Le greffier,
Signé : F. LORRAIN
La République mande et ordonne à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier :
F. LORRAIN
N° 22NC00089 2