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21/07/2022 | FRANCE | N°21NC03084

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 juillet 2022, 21NC03084


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2021 C... lequel le préfet de l'Yonne l'a obligée à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros C... jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notifi

cation du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat le versemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 6 octobre 2021 C... lequel le préfet de l'Yonne l'a obligée à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros C... jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Mme A... a également demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2021 C... lequel le préfet de l'Yonne a prononcé son maintien en rétention administrative, d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile et de lui permettre de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la décision de la Cour nationale du droit d'asile et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

C... un jugement n° 2102902 et 2102964 du 29 octobre 2021, le tribunal administratif de Nancy a annulé les arrêtés du préfet de l'Yonne des 6 et 12 octobre 2021, a enjoint au préfet de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de lui délivrer immédiatement une attestation provisoire de séjour, a mis à la charge de l'Etat, sous réserve de l'admission définitive de Mme A... à l'aide juridictionnelle et sous réserve que Me Chaib, avocate de Mme A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, le versement à cette dernière, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, et, dans le cas où l'aide juridictionnelle ne serait pas accordée à Mme A... C... le bureau d'aide juridictionnelle, le versement à Mme A... de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de Mme A....

Procédure devant la cour :

C... une requête enregistrée sous le n° 21NC03084 le 30 novembre 2021, le préfet de l'Yonne, représenté C... Me Cano, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 29 octobre 2021 ;

2°) de rejeter les demandes présentées C... Mme A... devant le tribunal administratif de Nancy.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que la minorité de Mme A... était établie et qu'elle ne pouvait dès lors faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.

C... deux mémoires en défense, enregistrés les 8 et 19 juin 2022, Mme A..., représentée C... Me Chaib, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Yonne de réexaminer sa situation ;

3°) à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Elle fait valoir que les moyens soulevés C... le préfet de l'Yonne ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale C... une décision en date du 27 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 20 novembre 2019 pris en application de l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Goujon-Fischer premier conseiller,

- et les observations de Me Morel, pour le préfet de l'Yonne, ainsi que celles de Me Chaib, pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme. A..., ressortissante ivoirienne, est entrée en France, selon ses déclarations, au début de l'année 2021. S'étant déclarée mineure, elle a été prise en charge C... les services départementaux de l'Yonne, qui, après avoir procédé à l'évaluation de sa minorité et de son isolement, ont conclu qu'elle était majeure et ont refusé de poursuivre sa prise en charge. Le 6 octobre 2021, l'intéressée a été placée en garde à vue pour déclaration fausse ou incomplète d'identité pour obtenir d'une personne publique ou d'un organisme chargé d'une mission de service public une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu. C... un arrêté du 6 octobre 2021, le préfet de l'Yonne lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 611-1 et du 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. C... un second arrêté, du même jour, le préfet de l'Yonne a placé Mme A... au centre de rétention administrative de Metz. Ayant sollicité le bénéfice de l'asile le 11 octobre 2021, elle a fait l'objet, le 12 octobre suivant, d'une décision du préfet de l'Yonne la maintenant en rétention administrative le temps de l'examen de sa demande d'asile. C... un jugement du 29 octobre 2021, le tribunal administratif de Nancy a annulé les arrêtés du préfet de l'Yonne des 6 et 12 octobre 2021, a enjoint au préfet de réexaminer la situation de Mme A... dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement et de lui délivrer immédiatement une attestation provisoire de séjour et a mis une somme à la charge de l'Etat au titre des frais de l'instance. Le préfet de l'Yonne relève appel de ce jugement.

Sur le moyen d'annulation retenu C... le tribunal :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française. ". La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue C... tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation C... l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits C... les parties.

3. Il ressort des pièces du dossier que, pour justifier de son état civil, Mme A... a présenté un acte de naissance établi C... les services de l'état civil de la commune de Bouaké le 20 septembre 2021 au nom de Mme D... A..., née le 28 décembre 2005 à Dièzou en République de Côte d'Ivoire. Le préfet de l'Yonne se prévaut à cet égard d'un rapport établi le 19 novembre 2021 C... un officier de police judiciaire spécialement formé à la fraude documentaire du groupement de gendarmerie nationale de l'Yonne, selon lequel, à la différence de l'extrait d'acte de naissance de la commune de Marcory enregistré dans la base de données IFAPO, l'acte de naissance produit C... Mme A... ne comporte pas de fond d'impression visible, alors même que les tampons et le timbre apparaissent en couleur, et n'utilise pas la technique d'impression professionnelle Offset, mais une technique s'apparentant à de la xérographie ou à une impression C... jet d'encre. Au vu de ces éléments, ce rapport conclut que l'acte de naissance produit constitue une contrefaçon. Ces éléments, de nature, à remettre en cause la valeur probante du document produit, et non contredits C... l'existence d'usages différents parmi les services d'état civil des communes de la République de Côte d'Ivoire, sont C... ailleurs confortés, d'une part, C... l'évaluation effectuée C... les services du département de l'Yonne, qui ont estimé que l'intéressée était majeure et dont aucun élément ne permet d'affirmer, comme le suggère Mme A..., qu'elle n'aurait pas été conduite dans les conditions de formation, d'expérience et de pluridisciplinarité des professionnels en charge de procéder à cette évaluation, telles qu'exigées C... l'article R. 221-11 du code de l'action sociale et des familles et C... l'arrêté du 20 novembre 2019 pris en application de cet article, et, d'autre part, C... l'indication non contredite que Mme A... utilise depuis plusieurs années les réseaux sociaux en s'y présentant d'ailleurs désormais comme majeure. Au demeurant, l'intéressée, entrée en France selon ses déclarations, au début de l'année 2021 et prise en charge temporairement C... les services du département de l'Yonne, n'apporte aucune explication sérieuse et crédible sur la manière dont elle aurait sollicité et obtenu des services de l'état civil de la commune de Bouaké le 20 septembre 2021, l'acte de naissance qu'elle a produit auprès des services du préfet. Au regard de l'ensemble de ces éléments, il doit être regardé comme établi qu'à la date de son arrêté, Mme A... était majeure.

4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Yonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, C... le jugement attaqué, le tribunal a retenu le moyen tiré de la méconnaissance du 1° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige C... l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés C... Mme A... tant devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens soulevés C... Mme A... :

En ce qui concerne l'arrêté du 6 octobre 2019 en son entier :

6. En premier lieu, l'arrêté du préfet de l'Yonne du 6 octobre 2021 faisant obligation à Mme A... de quitter le territoire français, fixant son pays de renvoi et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français, est signé, pour le préfet, C... Mme Dominique Yani, secrétaire générale, à qui le préfet avait donné délégation C... un arrêté n° PREF/SAPPIE/BCAAT/2021/0095 du 5 mai 2021, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Yonne, à l'effet de signer tous arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de la réquisition du comptable public et des arrêtés de conflit. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté manque en fait.

7. En deuxième lieu, cet arrêté énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et satisfait dès lors à l'obligation de motivation.

8. En troisième lieu, la circonstance, à la supposer établie, que les décisions de cet arrêté n'auraient pas été notifiées à Mme A... dans une langue qu'elle comprend est sans incidence sur leur légalité.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 3 du présent arrêt, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'en la regardant comme majeure, le préfet aurait commis une erreur de fait ou d'appréciation. Mme A... étant majeure à la date de l'arrêté du préfet, elle ne soutient pas utilement que cet arrêté méconnaissait l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

10. En deuxième lieu, il ne ressort ni du procès-verbal d'audition, établi C... les services de la gendarmerie nationale le 6 octobre 2019, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, ni d'aucune autre pièce du dossier que Mme A... aurait exprimé son souhait de présenter une demande d'asile avant l'édiction de l'arrêté du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français. Ainsi, et en tout état de cause, elle n'est pas fondée à soutenir que cette mesure d'éloignement aurait été illégale faute de délivrance d'une attestation de demande d'asile ou au regard du principe de non-refoulement énoncé au paragraphe 1 de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951.

11. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A..., entrée en France en 2021, est célibataire et sans enfant et n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine. Eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressée, la décision l'obligeant à quitter le territoire français ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne le refus d'un départ volontaire :

12. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " C... dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". L'article L. 612-3 de ce code précise que " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / 1° L'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) 8° L'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité (...) ".

13. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui est entrée en France irrégulièrement, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et n'a pu présenter de document d'identité ou de voyage en cours de validité, entre dans les cas où, en application des dispositions rappelées ci-dessus, le préfet pouvait regarder comme établi le risque de soustraction à la mesure d'éloignement et refuser à l'intéressée le bénéfice d'un délai de départ volontaire. Mme A... ne justifie pas de circonstances particulières de nature à écarter l'existence de ce risque.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

14. En premier lieu, la décision faisant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir de cette illégalité C... la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

15. En second lieu, si Mme A... soutient qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à un risque de subir un mariage forcé, elle n'apporte aucun élément précis, ni probant de nature à établir le bien-fondé de cette crainte. Elle n'est C... suite pas fondée à soutenir que la décision fixant son pays de renvoi l'exposerait à des traitements inhumains ou dégradants prohibés C... l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

16. En premier lieu, la décision faisant obligation de quitter le territoire français n'étant pas illégale, Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir de cette illégalité C... la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français.

17. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour (...) ".

18. Pour soutenir que le préfet de l'Yonne aurait commis une erreur dans son appréciation des circonstances humanitaires susceptible de justifier qu'il n'édicte pas d'interdiction de retour, Mme A... se borne à faire à nouveau valoir sa qualité de mineure, alors qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'elle doit être regardée comme ayant été majeure. Le moyen invoqué ne peut dès lors qu'être écarté. En fixant à un an la durée de cette interdiction de retour, le préfet n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, fait une inexacte appréciation des faits de l'espèce.

En ce qui concerne la décision du 12 octobre 2021 portant maintien de Mme A... en rétention administrative :

19. En premier lieu, l'arrêté du préfet de l'Yonne du 12 octobre 2021 portant maintien de Mme A... en rétention administrative est signé, pour le préfet, C... Mme Dominique Yani, secrétaire générale, à qui le préfet avait donné délégation C... un arrêté n° PREF/SAPPIE/BCAAT/2021/0095 du 5 mai 2021, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Yonne, à l'effet de signer tous arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de la réquisition du comptable public et des arrêtés de conflit. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cet arrêté manque en fait.

20. En deuxième lieu, cet arrêté énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et satisfait dès lors à l'obligation de motivation.

21. Aux termes de l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Si la France est l'État responsable de l'examen de la demande d'asile et si l'autorité administrative estime, sur le fondement de critères objectifs, que cette demande est présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution de la décision d'éloignement, elle peut prendre une décision de maintien en rétention de l'étranger pendant le temps strictement nécessaire à l'examen de sa demande d'asile C... l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, en cas de décision de rejet ou d'irrecevabilité de celle-ci, dans l'attente de son départ. / Cette décision de maintien en rétention n'affecte ni le contrôle ni la compétence du juge des libertés et de la détention exercé sur le placement et le maintien en rétention en application du chapitre III du titre IV. La décision de maintien en rétention est écrite et motivée. / A défaut d'une telle décision, il est immédiatement mis fin à la rétention et l'autorité administrative compétente délivre à l'intéressé l'attestation mentionnée à l'article L. 521-7 ".

22. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui n'a pas sollicité le bénéfice du statut de réfugiée depuis son entrée en France, ni fait état de craintes de persécution ou de menaces graves dans son pays d'origine, notamment au cours de son audition C... les services de police, n'a déposé sa demande d'asile qu'au bout de cinq jours de placement en rétention administrative, à la suite de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention. Dans ces circonstances, le préfet a pu, sans faire une inexacte application des dispositions l'article L. 754-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, citées au point précédent, estimer que sa demande d'asile était présentée dans le seul but de faire échec à l'exécution d'une décision d'éloignement.

23. Le maintien en rétention administrative de Mme A... n'étant pas fondé sur l'absence de garanties de représentation, le moyen tiré de ce qu'elle disposait de telles garanties ne peut qu'être écarté comme inopérant.

24. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Yonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, C... le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé les arrêtés du préfet de l'Yonne des 6 et 12 octobre 2021, lui a enjoint de réexaminer la situation de Mme A... et de lui délivrer immédiatement une attestation provisoire de séjour et mis une somme à la charge de l'Etat au titre des frais de l'instance.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

25. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. C... suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées C... Mme A....

Sur les frais liés à l'instance :

26. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

27. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 29 octobre 2021 est annulé.

Article 2 : La demande présentée C... Mme A... devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des Outre-mer et à Mme B....

Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- M. Rees, président-assesseur,

- M. Goujon-Fischer, premier conseiller.

Rendu public C... mise à disposition au greffe, le 21 juillet 2022.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. Goujon-FischerLa présidente,

Signé : S. Vidal

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 21NC03084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC03084
Date de la décision : 21/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-21;21nc03084 ?
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