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21/07/2022 | FRANCE | N°21NC02830

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 juillet 2022, 21NC02830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 février 2021 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prolongé d'un an l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 23 avril 2019.

Par un jugement n° 2102054 du 7 mai 2021, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Strasbou

rg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 février 2021 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prolongé d'un an l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 23 avril 2019.

Par un jugement n° 2102054 du 7 mai 2021, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 octobre 2021, M. C..., représenté par Me Dollé demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 7 mai 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 février 2021 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prolongé d'un an l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 23 avril 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative, au besoin sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- l'avis du collège des médecins de l'OFII est irrégulier en ce qu'il existe un doute sur l'authentification des signatures électroniques de ses membres ;

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 313-11-11°du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne peut pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision méconnait les dispositions de l'article L. 511-4-10°du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Sur le pays de destination :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2022, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 18 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Barrois, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., de nationalité bosnienne, est entré une seconde fois sur le territoire français le 15 janvier 2016 selon ses déclarations, accompagné de sa femme et de ses deux enfants, afin d'y solliciter à nouveau la reconnaissance du statut de réfugié. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) des 7 juillet 2016 et 5 juillet 2018, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 2 janvier 2017 et le 24 juillet 2018. Sa demande de réexamen a également été rejetée le 13 mars 2019 par la cour nationale du droit d'asile. Sa demande de titre de séjour pour raisons de santé a également été rejetée par un arrêté du 10 octobre 2018, confirmé en dernier lieu par une ordonnance de la cour administrative d'appel de Nancy du 9 septembre 2020. Il a ensuite été assigné à résidence avec interdiction de retour et les termes de l'arrêté du 10 octobre 2018 lui ont été confirmés par une nouvelle décision du préfet du 11 septembre 2019. Le 12 juin 2020, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. A la suite d'un avis du collège des médecins de l'OFII du 22 octobre 2020, le préfet de la Moselle, par un arrêté du 17 février 2021, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a prolongé l'interdiction de retour et l'a signalé dans le système d'information Schengen. Par la présente requête, M. C... fait appel du jugement du 7 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Les décisions de l'administration peuvent faire l'objet d'une signature électronique. Celle-ci n'est valablement apposée que par l'usage d'un procédé, conforme aux règles du référentiel général de sécurité mentionné au I de l'article 9 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, qui permette l'identification du signataire, garantisse le lien de la signature avec la décision à laquelle elle s'attache et assure l'intégrité de cette décision ".

3. Si M. C... soutient que l'avis rendu par les membres du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 22 octobre 2020 n'est pas régulièrement signé dès lors qu'il n'est pas démontré que les signatures électroniques figurant sur cet avis auraient été apposées de manière régulière et suivant un processus d'authentification, l'avis de ce collège de médecins, qui ne constitue pas une décision administrative, au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 213-3 du code des relations entre le public et l'administration, n'a pas à satisfaire aux exigences posées par ces dispositions. En tout état de cause, aucun élément du dossier ne permet de supposer que les signatures apposées au bas de l'avis litigieux ne seraient pas celles des trois médecins composant le collège de médecins de l'OFII, dont l'identité est précisée. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

5. Par un avis du 22 octobre 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité celui-ci pouvait en revanche bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dès lors qu'aucun des documents produits ne permet de remettre en cause l'appréciation du collège de médecins selon laquelle l'intéressé pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le préfet de Moselle n'a pas fait une application inexacte du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français qui fait apparaître les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut pas être accueilli.

7. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, il y a lieu d'écarter les moyens tirés, d'une part, de ce que M. C... pouvait, au regard de son état de santé, se prévaloir contre une mesure d'éloignement des dispositions protectrices du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, de ce qu'en l'absence d'accès effectif à un traitement approprié dans le pays d'origine du requérant, la décision fixant le pays de renvoi méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

9. La circonstance que les deux enfants de M. C..., âgés de quinze et cinq ans,à la date de l'arrêté attaqué, soient scolarisés en France et que l'un d'entre eux y soit né, ne suffisent pas à établir, alors que les décisions litigieuses n'ont pas pour effet de séparer la cellule familiale et qu'il n'est fait état d'aucun élément qui serait de nature à faire obstacle à la poursuite de la scolarité des enfants hors D..., qu'en prenant la décision attaquée le préfet aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur des enfants du requérant. Par suite, le moyen doit être écarté.

10. En sixième lieu, la décision prolongeant d'un an son interdiction de retour sur le territoire français qui fait apparaître les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut pas être accueilli.

11. En dernier lieu, si le requérant soutient que cette décision méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ressort des pièces du dossier que sa femme a fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et que la cellule familiale peut se reconstituer dans son pays d'origine. Par suite, ce moyen doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vidal, présidente de chambre,

- M. Rees, président-assesseur,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé : M. B...La présidente,

Signé : S. Vidal

La greffière,

Signé : S. RobinetLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 21NC02830


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02830
Date de la décision : 21/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Marion BARROIS
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-21;21nc02830 ?
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