La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/07/2022 | FRANCE | N°21NC03174

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 13 juillet 2022, 21NC03174


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société ... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a rejeté sa demande d'aide à l'investissement pour un montant de 21 896 euros.

Par un jugement n° 1600659 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18NC01363 du 27 juin 2019, la cour administra

tive d'appel de Nancy a, sur l'appel de la société ..., annulé ce jugement et la décision...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société ... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 9 octobre 2015 par laquelle le directeur général de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) a rejeté sa demande d'aide à l'investissement pour un montant de 21 896 euros.

Par un jugement n° 1600659 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 18NC01363 du 27 juin 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur l'appel de la société ..., annulé ce jugement et la décision du directeur général de FranceAgriMer du 9 octobre 2015.

Par une décision du 9 décembre 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté pour l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 juin 2019 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 mai 2018 et 19 février 2019, la société ..., représentée par Me Chemla, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 5 mars 2018 ;

2°) d'annuler la décision du directeur général de FranceAgriMer du 9 octobre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de FranceAgriMer le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société ... soutient que :

- la décision du 9 octobre 2015, qui retire une précédente décision lui octroyant la subvention sollicitée, a été adoptée sans qu'elle ait été mise en mesure de faire valoir ses observations en méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le directeur général de FranceAgriMer n'est pas compétent pour subordonner l'attribution des aides à des conditions venant s'ajouter à celles limitativement prévues par les dispositions législatives ou règlementaires ;

- FranceAgriMer a commis une erreur de droit en considérant que la signature d'un devis valait commencement des travaux.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 septembre 2018 et 6 mars 2019, l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la société ... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

FranceAgriMer soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 25 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 1er juin 2022 à 12h00.

Un mémoire présenté pour la SAS ... a été enregistré le 24 juin 2022, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil du 29 avril 2008 portant organisation commune du marché vitivinicole ;

- le règlement n° 555/2008 de la Commission du 27 juin 2008 relatif aux modalités de mise en œuvre des mesures retenues au titre du plan national d'aide au secteur vitivinicole financé par les enveloppes nationales définies par le règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil de l'Union européenne du 29 avril 2008 ;

- le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles et abrogeant les règlements (CEE) n° 922/72, (CEE) n° 1037/2001 et (CE) n° 1234/2007 du Conseil ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le décret n° 2013-172 du 25 février 2013 ;

- la décision du directeur général de FranceAgriMer FILITL/SEM/D 2013-76 du 4 décembre 2013 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Gohgoalet, représentant FranceAgriMer.

Considérant ce qui suit :

1. Le 6 janvier 2014, la société par actions simplifiées (SAS) ..., producteur récoltant de champagne, a déposé une demande d'aide pour l'acquisition de matériels auprès de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) notamment chargé de la mise en œuvre du programme adopté par la France en application de l'article 7 du règlement (CE) n° 479/2008 du Conseil de l'Union européenne du 29 avril 2008 portant organisation commune du marché vitivinicole auquel a succédé le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles. En application de l'article 5 de la décision du directeur général de FranceAgriMer FILITL/SEMD 2013-76 du 4 décembre 2013, qui précise les modalités d'examen des demandes d'aide, FranceAgriMer, par un courrier du 20 janvier 2014, a accusé réception de la demande de la société et autorisé celle-ci à commencer les travaux à compter du 6 janvier 2014. Par un courrier de notification du 25 août 2014 accompagné d'une décision d'octroi de l'aide, elle lui a ensuite notifié une décision d'éligibilité pour un montant de 20 230 euros, correspondant à 57 800 euros de dépenses éligibles. Par un courrier du 9 octobre 2015, FranceAgriMer, après avoir procédé à l'instruction du dossier de demande de paiement de la société, a toutefois informé celle-ci du rejet de sa demande de versement de l'aide, faute d'avoir respecté l'ensemble des conditions d'éligibilité prévues. Par un jugement du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande de la société tendant à l'annulation de cette décision de refus de paiement. Par un arrêt n° 18NC01363 du 27 juin 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a, sur l'appel de la société SAS ..., annulé ce jugement et la décision du directeur général de FranceAgriMer du 9 octobre 2015. Par une décision du 9 décembre 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté pour FranceAgriMer, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 juin 2019 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dans sa rédaction alors en vigueur : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à 1'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. "

3. D'une part, la décision du 25 août 2014 par laquelle FranceAgriMer a octroyé à la société ... une aide d'un montant de 20 230 euros constituait une décision créatrice de droits, quand bien même ces droits étaient subordonnés au respect de diverses conditions et à la présentation, dans un délai de deux mois après la date limite de réalisation des travaux, d'une demande de paiement assortie des justificatifs permettant de vérifier ce respect. La décision du 9 octobre 2015 par laquelle FranceAgriMer a refusé de verser cette aide à la société ..., qui était motivée par le constat, ressortant des justificatifs produits par la société à l'appui de sa demande de paiement de l'aide, que la condition concernant la date de commencement autorisé des travaux n'avait pas été respectée, se bornait à exécuter cette décision d'octroi en tirant les conséquences du non-respect des conditions posées par cette dernière et n'en constituait donc pas le retrait.

4. D'autre part, compte tenu des droits créés par la décision d'octroi de l'aide,

cette décision de refus de versement doit être regardée comme refusant un avantage dont

l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour

l'obtenir, et devait, à ce titre, en application des dispositions de l'article 1er de la loi du 11 juillet

1979, être motivée. Toutefois, dès lors que cette décision faisait suite à une demande de la

société tendant au versement de l'aide octroyée, après examen des justificatifs à fournir à l'appui

de cette demande, elle n'était pas au nombre des décisions soumises par les dispositions précitées

de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 à la procédure contradictoire qu'elles instituent.

5. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la décision contestée du 9 octobre 2015

de FranceAgriMer rejetant la demande de versement de l'aide constitue le retrait d'une décision

créatrice de droits d'une part, et qu'elle serait intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière

faute d'avoir fait l'objet d'une procédure contradictoire d'autre part, doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 15 relatif aux investissements du règlement (CE) n° 479/2008 du 29 avril 2008 : " 1. Un soutien peut être accordé pour des investissements matériels ou immatériels dans les installations de transformation, l'infrastructure de vinification, la commercialisation du vin qui améliore les performances globales de l'entreprise et concernent un ou plusieurs des points suivants : a) la production ou la commercialisation des produits visés à l'annexe IV (...) ". Le règlement (CE) n° 555/2008 du 27 juin 2008 pris pour son application, prévoit en son article 17 que " sont admissibles les dépenses relatives : a) à la construction, à l'acquisition, y compris par voie de crédit-bail, et à la rénovation de biens immeubles ; b) à l'achat ou à la location vente de matériels et d'équipements neufs (...) ". Aux termes de l'article D. 621-27 du code rural dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'exécution des missions d'organisme payeur, le directeur général prend, si nécessaire, les décisions visant à préciser les conditions de gestion et d'attribution des aides instaurées par les règlements communautaires, après avis du conseil spécialisé intéressé ou du conseil d'administration. " Aux termes de l'article 2 du décret 2009-178 du 16 février 2009 : " Des arrêtés conjoints des ministres chargés de l'agriculture et du budget précisent les conditions et les modalités d'attribution des aides mentionnés aux articles (...) 15 (...) du règlement (CE) n° 479/2008 (...) Toutefois, sont précisées par décision du directeur général de l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer) les conditions et modalités d'attribution : - des aides aux investissements, lorsque la demande a été déposée à compter du 1er janvier 2013 ; (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 2013-172 du 25 février 2013 relatif au programme d'aide national au secteur vitivinicole pour les exercices financiers 2014 à 2018 : " Le programme d'aide national au secteur vitivinicole mentionné à l'article 103 decies du règlement (CE) n° 1234/2007 du Conseil du 22 octobre 2007 susvisé et rendu applicable dans les conditions prévues à l'article 103 duodecies de ce règlement et à l'article 2 du règlement (CE) n° 555/2008 de la Commission du 27 juin 2008 susvisé pour les exercices financiers 2014 à 2018 est mis en œuvre par l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgriMer). / A ce titre, sous réserve de l'article 2, le directeur général de l'établissement détermine notamment, après avis du conseil spécialisé intéressé :/ 1° Les modalités de demande des aides, les conditions d'éligibilité aux aides, la procédure et les critères de sélection des demandes, le montant des aides attribuables et leurs modalités de paiement ; ". Aux termes de l'article 2 de ce même décret : " Pour l'aide à la promotion et l'aide à l'investissement, peuvent seules relever du programme mentionné à l'article 1er les demandes déposées à compter du 16 octobre 2013. (...) ". Aux termes de l'article 3 de la décision du directeur général de FranceAgriMer FILITL/SEM/D 2013-76 du 4 décembre 2013 portant mise en œuvre par FranceAgriMer d'une aide aux programmes d'investissement des entreprises dans le cadre de l'OCM vitivinicole pour les exercices financiers 2014 à 2018 : " Le bénéficiaire s'engage : - À ce que le projet pour lequel la subvention est sollicitée ne reçoive aucun

commencement d'exécution (signature de bon de commande, approbation de

devis, ordre de service, acompte...) et de réalisation des travaux avant la

réception d'un accusé réception de la demande d'aide autorisant le démarrage des

travaux (cf. article 5.2) ". Aux termes de l'article 5.2 de cette même décision : " Après examen de la demande, sous réserve que l'enveloppe ne soit pas épuisée, une décision relative à son éligibilité de principe sous réserve de vérifications plus détaillées est notifiée au bénéficiaire, sans engagement financier de l'établissement. Cette décision autorise le démarrage des travaux à compter de la date de réception de la demande (statut " enregistré ", cf. point 5.1.1). (...) La demande doit impérativement bénéficier d'une autorisation de démarrage des travaux, dont la date est mentionnée dans l'accusé de réception, avant tout début d'exécution du projet, c'est-à-dire avant toute exécution matérielle du projet et avant le premier acte juridique passé pour la réalisation du projet (soit avant tout devis dont la date d'acceptation (signature) est antérieure à la date d'ACT, avant tout bon de commande, avant tout paiement même partiel...). Les éventuelles études préalables nécessaires à la réalisation de ces travaux (études de sol, d'architectes...) ne sont toutefois pas concernés par cette disposition. En cas de démarrage des travaux pour un poste donné avant la date autorisée l'intégralité de la tranche fonctionnelle concernée est considérée comme non éligible à l'aide. (...) ".

7. Pour remettre en cause l'aide à l'investissement accordée à la SAS ... par accusé-réception du 20 janvier 2014, le directeur général de FranceAgriMer, par la décision attaquée du 9 octobre 2015, a considéré que la signature de deux devis, les 26 octobre et 3 novembre 2013, avec la mention " bon pour accord ", devait être regardée comme un commencement de travaux antérieur à la date d'autorisation de commencer les travaux, fixée au 6 janvier 2014. La SAS ... soutient que le directeur de FranceAgriMer ne pouvait légalement ajouter, dans sa décision FILITL/SEM/D 2013-76 du 4 décembre 2013, une condition en assimilant la signature d'un devis à un commencement d'exécution et qu'il a ainsi outrepassé sa compétence.

8. Il résulte des dispositions combinées précitées de l'article D. 621-27 du code rural et du décret n° 2013-172 du 25 février 2013, applicable aux demandes déposées à compter du 16 octobre 2013, que le pouvoir réglementaire a désigné FranceAgriMer comme organisme payeur de dépenses financées par les fonds de financement des dépenses agricoles, dont le fonds européen agricole de garantie (FEAGA), et lui a confié la mise en œuvre du programme d'aides national. En outre, l'article 1er du décret n° 2013-172 du 25 février 2013 habilite le directeur général de FranceAgriMer pour édicter, après avis du conseil spécialisé intéressé, les modalités de demande des aides, les conditions d'éligibilité aux aides, la procédure et les critères de sélection des demandes, le montant des aides attribuables et leurs modalités de paiement. Par suite, en prévoyant dans sa décision FILITL/SEM/D 2013-76 du 4 décembre 2013 que l'approbation d'un devis constituait un commencement d'exécution d'un projet pour lequel la subvention était demandée par une entreprise du secteur vitivinicole, le directeur de l'établissement FranceAgriMer s'est borné à édicter les conditions d'éligibilité des aides nationales, après avis du conseil spécialisé filière viticole du 13 novembre 2013. Il s'ensuit que le directeur général de FranceAgriMer n'a pas excédé l'habilitation qui lui a été donnée par le pouvoir réglementaire. Par conséquent, le moyen tiré de ce que le directeur de FranceAgriMer aurait outrepassé sa compétence doit être écarté.

9. En troisième lieu, il ne résulte d'aucune disposition des règlements européens mentionnés au point 6, ni d'aucune autre disposition du droit de l'Union européenne ayant effet direct et applicable aux aides en cause que le bénéfice de ces aides serait subordonné à l'absence de tout commencement d'exécution du projet à la date de la demande. Aucune disposition du droit de l'Union ne faisait cependant obstacle à ce qu'une disposition en ce sens soit prise par les autorités françaises pour assurer l'application de ces règlements, dans le respect des règles de répartition des compétences applicables en droit interne. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que les règlements européens ne donneraient pas compétence au directeur de FranceAgriMer pour fixer les conditions d'attribution des aides en cause doit être écarté.

10. En quatrième lieu, la société requérante soutient que l'autorisation de commencer les travaux étant rétroactive au jour de la demande de l'aide en cause, la condition ayant pour objet de ne pas signer de devis antérieurement à la date de commencement des travaux ne permet pas de s'assurer que l'investissement a été entrepris grâce à cette aide dès lors que les travaux peuvent être réalisés avant même l'attribution définitive de l'aide. Toutefois, ces considérations, qui tendent à contester l'opportunité de la condition d'éligibilité qui a été opposée à la SAS ..., sont ici sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

11. En cinquième lieu, la SAS ... se prévaut de deux devis signés par son président les 14 et 17 janvier 2014, et portant la mention " Bon pour accord ", qui sont postérieurs à la date d'autorisation de commencer les travaux du 6 janvier 2014, fixée par FranceAgriMer. La société soutient que seuls ces devis ont été communiqués aux entreprises devant exécuter les travaux bénéficiant de l'aide en cause, ce qui n'a pas été le cas pour les devis précédemment signés les 26 octobre 2013 et 3 novembre 2013. La SAS considère ainsi qu'elle a respecté la condition tenant à l'absence de tout engagement juridique des travaux avant la date de commencement des travaux fixée par FranceAgriMer.

12. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le devis du 20 décembre 2013, signé le 14 janvier 2014, concernant l'achat d'une étiqueteuse adhésive automatique pour un montant de 24 470 euros hors taxe, porte sur une prestation identique à celle proposée par le devis du 24 octobre 2013, précédemment signé le 26 octobre 2013 et portant également la mention " bon pour accord ", pour un montant de 23 890 euros hors taxes. S'agissant du devis signé le 17 janvier 2014 pour l'installation d'une thermorégulation de la cuverie à champagne pour un montant de 33 330 euros hors taxe, hors option, il est daté du 28 octobre 2013 et porte la même référence que le premier devis signé par la SAS le 3 novembre 2013. Ce devis du 3 novembre a été également établi le 28 octobre 2013, et fixe à 27 250 euros hors taxe et hors option le coût de la mise en place d'un système de thermorégulation, identique à celui du second devis signé le 17 janvier 2014. En outre, la société fournissant et installant cette thermorégulation a signé les deux devis. Par conséquent, contrairement à ce que soutient la société requérante, son fournisseur a bien été destinataire du premier devis qu'elle a signé avec la mention " Bon pour accord " le 3 novembre 2013. La SAS Brocard n'apporte aucun élément justifiant des circonstances ayant conduit à la signature de ces seconds devis, portant sur des prestations identiques en dépit de l'augmentation de tarif. Par suite, elle n'établit pas qu'elle n'aurait pas accepté les conditions matérielles et financières des travaux sollicités dès la signature des premiers devis les 28 octobre et 3 novembre 2013. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la signature des devis ne vaudrait pas commencement d'exécution du projet pour lequel une aide a été sollicitée seulement lorsque ces devis sont parvenus à l'entreprise prestataire. FranceAgriMer a pu dès lors légalement admettre que les devis signés les 26 octobre et 3 novembre 2013 devaient être regardés comme un commencement de travaux antérieur à la date d'autorisation de commencer les travaux, fixée au 6 janvier 2014 et qu'ils faisaient dès lors obstacle au versement effectif de l'aide.

13. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que c'est à bon droit que le directeur de l'établissement a estimé que la signature des devis constituait un engagement juridique valant commencement des travaux réalisé avant la date d'autorisation de commencer les travaux du 6 janvier 2014. Par suite, la circonstance, à la supposer établie, que les travaux n'aient physiquement débuté que le 17 mars 2014, postérieurement à cette date du 6 janvier 2014, fixée par FranceAgriMer, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS ... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les frais de justice :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'établissement France-AgriMer, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la SAS ... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS ... le versement d'une somme de 1 500 euros à FranceAgriMer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de La SAS ... est rejetée.

Article 2 : La société SAS ... versera à FranceAgriMer la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS ... et à FranceAgriMer.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2022, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Lambing, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2022.

La rapporteure,

Signé : S. A... Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 21NC03174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC03174
Date de la décision : 13/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SEBAN ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-07-13;21nc03174 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award