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02/06/2022 | FRANCE | N°21NC02816

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 02 juin 2022, 21NC02816


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 24 mars 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101618 du 28 septembre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 octo

bre 2021, M. C... B..., représenté par Me Gervais, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 24 mars 2021 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101618 du 28 septembre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 octobre 2021, M. C... B..., représenté par Me Gervais, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 septembre 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 24 mars 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- il n'a pas été précédé d'un examen approfondi de sa situation personnelle ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur de fait ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né en 1954 et de nationalité arménienne, est entré régulièrement en France le 13 novembre 2016 sous couvert d'un visa court séjour délivré par les autorités tchèques. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. A la suite d'un arrêté portant remise aux autorités tchèques du 23 mars 2017, l'intéressé a renoncé à sa demande de protection. Le 12 juillet 2017, M. B... a déposé une demande de titre de séjour pour raisons de santé. Par un arrêté du 21 février 2018, le préfet de la Marne a refusé de l'admettre au séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par des jugements des 17 juillet 2018 et 14 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cet arrêté du 21 février 2018 et enjoint au préfet de réexaminer la demande de M. B.... Par un courrier du 20 janvier 2020, l'intéressé a sollicité le réexamen de sa situation et a obtenu, à la suite d'un avis favorable du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 1er avril 2020, une autorisation provisoire de séjour d'une durée de neuf mois afin de poursuivre des soins en France. Le 12 mars 2021, M. B... a demandé le renouvellement de son droit au séjour. Par un arrêté du 24 mars 2021, le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 28 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 24 mars 2021.

2. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux ni critiquer utilement les motifs de rejet qui lui ont été opposés en première instance, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier dont serait entaché l'arrêté attaqué. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre d'un adénocarcinome lieberkuhnien colique diagnostiqué et opéré en 2018, avec colostomie transverse gauche terminale définitive en octobre 2019. Il est également atteint d'une cirrhose virale B qui a nécessité la pose d'un TIPS (transjugular intrahepatic portosystemic shunt) en mars 2019, ainsi que d'un diabète diagnostiqué en décembre 2020. Par un avis émis le 5 mai 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que, si l'état de santé de M. B... nécessite un traitement médical dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut néanmoins bénéficier, dans le pays dont il est originaire, d'un traitement médical approprié à son état de santé.

4. Pour justifier que le préfet aurait commis une erreur de fait dans l'appréciation de sa situation, le requérant se prévaut de plusieurs certificats médicaux qui précisent qu'une surveillance régulière clinique, biologique et par imagerie est nécessaire concernant l'ensemble de ses pathologies. Sa charge virale B est devenue indétectable en février 2020 en raison de la prise d'un traitement adapté dont il n'est pas établi qu'il ne serait pas disponible en Arménie. S'agissant des suites de la colostomie terminale gauche, le certificat médical du service de chirurgie digestive du centre hospitalier universitaire de Reims du 1er avril 2021 indique que les suites sont bonnes en dépit de l'impossibilité de rétablissement de la continuité colorectale. M. B... a démarré, en outre, un traitement par insuline début 2021, qui a permis de réduire ses épisodes d'encéphalopathie hépatique. Si l'ensemble des éléments médicaux produits par le requérant atteste de la gravité de son état de santé, aucun n'indique que l'intéressé ne pourrait pas bénéficier d'un suivi médical adapté dans son pays d'origine et d'un traitement médicamenteux approprié. Les certificats médicaux des 23 avril, 18 juin et 8 octobre 2021, qui font état de l'apparition de nouveaux polypes sur le colon, au demeurant sans gravité, sont postérieurs à la décision attaquée et ne peuvent par suite être utilement invoqués par le requérant. En outre, le requérant n'apporte aucun élément démontrant qu'il ne disposerait pas de capacité financière afin d'accéder effectivement aux soins nécessaires. S'il évoque des difficultés de déplacement en raison de ses pathologies, notamment de son diabète récemment diagnostiqué, il ne ressort cependant pas des éléments médicaux qu'il produit qu'il ne peut voyager sans risque. Enfin, M. B... produit des certificats médicaux du service de cancérologie digestive et du service de chirurgie digestive du centre hospitalier universitaire de Reims des 20 novembre et 3 décembre 2020, et 24 septembre 2021, qui indiquent que la présence de son épouse est indispensable au côté du requérant, cette dernière réalisant notamment les prises journalières de glycémies. Cependant, le préfet mentionne dans la décision attaquée, sans être contesté, que sa compagne ne bénéficie d'aucun droit au séjour en France. L'épouse du requérant a ainsi vocation à retourner également dans son pays d'origine. Dans ces conditions, les éléments produits par M. B... ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par le préfet au vu de l'avis émis le 5 mai 2021 par le collège des médecins de l'OFII. Le préfet n'a, par suite, pas entaché sa décision d'erreurs de fait.

5. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. B... se prévaut de ses cinq années de présence en France et soutient qu'il n'a plus de famille en Arménie. Toutefois, M. B... ne justifie pas d'une intégration particulière en France. Par ailleurs, eu égard à ce qui a été dit au point précédent, son état de santé ne fait pas obstacle à un retour dans son pays d'origine. Il pourra y reconstituer sa cellule familiale avec son épouse qui est en situation irrégulière en France. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, les décisions contestées ne sont pas entachées d'erreur de fait dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Samson-Dye, présidente,

Mme Mosser, première conseillère,

Mme Lambing, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.

La rapporteure,

Signé : S. A...

La présidente,

Signé : A. SAMSON-DYE

La greffière,

Signé : S. BLAISE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 21NC02816


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02816
Date de la décision : 02/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : GERVAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-06-02;21nc02816 ?
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