La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2022 | FRANCE | N°21NC02318

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 03 mai 2022, 21NC02318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2103622 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 13 août 2021 so

us le n° 21NC02317, M. D... A..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 mars 2021 par lequel la préfète du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2103622 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 13 août 2021 sous le n° 21NC02317, M. D... A..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 26 mars 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard, ou subsidiairement de réexaminer sa situation dans les quinze jours de l'arrêt à intervenir, dans les mêmes conditions d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi

du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'Autriche aurait dû être désignée comme pays de renvoi, dès lors qu'il justifiait d'un droit au séjour dans cet Etat à la date de sa demande de titre de séjour.

Par une ordonnance du 24 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2022.

Un mémoire produit par la préfète du Bas-Rhin a été enregistré le 16 mars 2022.

II. Par une requête enregistrée le 13 août 2021 sous le n° 21NC02318, M. D... A..., représenté par Me Airiau, demande à la cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement tribunal administratif de Strasbourg du 13 juillet 2021 ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler jusqu'à ce que la cour ait statué sur son recours au fond ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi

du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement de première instance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables, au sens de l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de ce que le refus de titre de séjour méconnait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de ce que cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un courrier du 14 mars 2022, les parties ont été informées que la cour était, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, susceptible de relever d'office qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution et d'injonction de la requête n° 21NC02318, dans l'hypothèse où cette affaire serait enrôlée concomitamment à la requête d'appel n° 21NC02317.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 septembre 2021, dans les deux instances.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., ressortissant camerounais né le 14 octobre 1978, relève appel du jugement du 13 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 26 mars 2021 de la préfète du Bas-Rhin portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de renvoi. Il sollicite également, par une requête distincte, qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces requêtes, dirigées contre un même jugement et qui présentent à juger des questions communes, pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dernières stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France pour la dernière fois en février 2020 et qu'il résidait régulièrement en Autriche, où il indique avoir exercé une activité professionnelle. Il a eu une enfant, née en 2011, avec Mme B..., compatriote titulaire d'une carte de résident depuis 2010. Le requérant justifie avoir conservé des liens avec sa compagne et leur enfant pendant la période où il avait sa résidence en Autriche. Mme B... est, par ailleurs, mère d'une fille de nationalité française née en 2007 à Strasbourg et dont le père est né en Côte d'Ivoire. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... représenterait une menace pour l'ordre public, ou même qu'il serait défavorablement connu des services de police ou de gendarmerie, et il justifie de son intégration à titre professionnel. Dans les circonstances de l'espèce, le refus de lui accorder un titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ainsi qu'à l'intérêt supérieur de son enfant et de la fille aînée de son épouse, et méconnait ainsi les stipulations citées au point précédent.

4. Il suit de là que le refus de titre de séjour est illégal et doit être annulé. M. A... est, dans ces conditions, fondé à exciper de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français et l'octroi d'un délai de départ volontaire de trente jours, la désignation du Cameroun comme pays de renvoi étant pour sa part entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des circonstances précédemment rappelées. M. A... est donc fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête n° 21NC02317, à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. L'exécution du présent arrêt implique, compte tenu de ses motifs, la délivrance à M. A... d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de procéder à la délivrance de cette carte dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

6. Le présent arrêt statue sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 13 juillet 2021. Les conclusions de M. A... aux fins de sursis à exécution, ainsi que les conclusions aux fins d'injonction dont elles sont assorties, présentées dans l'instance n° 21NC02318, sont, par suite, devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.

Sur les frais liés au litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2103622 du 13 juillet 2021 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté de la préfète du Bas-Rhin du 26 mars 2021 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à la préfète du Bas-Rhin de délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à M. D... A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution et d'injonction de la requête n° 21NC02318.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Strasbourg en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Samson-Dye, présidente,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 mai 2022.

La présidente,

Signé : A. C...L'assesseur le plus ancien,

Signé : E. MEISSE

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

Nos 21NC02317, 21NC02318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02318
Date de la décision : 03/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SAMSON-DYE
Rapporteur ?: Mme la Pdte. Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : AIRIAU

Origine de la décision
Date de l'import : 10/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-05-03;21nc02318 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award