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29/03/2022 | FRANCE | N°21NC01394

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 29 mars 2022, 21NC01394


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2019 par lequel le maire de la commune du Ban-Saint-Martin a délivré un permis de construire à la société Vilogia portant sur la construction de deux immeubles collectifs de 25 logements sur un terrain situé au 5 rue du Maréchal Foch, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2004376 du 15 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté en tant

qu'il ne prévoit pas explicitement que la haie plantée sera d'essence locale et reje...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2019 par lequel le maire de la commune du Ban-Saint-Martin a délivré un permis de construire à la société Vilogia portant sur la construction de deux immeubles collectifs de 25 logements sur un terrain situé au 5 rue du Maréchal Foch, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2004376 du 15 mars 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet arrêté en tant qu'il ne prévoit pas explicitement que la haie plantée sera d'essence locale et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 mai 2021 et 1er décembre 2021 Mme B... A..., représentée par Me de Zolt, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire du Ban-Saint-Martin du 9 décembre 2019 et du 28 juillet 2021 portant respectivement délivrance d'un permis de construire et d'un permis de construire modificatif à la société Vilogia ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la société Vilogia et de la commune du Ban-Saint-Martin une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son appel est recevable ; son recours a été régulièrement notifié pour l'application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, y compris ses écritures contestant le permis modificatif ; elle justifie de sa qualité de propriétaire d'une parcelle mitoyenne au terrain d'assiette du projet, pour l'application de l'article R. 600-4 du même code, et d'un intérêt pour agir au sens de l'article L. 600-1-2 de ce code, que ce soit à l'encontre du permis initial ou du permis modificatif ; elle est recevable à contester le permis modificatif qui ne lui a été communiqué que dans le cadre de l'instance, en application de l'article L. 600-5-2 du même code ;

- les modalités de raccordement au réseau d'alimentation en eau potable ne sont pas précisées, en méconnaissance de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme, l'avis de la société mosellane des eaux ne pouvant palier cette lacune ; l'article L. 332-15 du même code est méconnu, dès lors que le pétitionnaire a donné son autorisation pour la prise en charge de l'extension du réseau électrique, alors que le plan masse indique un raccordement au droit de la parcelle ; le dossier de demande de permis initial comporte des mentions frauduleuses, dès lors que les cinq arbres mentionnés au niveau des emplacements de stationnement ne peuvent y être implantés, au regard des dispositions de l'article 671 du code civil imposant une distance de deux mètres par rapport à la limite de propriété, même s'il n'appartient ni au service instructeur ni au juge administratif de s'assurer du respect de ces dispositions ; ces vices ont induit en erreur le service instructeur ; les premiers juges ont omis de statuer s'agissant de la fraude concernant la mention d'arbres dont le pétitionnaire ne peut ignorer qu'ils ne pourront être plantés et ont, à tort, requalifié son moyen en méconnaissance des dispositions du code civil ;

- compte tenu de l'impossibilité de planter certains des arbres mentionnés dans le dossier de demande, le projet ne prévoit pas un nombre d'arbres suffisant pour respecter les dispositions de l'article UA 13 du règlement du plan local d'urbanisme ; le permis de construire initial ne mentionne pas les essences des arbres à haute tige qui doivent être plantés ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 4 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors que le projet prévoit un raccordement au réseau public d'eau pluviale sans qu'il soit justifié d'une impossibilité technique avérée d'assurer l'infiltration des eaux sur la parcelle ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme, dès lors que la façade du rez-de-chaussée, qui se situe en retrait du reste du bâtiment projeté, n'est implantée ni à l'alignement, ni à au moins six mètres de la limite de la voie publique, ni même de manière à assurer un alignement harmonieux avec les constructions voisines, alors que la dérogation prévue par le document d'urbanisme s'agissant de cette dernière faculté doit être interprétée strictement et que ce décroché ne peut être regardé comme restreint ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'article Oi 1.2.1. du plan de prévention des risques d'inondation n'était pas méconnu, alors que le projet ne se situe pas en front de rue, au sens de ces dispositions, compte tenu de l'existence du front de rue formé par son habitation et la maison voisine ;

- aucune des prescriptions édictées par le permis de construire n'est motivée ;

- le permis modificatif a été signé par une autorité incompétente dès lors qu'il a été signé par le premier adjoint, qui n'a pas agi par délégation mais en application de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales, applicable dans les communes d'Alsace-Moselle, sans qu'il soit justifié d'une absence du maire et alors que l'accomplissement de cet acte ne s'imposait pas, compte tenu du délai d'instruction ;

- le permis modificatif n'a pas régularisé l'irrégularité affectant la représentation du raccordement au réseau d'eau potable, qui n'apparait toujours pas sur le plan masse ;

- si le permis modificatif a régularisé le permis initial s'agissant de la définition des arbres devant constituer la haie, il est illégal en ce qu'il prévoit que les arbres plantés dans les espaces libres seront des essences ne figurant pas sur la liste des essences locales.

Par deux mémoires enregistrés les 4 octobre 2021 et 17 janvier 2022, la commune du Ban-Saint-Martin, représentée par Me Gillig, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le vice censuré par le tribunal a été régularisé par le permis de construire modificatif, dont il doit être tenu compte pour apprécier la légalité du permis initial ;

- les moyens invoqués ne sont pas fondés, le moyen tiré du défaut de motivation des prescriptions n'étant soulevé que dans l'hypothèse où la cour annulerait le jugement litigieux.

Par deux mémoires enregistrés les 4 octobre 2021 et 17 janvier 2022, la société Vilogia, représentée par Me Gillig, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

- elle s'en remet aux écritures de la commune s'agissant du moyen tiré de l'incompétence du signataire du permis modificatif ;

- le moyen tiré du défaut de motivation des prescriptions n'est soulevé que dans l'hypothèse où la cour annulerait le jugement litigieux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Bertrand pour Mme A... et Me Cheminet pour la commune du Ban-Saint-Martin et la société Vilogia.

1. Mme A... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'un recours dirigé contre l'arrêté du 9 décembre 2019 par lequel le maire de la commune du Ban-Saint-Martin a délivré un permis de construire à la société Vilogia portant sur la construction de deux immeubles collectifs de 25 logements sur un terrain situé au 5 rue du Maréchal Foch. Par un jugement du 15 mars 2021, le tribunal a annulé cet arrêté en tant qu'il ne prévoit pas explicitement que la haie plantée sera d'essence locale, en faisant usage des pouvoirs prévus par l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Mme A... doit être regardée comme contestant ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'annulation totale de cette autorisation d'urbanisme. Conformément aux dispositions de l'article L. 600-5-2 du même code, elle a en outre sollicité, devant la cour, l'annulation du permis modificatif délivré le 28 juillet 2021, qui lui a été communiqué au cours de cette instance.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux points 18 à 21 du jugement attaqué, le tribunal a écarté les moyens relatifs au contenu du dossier de permis de construire s'agissant des plantations et à la méconnaissance de l'article UA 13 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune

du Ban-Saint-Martin. Il a ainsi statué sur l'intégralité des moyens qui étaient soulevés à cet égard et notamment sur la fraude qui était invoquée par Mme A.... Par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges ont omis de se prononcer sur ce moyen. En outre, la circonstance que le tribunal a précisé qu'il n'appartenait ni au service instructeur ni au juge administratif de s'assurer du respect de l'article 671 du code civil, alors que Mme A... ne le contestait pas, n'entache pas d'irrégularité ce jugement.

Sur la légalité des arrêtés litigieux :

En ce qui concerne les points non impactés par le permis modificatif :

3. En premier lieu, si les articles L. 424-3 et R. 424-5 du code de l'urbanisme prévoient la motivation des prescriptions assortissant la délivrance d'un permis de construire, la motivation exigée peut résulter directement du contenu même des prescriptions. Il ressort des pièces du dossier que la prescription financière imposée sur le fondement de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est suffisamment motivée en fait et en droit et que, pour le surplus, les avis dont les prescriptions litigieuses imposent la prise en compte sont eux-mêmes suffisamment motivés. Le moyen tiré du défaut de motivation des prescriptions doit ainsi être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus à juste titre par le tribunal, aux points 3 à 5 du jugement attaqué, pour écarter le moyen tiré de l'insuffisance du contenu du dossier de demande de permis de construire s'agissant de la desserte par le réseau de distribution d'électricité.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article UA 4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune du Ban-Saint-Martin : " 4.3 - Assainissement des eaux pluviales : / Pour tout projet, des dispositifs appropriés et proportionnés, permettant la gestion des eaux pluviales doivent être réalisés sur le site de l'opération, en privilégiant l'infiltration lorsque cela s'avère techniquement possible et garantir leur traitement si nécessaire ; / En cas d'impossibilité technique avérée, les eaux pluviales pourront être déversées dans le milieu naturel ou le réseau public dédié à cet usage dans des conditions conformes à la règlementation en vigueur ".

6. Si le rapport de présentation du plan local d'urbanisme précise, en page 96, pour justifier les choix retenus par le règlement, que " la gestion des eaux pluviales devra être prévue sur le site même de l'opération, en privilégiant l'infiltration, et ce, pour ne pas augmenter le risque d'inondations et limiter les coûts de gestion des réseaux publics d'eaux pluviales ", cette mention d'un document dépourvu, par lui-même, de valeur réglementaire ne saurait permettre d'interpréter les dispositions citées au point précédent, imposant un recours à une infiltration à la parcelle sauf en cas d'impossibilité technique avérée, comme ne s'appliquant pas aux constructions nouvelles édifiées sur des parcelles d'ores et déjà raccordées au réseau public d'eau pluviale.

7. Il est constant que le dossier de demande de permis de construire, complété par les avis émis par les autorités compétentes, prévoit que les eaux pluviales venant des toitures et des surfaces imperméabilisées dédiées à la circulation et au stationnement des véhicules sont, après pré-traitement, rejetées dans le réseau public des eaux pluviales. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un pré-traitement serait insuffisant pour pallier le risque de pollution aux hydrocarbures des eaux provenant des espaces de circulation et de stationnement dans des conditions telles que le risque généré serait assimilable à une impossibilité technique. Il en va de même s'agissant des eaux provenant des toitures, pour lesquelles les défendeurs se bornent à invoquer la pollution de l'air. Par suite, en prévoyant une évacuation de ces eaux pluviales par le réseau public en l'absence de justifications suffisantes quant à une impossibilité technique avérée d'une infiltration sur le terrain d'assiette du projet, l'arrêté du 9 décembre 2019 méconnait les dispositions citées au point 5.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme : " 6.1 - Dispositions générales : / Dans toute la zone, la façade sur rue des constructions principales doit se situer à l'alignement ou à partir de 6 mètres depuis l'alignement des voies publique ou privée, existante, à créer ou à modifier, ouverte à la circulation automobile ou la limite qui s'y substitue. Toutefois, une implantation différente peut être autorisée : / Si elle permet une intégration harmonieuse à la composition de la rue et que ce type d'implantation est dominant dans le groupe de constructions voisines ; / Pour la sécurité des usagers vis-à-vis des voies publiques ou privées ouvertes à la circulation. / Dans la zone UA, toute construction doit être réalisée dans une bande de constructibilité de 35 mètres comptée par rapport à l'alignement ou à la limite qui s'y substitue ; / Dans le seul secteur UAb, toute construction doit être réalisée dans une bande de constructibilité de 50 mètres comptée par rapport à l'alignement ou à la limite qui s'y substitue (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que la majeure partie de la façade sur rue du projet s'établit à 3,34 mètres de la limite de la rue du Maréchal Foch, pour s'aligner sur le front bâti constitué par les constructions situées au nord-ouest. Il est constant que, dans son principe, cette implantation relève de la dérogation prévue pour permettre une intégration harmonieuse à la composition de la rue. Si, ainsi que le fait valoir Mme A..., le rez-de-chaussée de cette façade est édifié en retrait d'environ deux mètres par rapport aux étages supérieurs, qui sont alignés sur le front de rue existant, et alors même que cette configuration n'existe pas sur les bâtiments contre lesquels s'adosse le projet, cette circonstance n'a pas pour effet une méconnaissance des dispositions citées au point précédent. En effet, d'une part, le décroché au niveau du rez-de-chaussée ne remet pas en cause l'intégration harmonieuse du projet à la composition de la rue du Maréchal Foch, ainsi que l'a rappelé à juste titre le tribunal, et, d'autre part, le règlement du plan local d'urbanisme n'a pas, compte tenu de la rédaction adoptée, notamment s'agissant des précisions portant sur les éléments admis à l'intérieur des marges de recul des constructions, tels que les balcons et les auvents, entendu imposer un respect des règles d'alignement en tous points de la façade et interdire les retraits concernant une portion minoritaire de la façade, comme c'est le cas pour celui opéré en l'espèce. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point précédent doit être écarté.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article Oi 1 du règlement du plan de prévention des risques naturels de la vallée de la Moselle, portant notamment sur le risque d'inondation, applicable sur le territoire de la commune du Ban-Saint-Martin : " Article 2.2 - Sont admis sous conditions / • Dans les secteurs Oi et Oi1, les constructions et installations à condition qu'elles respectent les dispositions des articles 2.3 et 2.4 ci-dessous. En outre : / - dans le secteur Oi1 (à l'exception du sous-secteur Oi1a), seuls les fronts de rue existants ou prévus dans les documents d'urbanisme à la date d'approbation du présent PPR, en vue d'assurer la continuité du bâti existant, seront constructibles, les cœurs d'îlots resteront inconstructibles à l'exception des annexes aux constructions existantes telles que garages, abris de jardin, abris bois... (...) ".

11. Il ressort des pièces du dossier que le projet, implanté en secteur Oi1, se situe dans la continuité du front de rue, constitué par les bâtiments édifiés au nord-ouest, auxquels il s'adosse ainsi qu'il a été dit au point 9. Il n'est pas contesté que ce front de rue existait à la date d'approbation du plan de prévention des risques. Le groupe de construction constitué par l'habitation de Mme A... et le bâtiment voisin, implanté à une distance importante par rapport à la voie publique, ne peut, en tout état de cause, être qualifié de front de rue au sens des dispositions citées au point précédent. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'article Oi 1 du règlement du plan de prévention des risques naturels est méconnu.

En ce qui concerne le permis modificatif et ses conséquences sur le permis initial :

12. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi neutralisées à la suite de la modification de son projet par le pétitionnaire ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

13. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales, applicable en Moselle selon l'article L. 2 541-du même code : " En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau ".

14. Il n'est pas contesté qu'ainsi que le fait valoir la commune dans ses écritures, son maire était absent pour une longue durée, en raison de son état de santé. Le permis modificatif litigieux avait été sollicité pour régulariser le vice qui avait été retenu par le tribunal, mais aussi pour apporter des corrections sur des points faisant l'objet d'une contestation devant la cour. Dans ces conditions et à supposer même que le délai d'instruction n'ait expiré que le 19 août 2021, ainsi que le soutient Mme A..., l'arrêté portant délivrance de ce permis modificatif, signé le 28 juillet 2021, relevait des actes dont l'accomplissement s'imposait à cette date et que le premier adjoint avait compétence pour signer. Le moyen tiré de l'incompétence doit donc être écarté, de sorte que le permis modificatif n'est entaché d'aucun vice propre susceptible de l'entacher dans son intégralité.

15. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient Mme A..., le plan masse figurant au dossier de demande du permis modificatif comporte une ligne de couleur bleu clair accompagnée de la mention " AEP ", représentant le réseau d'alimentation en eau potable, ainsi que le raccordement du projet à ce réseau. Dès lors, le moyen tiré de l'absence d'une telle mention au plan masse du dossier de demande du permis initial ne peut plus être utilement invoqué.

16. En troisième lieu, le permis modificatif précise que les arbres qui seront plantés dans les espaces libres seront des essences Acer Platanoides et Pyrus Communis. Ces essences, correspondant respectivement à l'érable plane et au poirier sauvage, figurent dans la liste des essences locales mentionnée par le règlement du plan local d'urbanisme litigieux. Le moyen tiré de ce que le permis modificatif prévoirait la plantation d'arbres ne figurant pas sur cette liste au sein des espaces libres manque donc en fait, le permis modificatif n'étant ainsi entaché d'aucun vice propre à cet égard. Dans ces conditions, il a régularisé le défaut de mention de l'essence de ces arbres, qui entachait le permis initial, ce moyen étant désormais inopérant.

17. En quatrième lieu, Mme A... soutient que l'arbre implanté à l'angle nord du terrain d'assiette du projet, selon les plans figurant au dossier de demande de permis initial, n'aurait pu être effectivement planté sans méconnaitre les dispositions de l'article 671 du code civil. Elle en conclut que la demande est frauduleuse et que le nombre d'arbres prévu, dont devrait selon elle être déduit l'arbre en question, est insuffisant au regard des dispositions de l'article UA 13 du règlement du plan local d'urbanisme. Toutefois, le permis modificatif prévoit, notamment pour cet arbre, une localisation différente, laquelle ne fait pas l'objet de critique. Dans ces conditions, les moyens tirés du caractère frauduleux de la demande et de la méconnaissance de l'article UA 13 du règlement du plan local d'urbanisme ne sont plus susceptibles d'être utilement invoqués.

Sur les conséquences du vice affectant le permis de construire :

18. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de

non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé ".

19. Il résulte de ce qui précède que seul est fondé le moyen tiré de ce que le projet prévoit une évacuation d'eaux pluviales par le réseau public sans justifier suffisamment d'une impossibilité technique avérée d'une infiltration sur le terrain d'assiette du projet, en méconnaissance de l'article UA 4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune du Ban-Saint-Martin,. Il y a lieu de ne procéder qu'à une annulation partielle et conditionnelle du permis de construire litigieux, dès lors que ce vice porte seulement sur une partie identifiable du projet et qu'il est régularisable sans que la nature même du projet soit modifiée. Il y a lieu de fixer un délai de trois mois à la société Vilogia pour solliciter la régularisation de ce vice.

20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont annulé le permis litigieux qu'en tant qu'il ne prévoit pas explicitement que la haie plantée sera d'essence locale.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la requérante, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse aux intimés les sommes qu'ils réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune du Ban-Saint-Martin et de la société Vilogia, parties perdantes, deux sommes de 1 000 euros à verser à Mme A... au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 9 décembre 2019 du maire du Ban-Saint-Martin est annulé en tant que le projet autorisé prévoit une évacuation d'eaux pluviales par le réseau public sans justifier suffisamment d'une impossibilité technique avérée d'une infiltration sur le terrain d'assiette du projet.

Article 2 : Le délai imparti à la société Vilogia pour solliciter la régularisation de son projet est fixé à trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune du Ban-Saint-Martin et la société Vilogia verseront chacune une somme de 1 000 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., à la commune du

Ban-Saint-Martin et à la société Vilogia.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Metz.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président de chambre,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- M. Meisse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

La rapporteure,

Signé : A. SAMSON-DYELe président,

Signé : Ch. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet de la Moselle, en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

2

N° 21NC01394


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01394
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme la Pdte. Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : SELARL SOLER-COUTEAUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-29;21nc01394 ?
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