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22/03/2022 | FRANCE | N°21NC02649

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 mars 2022, 21NC02649


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté préfectoral du 5 juin 2020 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n°2002229 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Gabon, dem

ande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 3...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté préfectoral du 5 juin 2020 par lequel le préfet de la Marne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.

Par un jugement n°2002229 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2021, M. A..., représenté par Me Gabon, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 31 décembre 2020 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté préfectoral du 5 juin 2020 du préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'acte attaqué ;

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'un vice de procédure au regard de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'union européenne car il n'a pas pu émettre des observations préalablement à son édiction ;

- il est entaché d'un autre vice de procédure dès lors qu'il n'est pas établi que :

• le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été saisi ;

• le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration était compétent pour rendre son avis et que les médecins étaient identifiés avec une signature lisible ;

• la procédure décrite aux articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige, a été respectée ;

• du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a été suffisamment précis au regard des dispositions applicables ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru lié par cet avis ;

- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de séjour en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'il démontre qu'il ne pourra pas avoir accès à un traitement effectif dans son pays d'origine ; qu'il n'existe pas de transplantation rénale en Arménie ;

- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation en ne lui délivrant pas une carte de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en refusant de l'admettre exceptionnellement au séjour ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il ne tient pas compte de son état de santé, lequel fait obstacle à ce qu'il voyage pour rejoindre son pays d'origine ;

- il l'expose à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de la Marne, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 3 février 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 février 2022.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant arménien né le 6 février 1985, est entré irrégulièrement en France le 24 septembre 2019. Il a sollicité auprès des services préfectoraux de la Marne, le 11 décembre 2019, un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Le préfet de la Marne a pris à son encontre le 5 juin 2020 un arrêté préfectoral portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 31 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a répondu en son point 2 au moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté attaqué, contrairement à ce que soutient le requérant. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

Sur la légalité de l'arrêté du 5 juin 2020 du préfet de la Marne :

3. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application et mentionne les éléments de fait en considération desquels le préfet de la Marne a apprécié la situation personnelle de M. A... pour lui refuser le titre de séjour sollicité. Il rappelle notamment le parcours de l'intéressé depuis son arrivée en France, fait référence à l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) émis le 10 mars 2020 et précise que le requérant ne fait état d'aucune circonstance qui l'empêcherait d'avoir un accès au traitement médical dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation du refus de séjour et du défaut d'examen particulier de la situation du requérant doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, si aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union européenne. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

5. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de rendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause. Dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au litige, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour. En effet, à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour, l'intéressé est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux.

6. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou d'en présenter des nouvelles, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour. Dès lors, la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français ayant été prise concomitamment à la décision refusant son admission au séjour, le requérant n'a pas été privé de son droit à être entendu.

7. En troisième lieu, d'une part, aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...) ".

8. Aux termes d'autre part, des dispositions de l'article R. 313-22 du même code, dans sa version applicable au litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code: " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22 / (...) / La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".

9. Enfin, aux termes des dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant :/ a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

10. Il ressort des pièces du dossier que l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII le 10 mars 2020 est dûment signé par trois médecins identifiés et désignés parmi la liste jointe en annexe de la décision du 18 novembre 2019 du directeur de l'Office, laquelle, consultable sur internet, a été régulièrement publiée au bulletin officiel du ministère de l'intérieur du 18 décembre 2019. Cet avis porte également le nom du médecin rapporteur, lequel ne siégeait pas au sein de ce collège. L'avis comporte l'ensemble des précisions requises par l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de ce que l'avis rendu serait incomplet et que la décision de refus de séjour contestée aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière doivent être écartés.

11. En quatrième lieu, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'OFII et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tout élément permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

12. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre d'une insuffisance rénale chronique, nécessitant un traitement de trois séances hebdomadaire d'hémodialyse, qui ne doit pas être interrompu. Pour refuser le titre de séjour sollicité, le préfet de la Marne s'est fondé sur l'avis du 10 mars 2020 par lequel le collège de médecins de l'OFII a estimé que, si le requérant est affecté d'une pathologie nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine où il peut se rendre sans risque au regard de son état de santé. Or, les copies d'ordonnances médicales, des rapports d'examen et certificats médicaux produits par le requérant ne sont pas de nature à infirmer les conclusions de l'avis précité en considération desquelles le préfet de la Marne a pris la décision attaquée. En particulier, si le requérant se prévaut de ce que la transplantation rénale n'existe pas en Arménie, il ne ressort d'aucune pièce médicale produite qu'une transplantation rénale soit envisagée. Par ailleurs, les documents produits par le requérant attestent que si une telle intervention est peu disponible en Arménie, elle n'est pas exclue. Aucune des pièces produites ne permet ainsi d'établir qu'il n'aurait pas accès aux soins nécessaires dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur de fait, de droit ou d'appréciation au regard du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

13. En cinquième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée, que le préfet de la Marne se serait estimé lié par le sens de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII. Ainsi, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Marne a méconnu l'étendue de sa compétence.

14. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

15. M. A... est arrivé seul en France alors que toute sa famille se trouve en Arménie, dont son épouse et ses enfants mineurs. De plus, il n'apporte aucun élément relatif à son intégration ou ses attaches en France. Par suite, eu égard à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressé en France, la décision attaquée ne porte pas, au regard du but poursuivi, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il s'ensuit que le préfet, en lui refusant le séjour, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

16. En septième lieu, il ne ressort pas des termes de la décision attaquée que le préfet se soit fondé sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité pour refuser le séjour au requérant. Par suite, le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces dispositions à l'appui de la contestation de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour.

17. En huitième lieu, compte tenu notamment de la situation personnelle du requérant évoquée aux points 12 et 15 du présent arrêt qui ne révèle pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Marne aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en lui refusant le séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige.

18. En neuvième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de ce qui a été dit au point 12 que le préfet de la Marne aurait commis une erreur quant à l'appréciation de la capacité médicale du requérant à être éloigné.

19. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

20. En se bornant à évoquer le conflit existant dans la région du Haut-Karabagh, le requérant n'établit pas que l'arrêté attaqué, en tant qu'il désigne l'Arménie comme pays de destination de son éloignement, l'expose à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

21. ll résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 5 juin 2020 du préfet de la Marne. Les conclusions de la requête à fin d'injonction, sous astreinte, et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, en conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

2

N° 21NC02649


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02649
Date de la décision : 22/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : GABON

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-22;21nc02649 ?
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