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01/03/2022 | FRANCE | N°21NC01057

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 01 mars 2022, 21NC01057


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 6 octobre 2018 par laquelle le directeur du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom a suspendu son accès à la zone contrôlée de ce site et de mettre à la charge du centre national de production d'électricité de Cattenom une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902163 du 9 février 2021, le tribunal administratif de

Strasbourg a rejeté les demandes de M. B...

Procédure devant la cour :

Par une r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 6 octobre 2018 par laquelle le directeur du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom a suspendu son accès à la zone contrôlée de ce site et de mettre à la charge du centre national de production d'électricité de Cattenom une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902163 du 9 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes de M. B...

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 avril 2021, M. B..., représenté par la Selarl Cabinet Rondu, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 février 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 6 octobre 2018 par laquelle le directeur du centre nucléaire de production d'électricité de Cattenom a suspendu son accès à la zone contrôlée de ce site ;

3°) de mettre à la charge du centre national de production d'électricité de Cattenom une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'un vice de forme dès lors que les premiers juges n'ont pas répondu aux pièces versées et notamment celles qui venaient contredire la " note blanche " produite par la ministre ;

- il n'appartient pas au mouvement " Hammerskin " et est simple collectionneur d'objets relatifs à la Seconde guerre mondiale ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 décembre 2021, la ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 27 janvier 2022, M. B... conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens. Il n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picque, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est technicien d'exploitation au sein du centre nucléaire de production d'électricité (CNPE) de Cattenom. Par un courrier du 6 octobre 2018, le directeur de la centrale nucléaire, exploitée par la société Electricité de France (EDF), a suspendu l'autorisation d'accès de M. B... aux zones contrôlées du site, à la suite d'un avis défavorable émis le 28 septembre 2018 par le préfet de la Moselle. Par une lettre du 20 novembre 2018, M. B... a formé un recours contre cette décision devant le ministre de la transition écologique et solidaire qui, par courrier du 17 décembre 2018, en a accusé réception. Ce recours administratif préalable obligatoire a été implicitement rejeté par une décision qui s'est substituée à la décision du 6 octobre 2018. Par un jugement du 9 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir requalifié la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 6 octobre 2018 comme étant dirigée contre la décision implicite du ministre, a rejeté cette demande. M. B..., qui en persistant à demander l'annulation de la décision initiale doit être regardé comme demandant l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable obligatoire, relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le point n° 7 du jugement attaqué indique les motifs pour lesquels le tribunal a estimé que la décision de refus d'autorisation d'accès en litige n'était pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le tribunal, dont l'office est de répondre aux moyens soulevés par les parties et non aux arguments qu'elles avancent ou aux pièces qu'elles produisent, n'a pas entaché son jugement d'une insuffisance de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 1332-1 du code de la défense : " Les opérateurs publics ou privés exploitant des établissements ou utilisant des installations et ouvrages, dont l'indisponibilité risquerait de diminuer d'une façon importante le potentiel de guerre ou économique, la sécurité ou la capacité de survie de la nation, sont tenues de coopérer à leurs frais dans les conditions définies au présent chapitre, à la protection desdits établissements, installations et ouvrages contre toute menace, notamment à caractère terroriste (...) ". Aux termes de l'article L. 1332-2-1 du même code : " L'accès à tout ou partie des établissements, installations et ouvrages désignés en application du présent chapitre est autorisé par l'opérateur qui peut demander l'avis de l'autorité administrative compétente dans les conditions et selon les modalités définies par décret en Conseil d'État./ L'avis est rendu à la suite d'une enquête administrative qui peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification. / La personne concernée est informée de l'enquête administrative dont elle fait l'objet ". Aux termes de l'article R. 1332-22-1 du même code : " Avant d'autoriser l'accès d'une personne physique ou morale à tout ou partie d'un point d'importance vitale qu'il gère ou utilise, l'opérateur d'importance vitale peut demander par écrit l'avis du préfet de département dans le ressort duquel se situe le point d'importance vitale (...). / Cette demande peut justifier que soit diligentée sous le contrôle de l'autorité concernée une enquête administrative destinée à vérifier que les caractéristiques de la personne physique ou morale intéressée ne sont pas incompatibles avec l'accès envisagé et pouvant donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. / La demande d'avis mentionnée aux alinéas précédents concerne l'accès aux parties des points d'importance vitale déterminées à cette fin dans les plans particuliers de protection ". Aux termes de l'article R. 1332-33 du même code : " Préalablement à l'introduction d'un recours contentieux contre tout acte administratif pris en application du présent chapitre, à l'exception de la décision mentionnée au II de l'article R. 1332-26, le requérant adresse un recours administratif au ministre coordonnateur du secteur d'activités dont il relève. Le ministre statue dans un délai de deux mois. En l'absence de décision à l'expiration de ce délai, le recours est réputé être rejeté ".

4. Il ressort des pièces du dossier que, pour suspendre l'autorisation d'accès de M. B... aux zones contrôlées du site nucléaire de Cattenom, le ministre de la transition écologique et solidaire s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait été condamné à une peine d'emprisonnement de sept mois pour des faits, commis le 21 novembre 2015, de violence en réunion sans incapacité, dégradation ou détérioration du bien d'autrui commis en réunion, violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité supérieure à huit jours, et violence aggravée par deux circonstances suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours. La ministre a également tenu compte d'une note dite " blanche " du service central du renseignement territorial (SCRT) du 2 mai 2019 faisant mention qu'à la suite d'une rixe le mettant en cause, une perquisition ordonnée au domicile de M. B... en novembre 2015 avait révélé l'existence d'une pièce dédiée au culte d'Adolf Hitler et confirmé son appartenance à mouvance radicale d'ultra-droite néonazie " Hammerskin ".

5. En premier lieu, les attestations très peu circonstanciées émanant de l'épouse et du père de M. B... ne permettent pas de remettre en cause la matérialité des faits rapportés par la note du SCRT du 2 mai 2019.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que la peine d'emprisonnement dont M. B... a fait l'objet a été effacée, pour l'avenir, du bulletin n° 2 de son casier judiciaire par un jugement correctionnel du 10 septembre 2020 rendu sur une requête de l'intéressé faisant suite à la décision de suspension en litige et motivée par des raisons familiales et professionnelles. Cependant, cette seule circonstance, au demeurant postérieure à la décision de suspension d'autorisation d'accès en litige, ne saurait suffire à remettre en cause la gravité des faits de violence pour lesquels M. B... a été condamné. Dès lors, au regard de tels faits et de la vulnérabilité à laquelle l'expose sa proximité avec la mouvance radicale d'ultra-droite néonazie, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le ministre aurait apprécié de façon manifestement inexacte sa situation en lui retirant son autorisation d'accéder aux zones contrôlées du site nucléaire de Cattenom.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

2

N° 21NC01057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01057
Date de la décision : 01/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05 Police. - Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie PICQUE
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SELARL CABINET RONDU

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-03-01;21nc01057 ?
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