Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... D... née E... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté préfectoral du 28 août 2019 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n°1902953 du 10 mars 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2020, Mme D..., représentée par Me Miravete, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 10 mars 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 28 août 2019 du préfet de la Marne ;
3°) d'ordonner, si nécessaire, une mesure d'expertise pour définir dans quelle situation se trouve l'enfant et s'il peut être soigné dans son pays d'origine ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation car :
* la pathologie de son enfant n'est pas prise en charge en Algérie ;
* l'enfant n'est pas en capacité de voyager.
Le préfet de la Marne, à qui la procédure a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante algérienne, née le 8 août 1978, est entrée en France le 4 juin 2017 accompagnée de sa fille mineure B... D..., toutes deux munies d'un visa touristique valable jusqu'au 14 septembre 2017. Le 6 septembre 2017, Mme D... a demandé au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour en raison de l'état de santé de sa fille. Par un arrêté du 16 mars 2018, le préfet de la Marne a opposé un refus à sa demande. Mme D... a sollicité à nouveau la délivrance d'un titre de séjour pour le même motif. Par un arrêté du 28 août 2019, le préfet de la Marne a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du 10 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Si ces dispositions, qui prévoient la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au bénéfice des parents d'enfants dont l'état de santé répond aux conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 du même code, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, délivre à ces ressortissants un certificat de résidence pour l'accompagnement d'un enfant malade.
3. Aux termes de l'article R. 313-22 du même code, da sa version applicable au litige : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont celles de l'état de santé nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont l'étranger est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle.
4. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle. La partie qui justifie d'un avis du médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), consulté par le préfet de la Marne pour apprécier la situation médicale de la fille A... la requérante, née le 7 mai 2007, a, dans son avis, émis le 12 août 2019, conclu que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'enfant peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et qu'en outre, au vu des éléments du dossier et à la date de cet avis, son état peut lui permettre de voyager sans risque vers l'Algérie.
6. La jeune B... D... souffre d'une amyotrophie spinale infantile type 3 à l'origine d'un handicap moteur important avec perte de la marche. Il ressort des pièces du dossier qu'elle a fait l'objet d'une arthrodèse vertébrale le 20 mars 2018 et que les suites opératoires ont été satisfaisantes. Pour contester l'appréciation portée par le préfet de la Marne sur la possible prise en charge de la pathologie de sa fille en Algérie, la requérante produit un certificat médical, au demeurant non daté, qui indique qu'elle bénéficie d'un suivi au centre de référence des maladies rares à raison de deux à trois fois par an et d'une surveillance d'une lithiase rénale droite, et que son état nécessite une ventilation non invasive du fait d'une insuffisance respiratoire chronique, un travail d'ampliation thoracique quotidien et des séances de kinésithérapie trois fois par semaine ainsi que différents appareillages. Toutefois, ce certificat ne mentionne pas l'impossibilité pour la jeune B... de bénéficier de ces soins dans son pays d'origine. Si la requérante produit également un certificat d'un médecin algérien du 18 septembre 2019 qui adresse la patiente à un confrère " sachant que cette pathologie n'est pas prise en charge en Algérie ", celui-ci est très peu circonstancié. Enfin, la production, à hauteur d'appel, d'un certificat médical d'un médecin du centre hospitalier de Reims du 19 février 2021, soit postérieurement à la décision attaquée, qui précise que la jeune fille bénéficie désormais d'un traitement en " ATU " de cohorte (Ridiplam) qui n'est " probablement pas disponible dans son pays " ne suffit pas à démontrer son indisponibilité en Algérie. L'ensemble de ces éléments, en l'état des pièces du dossier, n'est donc pas de nature à contredire utilement l'avis médical du collège des médecins de l'OFII sur l'existence d'un traitement approprié en Algérie et sur sa capacité à voyager sans risque vers ce pays. Dans ces conditions, en refusant de délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet de la Marne n'a pas commis d'erreur d'appréciation.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 28 août 2019 du préfet de la Marne. Ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, en conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
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N° 20NC03703