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28/12/2021 | FRANCE | N°19NC02365

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 28 décembre 2021, 19NC02365


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la commune de Ville-sur-Yron à lui verser la somme de 3 356,80 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait des désordres affectant ses terrains, d'annuler la décision par laquelle le maire de Ville-sur-Yron a rejeté implicitement sa demande de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant sa propriété et enfin d'enjoindre à la commune de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux in

ondations affectant sa propriété.

Par un jugement n° 1603759 du 28 mai 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner la commune de Ville-sur-Yron à lui verser la somme de 3 356,80 euros en réparation des préjudices qu'il a subis du fait des désordres affectant ses terrains, d'annuler la décision par laquelle le maire de Ville-sur-Yron a rejeté implicitement sa demande de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant sa propriété et enfin d'enjoindre à la commune de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant sa propriété.

Par un jugement n° 1603759 du 28 mai 2019, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2019 et le 23 avril 2020, M. A..., représenté par Me Gillig, demande à la cour, dans l'état de ses dernières écritures :

1°) d'annuler le jugement du 28 mai 2019 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) de condamner la commune de Ville-sur-Yron à lui verser la somme de 3 365,80 euros au titre du préjudice qu'il a subi du fait des désordres affectant son terrain ;

3°) d'annuler la décision par laquelle la commune de Ville-sur-Yron a rejeté implicitement sa demande de prendre des mesures nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant sa propriété dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit la désignation d'un expert avec pour mission de :

- se rendre sur les lieux des désordres ;

- constater et déterminer précisément l'étendue des désordres ;

- entendre les parties ainsi que tout sachant et se faire communiquer tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- rechercher les causes et origines des désordres et préciser si les inondations sont en lien avec les travaux réalisés par la société Riani sous la maîtrise d'ouvrage de la commune de Ville-sur-Yron ;

- dans l'affirmative, dire si les désordres constatés sont inhérents à l'exécution des travaux ;

- dire si des travaux conservatoires doivent être réalisés dans l'urgence pour assurer la stabilité de l'ouvrage et dans ce cas, les déterminer et les chiffrer ;

- déterminer et chiffrer les travaux nécessaires à la remise en état des lieux ;

- fournir de façon générale, tous les éléments techniques ou de fait, de nature à permettre à la juridiction du fond, éventuellement saisie, de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudice subis ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Ville-sur-Yron la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur l'illégalité de la décision implicite de rejet de la commune de Ville-sur-Yron refusant de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant les terrains du requérant ;

- le préjudice est avéré car sa cave est inondée ;

- les conclusions du rapport d'expertise sont explicites sur la responsabilité de la commune ; la résurgence des eaux dans sa cave provient d'une canalisation publique ;

- le lien de causalité entre l'action de la commune et son préjudice est établi ;

- sa demande d'exécution matérielle des travaux est donc fondée.

Par des mémoires, enregistrés le 9 janvier 2020 et le 29 octobre 2021, la commune de Ville-sur-Yron, représentée par Me Lebon, conclut au rejet de la requête et à ce que M. A... soit condamné à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. A... ne démontre pas la réalité d'un préjudice anormal et spécial ;

- il n'y a eu qu'un phénomène ponctuel d'inondation en août 2014 et il n'a subi aucun dommage imputable au sinistre, ni aucune perte directe ;

- la présence d'eau dans cette excavation qui est en fait un vide sanitaire et non une cave, ne présente pas un caractère anormal et spécial ;

- aucune expertise n'a constaté de menaces pour la pérennité de l'immeuble, ni n'a considéré que des mesures devaient être prises pour sa sauvegarde ;

- il y a absence de lien de causalité entre le préjudice allégué et l'ouvrage public ;

- l'existence d'une fuite du réseau public n'est absolument pas démontrée : l'expert s'est borné à dire que le désordre trouve son origine dans le domaine public sans indiquer où se trouve la prétendue fuite du réseau public ;

- l'arrière de la maison étant plus élevé que le niveau de l'usoir devant la maison, il est vraisemblable que l'eau provienne en réalité d'une circulation souterraine naturelle après épisode pluvieux, comme c'est le cas de ses voisins ;

- à titre subsidiaire, l'épisode pluvieux d'août 2014 a été exceptionnellement fort ce qui expliquerait que les désordres soient survenus et il devra alors être qualifié de force majeure, ce qui constitue une cause exonératoire de responsabilité ;

- en tout état de cause, les 3 356,80 euros sollicités par M. A... ne sont pas justifiés ;

- la mesure d'expertise sollicitée est dépourvue de toute utilité.

Par une ordonnance du 29 octobre 2021, la clôture d'instruction initialement fixée à la date du 29 octobre 2021 a été reportée au 18 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Roussaux, première conseillère,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public ;

- les observations de Me Huck, représentant M. A... et les observations de Me Coissard, représentant la commune de Ville-sur-Yron.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... est propriétaire, occupant depuis 1988 d'une maison d'habitation située dans la commune de Ville-sur-Yron. Après avoir subi une première inondation en juillet 2001 dans sa cave, une seconde inondation est intervenue en août 2014. M. A... a sollicité le tribunal administratif de Nancy afin que soit prescrite une expertise en vue de déterminer les causes des inondations subies par sa propriété. Par une ordonnance du 10 novembre 2015, une expertise a été ordonnée par le juge des référés et le rapport d'expertise a été remis le 28 juin 2016. M. A... a mis en demeure la commune de Ville-sur-Yron, par courrier du 22 octobre 2016, de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux désordres affectant sa propriété. Aucune réponse ne lui a été apportée. Il a alors saisi le tribunal administratif de Nancy et a demandé la condamnation de la commune de Ville-sur-Yron à lui verser la somme de 3 356,80 euros en réparation des préjudices causés du fait des désordres affectant son terrain, l'annulation de la décision par laquelle le maire a rejeté implicitement sa demande de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin aux inondations affectant sa propriété et à ce qu'il soit enjoint à la commune de réaliser les travaux. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nancy du 28 mai 2019 qui a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges, contrairement à ce que soutient M. A..., ont répondu aux points 8 et 9 du jugement à ses conclusions tendant à l'annulation de la décision ayant implicitement rejeté sa demande par laquelle il demandait à la commune de réaliser les travaux nécessaires pour mettre fin aux troubles générés par les infiltrations régulières dans sa cave. Le jugement est donc régulier.

Sur les conclusions indemnitaires :

3. Le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages, qui doivent revêtir un caractère grave et spécial pour ouvrir droit à réparation, résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure.

4. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. La mission confiée à l'expert peut viser à concilier les parties ".

5. M. A... se plaint d'infiltrations d'eau dans un espace réduit en sous-sol de sa maison côté rue pour la résorption desquelles il a mis en place une pompe d'évacuation des eaux. Si l'assureur de M. A... en 2014, a imputé ces inondations à un bouchon situé dans le réseau d'évacuation des eaux pluviales, l'origine des arrivées d'eau n'a pu être clairement confirmée par l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif qui n'a pas pu mener toutes les investigations utiles. Dès lors que les pièces versées au dossier ne permettent pas à la cour de connaître l'origine exacte des infiltrations affectant l'espace en sous-sol de la maison de M. A..., qui, même réduit, n'a pas vocation à recevoir des eaux, et de déterminer la nature et le montant des travaux utiles pour y mettre fin, il y a lieu, avant de statuer sur la requête de M. A... d'ordonner une expertise définie à l'article 1er du présent arrêt.

D E C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de M. A..., procédé par un expert, désigné par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy, à une expertise avec mission pour l'expert de :

1°) se rendre sur les lieux et procéder à la constatation et au relevé précis et détaillé des infiltrations d'eau survenues à partir d'août 2014 affectant l'espace réduit situé en sous-sol côté rue de la maison d'habitation de M. A... située 9, rue principale à Ville-sur-Yron (54800) ; préciser si ces infiltrations sont ponctuelles ou permanentes et indiquer, si possible, la date de leur survenance et leur périodicité ;

2°) donner un avis motivé sur les causes et origines des désordres dont il s'agit, en précisant s'ils sont imputables aux réseaux d'évacuation des eaux pluviales de la commune ou à tout autre ouvrage public ou à l'écoulement naturel des eaux de pluie, ou aux conditions d'utilisation et d'entretien de la maison d'habitation et en particulier au défaut d'installations propres à éviter des infiltrations ou à toute autre cause qu'il déterminera et, dans le cas de causes multiples, d'évaluer les proportions relevant de chacune d'elles ;

3°) indiquer la nature des travaux nécessaires pour faire cesser les désordres ; dire si l'urgence et/ou la nature des désordres impliquent que des mesures conservatoires soient prises ;

4°) donner son avis motivé sur l'évaluation du coût des travaux ainsi que sur les préjudices de toute nature subis par le requérant et en évaluer le montant en indiquant le cas échéant si l'assureur de M. A... a déjà pris, en tout ou partie, en charge certains frais ;

5°) d'une façon générale, recueillir tous éléments et faire toutes autres constatations utiles de nature à éclairer la cour dans son appréciation des responsabilités éventuellement encourues et des préjudices subis.

L'expert disposera des pouvoirs d'investigations les plus étendus. Il pourra entendre tous sachants, se faire communiquer tous documents et renseignements, faire toutes constatations ou vérifications propres à faciliter l'accomplissement de sa mission et éclairer la cour.

Article 2 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy dans sa décision le désignant.

Article 3 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 4 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et à la commune de Ville-sur-Yron.

3

N° 19NC02365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02365
Date de la décision : 28/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-03-01 Travaux publics. - Différentes catégories de dommages. - Dommages causés par l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics. - Existence de l'ouvrage.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SCP LEBON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-28;19nc02365 ?
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