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14/12/2021 | FRANCE | N°19NC00903

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 14 décembre 2021, 19NC00903


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le maire de Geispolsheim ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux, déposée le 8 septembre 2015 par M. A... D..., en vue de la réalisation d'une annexe à l'écurie existante, d'une surface de plancher de 19 mètres carrés, sur un terrain situé 9 petite rue du Château.

Par un jugement n° 1604066 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la

demande de M. et Mme C..., mis à leur charge la somme de 1 500 euros à verser à M. D.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le maire de Geispolsheim ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux, déposée le 8 septembre 2015 par M. A... D..., en vue de la réalisation d'une annexe à l'écurie existante, d'une surface de plancher de 19 mètres carrés, sur un terrain situé 9 petite rue du Château.

Par un jugement n° 1604066 du 31 janvier 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. et Mme C..., mis à leur charge la somme de 1 500 euros à verser à M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté les conclusions de M. D... tendant à ce que le tribunal fasse usage de la faculté prévue à l'article R. 622-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 mars 2019, M. B... C... et Mme E... C..., représentés par Me Galland, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 janvier 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 du maire de Geispolsheim ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Geispolsheim une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de la déclaration préalable au regard des articles 155 et 156 du règlement sanitaire départemental, ce qui entache l'arrêté litigieux d'un vice de procédure ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les dispositions des articles 155 et 156 du règlement sanitaire départemental n'étaient pas méconnues.

Par ordonnance du 10 août 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 septembre 2021.

Un mémoire, produit pour M. D..., a été enregistré le 12 novembre 2021, après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Maamouri, pour M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... doivent être regardés comme relevant appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 janvier 2019 en tant qu'il rejette leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le maire de Geispolsheim ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux, déposée par M. A... D..., en vue de la réalisation d'une annexe à l'écurie existante et en tant qu'il met à leur charge la somme de 1 500 euros à verser à M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. D'une part, les dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 pour l'évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, n'étaient applicables qu'aux recours pour excès de pouvoir formés contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, et non aux recours dirigés, comme en l'espèce, contre une décision de non-opposition à déclaration préalable.

3. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... sont voisins du terrain d'assiette du projet, dont ils ne sont séparés que par une ruelle. Alors même que la construction projetée est d'une taille limitée et n'est pas visible depuis leur propriété, elle est, compte tenu de sa destination permettant l'accueil d'un cheval supplémentaire sur le terrain de M. D..., susceptible de générer des nuisances, notamment olfactives, pour les demandeurs. Ces derniers justifient, dès lors, d'un intérêt pour contester la non-opposition à déclaration préalable.

4. Il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par M. D... devant les premiers juges doit être écartée.

Sur la légalité de la non-opposition à déclaration préalable :

5. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration se serait abstenue d'examiner la déclaration préalable avant de délivrer l'autorisation d'urbanisme en litige. Ainsi, et alors même qu'elle se serait méprise quant à l'identification des règles dont elle devait vérifier le respect, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. (...) ". L'article L. 421-7 du même code précise : " Lorsque les constructions, aménagements, installations et travaux font l'objet d'une déclaration préalable, l'autorité compétente doit s'opposer à leur exécution ou imposer des prescriptions lorsque les conditions prévues à l'article L. 421-6 ne sont pas réunies ". Les règlements sanitaires départementaux, dans la mesure où ils se rattachent à l'un ou l'autre des objets mentionnés à l'article L. 421-6, sont au nombre des prescriptions au respect desquelles est subordonnée la délivrance du permis de construire ou la non-opposition à une déclaration préalable. La circonstance que, pour l'application des dispositions de l'article R. 421-14 du code de l'urbanisme, une annexe est réputée avoir la même destination que la construction principale ne saurait, en tout état de cause, avoir pour effet de dispenser la personne souhaitant édifier une annexe à une habitation du respect du règlement sanitaire, contrairement à ce que fait valoir la commune dans ses écritures de première instance.

7. D'une part, aux termes de l'article 155 du règlement sanitaire départemental du Bas-Rhin : " Les litières provenant des logements d'animaux sont évacuées aussi souvent qu'il est nécessaire. Les dépôts permanents ou temporaires de ces matières ne doivent pas entraîner une pollution des ressources en eaux [...] 155.2) Aménagement/ Les fumiers sont déposés sur une aire étanche, munie au moins d'un point bas, où sont collectés les liquides d'égouttage et les eaux pluviales qui doivent être dirigés, à l'aide de canalisations étanches et régulièrement entretenues, vers des installations de stockage étanche ou de traitement des effluents de l'élevage./La superficie de l'aire de stockage sera fonction de la plus longue période pouvant séparer deux évacuations successives des déjections solides./Des mesures appropriées sont prises pour empêcher la pullulation des insectes./ S'il est reconnu nuisible à la santé publique, le dépôt, quelle qu'en soit l'importance, sera remis en état ".

8. Une autorisation d'urbanisme n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. En l'espèce, le projet, qui porte sur la création d'un box supplémentaire par rapport à l'écurie préexistante, ne prévoit pas d'aire de stockage des fumiers. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 155 du règlement sanitaire départemental dont se prévalent les requérants, relatives aux caractéristiques que doivent respecter ces aires, doit ainsi être écarté comme inopérant à l'égard de la décision de ne pas s'opposer à cette déclaration préalable, laquelle n'a pas pour objet de contrôler la légalité des conditions d'exploitation du box supplémentaire créé par M. D.... Compte tenu de ce qui précède, M.et Mme C... ne sauraient utilement reprocher au maire de ne pas avoir examiné la déclaration préalable au regard de ces dispositions.

9. D'autre part, aux termes de l'article 156 du règlement sanitaire départemental, figurant dans le titre VIII définissant les prescriptions applicables aux activités d'élevage et aux autres activités agricoles : " Les urines et déjections recueillies sous forme de lisiers, les jus d'ensilage, et les eaux de lavage sont évacués vers des ouvrages de stockage ou de traitement, implantés suivant les conditions prévues à l'article 155.1 concernant les dépôts de fumier./A l'extérieur des bâtiments, l'écoulement des purins, lisiers, jus d'ensilage et des eaux de lavage, vers les ouvrages de stockage ou de traitement doit s'effectuer séparément de celles des eaux pluviales et de ruissellement et être assuré par l'intermédiaire de caniveaux ou de canalisations régulièrement entretenus et étanches. L'évacuation des eaux pluviales vers les ouvrages de stockage ou de traitement est strictement interdite. / Les eaux de lavage peuvent être évacuées vers le réseau d'assainissement communal sous réserve de l'autorisation de la collectivité propriétaire des ouvrages d'assainissement. Ces fosses, d'une capacité suffisante pour éviter tout débordement sont construites en maçonnerie, rendues complètement étanches et vidangées comme les fosses d'aisance (...) ".

10. Ces dispositions sont susceptibles d'être invoquées à l'encontre d'une autorisation d'urbanisme, en tant qu'elles ont trait à l'assainissement des constructions. Le projet, qui prévoit la réalisation d'un box destiné à l'hébergement d'un équidé, ainsi que cela ressort notamment de la configuration de sa porte, doit, contrairement à ce qu'ont fait valoir la commune et le pétitionnaire devant les premiers juges, être regardé comme concernant une activité d'élevage, soumise à ces dispositions, la présence ou l'absence du cheval dans ce bâtiment n'ayant pas vocation à être prise en considération pour la délivrance d'une autorisation d'urbanisme. Dans ces conditions et alors qu'il ressort des photographies jointes au dossier de déclaration préalable qu'un dispositif de lavage est prévu, il appartenait au pétitionnaire de justifier des modalités d'assainissement retenues. En l'absence de toute précision en ce sens, le projet doit être regardé comme méconnaissant les dispositions citées au point précédent.

11. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé ".

12. Les autres moyens invoqués par M. et Mme C... devant les premiers juges et écartés par ces derniers n'ayant pas été repris en appel et les moyens des défendeurs soulevés devant le tribunal ayant été écartés par le présent arrêt dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, il y a lieu de ne procéder qu'à une annulation partielle et conditionnelle de la décision litigieuse, le vice retenu au point 10 portant seulement sur une partie identifiable du projet et étant régularisable sans que la nature même du projet soit modifiée. Il y a lieu de fixer un délai de trois mois à M. D... pour solliciter la régularisation de ces vices. M. et Mme C... sont donc fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont intégralement rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

13. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge.

14. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M. et Mme C... avaient la qualité de partie perdante et ont mis à leur charge une somme de 1 500 euros à verser à M. D.... Les requérants sont donc fondés à demander l'annulation de l'article 2 du jugement litigieux. Il y a lieu pour la cour, saisie à nouveau, au titre de l'effet dévolutif de l'appel, des conclusions présentées en première instance par M. D..., ainsi que de celles présentées par les requérants tant en première instance qu'au titre de la procédure d'appel, de rejeter les conclusions de l'ensemble des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le maire de Geispolsheim ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux déposée le 8 septembre 2015 par M. A... D... est annulé en tant que le projet n'est pas conforme aux dispositions de l'article 156 du règlement sanitaire départemental du Bas-Rhin relatives à l'assainissement.

Article 2 : Le délai imparti à M. A... D... pour solliciter la régularisation de son projet est fixé à trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 janvier 2019 est annulé.

Article 4 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 31 janvier 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et Mme E... C..., à la commune de Geispolsheim et à M. A... D....

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

6

N° 19NC00903


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00903
Date de la décision : 14/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture et forêts - Exploitations agricoles.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation des installations et travaux divers.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme la Pdte. Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : MAAMOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-14;19nc00903 ?
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