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25/11/2021 | FRANCE | N°20NC03468

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 25 novembre 2021, 20NC03468


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile à la suite de sa demande du 21 décembre 2018, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de lui accorder sans délai l'allocation pour demandeur d'asile à compter du 21 décembre 2018 sous astreinte de 200 euros par jour à compter

de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Offic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile à la suite de sa demande du 21 décembre 2018, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de lui accorder sans délai l'allocation pour demandeur d'asile à compter du 21 décembre 2018 sous astreinte de 200 euros par jour à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Par un jugement n° 1901820 du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 20NC03468 le 27 novembre 2020, M. B..., représenté par Me Gaudron, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 juillet 2020 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile à la suite de sa demande du 21 décembre 2018 ;

3°) d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de lui accorder sans délai l'allocation pour demandeur d'asile à compter du 21 décembre 2018 sous astreinte de 200 euros par jour à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- n'ayant pas été en situation de fuite au sens du Règlement UE n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, il ne pouvait pas faire l'objet d'un refus de rétablissement des conditions matérielles d'accueil fondé sur le non-respect de l'obligation de se présenter aux autorités ;

- l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas tenu compte de sa vulnérabilité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 février 2021, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me de Froment, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

M. B... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision en date du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant congolais, est entré en France en 2016. Il a déposé une demande d'asile le 2 décembre 2016 et a accepté les conditions matérielles d'accueil de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le 24 janvier 2017. Par une décision du 30 novembre 2017, l'OFII a suspendu le bénéfice des conditions matérielles d'accueil après avoir relevé que M. B... ne s'était pas présenté à la direction départementale de la police aux frontières de l'aéroport de Strasbourg-Entzheim, comme l'y avait invité un courrier du préfet du Bas-Rhin du 10 mai 2017, dans le cadre d'une procédure de transfert vers le Portugal. S'étant finalement vu délivrer une attestation de demande d'asile le 23 octobre 2018, M. B... a sollicité de l'OFII, le 21 décembre 2018, le rétablissement du bénéfice des conditions matérielles d'accueil. Le silence gardé par l'OFII sur cette demande a fait naître une décision implicite de rejet. M. B... relève appel du jugement du 30 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la légalité de la décision implicite de l'OFII :

2. Aux termes de l'article 20 de la directive 2013/33/UE du 26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres peuvent limiter ou, dans des cas exceptionnels et dûment justifiés, retirer le bénéfice des conditions matérielles d'accueil lorsqu'un demandeur (...). / 5. Les décisions portant limitation ou retrait du bénéfice des conditions matérielles d'accueil (...) sont prises au cas par cas, objectivement et impartialement et sont motivées. Elles sont fondées sur la situation particulière de la personne concernée, en particulier dans le cas des personnes visées à l'article 21, compte tenu du principe de proportionnalité. (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicables aux faits de l'espèce : " Le bénéfice des conditions matérielles d'accueil peut être : / 1° Suspendu si, sans motif légitime, le demandeur d'asile a abandonné son lieu d'hébergement déterminé en application de l'article L. 744-7, n'a pas respecté l'obligation de se présenter aux autorités, n'a pas répondu aux demandes d'informations ou ne s'est pas rendu aux entretiens personnels concernant la procédure d'asile ; / 2° Retiré si le demandeur d'asile a dissimulé ses ressources financières ou a fourni des informations mensongères relatives à sa situation familiale ou en cas de comportement violent ou de manquement grave au règlement du lieu d'hébergement ; / 3° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2. / La décision de suspension, de retrait ou de refus des conditions matérielles d'accueil est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur. / La décision est prise après que l'intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites dans les délais impartis. / Lorsque le bénéfice des conditions matérielles d'accueil a été suspendu, le demandeur d'asile peut en demander le rétablissement à l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

4. En premier lieu, il est constant que, dans le cadre de la procédure de transfert vers le Portugal dont il a initialement fait l'objet, M. B... a été destinataire d'un courrier du préfet du Bas-Rhin du 10 mai 2017, dont il a reçu notification le 17 mai suivant, lui demandant de se présenter dans les quinze jours suivant cette notification au service de la direction départementale de la police aux frontières de l'aéroport de Strasbourg-Entzheim en vue de son transfert vers le Portugal, responsable du traitement de sa demande d'asile, et l'informant que l'absence d'accomplissement de cette démarche serait considérée comme la manifestation d'une attitude de soustraction intentionnelle et systématique à la mesure de réadmission dont il faisait l'objet et autoriserait la prolongation pour 12 mois du délai de réadmission au motif de sa fuite sur le fondement de l'article 29 § 2 du Règlement (CE) n° 604/2013 du Conseil de l'Union Européenne.

5. Le requérant se borne à soutenir qu'il n'aurait pas été en situation de fuite au sens de ce règlement, faute de s'être soustrait intentionnellement et systématiquement au contrôle de l'autorité administrative en vue de faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement le concernant et alors qu'il se serait tenu à la disposition des autorités en vue d'un transfert. Toutefois il n'est pas contesté qu'il n'a donné aucune suite quelconque au courrier du préfet du Bas-Rhin du 10 mai 2017 l'invitant à se présenter auprès de la police aux frontières, de sorte que l'OFII a pu légalement considérer qu'il n'avait pas respecté les exigences des autorités en charge de sa situation de demandeur d'asile, notamment celles de se présenter à ces autorités ou de leur fournir toute information ou réponse nécessaire au traitement de sa situation.

6. En second lieu, si M. B... soutient qu'il aurait les plus grandes difficultés à se nourrir, en particulier pendant le week-end et les vacances, lorsque les structures qu'il sollicite sont fermées et qu'il ne serait plus en mesure de subvenir à ses besoins les plus élémentaires, il n'apporte aucune précision, ni aucun élément probant à l'appui de ces allégations, alors que l'OFII fait valoir que l'évaluation initiale de sa situation n'avait pas mis en lumière d'éléments particuliers de vulnérabilité, laquelle avait été estimée à 1 sur l'échelle de 0 à 3 établie par les services de l'Office. Dès lors, en refusant de rétablir au profit de M. B... le bénéfice des conditions matérielles d'accueil, l'OFII, qui a bien procédé à un examen de la vulnérabilité de celui-ci, n'a pas inexactement apprécié cette vulnérabilité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. B....

Sur les frais liés à l'instance :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. B... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à l'Office français de l'immigration et de l'intégration et au ministre de l'intérieur.

2

N° 20NC03468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03468
Date de la décision : 25/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-06-02


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : DE FROMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-11-25;20nc03468 ?
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