La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2021 | FRANCE | N°21NC01449

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 5ème chambre, 28 octobre 2021, 21NC01449


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2001979 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.


Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 mai, 14 et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2001979 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 mai, 14 et 22 septembre 2021, M. A..., représenté par Me Mendy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 18 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juin 2020 pris à son encontre par le préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

Sur le moyen commun :

- le signataire de l'arrêté attaqué était incompétent ;

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

-elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les articles L. 313-7 et R-313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît également les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de cet article ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ainsi que le droit de l'Union européenne ;

- l'illégalité de la décision de refus de séjour entraîne l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la décision fixant le pays d'éloignement :

- elle est insuffisamment motivée.

La requête a été communiquée au préfet de la Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par ordonnance du 22 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 22 septembre 2021.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 15 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Laubriat a été entendu au cours de l'audience publique.

1. M. A..., ressortissant guinéen, qui dit être né le 12 septembre 2000, est entré en France, selon ses déclarations, le 3 décembre 2016. Le 25 janvier 2019, il a demandé la délivrance d'une carte de séjour étudiant. Par un arrêté du 5 juin 2020, le préfet de la Marne lui a opposé un refus, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... fait appel du jugement du 18 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen commun :

2. Aux termes de l'article 43 du décret susvisé du 29 avril 2004 : " Le préfet de département peut donner délégation de signature (...) : 1° En toutes matières (...), au secrétaire général (...) ". Ces dispositions autorisent le préfet de département à déléguer au secrétaire général de la préfecture la signature des actes pris dans l'exercice de ses compétences en matière d'entrée et de séjour des étrangers.

3. Par un arrêté du 3 février 2020, publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Marne a donné délégation à M. Gaudin, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous actes relevant de la compétence de l'Etat dans le département, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de police des étrangers. M. Gaudin disposait ainsi d'une délégation l'habilitant à signer les actes pris dans l'exercice des compétences du préfet en matière d'entrée et de séjour des étrangers, et cela sans qu'il ait à justifier de l'absence ou de l'empêchement du préfet. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de M. Gaudin manque en fait et doit être écarté.

Sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet, après avoir visé les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicables ainsi que les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a rappelé les éléments de la situation personnelle de M. A..., en indiquant notamment qu'il est de nationalité guinéenne, qu'il a déclaré être entré en France le 3 décembre 2016 à l'âge de 16 ans, qu'il a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance, qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour étudiant, que les services de la police aux frontières ont estimé que les documents justifiant de son état civil étaient faux, que M. A... ne peut en tout état de cause prétendre à la délivrance d'un titre de séjour étudiant dès lors qu'il est entré en France sans être muni d'un passeport revêtu d'un visa de long séjour, qu'il ne justifie pas de circonstances exceptionnelles l'empêchant de poursuivre ses études en Guinée, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Guinée où son père et sa fratrie résident toujours, et, enfin, qu'il n'établit pas être exposé à la torture ou à des peines ou traitements inhumains en cas de retour dans son pays d'origine. La décision portant refus de séjour comporte ainsi l'énoncé des circonstances de droit et de fait qui la fondent et est par suite suffisamment motivée. Cette motivation révèle en outre un examen approfondi de la situation personnelle de M. A..., la circonstance que l'arrêté attaqué fasse mention à une seule occasion d'un autre patronyme que celui de l'appelant constituant à cet égard une simple erreur matérielle.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France.(...) ".

6. Pour refuser à M. A... la délivrance du titre de séjour étudiant que ce dernier avait sollicité sur le fondement des dispositions alors applicables de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'est fondé, d'une part, sur le caractère frauduleux des documents d'état civil produits par l'intéressé, d'autre part sur l'irrégularité de son entrée sur le territoire français. Il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé exclusivement sur le second de ces motifs. Dès lors, le moyen tiré par M. A... de ce que le préfet ne serait pas en mesure d'établir que ses documents d'état civil seraient contrefaits est inopérant.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. "

8. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

9. Il n'est pas contesté que le père et la fratrie de M. A... résident toujours en Guinée. Par ailleurs, M. A... n'établit pas qu'il serait isolé en cas de retour dans ce pays. Enfin, il n'établit pas ne pas pouvoir y poursuivre ses études. Dans ces conditions, et en dépit du caractère réel et sérieux de ses études qui n'est pas contesté, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, M. A... reprend en appel, sans apporter d'élément nouveau ni critiquer utilement les motifs de rejet qui lui ont été opposés par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, le moyen tiré de la méconnaissance de son droit à être entendu préalablement prévu par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration reprenant celles de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 désormais abrogées. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 alors applicable du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".

12. Le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français incluse dans l'arrêté du 5 juin 2020 serait insuffisamment motivée ne peut qu'être écarté, dès lors que cet arrêté mentionne, comme il a été dit au point 4, les circonstances de droit et de fait fondant le refus de titre de séjour opposé à M. A... et vise les dispositions de l'article L. 511-1 qui prévoient qu'un refus ou un retrait de titre de séjour peut être assorti d'une telle obligation.

13. En troisième lieu, M. A... n'établissant pas l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, il n'est pas fondé à soutenir que l'illégalité de cette décision devrait entraîner l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

Sur la décision fixant le pays d'éloignement :

14. La décision attaquée vise les articles L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et indique que M. A... est de nationalité guinéenne et qu'il n'établit pas être exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans ce pays. La décision attaquée comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et est par suite suffisamment motivée.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

4

N° 21NC01449


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01449
Date de la décision : 28/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAUBRIAT
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : MENDY

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-10-28;21nc01449 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award