Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Voies Navigables de France a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner M. A... B... au paiement d'une amende de 1 000 euros au titre de l'action publique, et de lui enjoindre, au titre de l'action domaniale, d'évacuer le domaine public fluvial dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1702192 du 24 avril 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné M. B... au paiement d'une amende de 800 euros et lui a enjoint de libérer le domaine public fluvial dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 6 novembre 2019 sous le n° 19NC03204, M. A... B..., représenté par Me Millot-Logier, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1702192 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 avril 2019 ;
2°) subsidiairement, de limiter à un euro symbolique le montant de son amende ;
3°) de rejeter les demandes de Voies Navigables de France ;
4°) de mettre à la charge de Voies Navigables de France la somme de 2 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier, dès lors qu'il n'a pas été rendu par un juge statuant seul ;
- en application des articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l'administration, il doit être relaxé de l'amende, ou à tout le moins le montant de celle-ci doit être réduit, dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a agi de mauvaise foi en méconnaissant délibérément une règle applicable à sa situation, et qu'il est dans l'impossibilité de déplacer son bateau.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2020, Voies Navigables de France conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
II. Par une requête, enregistrée le 12 mars 2020 sous le n° 20NC00649, M. A... B..., représenté par Me Millot-Logier, demande à la cour de prononcer le sursis à l'exécution du jugement n° 1702192 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 avril 2019.
Il soutient que :
- ses moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué et de son absence de mauvaise foi sont sérieux ;
- l'exécution du jugement attaqué emporterait des conséquences manifestement excessives sur son droit de propriété, et il n'est pas en mesure de payer l'astreinte.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par décision en date du 14 janvier 2020.
Vu le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 22 mars 2017 et les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, président assesseur,
- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité du jugement attaqué :
1. Aux termes de l'article L. 3 du code de justice administrative : " Les jugements sont rendus en formation collégiale, sauf s'il en est autrement disposé par la loi ". Aux termes de l'article L. 774-1 du même code : " Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller statue sur les difficultés qui s'élèvent en matière de contravention de grande voirie, à défaut de règles établies par des dispositions spéciales ".
2. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été rendu en formation collégiale, et non par un magistrat désigné à cette fin par le président du tribunal administratif. Toutefois, il résulte de la combinaison des dispositions précitées qu'elles ne font nullement obstacle à ce qu'un jugement en matière de contraventions de grande voirie soit rendu en formation collégiale. Par suite le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait, de ce fait, entaché d'irrégularité, doit être écarté.
Sur l'action publique :
3. Aux termes de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. Le contrevenant est passible d'une amende de 150 à 12 000 euros, de la confiscation de l'objet constituant l'obstacle et du remboursement des frais d'enlèvement d'office par l'autorité administrative compétente ".
4. Le procès-verbal, établi le 22 mars 2017 sur le fondement des dispositions de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques, mentionne que le bateau dénommé " Ramses ", dont M. B... est propriétaire, stationne, sans droit ni titre, en rive gauche de l'écluse de Thionville, au point PK 269.600 sur la commune de Thionville. Ce procès-verbal établit ainsi une contravention de grande voirie.
5. En premier lieu, les dispositions des articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l'administration, qui ne s'appliquent qu'à certaines sanctions administratives prononcées par l'administration, ne peuvent pas être utilement invoquées en matière de contraventions de grande voirie.
6. En deuxième lieu, l'infraction prévue par les dispositions de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques précité n'étant constituée d'aucun élément moral, M. B... ne peut pas utilement faire valoir sa bonne foi.
7. En troisième lieu, M. B... fait valoir qu'il serait dans l'impossibilité de naviguer pour déplacer son bateau, faute de disposer de l'assurance lui permettant d'obtenir de l'administration une autorisation à cette fin. Toutefois, il résulte de l'instruction que son assureur subordonne l'octroi de sa garantie à une inspection de la coque de son bateau, laquelle peut, selon les explications de VNF, être réalisée moyennant le remorquage de ce dernier à terre pour sa mise en cale sèche. Il ne résulte pas de l'instruction que cette opération serait impossible à effectuer. Dans ces conditions, la force majeure n'est pas établie.
8. En dernier lieu, aucune de ces considérations invoquées par M. B... n'est de nature à justifier une réduction du montant de l'amende que lui a infligée le tribunal.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à payer une amende de 800 euros et à déplacer son bateau sous astreinte.
Sur le sursis à exécution du jugement :
10. La cour se prononçant par le présent arrêt sur le bien-fondé du jugement attaqué, les conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
Sur les frais de l'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Voies Navigables de France, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20NC00649, tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1702192 du tribunal administratif de Strasbourg du 24 avril 2019.
Article 2 : La requête n° 19NC03204 de M. B... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à Voies Navigables de France.
N°s 19NC03204-20NC00649 2
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