La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/07/2021 | FRANCE | N°21NC00223-21NC00225

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 15 juillet 2021, 21NC00223-21NC00225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Mme E... F..., épouse A..., a demandé au tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer u

n titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de tre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Mme E... F..., épouse A..., a demandé au tribunal administratif de

Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 2001899, 2001900 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.- Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2021, sous le n° 21NC00223, M. D... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 18 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à titre principal au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à titre subsidiaire au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a déclaré sa demande tardive et donc irrecevable.

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La préfète de l'Aube n'a pas produit de mémoire en défense.

II.- Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2021, sous le n° 21NC00225, Mme E... F... épouse A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 18 décembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à titre principal au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à titre subsidiaire au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a déclaré sa demande tardive et donc irrecevable.

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La préfète de l'Aube n'a pas produit de mémoire en défense.

M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 mai 2021.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A..., ressortissants albanais, sont entrés en France, selon leurs déclarations, en 2017 avec leurs deux enfants, alors mineurs, en vue de solliciter l'asile. Leurs demandes ont été rejetées par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 janvier 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 7 décembre 2018. M. A... a ensuite bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 12 août 2019 au 11 février 2020. Il en a sollicité le renouvellement le 7 novembre 2019. Par un arrêté du 10 août 2020, le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Il a par un second arrêté du même jour refusé de délivrer le titre de séjour sollicité par Mme A... le 16 septembre 2019, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. et Mme A... font appel du jugement du 18 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. Les requêtes susvisées, enregistrées sous les nos 21NC00223 et 21NC00225, sont relatives à la situation d'un couple d'étrangers et présentent à juger des mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. Pour déclarer les demandes de M. et Mme A... irrecevables, les premiers juges ont estimé que les arrêtés en litige avaient été notifiés aux requérants le 14 août 2020, avec la mention des voies et délais de recours, et qu'en conséquence, leurs demandes, enregistrées au greffe du tribunal le 20 septembre 2020, soit après l'expiration du délai de recours contentieux de trente jours prévu par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, étaient tardives. Toutefois, il ressort de la mention figurant sur l'un des plis du courrier recommandé que les requérants ont seulement été avisés le 14 août 2020 de ce qu'ils étaient destinataires d'un courrier recommandé. Il ressort également du document retraçant l'historique de suivi postal produits en appel par les intéressés, que les courriers recommandés ont été déposés au bureau postal de leur lieu de domiciliation le 14 août 2020 et qu'ils les ont retirés le 21 août 2020, soit avant qu'ils ne soient retournés à la préfecture à l'expiration du délai de quinze jours, conformément à la réglementation postale. Le délai de recours ayant commencé à courir à compter du retrait des courriers recommandés, les demandes des requérants enregistrées au greffe du tribunal le 20 septembre 2020 n'étaient pas tardives. Il y a donc lieu d'annuler pour ce motif le jugement attaqué.

4. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les demandes de M. et Mme A....

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les décisions de refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, les décisions contestées comportent les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...)/ 11°A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) / La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...). Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement ".

7. D'une part, le collège des médecins a estimé, dans son avis du 5 juin 2020, que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, le collège de médecins n'était pas tenu de préciser en outre s'il pourrait bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, et en admettant qu'il ait entendu soulever un tel moyen, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cet avis méconnait les dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 et qu'en conséquence, la décision en litige serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière.

8. D'autre part, pour refuser à M. A..., qui a subi des opérations des hanches, gauche et droite, au cours de l'année 2018, de renouveler son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Aube s'est fondé sur l'avis émis le 5 juin 2020 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de soins ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les certificats médicaux produits par le requérant, notamment des 31 janvier 2020 et du 26 mars 2020, qui mentionnent que la hanche gauche nécessite une reprise chirurgicale, sans nécessité absolue, et que la hanche droite, en raison d'une tige faisant saillie et provoquant des douleurs, doit faire l'objet d'une nouvelle intervention qui n'est pas urgente, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les médecins du collège sur les conséquences d'une absence de traitement. S'il ressort des pièces du dossier, notamment d'un certificat médical du 25 novembre 2020, que l'intéressé a subi une nouvelle intervention de la hanche gauche en octobre 2020, suivie de complications liées à une contamination justifiant, selon son médecin, un suivi rigoureux dans un système de santé moderne et adapté, ces circonstances sont postérieures à la décision en litige. Dès lors que M. A... n'a pas établi que l'absence de traitement aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne peut utilement soutenir qu'il ne pourra pas accéder à un traitement effectif dans son pays d'origine. Par suite, le préfet de l'Aube n'a pas commis d'erreur de fait concernant l'accessibilité aux soins, ni davantage fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer un titre de séjour à M. A....

9. Eu égard à ce qui a été dit au point précédent, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que le préfet a entaché d'illégalité sa décision en refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire à en qualité d'accompagnant de son époux malade.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

11. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A... étaient présents en France depuis moins de trois ans à la date de la décision en litige. Si M. A... se prévaut de son état de santé, cette circonstance n'est pas de nature à établir que la décision en litige porte atteinte à sa vie privée et familiale tout comme d'ailleurs les risques allégués par les requérants en cas de retour dans leur pays d'origine. Les intéressés n'apportent aucun élément établissant qu'ils auraient transféré le centre de leurs intérêts en France. Par ailleurs, ils n'établissent pas que leur fils, né en 2003, scolarisé dans un lycée professionnel, ne pourra pas poursuivre sa scolarité normale en Géorgie. Si leur fille aînée a obtenu le statut de réfugié, elle est majeure et rien ne s'oppose à ce qu'ils lui rendent visite. Dans ces conditions, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Aube a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation que le préfet aurait commis dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur leur situation personnelle doit être écarté.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français devraient être annulées par voie de conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour ne peut qu'être écarté.

13. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) ".

14. Les décisions portant refus de délivrance à M. et Mme A... d'un titre de séjour étant suffisamment motivées, ainsi qu'il a été indiqué au point 5, les décisions en litige n'avaient pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, à faire l'objet d'une motivation spécifique. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

15. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Ce dernier texte dispose que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

16. M. et Mme A... soutiennent qu'ils encourent des risques en cas de retour dans leur pays d'origine où M. A..., en raison de ses fonctions de policier, a été menacé. Toutefois, ni les procès-verbaux de plaintes déposés en juin, juillet et août 2020 par le père de M. A..., qui a déclaré avoir reçu des menaces d'individus motivées par les fonctions de policier que son fils avait exercées, ni la dégradation de l'appartement du père de M. A... à la suite d'une explosion ne sont suffisants à établir que M. A... encourait des risques personnels en cas de retour en Albanie contre lesquels les autorités de cet Etat ne pourraient pas le protéger. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en désignant l'Albanie comme pays à destination duquel ils pourraient être éloignés, le préfet de l'Aube a méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du préfet de l'Aube du 10 août 2020. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement nos 2001899, 2001900 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 18 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : Les demandes de première instance de M. et Mme A... et le surplus des conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Mme E... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aube.

Nos 21NC00223, 21NC00225 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00223-21NC00225
Date de la décision : 15/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : GAFFURI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-15;21nc00223.21nc00225 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award