Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 31 août 2020 par lequel le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.
Par un jugement n° 2001867 du 19 novembre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2020, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 10 février et 30 mars 2021, M. A... B..., représenté par Me D..., doit être regardé comme demandant à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001867 du tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne du 19 novembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Aube du 31 août 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence méconnaît les stipulations du 4) et du 5) du deuxième alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- la décision en litige méconnaît également les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît encore les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2021, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B... est un ressortissant algérien, né le 31 octobre 1991. Il est entré régulièrement en France, le 8 juillet 2019, sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de court séjour de quinze jours, valable du 5 juillet au 3 août 2019. Se prévalant de la présence régulière en France de son épouse, avec laquelle il est marié depuis le 5 octobre 2015, et de leur fille née le 23 décembre 2018, il a sollicité le 3 juillet 2020 son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Toutefois, par un arrêté du 31 août 2020, le préfet de l'Aube a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. M. B... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 31 août 2020. Il relève appel du jugement n° 2001867 du 19 novembre 2020, qui rejette sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résident en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ".
3. M. B... ne saurait utilement invoquer les stipulations précitées pour contester la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence, dès lors que, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa fille mineure, née le 23 décembre 2018, serait de nationalité française et que, d'autre part, ayant épousé en Algérie, le 5 octobre 2015, une compatriote séjournant régulièrement en France sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans, il entre dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance desdites stipulations doit être écarté comme inopérant.
4. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ".
5. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, dans sa rédaction alors applicable, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants algériens, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles ils peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Toutefois, si l'accord franco-algérien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
6. M. B... se prévaut essentiellement de son mariage avec une compatriote, titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, de la naissance en France de leur fille le 23 décembre 2018 et d'une promesse d'embauche en qualité de mécanicien datée du 30 juin 2020. Toutefois, il n'est pas contesté que l'intéressé n'est présent sur le territoire français que depuis le 8 juillet 2019 et qu'il n'y justifie pas d'une intégration particulière. S'il fait valoir qu'il a vécu séparé de son épouse et de sa fille en raison de l'obligation dans laquelle il s'est trouvé de s'occuper de sa mère malade jusqu'à son décès, il ne l'établit pas. Il ne démontre pas davantage être isolé dans son pays d'origine. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que son épouse et sa fille seraient dans l'impossibilité de l'accompagner en Algérie et d'y poursuivre une existence et, s'agissant de la seconde, une scolarité normales, ni inversement que l'intéressé ne pourrait pas bénéficier d'une mesure de regroupement familial en France. Par suite, le préfet de l'Aube n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel.
7. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
8. Compte tenu de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations en cause, ainsi que celui tiré de ce que la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aube du 31 août 2020. Par voie de conséquence, il n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me D... pour M. A... B... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
N° 20NC03479 2