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15/04/2021 | FRANCE | N°19NC02024

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 15 avril 2021, 19NC02024


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée sous le n° 19NC02024 le 27 juin 2019, complétée par un mémoire enregistré le 3 octobre 2019, la société Fongaly Immobilier, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, l'arrêté du 4 avril 2019 par lequel le maire de Creutzwald a accordé à la société Croixdis-LG un permis de construire pour la création d'un " Espace Matériaux Bâti E. Leclerc " de 4 790 m² de surface de vente et d'un point permanent de retrait à l'enseigne " E.

Leclerc Drive " de six pistes de ravitaillement et de 462 m² d'emprise au sol ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée sous le n° 19NC02024 le 27 juin 2019, complétée par un mémoire enregistré le 3 octobre 2019, la société Fongaly Immobilier, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, l'arrêté du 4 avril 2019 par lequel le maire de Creutzwald a accordé à la société Croixdis-LG un permis de construire pour la création d'un " Espace Matériaux Bâti E. Leclerc " de 4 790 m² de surface de vente et d'un point permanent de retrait à l'enseigne " E. Leclerc Drive " de six pistes de ravitaillement et de 462 m² d'emprise au sol ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Creutzwald une somme de 5 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable : elle a un intérêt pour agir et son recours n'est pas tardif ;

- le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale est insuffisant en ce qui concerne la zone de chalandise, l'évolution de la population totale de la zone de chalandise, les flux de circulation, le volet environnemental et paysager et, enfin, les risques de pollution du site ;

- le projet n'est pas conforme aux objectifs prévus à l'article L. 752-6 du code de commerce en matière d'aménagement du territoire (il y a un risque d'atteinte à l'animation de la vie urbaine ; le projet aura des effets négatifs sur les flux de circulation aux abords du projet ; il risque de créer des friches ; la desserte par les modes doux est insuffisante) et en matière de développement durable (la qualité environnementale du projet est insuffisante ; les risques affectant le site ont été insuffisamment pris en compte, du point de vue de la circulation interne, et du point de vue des risques miniers).

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 septembre et 17 octobre 2019, la société Croixdis-LG, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société Fongaly Immobilier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable, pour défaut d'intérêt pour agir et tardiveté ;

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2019, la commune de Creutzwald, représentée par la selarl le Roy, Gourvennec, Prieur, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de la société Fongaly Immobilier sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable, pour défaut d'intérêt pour agir et tardiveté ;

- les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté pour la société Fongaly Immobilier, tendant aux mêmes fins que ses écritures précédentes, par les mêmes moyens, a été enregistré le 22 février 2021 et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code du commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la société Fongaly Immobilier, et celles de Me C... pour la commune de Creutzwald.

Considérant ce qui suit :

1. En juin 2018, la société Croixdis-LG a déposé auprès de la commune de Creutzwald une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un " Espace Matériaux Bâti E. Leclerc " de 4.790 m² de surface de vente et d'un point permanent de retrait à l'enseigne " E. Leclerc Drive " de six pistes de ravitaillement et de 462 m² d'emprise au sol. La commission départementale d'aménagement commercial de la Moselle a émis le 29 octobre 2018 un avis favorable au projet. La société Fongaly Immobilier, bailleur commercial des cellules constituant la galerie marchande attenante à l'hypermarché " Cora " de Longeville-lès-Saint-Avold, a formé un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC). Cette dernière a émis un avis favorable au projet lors de sa séance du 21 février 2019, ce qui a conduit le maire de Creutzwald à accorder le permis de construire sollicité par la société Croixdis-LG, par un arrêté du 4 avril 2019. La société Fongaly Immobilier demande à la cour d'annuler ce permis de construire, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité de l'arrêté du 4 avril 2019 :

En ce qui concerne l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation :

2. Aux termes de l'article R. 52-6 du code du commerce, dans sa rédaction alors en vigueur : " La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : (...) 2° Informations relatives à la zone de chalandise et à l'environnement proche du projet : (...) b) Une carte ou un plan de l'environnement du projet, dans un périmètre d'un kilomètre autour de son site d'implantation (...) 4° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire : Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : (...) c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; (...) ".

3. Si le dossier de demande d'autorisation doit comporter des éléments suffisants pour permettre à la commission nationale d'apprécier la conformité du projet aux objectifs fixés par le législateur, la circonstance que le dossier de demande d'autorisation de permis de construire serait incomplet ou que des pièces seraient insuffisantes, imprécises ou inexactes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire accordé que dans le cas où ces omissions, inexactitudes ou insuffisances ont été de nature à fausser l'appréciation de l'administration sur la conformité du projet à la réglementation.

S'agissant de la zone de chalandise :

4. Si la société Fongaly Immobilier soutient que le dossier de demande d'autorisation ne précise pas que l'offre proposée par la société Croixdis-LG existe déjà dans la zone de chalandise et que, sur Saint-Avold en particulier, il se borne à mentionner la présence des magasins " Mr. Bricolage " et Point Vert " (devenu " La Maison "), alors que la zone de chalandise comporte bien d'autres équipements, l'article R. 752-6 du code de commerce n'impose pas au pétitionnaire de dresser une liste exhaustive des équipements commerciaux déjà existants dans la zone de chalandise. En outre, le dossier de demande d'autorisation présenté par la société Croixdis-LG décrit, sur plusieurs pages, les " Lieux exerçant une attraction significative sur la population de la zone de chalandise " (pages 43 et suivantes), ainsi que " Les activités commerciales et services " présentes dans l'environnement proche du site d'implantation du projet (pages 43 et suivantes).

S'agissant de l'évolution de la population de la zone de chalandise :

5. L'article R. 752-6 du code du commerce prévoit que le dossier de demande d'autorisation doit comporter notamment " une carte ou un plan indiquant les limites de la zone de chalandise, accompagné : (...) de la population de chaque commune ou partie de commune comprise dans cette zone, de la population totale de cette zone et de son évolution entre le dernier recensement authentifié par décret et le recensement authentifié par décret dix ans auparavant (...) " Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport d'instruction de la CNAC en date du 21 février 2019, et il n'est au demeurant pas contesté, que la population de la zone de chalandise est passée de 96 614 en 1999 à 96 644 en 2016, soit une augmentation extrêmement minime de + 0,03% sur la période considérée. Dès lors, la circonstance que l'analyse démographique de la zone de chalandise se fonde sur les données disponibles en 2015, et non sur celles de 2016, est en tout état de cause sans incidence.

S'agissant des accès et des flux de circulations :

6. Le dossier de demande d'autorisation comporte, pages 59 et 60, un point III relatif à " l'impact du projet sur les flux de circulation ", et, pages 61 et 62, un point IV relatif à " l'analyse prévisionnels des flux de déplacement dans la zone de chalandise ", qui décrivent notamment les flux de véhicules légers et les flux des véhicules de livraison. Concernant plus particulièrement les véhicules de livraison, il précise qu'ils accèderont au site de la même façon que la clientèle, qu'une fois sur place, ils longeront le bâtiment par la droite pour accéder à la zone de livraison située à l'arrière, et qu'une zone de retournement est prévue pour faciliter les manoeuvres des camions, une fois les livraisons effectuées. Il indique également que l'Espace matériaux Bâti E. Leclerc sera livré chaque semaine par 10 poids lourds, contre 7 actuellement, 5 petits camions et camionnettes, contre 3 actuellement, et 5 véhicules utilitaires, contre 3 actuellement, et que le drive sera livré par une camionnette assurant la navette depuis le magasin E. Leclerc Avold, où seront préparées les commandes, à raison de 3 à 4 rotations par jour. Il souligne par ailleurs que les livraisons s'effectueront tôt le matin, en dehors des heures magasin, pour ne pas gêner la circulation.

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que des précisions supplémentaires sur le fonctionnement du service de location de véhicules et sur son incidence sur les flux de circulation auraient été nécessaires pour permettre à la CNAC d'apprécier la conformité du projet à la législation, alors que la nature même de ce type de service implique que les véhicules loués sont, le plus souvent, hors du site de location et ne posent pas de problèmes particulier en matière de stationnement.

8. La circonstance que les accès au bâtiment artisanal " seront mutualisés avec ceux du projet " n'étant pas, en soi, de nature à poser un problème de sécurité de circulation entre les deux bâtiments, le pétitionnaire n'était pas tenu de donner des informations particulières sur cet aspect de son projet.

S'agissant du volet environnemental et paysager :

9. Le dossier de demande d'autorisation comporte, pages 68 à 74, un point III relatif à " L'intégration architecturale et paysagère du projet dans son environnement ", qui décrit en détail le paysage et l'écosystème, l'aménagement paysager et les matériaux de construction utilisés. Il comporte notamment, page 68, une photo aérienne de l'environnement immédiat du projet et, page 7/13 de l'annexe au dossier de demande, une photo aérienne de l'environnement du projet sur 1 km.

S'agissant des risques de pollution du site :

10. Le dossier de demande d'autorisation comporte, pages 75 à 77, un point IV 2. relatif aux " mesures limitant les pollutions et les nuisances associées à l'activité ", qui décrit la gestion des eaux pluviales, de l'eau potable, des eaux usées, ainsi que la gestion des déchets et pollution d'exploitation et, pages 86 et 87, un autre point IV relatif à " l'évaluation des risques naturels, technologies et miniers ". Si ce dernier ne mentionne pas le risque de pollution des sols, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il y aurait des raisons de suspecter l'existence d'un telle pollution, et ce nonobstant la circonstance que le site en cause a été antérieurement occupé par l'usine Grundig, dont la cessation de l'activité avait été du reste accompagnée d'un désamiantage du site.

11. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale serait insuffisant pour permettre à la CNAC d'apprécier la conformité du projet aux objectifs fixés par le législateur.

En ce qui concerne le respect des objectifs et des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce :

12. Aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce : " Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ".

13. L'article L. 752-6 du même code dispose, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 23 septembre 2015 : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au dernier alinéa de l'article L. 123-1-4 du code de l'urbanisme. / La Commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale ".

14. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 752-6 du code du commerce que la Commission départementale d'aménagement commercial prend en considération trois séries de critères liés à l'aménagement du territoire, au développement durable et à la protection des consommateurs. A titre accessoire, elle peut également prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. Lorsqu'elle est saisie, la CNAC émet un avis sur la conformité du projet aux mêmes critères. Il suit de là, que l'autorisation d'exploitation commerciale ne peut être accordée que si, eu égard à ses effets, le projet ne compromet pas la réalisation des objectifs prévus par la loi.

S'agissant de l'objectif d'aménagement du territoire :

Quant à l'animation de la vie urbaine et rurale :

15. D'une part, la CNAC et le ministre du commerce soulignent, dans leurs avis respectifs des 21 février 2019 et 14 février 2019, que le projet litigieux, localisé au sein du Parc d'Activités Sud, sur un terrain en friche comblant une " dent creuse " comprenant actuellement un bâtiment artisanal en fond de parcelle, ne concurrencera pas le centre-ville de Creutzwald, lequel "ne dispose pas d'offre commerciale équivalente ", et que " Le futur Drive apportera un nouveau service absent du centre-ville ", de sorte que " le projet n'aura pas d'effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine ". La direction départementale des territoires (DDT) de la Moselle confirme, dans son rapport du 16 octobre 2018, que " Les commerces présents en centre-ville par leur nature ne seront pas impactés par le projet ".

16. D'autre part, si la commune de Creutzwald fait partie de la Communauté de communes du Warndt, couverte par le SCOT du Val de Rosselle approuvé le 5 mars 2012 et mis en révision le 25 avril 2013, la CNAC souligne, dans son rapport d'instruction du 21 février 2019, que ce SCOT " ne dispose pas d'un Document d'Aménagement Commercial (DAC) ", que " Pour le volet du commerce, le SCOT préconise l'amélioration de la qualité des sites existants " et que " selon la DDT, le projet s'inscrit dans cet objectif ". En tout état de cause, la requérante ne saurait utilement soutenir que le renforcement de l'équipement commercial dans les centres-villes est une priorité du document d'orientations générales du futur SCOT de Rosselle, dès lors que ce dernier n'était pas en vigueur à la date de la décision contestée.

17. Enfin, si l'article 166 de la loi dite " Elan " n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 prévoit que le demandeur d'une autorisation d'exploitation commerciale doit démontrer qu'aucune friche existante en centre-ville ne permet l'accueil du projet envisagé, ou en l'absence d'une telle friche, qu'aucune friche existante en périphérie ne permet l'accueil du projet envisagé, ces dispositions ne concernent, en application de l'article 12 du décret n° 2019-331 du 17 avril 2019, que les demandes d'autorisations d'exploitation commerciale ou de permis de construire en tenant lieu déposées à partir du 1er janvier 2020, ce qui exclut la demande d'autorisation de la société pétitionnaire, déposée en juin 2018.

18. Par suite, nonobstant l'avis défavorable et très peu circonstancié émis le 18 février 2019 par le ministre de l'urbanisme, et quand bien même les communes de Saint-Avold, Folschviller et Valmont, situées dans la zone de chalandise, bénéficieraient des aides du FISAC pour faire face aux difficultés rencontrées par leurs commerçants, le projet litigieux ne compromet pas la réalisation de l'objectif d'animation de la vie urbaine et rurale.

Quant aux flux de circulation aux abords du projet :

19. La CNAC et le ministre du commerce soulignent, dans leurs avis respectifs des 21 février 2019 et 14 février 2019, que le projet dispose d'une bonne desserte routière par la RD73, que l'accroissement du flux de circulation sur cette voie ne sera pas sensiblement modifié du fait du projet, que l'accès au site sera sécurisé par la création d'un " tourne-à-gauche " financé par le pétitionnaire, et qu'un panneau " STOP " sera positionné en sortie du parking et que cette sortie se fera exclusivement par la droite, pour éviter de couper la route. Le rapport d'instruction de la commission nationale mentionne par ailleurs que l'étude de trafic jointe à la demande d'autorisation précise que le projet générera des mouvements de trafic de l'ordre de 40 véhicules supplémentaires à l'heure de pointe et conclut à un impact très modéré, non susceptible de dégrader les conditions futures de circulation sur la RD73. S'agissant plus particulièrement des livraisons, il est indiqué que les camions emprunteront la N33 qui permet un accès direct à la zone commerciale du Parc d'activités Sud, pour ne pas perturber la circulation en zone urbaine, et que les livraisons s'effectueront tôt le matin, en dehors des heures d'ouverture du magasin. Enfin, ainsi qu'il a été dit plus haut, dès lors que le futur SCOT de Rosselle n'était pas en vigueur à la date de la décision contestée, la requérante ne peut pas utilement s'en prévaloir. Par suite, le projet litigieux ne compromet pas la réalisation des objectifs de l'article L. 752-6 du code de commerce, en matière de flux de circulation.

Quant à la desserte par les modes doux :

20. La CNAC et le ministre du commerce soulignent, dans leurs avis respectifs des 21 février 2019 et 14 février 2019, que le site est desservi par deux lignes, 4 et 22, du réseau régional TIM, grâce à l'arrêt " Zone commerciale " situé route de Jonction, à moins de 100 mètres du projet. A cet égard, si la DDT souligne que la ligne 4 ne dessert le site qu'une fois par jour et n'est pas adaptée aux clients et aux salariés, et que la ligne 22, bien que desservant le site 6 fois par jour et par sens de circulation, n'est pas suffisante, les déplacements des clients s'effectueront essentiellement, ainsi qu'il a été dit plus haut, avec les véhicules particuliers, et pas avec les transports en commun, compte tenu de la nature des produits proposés par le projet litigieux.

21. La CNAC mentionne également, dans son rapport d'instruction, que la voirie locale assurant la desserte du Parc d'Activités Sud est équipée de trottoirs et de passages piétons suffisamment larges pour circuler en sécurité, et qu'un cheminement piéton sera réalisé en façade principale du bâtiment, relié aux espaces de stationnement et connecté aux espaces publics extérieurs, permettant à la clientèle se déplaçant à pied d'accéder avec facilité au magasin. Elle ajoute que, s'il n'y a pas de piste cyclable, " les déplacements des clients s'effectueront essentiellement en véhicule compte tenu de la nature des produits vendus (matériaux lourds et encombrants) et de la présence du Drive ".

22. Enfin, ainsi qu'il a été dit plus haut, dès lors que le futur SCOT de Rosselle n'était pas en vigueur à la date de la décision contestée, la requérante ne peut pas utilement s'en prévaloir.

23. Par suite, nonobstant l'avis défavorable et très peu circonstancié du ministre de l'urbanisme, le projet litigieux ne compromet pas la réalisation des objectifs de l'article L. 752-6 du code de commerce, en matière de desserte du projet par les modes doux.

Quant au risque de créer des friches :

24. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux, qui permet lui-même de combler une friche existante en s'intégrant dans une dent creuse, entraînerait une imperméabilisation de terres allant au-delà de ce que génère tout projet comparable. D'autre part, la société pétitionnaire n'était pas tenue de justifier l'absence de reconversion des bâtiments déjà existants sur la parcelle d'assiette du projet, bâtiments qui, au demeurant, ne sont pas inoccupés. Enfin, ainsi qu'il a été dit plus haut, si l'article 166 de la loi dite " Elan " de 2018 impose la démonstration, par le pétitionnaire, de l'absence de friche réutilisable en centre-ville ou en périphérie, cette exigence ne concerne que les demandes d'autorisations déposées à partir du 1er janvier 2020.

S'agissant de l'objectif de développement durable :

Quant à la qualité environnementale du projet :

25. La CNAC et le ministre du commerce soulignent, dans leurs avis respectifs des 21 février 2019 et 14 février 2019, " qu'en ce qui concerne la qualité environnementale, le projet dépassera les exigences de la RT 2012 ", que les espaces verts représenteront 3 506 m², soit 14,7 % de l'emprise foncière du site, avec 35 arbres à planter contre 6 actuellement. La CNAC indique également, dans son rapport d'instruction, que l'intégration paysagère sera accentuée par les 225 m² de places enherbées ainsi que les 470 m² de toiture végétalisée. S'agissant plus particulièrement du bâti, il est indiqué que le projet sera visible depuis la RD73, principale voie d'accès le desservant, que le bâtiment sera de type moderne, avec de multiples hauteurs permettant d'animer l'architecture du bâtiment, ce qui sera " en adéquation avec celles des bâtiments existants présents autour du projet ". Le ministre du commerce insiste par ailleurs sur le fait qu'" En venant combler une friche visible en front de rue située entre l'actuel Brico E. Leclerc à l'Est et l'entreprise Hasbro à l'Ouest, le projet viendra améliorer l'impact visuel pour les riverains ".

26. En outre, il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a veillé à garantir le développement durable de son projet, notamment une consommation économe d'énergie, par le choix notamment d'une isolation performante et l'installation de panneaux photovoltaïques.

27. Enfin, ainsi qu'il a été dit plus haut, dès lors que le futur SCOT de Rosselle n'était pas en vigueur à la date de la décision contestée, la requérante ne peut pas utilement s'en prévaloir.

28. Par suite, nonobstant l'avis défavorable très peu circonstancié du ministre de l'urbanisme, le projet litigieux ne compromet pas la réalisation des objectifs de l'article L. 752-6 du code de commerce, s'agissant de la qualité environnementale du projet.

Quant aux risques affectant le site :

29. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions de la circulation interne au site d'implantation du projet soient de nature à générer des risques pour ses usagers, qu'il s'agisse des automobilistes ou des piétons. En outre, si le rapport de la DDT du 16 octobre 2018 mentionne que la commune de Creutzwald est soumise, d'une part aux risques sismiques et, d'autre part, au risque " Transports de Matières Dangereuses " (TMD), il précise que le risque sismique est de niveau 1, très faible, et qu'en tout état de cause, ces risques relèvent d'une réglementation de prévention spécifique et n'ont donc pas d'impact sur le projet.

30. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les objectifs et critères de l'article L. 752-6 du code de commerce ont été méconnus.

31. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la société Croixdis-LG et la commune de Creutzwald, que les conclusions de la société Fongaly Immobilier tendant à l'annulation du permis de construire du 4 avril 2019, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

32. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

33. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge la commune de Creutzwald, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la société Fongaly Immobilier demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

34. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Fongaly Immobilier une somme de 2 000 euros à verser, d'une part, à la société Croixdis-LG et, d'autre part, à la commune de Creutzwald, au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Fongaly Immobilier est rejetée.

Article 2 : La société Fongaly Immobilier versera à la société Croixdis-LG et à la commune de Creutzwald une somme de 2 000 euros chacune, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié la société Fongaly Immobilier, à la société Croixdis-LG, à la commune de Creutzwald et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 19NC02024


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