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18/03/2021 | FRANCE | N°19NC02528

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 18 mars 2021, 19NC02528


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le centre de formation des apprentis hôtelier de Metz à lui verser une indemnité de 24 000 euros en réparation des préjudices financier, matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait du non-respect des règles statutaires applicables à sa situation d'agent non titulaire.

Par un jugement n° 1703216 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour

:

Par une requête, enregistrée le 5 août 2019, et un mémoire complémentaire, enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner le centre de formation des apprentis hôtelier de Metz à lui verser une indemnité de 24 000 euros en réparation des préjudices financier, matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait du non-respect des règles statutaires applicables à sa situation d'agent non titulaire.

Par un jugement n° 1703216 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 août 2019, et un mémoire complémentaire, enregistré le 2 décembre 2020, M. F... B..., représenté par Me A..., doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703216 du tribunal administratif de Strasbourg du 20 juin 2019 ;

2°) de condamner le lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier, à lui verser une indemnité de 24 000 euros en réparation des préjudices financier, matériel et moral qu'il estime avoir subis du fait du non-respect des règles statutaires applicables à sa situation d'agent non titulaire ;

3°) de mettre à la charge du lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier, la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- ses contrats de travail successifs, dont il a bénéficié sans discontinuer, de 1995 à 2012, au sein du centre de formation des apprentis hôtelier de Metz, ne relèvent pas des dispositions des articles R. 6232-12 et suivants du code du travail, mais de celles du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat ;

- on ne peut opposer à un agent public, dont l'engagement a pris fin, un dispositif réglementaire ou législatif auquel l'employeur public n'a manifestement pas songé, ni même fait référence au moment du recrutement ;

- en application des articles 13 à 15 de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2015, portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, il aurait dû bénéficier d'un engagement à durée indéterminée, la loi n'ayant aucunement prévu de limiter l'application de son dispositif à la nature de l'emploi occupé, permanent, temporaire, à temps complet ou non complet ;

- il est fondé à réclamer une indemnisation à laquelle pouvait légalement prétendre un agent non titulaire recruté sans discontinuer pendant une durée de dix-sept ans et dont il est mis un terme à l'engagement sans préavis.

Par un mémoire en défense, le 13 novembre 2019, et un mémoire, enregistré le 10 décembre 2020, le lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier, représenté par Me G..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les prétentions indemnitaires de M. B... ne sont pas fondées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour M. B... et de Me E... pour le lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... B... a été employé au sein du centre de formation des apprentis hôtelier de Metz, d'abord, en qualité de surveillant du 11 septembre 1995 au 15 novembre 1998, puis en qualité d'animateur du centre ressources, du 16 novembre 1998 au 31 août 2007, et de professeur en " Prévention sociale et environnement " et en " Vie sociale et professionnelle ", du 16 novembre 1998 au 31 août 2012. Par un courrier du 29 juin 2012, le proviseur du lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, directeur du centre de formation des apprentis hôtelier, lui a notifié son intention de ne pas renouveler son dernier contrat, conclu pour la période allant du 1er septembre 2011 au 31 août 2012, et lui a délivré l'attestation d'employeur destinée à Pôle Emploi. Le 4 avril 2016, le requérant a adressé à son administration une demande préalable d'indemnisation. Cette demande s'étant heurtée à une décision implicite de rejet, il a saisi, le 26 juin 2017, le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation du centre de formation des apprentis hôtelier de Metz à lui verser la somme de 24 000 euros en réparation des préjudices financier, matériel et moral qu'il estime avoir subi du fait du non-respect des règles statutaires applicables à sa situation. Il relève appel du jugement n° 1703216 du 20 juin 2019, qui rejette sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 6232-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " La création des centres de formation d'apprentis fait l'objet de conventions conclues entre l'Etat, dans le cas des centres à recrutement national, la région, dans tous les autres cas et : 1° Les organismes de formation gérés paritairement par les organisations professionnelles d'employeurs et les syndicats de salariés ; 2° Les collectivités locales ; 3° Les établissements publics ; 4° Les chambres de commerce et d'industrie territoriales, les chambres des métiers et les chambres d'agriculture ; 5° Les établissements d'enseignement privés sous contrat ; 6° Les organisations professionnelles ou interprofessionnelles représentatives d'employeurs ; 7° Les associations ; 8° Les entreprises ou leurs groupements ; 9° Toute autre personne. ". Aux termes R. 6232-12 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " La convention créant un centre de formation d'apprentis est conclue pour une durée de cinq ans à partir d'une date d'effet qu'elle fixe expressément. ". Aux termes de l'article R. 6232-15 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur :

" Dix-huit mois au moins avant la date d'expiration de la convention, les parties se concertent afin de préparer son renouvellement en tenant compte, s'il y a lieu, des adaptations rendues nécessaires par l'évolution des besoins de formation. Lorsqu'il apparaît que la convention ne peut être renouvelée, le recrutement de nouveaux apprentis est interrompu. La convention en vigueur est prorogée de plein droit jusqu'à l'achèvement des formations en cours, lorsque cet achèvement a lieu après la date d'expiration de la convention. ".

3. L'existence ou l'absence du caractère permanent d'un emploi doit s'apprécier au regard de la nature du besoin auquel répond cet emploi et ne saurait résulter de la seule durée pendant laquelle il est occupé. Il résulte cependant des dispositions précitées que les conventions portant création d'un centre de formation des apprentis étant conclues pour une durée déterminée de cinq ans et étant susceptibles de ne pas être renouvelées, les emplois occupés au sein de ce type d'organisme sont nécessairement temporaires et ne peuvent, en conséquence, recevoir la qualification d'emploi permanent. Ainsi, en l'absence de tout emploi budgétaire permanent susceptible de le financer, aucun recrutement en contrat à durée indéterminée ne peut avoir lieu dans un centre de formation des apprentis.

4. D'autre part, aux termes de l'article 13 de la loi du 26 juillet 2005, portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de publication de la présente loi ou bénéficie, à cette date, d'un congé, en application des dispositions du décret mentionné à l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de l'article 4 de la même loi. / Lorsque, à la date de publication de la présente loi, l'agent est en fonction depuis six ans au moins, de manière continue, son contrat ne peut, à son terme, être reconduit que par décision expresse et pour une durée indéterminée. / II. - Le contrat est, à la date de publication de la présente loi, transformé en contrat à durée indéterminée, si l'agent satisfait, le 1er juin 2004 ou au plus tard au terme de son contrat en cours, aux conditions suivantes : 1° Etre âgé d'au moins cinquante ans ; 2° Etre en fonction ou bénéficier d'un congé en application des dispositions du décret mentionné à l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée ; 3° Justifier d'une durée de services effectifs au moins égale à six ans au cours des huit dernières années ; 4° Occuper un emploi en application de l'article 4 ou du premier alinéa de l'article 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée, dans les services de l'Etat ou de ses établissements publics administratifs. ". Aux termes de l'article 6 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque les contrats pris en application des articles 4 et 6 sont conclus pour une durée déterminée, cette durée est au maximum de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par reconduction expresse dans la limite d'une durée maximale de six ans. / Tout contrat conclu ou renouvelé en application des mêmes articles 4 et 6 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics effectifs de six ans dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu, par une décision expresse, pour une durée indéterminée. / (...) / Seul le premier alinéa s'applique aux contrats conclus pour la mise en oeuvre d'un programme de formation, d'insertion, de reconversion professionnelle ou de formation professionnelle d'apprentissage. ".

5. M. B... ne saurait utilement se prévaloir des dispositions des articles 14 et 15 de la loi du 26 juillet 2005, qui s'appliquent aux agents contractuels de la fonction publique territoriale. De même, il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait dû bénéficier d'un engagement à durée indéterminée, en application des dispositions précitées, dès lors qu'il a été recruté sur un emploi non permanent, ainsi qu'il a été dit au point 3 du présent arrêt, et que son contrat de travail a été conclu pour la mise en oeuvre d'un programme de formation professionnelle d'apprentissage, au sens du dernier alinéa de l'article 6 bis de la loi du 11 janvier 1984. Dans ces conditions, eu égard à la nature de l'emploi occupé par l'intéressé et à la nature des fonctions qu'il a exercées au cours de la période considérée, ni la circonstance que ses contrats de travail successifs visaient le décret du 17 janvier 1986, relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat, ni la circonstance qu'il a travaillé pendant dix-sept années pour le même employeur, n'étaient susceptibles de lui ouvrir droit au bénéfice d'un contrat à durée indéterminée.

6. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article 45 du décret du 17 janvier 1986, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque l'agent non titulaire est recruté par un contrat à durée déterminée susceptible d'être reconduit, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : - le huitième jour précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée inférieure à six mois ; - au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée supérieure ou égale à six mois et inférieure à deux ans ; - au début du deuxième mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée supérieure ou égale à deux ans ; - au début du troisième mois précédant le terme de l'engagement pour le contrat susceptible d'être reconduit pour une durée indéterminée. Dans ce cas, la notification de la décision doit être précédée d'un entretien. ". Et aux termes de l'article 51 de la même loi, dans sa rédaction alors applicable : " En cas de licenciement n'intervenant pas à titre de sanction disciplinaire, une indemnité de licenciement est versée : (...) 1° Aux agents recrutés pour une durée indéterminée ; (...) ".

7. Le contrat de travail de M. B... ne pouvant, pour les raisons exposées précédemment, être requalifié en contrat à durée indéterminée, il n'est pas fondé à soutenir que l'administration aurait dû, en application des dispositions précitées, lui verser une indemnité de licenciement et lui notifier son intention de ne pas renouveler son engagement au plus tard au début du troisième mois précédant le terme de son contrat. Par suite, alors que M. B... ne saurait utilement faire valoir qu'on ne saurait lui opposer un dispositif réglementaire ou législatif auquel l'employeur public n'a manifestement pas songé, ni même fait référence au moment de son recrutement, et qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que le non-renouvellement de son contrat de travail serait motivé par des considérations étrangères à l'intérêt du service, les conclusions à fin d'indemnisation présentées par l'intéressé ne peuvent qu'être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais de justice :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu non plus, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le défendeur en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour M. F... B... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au lycée hôtelier " Raymond Mondon " de Metz, gestionnaire du centre de formation des apprentis hôtelier.

Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et au recteur de l'académie de Nancy-Metz.

N° 19NC02528 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02528
Date de la décision : 18/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement technique et professionnel.

Fonctionnaires et agents publics - Cadres et emplois - Notion de cadre - de corps - de grade et d'emploi - Notion d'emploi.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : ROTH

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-03-18;19nc02528 ?
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