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17/11/2020 | FRANCE | N°19NC00326

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 17 novembre 2020, 19NC00326


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Ardennes a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la délibération du 21 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Charleville-Mézières a adopté un régime indemnitaire au bénéfice de ses agents.

Par un jugement n° 1801201 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette délibération en tant qu'elle prévoit le maintien du versement intégral de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'e

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Ardennes a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la délibération du 21 décembre 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Charleville-Mézières a adopté un régime indemnitaire au bénéfice de ses agents.

Par un jugement n° 1801201 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette délibération en tant qu'elle prévoit le maintien du versement intégral de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) aux fonctionnaires placés en congé de longue durée ou en congé de longue maladie.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 janvier 2019, la commune de Charleville-Mézières, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1801201 du 4 décembre 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) de rejeter le déféré du préfet des Ardennes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'en prévoyant le maintien du régime indemnitaire de ses agents, ce qu'elle pouvait légalement faire, tout en respectant le plafond global imposé par l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984, elle s'est bornée à définir les conditions d'attribution du régime indemnitaire ainsi que l'y autorise cet article 88, et n'a donc pas méconnu le principe de parité.

Par un mémoire, enregistré le 20 mars 2019, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales indique à la cour que le préfet des Ardennes a qualité pour représenter l'Etat à la présente instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2019, le préfet des Ardennes conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires ;

- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l'Etat et des magistrats de l'ordre judiciaire dans certaines situations de congés ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la commune de Charleville-Mézières.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 21 décembre 2017, le conseil municipal de la commune de Charleville-Mézières a mis en place un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), comprenant une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE), et un complément indemnitaire annuel (CIA).

2. La commune de Charleville-Mézières relève appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé cette délibération en tant qu'elle prévoit le maintien du versement intégral de l'IFSE aux fonctionnaires placés en congé de longue durée ou en congé de longue maladie.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Le tribunal a annulé les dispositions de la délibération contestée prévoyant le maintien du versement intégral de l'IFSE aux fonctionnaires placés en congé de longue durée ou en congé de longue maladie au motif qu'elles créent pour les agents de la requérante un régime indemnitaire plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat et, par suite, qu'elles méconnaissent le principe de parité entre les agents relevant des diverses fonctions publiques.

4. Aux termes de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, qui s'inspire de ce principe : " Les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l'Etat. Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d'exercice des fonctions et de l'engagement professionnel des agents. Lorsque les services de l'Etat servant de référence bénéficient d'une indemnité servie en deux parts, l'organe délibérant détermine les plafonds applicables à chacune de ces parts et en fixe les critères, sans que la somme des deux parts dépasse le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat. (...) ". Selon l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 susvisé, pris pour l'application de ces dispositions : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales et les conseils d'administration des établissements publics locaux pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". L'article 2 du même décret dispose que : " L'assemblée délibérante de la collectivité ou le conseil d'administration de l'établissement fixe, dans les limites prévues à l'article 1er, la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les collectivités territoriales qui décident de mettre en place un régime indemnitaire tenant compte, pour une part, des conditions d'exercice des fonctions et, pour l'autre part, de l'engagement professionnel des agents demeurent libres de fixer les plafonds applicables à chacune des parts, sous la seule réserve que leur somme ne dépasse pas le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. Elles sont également libres de déterminer les critères d'attribution des primes correspondant à chacune de ces parts.

5. En vertu des dispositions des 3° et 4° de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, de l'article 37 du décret du 14 mars 1986 et du 1° du I de l'article 1er du décret du 26 août 2010 susvisés, le fonctionnaire de l'Etat en congé de longue maladie ou de longue durée n'a pas droit au maintien du versement des indemnités qui sont attachées à l'exercice des fonctions. L'IFSE instituée par la délibération en litige, qui vise à valoriser l'exercice des fonctions et repose sur le niveau de responsabilité et d'expertise des fonctions exercées et sur la prise en compte de l'expérience professionnelle, a le caractère d'une indemnité attachée à l'exercice des fonctions. Par conséquent, les conditions d'attribution de cette indemnité aux agents de la commune de Charleville-Mézières, dans la mesure où elles prévoient le maintien de son versement intégral en cas de congé de longue durée ou de congé de longue maladie, sont plus avantageuses que celles dont bénéficient les agents de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes.

6. Mais, d'une part, ainsi qu'il a été rappelé au point 4, la commune de Charleville-Mézières était libre de déterminer les critères d'attribution des primes correspondant à la part du RIFSEEP que constitue l'IFSE, et si, comme le soutient le préfet, aucune disposition légale ou réglementaire ne prévoit le maintien du versement des indemnités attachées à l'exercice des fonctions pendant les périodes de congés de longue durée ou de longue maladie, il n'y en a pas davantage qui fasse obstacle à ce qu'une collectivité territoriale puisse légalement, lorsque des circonstances particulières lui paraissent le justifier, procéder à un tel maintien. D'autre part, la circonstance que les conditions d'attribution de l'IFSE soient, de ce seul point de vue, plus avantageuses que celles dont bénéficient les agents de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes n'est pas, par elle-même, de nature à établir que la somme de la part IFSE et de la part CIA du RIFSEEP en litige dépasserait le plafond global des primes octroyées aux agents de l'Etat, ni que, par conséquent, ce régime indemnitaire méconnaîtrait le principe de parité entre les agents relevant des diverses fonctions publiques.

7. Par suite, c'est à tort que, du seul fait que la délibération contestée prévoit le maintien du versement intégral de l'IFSE aux fonctionnaires placés en congé de longue durée ou en congé de longue maladie, le tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de ce qu'elle méconnaît le principe de parité entre les agents relevant des diverses fonctions publiques.

8. En l'absence de tout autre moyen soulevé par le préfet, tant devant le tribunal que devant la cour, il résulte de ce qui précède que la commune de Charleville-Mézières est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet du déféré du préfet des Ardennes.

Sur les frais de l'instance :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Charleville-Mézières en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1 : Le jugement n° 1801201 du 4 décembre 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Le déféré présenté par le préfet des Ardennes devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera à la commune de Charleville-Mézières la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Charleville-Mézières et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00326
Date de la décision : 17/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré préfectoral.

Fonctionnaires et agents publics - Rémunération - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : SEBAN ATLANTIQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-11-17;19nc00326 ?
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