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17/11/2020 | FRANCE | N°19NC00009

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 17 novembre 2020, 19NC00009


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le Département du Territoire de Belfort à lui verser la somme de 74 000 euros à titre d'indemnisation.

Par un jugement n° 1601598 du 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 janvier et 9 septembre 2019, M. F... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n

1601598 du 15 novembre 2018 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) de condamner le Département ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le Département du Territoire de Belfort à lui verser la somme de 74 000 euros à titre d'indemnisation.

Par un jugement n° 1601598 du 15 novembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 4 janvier et 9 septembre 2019, M. F... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1601598 du 15 novembre 2018 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) de condamner le Département du Territoire de Belfort à lui verser, à titre d'indemnisation, la somme de 74 000 euros, augmentée des intérêts de retard au taux légal et de leur capitalisation, dans un délai de deux mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge du Département du Territoire de Belfort la somme de 3 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers frais et dépens.

Il soutient que :

- sa démission doit être requalifiée en rupture abusive de son contrat de travail aux torts du département, compte tenu de la modification substantielle de ce contrat par le département et du comportement de ce dernier à son égard ;

- la modification substantielle de son contrat est intervenue sans que la commission paritaire ait été préalablement consultée, sans qu'il ait été préalablement informé de son changement de situation, ni donné son accord, ni bénéficié d'un entretien personnel ;

- la somme réclamée correspond à l'indemnisation des troubles dans ses conditions d'existence et du préjudice professionnel résultant de son éviction illégale.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 31 juillet 2019 et le 14 septembre 2020, le Département du Territoire de Belfort, représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. E... la somme de 5 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la requête d'appel, qui se borne à reprendre à l'identique la demande présentée devant le tribunal, est irrecevable et, subsidiairement, qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Le 29 septembre 2020, M. E... a déposé un mémoire, qui n'a pas été communiqué.

L'instruction a été close le 30 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour le Département du Territoire de Belfort.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... a été recruté par le Département du Territoire de Belfort en qualité d'agent contractuel par contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2008, afin d'exercer les fonctions de directeur du développement culturel. Par un courrier du 31 mars 2016, M. E... a présenté sa démission, laquelle a été acceptée à effet du 31 mai 2016 par le président du conseil départemental du Territoire de Belfort. M. E..., estimant qu'il a été contraint à la démission, a alors présenté une réclamation indemnitaire d'un montant de 74 000 euros, que le département a expressément rejetée le 29 août 2016.

2. M. E... relève appel du jugement du 15 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Département du Territoire de Belfort à lui verser cette somme.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, sauf s'il présente un caractère fictif ou frauduleux, le contrat de recrutement d'un agent contractuel de droit public crée des droits au profit de celui-ci, qui peut notamment demander au juge administratif l'annulation pour excès de pouvoir d'un acte d'exécution du contrat, l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité de cet acte, ainsi que l'indemnisation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait d'une décision de l'administration de mettre fin à son contrat. Les modalités de rupture de l'engagement d'un agent non titulaire de la fonction publique territoriale sont définies par les articles 39 à 49 du décret du 15 février 1988 susvisé relatifs à la démission et au licenciement. Il résulte de ces dispositions que le contrat de travail à durée indéterminée conclu entre un agent public et une collectivité publique ne peut être rompu que par un licenciement, une démission, ou à l'occasion d'une action en résiliation de ce contrat. Il appartient toutefois au juge administratif, saisi d'une demande tendant à l'indemnisation du préjudice qu'un agent non titulaire estime avoir subi du fait de la rupture de son contrat de travail résultant de modifications substantielles des clauses du contrat en cause, d'apprécier si la décision par laquelle l'autorité administrative a accepté la démission d'un agent non titulaire doit être regardée ou non comme un licenciement, eu égard notamment à la nature et à l'ampleur des modifications apportées au contrat, au comportement de l'employeur et aux motifs pour lesquels l'agent a cessé son activité.

4. M. E... soutient qu'il a été contraint de présenter sa démission en raison des modifications substantielles qui ont été apportées à son contrat sans son accord à la suite d'une réorganisation des services du département, ainsi qu'en raison du comportement du département à son égard.

5. D'une part, il résulte de l'instruction que, par un arrêté du 18 décembre 2015 portant organisation des services départementaux, le président du conseil départemental a regroupé les 19 directions existantes dans des directions à périmètre élargi, comprenant plusieurs pôles et rattachées à des directions générales adjointes. Une nouvelle direction de la jeunesse, de l'éducation, de la culture, du sport et de la vie associative, rattachée à la direction générale adjointe de la solidarité et du développement humain, est ainsi née du regroupement de plusieurs des anciennes directions, dont celle du développement culturel, laquelle en est devenue l'un des quatre pôles sous la dénomination " pôle culture ". Toutefois, la responsabilité de ce pôle a été confiée à M. E..., qui a ainsi conservé ses missions antérieures dans la nouvelle organisation. Par ailleurs, s'il ne bénéficiait plus directement d'une délégation de signature et n'assistait plus aux réunions de direction intéressant le développement culturel, il ne résulte pas de l'instruction que ces prérogatives, désormais exercées par la directrice de la jeunesse, de l'éducation, de la culture, du sport et de la vie associative, sous l'autorité de laquelle il était placé, étaient prévues par son contrat ou qu'elles en découlaient. Dans ces conditions et en dépit de la perte de son titre de directeur du développement culturel, M. E... n'est pas fondé à se prévaloir d'une modification substantielle de son contrat.

6. D'autre part, si M. E... soutient que le département a entendu le mettre à l'écart, non seulement ce dernier ne l'a pas dessaisi de ses missions antérieures mais encore, il résulte de l'instruction que le poste de directeur/directrice de la jeunesse, de l'éducation, de la culture, du sport et de la vie associative a fait l'objet d'un appel à candidatures auquel M. E... n'a pas répondu et n'établit pas ne pas avoir été à même de répondre. Dès lors, l'irrégularité alléguée de la nomination de la candidate retenue ne saurait révéler l'existence d'une manoeuvre de la part du département pour évincer M. E.... Quant à la délégation de signature consentie à la nouvelle directrice et à sa participation aux réunions de direction, elles résultent de la nouvelle organisation des services départementaux. Enfin, aucun des éléments produits par M. E..., notamment pas les attestations apportées pour la première fois en appel, eu égard notamment à leur caractère peu circonstancié, ne suffisent à étayer ses allégations relatives à divers agissements vexatoires du département, ni à plus forte raison que ce dernier se serait livré à un harcèlement moral à son égard.

7. Il résulte de ce qui précède que M. E..., eu égard notamment à la nature et à l'ampleur des modifications apportées à son contrat, au comportement du département et au motif de sa démission, n'est pas fondé à soutenir que la décision par laquelle le président du conseil départemental du Territoire de Belfort a accepté cette démission doit être regardée comme un licenciement.

8. En second lieu, dès lors que la rupture de son contrat résulte de l'acceptation de sa démission et non de son licenciement, M. E... ne peut, en tout état de cause, pas utilement faire valoir l'absence de consultation préalable de la commission administrative paritaire, d'information préalable sur son changement de situation, d'entretien personnel et d'accord préalable de sa part à ce sujet.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le Département du Territoire de Belfort, que les conclusions indemnitaires de M. E..., ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Département du Territoire de Belfort, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. E... demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. E... la somme demandée par le Département du Territoire de Belfort à ce titre.

D E C I D E :

Article 1 : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Département du Territoire de Belfort tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E... et au Département du Territoire de Belfort.

N° 19NC00009 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00009
Date de la décision : 17/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : TABAK

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-11-17;19nc00009 ?
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