La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/10/2020 | FRANCE | N°20NC00149

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 29 octobre 2020, 20NC00149


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J... B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le maire de Nancy et le maire de Vandoeuvre-lès-Nancy ont conjointement délivré à la SCI Nancy Les Arabesques un permis de construire pour la réalisation d'une résidence de services non médicalisée pour séniors d'une capacité de 115 logements, sur les parcelles cadastrées AE n° 71, 72 et 435 sur le territoire de la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy et BR n° 515 su

r le territoire de la commune de Nancy.

Par une ordonnance du 17 décembre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. J... B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le maire de Nancy et le maire de Vandoeuvre-lès-Nancy ont conjointement délivré à la SCI Nancy Les Arabesques un permis de construire pour la réalisation d'une résidence de services non médicalisée pour séniors d'une capacité de 115 logements, sur les parcelles cadastrées AE n° 71, 72 et 435 sur le territoire de la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy et BR n° 515 sur le territoire de la commune de Nancy.

Par une ordonnance du 17 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté cette demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 20 janvier 2020, complétée par un mémoire enregistré le 26 mai 2020, M. B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho, représentés par Me Coissard, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'ordonnance du 17 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 mars 2019 ;

3°) à titre subsidiaire, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nancy ;

4°) de mettre à la charge des communes de Nancy et Vandoeuvre-lès-Nancy et de la SCI Nancy Les Arabesques le versement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur appel est recevable en ce qu'ils ont notifié au pétitionnaire et aux communes concernées une copie de leur requête ;

- le projet en litige est de nature à affecter les conditions de jouissance de l'immeuble dont ils sont respectivement exploitant et propriétaires, en particulier s'agissant des conditions de stationnement dans le secteur, et ils justifient, par suite, d'un intérêt à le contester ;

- ayant été invités à régulariser leur requête par la production des justificatifs exigés sur le fondement de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, ils ont, en pensant satisfaire à cette demande, commis une erreur de manipulation et ont, le jour même, transmis des documents qui n'étaient pas ceux demandés mais dont le contenu était dépourvu d'ambiguïté quant au respect de la formalité et la juridiction ne pouvait, au regard du principe de loyauté du procès, prendre, sept mois après cet envoi, une ordonnance d'irrecevabilité sans nouvelle demande de rectification ;

- la demande de régularisation qui leur a été adressée seulement six jours après l'introduction de la requête était prématurée dès lors qu'à cette date, l'irrecevabilité n'était pas acquise ;

- l'arrêté est entaché d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- le projet méconnaît les dispositions de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme s'agissant du nombre de places de stationnement qui devaient être prévues, le service instructeur ayant illégalement accordé une dérogation à ces dispositions en application des dispositions de l'article L. 123-1-13 du code de l'urbanisme alors que celles-ci ont été abrogées depuis le 1er janvier 2016 ;

- à tout le moins, l'arrêté est entaché d'une absence de motivation de la dérogation accordée sur le fondement des dispositions de l'article L. 152-6 du code de l'urbanisme ;

- en tout état de cause, la résidence de services en litige, qui obéit au régime de la copropriété, n'aurait pas relevé des catégories d'établissements recevant du public, et notamment les établissements sociaux et médico-sociaux, qui auraient pu bénéficier d'une telle dérogation sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles et de l'article L. 631-12 du code de la construction et de l'habitation ;

- le projet méconnaît les règles de hauteur définies à l'article UA 10 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît également les règles d'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives énoncées à l'article UA 7 de ce document ;

- ces illégalités ne sont pas susceptibles de régularisation dans le cadre d'un permis modificatif.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2020, complété par un mémoire enregistré le 29 mai 2020, la commune de Nancy et la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy, représentées par la SELAS Devarenne Associés Grand Est, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de rejeter la requête d'appel ;

2°) de rejeter la demande d'évocation ;

3°) subsidiairement, de rouvrir les débats sur le fond ;

4°) de condamner ensemble M. B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho à leur verser à chacune une somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la demande de première instance était irrecevable au regard des dispositions du code de l'urbanisme en ce que le certificat de dépôt de la lettre recommandée accompagnant la copie de la requête qui devait être notifiée au pétitionnaire et à l'auteur du permis, n'a pas été produit dans le délai qui avait été imparti par le greffe dans sa demande de régularisation ;

- le courrier de production adressé au greffe ne comportait pas l'inventaire des documents produits de sorte que le greffe ne pouvait identifier aucune erreur matérielle s'agissant des pièces réellement produites ;

- le principe de loyauté du procès justifie qu'il soit accordé aux défendeurs un délai pour répondre aux nouvelles conclusions présentées quelques jours avant la clôture d'instruction et dirigées contre le permis initial.

Par des mémoires enregistrés le 9 avril et le 5 juin 2020, la SCI Nancy Les Arabesques représentée par Me Moitry, conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. B..., de la SCI Macyju et de la SCI Pharmho à lui verser chacun la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérants ne justifient pas avoir notifié leur requête d'appel dans les conditions prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme et celle-ci est donc irrecevable ;

- l'irrecevabilité, pour le même motif, de leur demande de première instance, ne peut être régularisée au cours de l'instance d'appel ;

- ils ne peuvent se prévaloir d'un document qu'ils n'ont pas produit devant la cour d'appel ;

- ils n'établissent pas avoir produit également la preuve du dépôt postal de leurs courriers recommandés alors que ni les dispositions applicables ni la jurisprudence n'imposaient au greffe d'attirer leur attention sur cette omission et qu'ils avaient la possibilité à tout moment de vérifier le contenu de leur envoi par le biais de l'application Télérecours ;

- la notification n'a en tout état de cause pas été faite à l'adresse exacte du pétitionnaire ;

- l'affichage sur le terrain du permis contesté répondait aux conditions requises par les dispositions du code de l'urbanisme de sorte que l'obligation de notification de leur recours était opposable à tout requérant.

II. Par un mémoire distinct enregistré le 21 janvier 2020, présenté sur le fondement de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme et complété par un mémoire enregistré le 26 mai 2020, M. B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho, représentés par Me Coissard, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2019 par lequel le maire de Nancy et le maire de Vandoeuvre-lès-Nancy ont conjointement délivré à la SCI Nancy Les Arabesques un permis de construire modificatif du permis accordé le 12 mars 2019 pour la réalisation d'une résidence de services non médicalisée pour séniors d'une capacité de 115 logements, sur les parcelles cadastrées AE n° 71, 72 et 435 sur le territoire de la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy et BR n° 515 sur le territoire de la commune de Nancy ;

2°) de mettre à la charge des communes de Nancy et Vandoeuvre-lès-Nancy et de la SCI Nancy Les Arabesques le versement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme sont applicables en l'espèce, quand bien même l'appel relatif au permis initial serait dirigé contre une ordonnance d'irrecevabilité, dès lors que le juge d'appel peut parfaitement, après avoir annulé l'ordonnance, statuer par la voie de l'évocation sur la légalité du permis initial ;

- le projet en litige est de nature à affecter les conditions de jouissance de l'immeuble dont ils sont respectivement exploitant et propriétaires, en particulier s'agissant des conditions de stationnement dans le secteur, et ils justifient, par suite, d'un intérêt à le contester ;

- le signataire, pour la commune de Nancy, de l'arrêté attaqué ne disposait pas d'une délégation régulière ;

- le permis modificatif a été délivré au vu d'un dossier dont, par rapport au permis initial, a été soustraite l'attestation par laquelle la pétitionnaire soutenait ne pas relever de la catégorie des établissements sociaux et médico-sociaux, et ceci dans le seul but de pouvoir bénéficier de la dérogation prévue tant par les dispositions aujourd'hui abrogées de l'article L. 123-1-13 que par celles de l'actuel article L. 151-35 du même code, s'agissant du nombre minimal de places de stationnement à prévoir et dans cette mesure, ce permis modificatif est entaché de fraude ;

- ne comportant pas le nombre de places de stationnement exigées, eu égard à sa nature et au régime de la copropriété qui lui est applicable, il méconnaît l'article UA 12 du plan local d'urbanisme ;

- les circonstances précédemment décrites permettent d'établir le détournement de pouvoir commis en l'espèce.

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 avril 2020 et 3 juillet 2020, la commune de Nancy et la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy, représentées par la SELAS Devarenne Associés Grand Est, demandent à la cour de rejeter la requête et de condamner solidairement M. B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmho à leur verser à chacune une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- les dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme sont inapplicables en l'espèce dès lors que la requête d'appel n'est pas dirigée contre le permis initial mais seulement contre l'ordonnance du 17 décembre 2019

- le permis modificatif du 22 novembre 2019 n'a pas été communiqué aux parties à l'instance d'appel ;

- les requérants ne présentent pas d'intérêt à agir au sens des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dès lors qu'ils ne sont pas voisins immédiats de la parcelle d'implantation du projet ;

- les allégations des requérants portant sur les difficultés de stationnement dans l'environnement proche du projet ne sont pas démontrées et s'agissant de celles rapportant la suppression de 32 places existantes sont fausses ; en réalité 26 places seulement ont été déplacées ;

- les moyens opposés à la légalité du permis de construire ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2020 la SCI Nancy Les Arabesques représentée par Me Moitry conclut au rejet de la requête et à la condamnation des requérants à lui verser chacun une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel est irrecevable dès lors qu'il est impossible pour les pétitionnaires de régulariser en appel l'absence de preuve de la notification du recours en première instance ;

- la requête dirigée contre le permis modificatif est irrecevable du fait de l'irrecevabilité de la requête dirigée contre le permis de construire initial ;

- les appelants ne justifient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour agir en application de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- les moyens opposés à la légalité des deux permis de construire ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Grossrieder, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de Me Coissard, pour M. B... et autres, de Me Devarenne, pour les villes de Nancy et de Vandoeuvre-les-Nancy, ainsi que celles de Me Moitry, pour la SCI Nancy Les Arabesques.

La SCI Nancy Les Arabesques a présenté une note en délibéré enregistrée le 7 octobre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté conjoint du 12 mars 2019, les maires de Nancy et de Vandoeuvre-les-Nancy ont délivré à la SCI Nancy Les Arabesques un permis de construire pour la réalisation, sur un terrain composé de quatre parcelles contiguës situées sur le territoire de leurs communes, d'une résidence de services non médicalisée d'une contenance de 115 logements destinés aux séniors. M. B..., qui exploite à Vandoeuvre-lès-Nancy une officine de pharmacie ainsi que les SCI Macyju et Pharmho, copropriétaires des locaux où se trouve le siège de cette exploitation, ont demandé l'annulation de cet arrêté devant le tribunal administratif de Nancy. Par une ordonnance du 17 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente de ce tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable. Les intéressés font appel de cette ordonnance et, par des mémoires distincts, ils ont en outre, directement présenté à la cour, sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme, des conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2019 par lequel les maires de Nancy et de Vandoeuvre-lès-Nancy ont conjointement accordé à la SCI Nancy Les Arabesques un permis de construire modificatif.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : "Les présidents de tribunal administratif (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) et les magistrats ayant une ancienneté minimale de deux ans et ayant atteint au moins le grade de premier conseiller désignés à cet effet par le président de leur juridiction peuvent (...) par ordonnance (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...). Les présidents des cours administratives d'appel (...) peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...) les requêtes dirigées contre des ordonnances prises en application des 1° à 5° du présent article (...) ".

3. Aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. / (...) La demande de régularisation mentionne qu'à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article R. 611-7".

4 Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. / Les dispositions du présent article ne sont pas applicables en cas de contestation d'un permis modificatif, d'une décision modificative ou d'une mesure de régularisation dans les conditions prévues par l'article L. 600-5-2".

5. Il ressort des pièces du dossier de première instance qu'après avoir, par l'application Télérecours, déposé auprès du tribunal administratif de Nancy, le 10 mai 2019, leur demande d'annulation du permis de construire délivré le 12 mars 2019 à la SCI Nancy Les Arabesques, le conseil des requérants a été invité par courrier du greffe mis à sa disposition le 16 mai 2019 sur la même application à apporter la preuve, dans le délai de quinze jours, de l'accomplissement des formalités de notification de la requête au titre de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, en précisant qu'il lui incombait de produire au tribunal tant la copie des lettres recommandées accompagnant la copie du recours et adressées à l'auteur de la décision ainsi qu'à son bénéficiaire, que le certificat de dépôt de ces lettres auprès des services postaux. Cette demande de régularisation précisait qu'à défaut de réponse dans le délai imparti, la requête pourrait être rejetée comme irrecevable dès l'expiration de ce délai.

6. Il ressort également des pièces du dossier qu'en réponse à cette demande de régularisation, dont il a accusé réception dès le 16 mai 2019, le conseil des requérants a, le jour même, déposé, par Télérecours, un document intitulé " Pièces demandées " dont il est toutefois apparu ultérieurement qu'il ne comprenait que la copie des courriers recommandés adressés aux deux maires concernés et à la SCI Nancy Les Arabesques, ainsi qu'une pièce jointe constituée par un nouveau bordereau de communication de pièces, où figurait la mention : " Pièce communiquée présentement : 16. Notification du recours aux auteurs de la décision et au pétitionnaire (A à C) ", à l'exclusion des copies des certificats de dépôt de ces courriers recommandés auprès des services postaux. Il appartenait toutefois au greffe de vérifier le contenu de cet envoi et l'absence de ces pièces au dossier justifiait que le greffe adresse au conseil des requérants une nouvelle demande de régularisation.

7. Il résulte de ce qui précède que les appelants sont fondés à soutenir que c'est irrégulièrement que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur requête sur le fondement des dispositions précitées du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de M. B... et autres rejetées par le tribunal.

Sur la légalité des permis attaqués :

En ce qui concerne la légalité externe :

8. En premier lieu, par un arrêté du 8 juin 2018, le maire de la commune de Nancy a délégué à M. A... H..., neuvième adjoint, les fonctions relatives à " l'urbanisme réglementaire : autorisations d'urbanisme et d'utilisation des sols, certificats d'urbanisme, renseignements d'urbanisme, (...) ". Le moyen tiré de l'incompétence de M. H... pour signer les permis de construire, lesquels font partie de la catégorie des "autorisations d'urbanisme et d'utilisation des sols ", n'est donc pas fondé.

9. En second lieu, les moyens tirés de l'absence d'avis de la commission de sécurité préalable à l'octroi de la dérogation aux normes de sécurité et de l'absence de motivation à la dérogation obtenue sur le fondement de l'article 31 de l'arrêté relatif à la protection des bâtiments d'habitation contre l'incendie du 31 janvier 1986 modifié concernent la réglementation propre à l'autorisation d'ouverture des établissements recevant du public et sont donc inopérants.

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme :

10. Aux termes de l'article L. 151-34 du code de l'urbanisme, " Le règlement peut ne pas imposer la réalisation d'aires de stationnement lors de la construction :/ (...) 2° Des établissements assurant l'hébergement des personnes âgées mentionnés au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ; (...). ". L'article L. 151-35 du même code dispose pour sa part que " Il ne peut, nonobstant toute disposition du plan local d'urbanisme, être exigé pour les constructions destinées à l'habitation mentionnées aux 1° à 3° de l'article L. 151-34 la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement. Toutefois, lorsque les logements mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 151-34 sont situés à moins de cinq cents mètres d'une gare ou d'une station de transport public guidé ou de transport collectif en site propre et que la qualité de la desserte le permet, il ne peut, nonobstant toute disposition du plan local d'urbanisme, être exigé la réalisation de plus de 0,5 aire de stationnement par logement.".

11. En vertu de l'article L. 312-1 I 6° du code de l'action sociale et des familles, sont des établissements sociaux ou médico-sociaux "Les établissements et les services qui accueillent des personnes âgées ou qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l'insertion sociale". Ces établissements doivent toutefois faire l'objet d'une autorisation délivrée par l'autorité compétente conformément aux dispositions des articles R. 313-7 et suivants du même code.

12. L'article UA 12 du plan local d'urbanisme de Nancy applicable au projet litigieux prescrit pour les constructions à usage d'habitation un emplacement de stationnement pour les voitures pour 70 m2 de surface de plancher avec au minimum une place par logement. La même norme est prévue pour les deux roues.

13. Lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Il peut, de même, être régularisé par un permis modificatif si la règle relative à l'utilisation du sol qui était méconnue par le permis initial a été entretemps modifiée. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial.

14. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que le projet objet du permis de construire contesté, portant sur une superficie d'habitation de 7 629,60 m² comprenant 115 logements, a prévu 58 places de stationnement. La société pétitionnaire a présenté le 25 octobre 2019 une demande de permis de construire modificatif, en modifiant son projet d'une résidence de service pour séniors en une résidence pour personnes âgées comportant des services d'aide à la personne pour accueillir des personnes âgées vulnérables et accompagner leur perte d'autonomie par un service d'aide et d'assistance à domicile. Ce service fournira des prestations de ménage et de préparation des repas, ainsi que l'assistance au lever, au coucher, à la toilette et à l'habillement. En conséquence de la mise en place d'un service d'aide et d'assistance à domicile, la SCI pétitionnaire a présenté auprès du département une demande d'autorisation de création d'établissement social ou médico-social en vertu des articles L. 312-1 et L. 313-1 du code de l'action sociale et des familles.

15. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, il n'y a pas cumul d'un régime de copropriété et d'un régime médico-social au sein de cette résidence puisque la gestion de cet établissement soumis au régime d'établissement médico-social est confiée par la SCI en charge de la construction à la SAS Domitys.

16. Dès lors que le projet, qui comporte 115 logements, se situe à moins de 500 m d'une station de tramway, seule la réalisation de 58 places de stationnement est exigible en application des dispositions précitées de l'article L. 151-35 du code de l'urbanisme. Le permis modificatif a ainsi régularisé l'illégalité qui entachait le permis initial, résultant de la méconnaissance de l'article UA 12 du PLU. Par suite, les moyens tirés de ce que le permis de construire litigieux aurait été délivré en méconnaissance des dispositions UA 12 du PLU et de ce qu'il ne comportait pas une motivation de la dérogation aux dispositions de l'article L. 152-6 du code de l'urbanisme ne peuvent plus être utilement invoqués à l'appui des conclusions dirigées contre le permis initial.

S'agissant des autres moyens :

17. En premier lieu, l'exception d'illégalité de l'avis rendu par la sous-commission départementale de sécurité le 7 décembre 2018 a trait à la procédure d'autorisation d'ouverture d'un établissement recevant du public et ne peut donc être utilement invoquée à l'appui des conclusions à fin d'annulation des permis de construire attaqué.

18. En deuxième lieu, les dispositions de l'article UA 10 du PLU, qui renvoient à des documents graphiques en annexe au PLU, prescrivent des règles de hauteur à l'égout de toit différentes selon l'implantation de la construction. En l'espèce, toutefois, il résulte de ces dispositions et documents graphiques que le projet n'est pas soumis à la limitation de la règle de hauteur dite des 20 mètres. En conséquence, au regard des plans de façades produits à l'appui de la demande de permis, il ne ressort pas des pièces du dossier que les règles de hauteur imposées par les dispositions de l'article UA 12 du PLU tenant à la hauteur à l'égout de toit et au gabarit des hauteurs auraient été méconnues.

19. Il ressort des pièces du dossier et notamment de la demande de permis de construire que la société pétitionnaire a instauré une servitude de cours commune pour bénéficier du report de prospect. En conséquence de ce report, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UA 7 du PLU sur l'implantation en limite séparative de propriété n'est pas fondé.

20. Le détournement de pouvoir et la fraude alléguée pour surmonter le vice entachant le permis de construire initial ne sont pas établis.

21. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que les appelants ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du 12 mars et du 22 novembre 2019 par lesquels les maires de Nancy et Vandoeuvre les Nancy ont accordé à la SCI Nancy les Arabesques des permis de construire.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des communes de Nancy et Vandoeuvre-lès-Nancy et de la SCI Nancy Les Arabesques, qui ne sont pas parties perdantes, le versement aux appelants d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. B... et des SCI Macyju et Pharmho le versement d'une part d'une somme globale de 1 500 euros aux communes de Nancy et Vandoeuvre-lès-Nancy et d'autre part d'une somme de 1 500 euros à la SCI Nancy Les Arabesques au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1901322 du 17 décembre 2019 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. B..., la SCI Macyju et la SCI Pharmo et leur demande de première instance sont rejetées.

Article 3 : M. B... et les SCI Macyju et Pharmho verseront, d'une part, une somme globale de 1 500 euros aux communes de Nancy et Vandoeuvre-lès-Nancy et, d'autre part, une somme de 1 500 euros à la SCI Nancy Les Arabesques au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... B..., la SCI Macyju, la SCI Pharmho, la commune de Nancy, la commune de Vandoeuvre-lès-Nancy et la SCI Nancy Les Arabesques.

Copie en sera adressée au préfet de la Meurthe-et-Moselle.

2

N°20NC00149


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00149
Date de la décision : 29/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Sophie GROSSRIEDER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : MOITRY

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-29;20nc00149 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award