Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 mars 2019 par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1902477 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 19NC02407 le 26 juillet 2019, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Moselle du 13 mars 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me B... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- a méconnu le droit d'être entendu garanti par l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, dès lors qu'un rendez-vous aux fins de déposer une demande de titre de séjour lui avait été donné le 12 mars 2019 par les services de la préfecture, pour le 11 avril 2019, mais que le préfet a pris dès le 13 mars 2019 un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, le privant ainsi de la possibilité d'exposer les raisons pour lesquelles il souhaitait solliciter un titre de séjour pour raison de santé ; un certificat médical lui a été remis par les services de la préfecture et a été transmis aux services de l'OFII ;
- est entachée d'une erreur de fait, car il est inexact d'affirmer qu'il n'avait pas sollicité de titre de séjour sur un autre fondement que l'asile, dès lors qu'il avait l'intention de solliciter la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé, lors du rendez-vous qui lui avait été donné pour le 11 avril 2019.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 9 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., né le 12 octobre 1992, de nationalité centrafricaine, est entré en France le 15 août 2015, muni d'un visa Schengen valable du 15 août 2015 au 10 février 2016. Il a sollicité le 16 novembre 2015 son admission au séjour au titre de l'asile dans le cadre des dispositions des articles L. 741-1 et L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 29 avril 2016, notifiée le 10 mai suivant, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 18 décembre 2018, notifiée le 3 janvier 2019. M. C... a sollicité le réexamen de sa demande le 25 janvier 2019 et s'est vu délivrer puis renouveler une attestation de demande d'asile, valable jusqu'au 24 février 2019. L'Office français de protection des réfugiés et des apatrides a déclaré sa demande irrecevable par une décision du 8 février 2019, notifiée le 19 février 2019. M. C... fait appel du jugement du 30 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 13 mars 2019 par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, si aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ", il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que cet article s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.
3. Toutefois, il résulte également de la jurisprudence de la Cour de Justice que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
4. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne.
5. M. C... a sollicité le 16 novembre 2015 son admission au séjour en qualité de réfugié, puis a sollicité le réexamen de sa demande le 25 janvier 2019. Il a ainsi été conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demandait que lui soit délivré un titre de séjour en cette qualité et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartenait, lors du dépôt de ces demandes, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il jugeait utiles. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que l'administration statue sur sa demande d'asile, n'imposait pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français.
6. En outre, si l'intéressé soutient qu'un rendez-vous aux fins de déposer une demande de titre de séjour lui avait été donné le 12 mars 2019 par les services de la préfecture, pour le 11 avril suivant, et qu'en prenant l'arrêté contesté dès le 13 mars 2019, le préfet de la Moselle l'a privé de la possibilité d'exposer les raisons pour lesquelles il souhaitait solliciter à cette occasion un titre de séjour pour raison de santé, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que M. C... n'avait jamais demandé, depuis son entrée en France et jusqu'à la date de l'arrêté contesté, son admission au séjour sur un autre fondement que le droit d'asile et n'avait jamais produit à l'administration le moindre élément relatif à son état de santé, que le requérant entendait présenter une demande d'admission au séjour pour raison de santé à l'occasion du rendez-vous prévu le 11 avril 2019.
7. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
8. En deuxième lieu, à supposer même que M. C... aurait eu l'intention, au cours du rendez-vous qui lui avait été donné pour le 11 avril 2019, de solliciter un titre de séjour pour raison de santé, le préfet de la Moselle n'a pas entaché la décision contestée d'une erreur de fait, en considérant qu'à la date de son adoption, l'intéressé n'avait pas sollicité de titre de séjour sur un autre fondement que l'asile.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 mars 2019 par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. C... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 19NC02407