Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les décisions du 14 novembre 2016 et du 23 janvier 2017 par lesquelles le directeur départemental des finances publiques du Jura a refusé d'autoriser son arrêt médical de travail prescrit pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016.
Par un jugement en date du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 juillet 2018 et un mémoire complémentaire enregistré le 8 janvier 2019, M. C... A... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 mai 2018 ;
2°) d'annuler les décisions du 14 novembre 2016 et du 23 janvier 2017 par lesquelles le directeur départemental des finances publiques du Jura a rejeté sa demande de placement en congés maladie pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016 et d'autre part décidé que son absence pendant la période du 28 octobre 2016 au 21 novembre 2016 ferait l'objet d'une retenue pour service non fait de 25/30ème de son salaire de mars 2017 ;
3°) d'ordonner au directeur départemental des finances publiques de procéder au réexamen de son dossier ;
4°) de condamner l'État à lui verser une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision contestée a été prise sans que la compétence de l'auteur de l'acte ne soit justifiée ;
- le tribunal a commis une erreur de droit en considérant qu'il ne remplissait pas les conditions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dès lors qu'il n'appartient pas à l'employeur d'apprécier le bien-fondé d'un arrêt de travail ainsi que les modalités de visite et de sorties ;
- le tribunal a commis une erreur d'appréciation des faits en jugeant que les certificats médicaux ne démontraient pas qu'il remplissait les conditions pour l'octroi d'un congé maladie ;
Par un mémoire en défense enregistré le 10 décembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics a conclu au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le moyen tiré de ce que le signataire de la décision attaquée n'aurait pas compétence manque en fait ;
- c'est à bon droit que l'administration a refusé l'arrêt de travail prescrit à M. A... pour bénéficier d'une cure thermale ; cet arrêt de travail prescrit pour la prise en charge d'une cure thermale après le refus initial de l'administration constitue un détournement de procédure ; l'impossibilité d'exercer les fonctions n'est pas établie n'ouvrant pas droit au bénéfice d'une cure thermale ;
- l'administration n'avait pas à mettre en oeuvre la procédure de contrôle et pouvait dès lors refuser l'arrêt de travail.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 29 octobre 2016, M. C... A..., contrôleur des impôts, a transmis à son administration un avis médical d'arrêt de travail pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016. Par une décision du 14 novembre 2016 et une décision du 23 janvier 2017, le directeur départemental des finances publiques du Jura a refusé la demande de placement en congé de maladie pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016 et disposé que l'absence non justifiée pendant cette période ferait l'objet d'une retenue de 25/30ème pour service non fait sur le salaire de mars 2017 de l'agent. M. A... relève appel du jugement du 17 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ces deux décisions.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : "Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois. (...)". L'article 24 du décret du 14 mars 1986 dispose qu'"en cas de maladie dûment constatée et mettant le fonctionnaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, celui-ci est de droit mis en congé de maladie". Aux termes de l'article 25 du même décret : "Pour obtenir un congé de maladie, ainsi que le renouvellement du congé initialement accordé, le fonctionnaire doit adresser à l'administration dont il relève, par l'intermédiaire de son chef de service, une demande appuyée d'un certificat d'un médecin, d'un chirurgien-dentiste ou d'une sage-femme. (...) L'administration peut faire procéder à tout moment à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé ; le fonctionnaire doit se soumettre, sous peine d'interruption du versement de sa rémunération, à cette contre-visite. Le comité médical compétent peut être saisi, soit par l'administration, soit par l'intéressé, des conclusions du médecin agréé".
3. Il résulte de ces dispositions que l'agent intéressé, placé de plein droit en congé de maladie dès la demande qu'il a présentée sur le fondement d'un certificat médical prescrivant un arrêt de travail, demeure en situation régulière tant que l'administration n'a pas contesté le bien-fondé de ce congé en suivant la procédure prévue par ces mêmes dispositions.
4. M. A... a transmis à son administration une demande parvenue le 19 août 2016 tendant à être placé en congé de maladie pour effectuer une cure thermale pour la période du 1er au 21 novembre 2016. Il a alors été soumis à une contre-visite auprès d'un médecin agréé, qui a conclu que " (...) le défaut de suivi de cette cure ne mettra pas l'agent dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions et ne sera pas susceptible de conduire à cette situation. ".
5. Par courrier simple du 5 octobre 2016, le directeur départemental des finances publiques du Jura a informé M. A... des conclusions de cette expertise et a refusé la prise en charge de sa cure thermale dans le cadre d'un congé de maladie en lui indiquant qu'elle ne pouvait être suivie que lors d'un congé annuel ou de jours d'aménagement et de réduction du temps de travail. Par un courrier du 12 octobre 2016, M. A... a contesté cette décision et a demandé la saisine du comité médical départemental, lequel a émis le 14 novembre 2016 un avis favorable au placement en congé de maladie ordinaire. Dans le même temps, M. A... a été informé par un courriel du 28 octobre 2016 que, compte tenu de l'avis défavorable du médecin expert, la cure thermale prévue du 1er au 21 novembre 2016 ne relevait pas du congé ordinaire de maladie et qu'il devait solliciter une disponibilité pour convenances personnelles compte tenu de son solde de congés insuffisant.
6. Le 29 octobre 2016, M. A... a fait parvenir à son administration un avis d'arrêt de travail pour motif médical pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016. Par une décision du 14 novembre 2016, le directeur départemental des finances publiques du Jura a alors informé M. A... qu'il refusait la prise en charge de son arrêt de travail et que chaque journée d'absence au cours de cette période serait considérée comme injustifiée et ferait l'objet d'une retenue d'un trentième sur sa rémunération. Par décision du 23 janvier 2017, le directeur départemental des finances publiques du Jura a, d'une part, rejeté la demande de l'intéressé de placement en congé de maladie pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016 au motif que cet arrêt de maladie ne pouvait avoir pour effet de contourner le refus d'octroi de congés de maladie ordinaire pour cure thermale qui lui a été signifié le 5 octobre 2016 et d'autre part décidé que son absence sur la période du 28 octobre 2016 au 21 novembre 2016 ferait l'objet d'une retenue de 25/30ème pour service non fait sur son salaire de mars 2017.
7. Il ressort de cette chronologie des faits et des pièces du dossier que l'administration s'est servie des expertises médicales sollicitées dans le cadre de la demande de placement en congé de maladie aux fins de bénéficier d'une cure thermale pour refuser le placement en congé de maladie ordinaire du 28 octobre au 21 novembre 2016. Si l'administration pouvait légalement refuser le placement en congé de maladie pour suivre une cure thermale, la procédure diligentée par le biais d'une visite auprès d'un médecin agréé le 28 septembre et la saisine du comité départemental médical concernaient la demande de M. A... présentée en août 2016 pour bénéficier d'une cure thermale et ne pouvaient servir de fondement aux décisions contestées rejetant une demande de placement en congé de maladie ordinaire issue d'un avis d'arrêt de travail du 29 octobre 2016. La double circonstance que la période corresponde à celle prévue initialement pour la cure thermale et que l'adresse de visite soit située à Aix les Bains, lieu où l'intéressé entendait suivre la cure, ne saurait suffire à faire regarder l'arrêt de travail pour maladie comme dépourvu de fondement en l'absence de tout élément médical propre à cet arrêt de travail. Dans ces conditions, l'administration n'ayant pas diligenté une contre-visite médicale à la suite du certificat médical du 28 octobre 2016 prescrivant un arrêt de travail à M. A..., c'est en méconnaissance des dispositions précitées des articles 34 de la loi du 11 janvier 1984 ainsi que 24 et 25 du décret du 14 mars 1986 que l'administration a pris les décisions contestées.
8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 14 novembre 2016 et du 23 janvier 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. M. A... demande que l'administration examine à nouveau sa situation. Il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre de l'action et des comptes publics de procéder au réexamen de sa demande d'octroi d'un congé de maladie ordinaire pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016 et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais non compris dans les dépens exposés par M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 mai 2018 est annulé.
Article 2 : Les décisions du directeur départemental des finances publiques du Jura en date du 14 novembre 2016 et du 23 janvier 2017 sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la relance de procéder, dans le délai de deux mois à compter du présent arrêt, au réexamen de la demande de congé de maladie ordinaire pour la période du 28 octobre au 21 novembre 2016.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
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N°18NC01974