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20/10/2020 | FRANCE | N°20NC00887

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 20 octobre 2020, 20NC00887


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 25 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une période d'un an.

Par un jugement n° 1901683 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procéd

ure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2020, M. D..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 25 juin 2019 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une période d'un an.

Par un jugement n° 1901683 du 5 décembre 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2020, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 5 décembre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Saône du 25 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Saône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ainsi qu'un " récépissé avec droit au travail " dans un délai de huit jours à compter de cette même notification et, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation personnelle et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de cette notification sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

Le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation du requérant au regard de la contradiction de motifs relatifs à l'existence ou non d'une menace à l'ordre public.

S'agissant du bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le refus de séjour :

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle tiré de la contradiction des motifs relatifs à l'existence ou non d'une menace à l'ordre public entre le refus de titre de séjour et l'interdiction de retour sur le territoire français ;

- les services de la police aux frontières rendent des avis qui ne démontrent pas de façon irréfragable une fraude ;

- l'absence de poursuite effective ou de condamnation pénale démontrent l'incertitude pesant sur le document d'état civil incriminé de décembre 2015 ;

- le préfet aurait dû saisir les autorités du pays d'origine en cas de doute sur l'authenticité d'un acte d'état civil, conformément au décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger ;

- le dysfonctionnement des services d'état civil de son pays peut expliquer les erreurs exclusives de toute intention frauduleuse ;

- le préfet a donc commis une erreur de fait et une erreur de droit en estimant que les documents d'état civil produits n'avaient pas force probante ;

- la menace à l'ordre public doit être écartée ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L.313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car le préfet n'a pas pris en compte l'ensemble des éléments se rapportant à sa situation personnelle et notamment l'avis de la structure d'accueil ;

- elle est entachée d'erreur de droit au regard de l'article L.313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui n'exige pas de l'étranger de rapporter la preuve de l'absence de famille dans le pays d'origine ;

- un titre de séjour ne saurait lui être refusé sur le fondement de l'article L.313-15 du code précité et eu égard à l'interprétation de cet article au regard des travaux parlementaires, au motif qu'il avait commencé sa formation depuis moins de six mois ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de son parcours d'intégration et de l'absence de famille dans son pays d'origine.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est illégale car il ne trouble pas l'ordre public, apporte des éléments d'intégration et n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2020, le préfet de la Haute-Saône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens ne sont pas fondés ;

- le moyen soulevé pour la première fois en appel et tiré de ce que les juridictions administratives doivent interpréter les dispositions de l'article L.313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au regard du contenu des travaux parlementaires est irrecevable car il est fondé sur une cause juridique distincte de celle invoquée en première instance.

Il sollicite, en cas d'annulation, uniquement le réexamen de la situation du requérant dans un délai de 30 jours et à ce que la somme versée en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative soit limitée à 450 euros.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'action sociale et de familles ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

-- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant sierra léonais qui déclare être né le 20 mai 2001 à Freetown, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 15 octobre 2017. Il a été pris en charge par l'aide sociale à l'enfance du département de la Haute-Saône du 24 janvier 2018 au 31 juillet 2018 suite à une ordonnance rendue par le tribunal pour enfants F... le 24 janvier 2018 dans l'attente de vérifier ses documents d'état civil et de lever le doute sur son âge réel. Le 7 septembre 2018, M. D... a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 25 septembre 2018, le juge des enfants du tribunal de grande instance F... a prononcé la mainlevée du placement de M. D... au regard d'éléments attestant de sa majorité. Le 2 mai 2019, le même tribunal a retenu la minorité de l'intéressé et l'a de nouveau confié aux services du département. Le requérant a intégré le centre de formation professionnelle et de promotion agricole F... le 27 mai 2019. Le 6 juin 2019, M. D... a présenté une demande subsidiaire de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 juin 2019 le préfet de la Haute-Saône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une période d'un an. M. D... relève appel du jugement du 5 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Devant le tribunal administratif, M. D... avait soulevé à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 25 juin 2019 portant refus de séjour, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de sa situation au regard de la contradiction de motifs relatifs à l'existence ou non d'une menace à l'ordre public.

3. Les premiers juges, qui ne sont jamais tenus de répondre expressément à l'ensemble des arguments invoqués au soutien de ce moyen, ont répondu à ce moyen en indiquant, au point 4 du jugement, qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Saône aurait omis de procéder à un examen personnalisé de la situation de M. D.... Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. ".

5. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement des dispositions citées au point précédent, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

6. Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger : " Lorsque, en cas de doute sur l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger, l'autorité administrative saisie d'une demande d'établissement ou de délivrance d'un acte ou de titre procède ou fait procéder, en application de l'article 47 du code civil, aux vérifications utiles auprès de l'autorité étrangère compétente, le silence gardé pendant huit mois vaut décision de rejet. / Dans le délai prévu à l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration, l'autorité administrative informe par tout moyen l'intéressé de l'engagement de ces vérifications. "

7. Ces dispositions posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Cependant, la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

8. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, que M. D... a produit à l'appui de sa demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des documents d'état civil et un passeport. Un rapport d'examen technique documentaire de la police aux frontières de Pontarlier établi le 28 juin 2018 a estimé que le certificat de naissance sierra léonais établi en décembre 2015 devait être considéré comme faux eu égard au format atypique, au fond bleu ne respectant pas les distances correctes observées sur un document authentique, aux polices de caractère des textes non conformes à celles normalement utilisées et aux fautes d'orthographes observées. Dans un second rapport d'examen technique documentaire du 13 décembre 2018, la cellule de lutte contre la fraude documentaire a précisé que le passeport biométrique ordinaire de la République de Sierra Léone du 28 septembre 2018, produit par M. D..., avait un support documentaire authentique mais a émis un doute quant à l'authenticité de la délivrance de ce livret puisque l'extrait d'acte de naissance présenté par M. D... et analysé en juin 2018 concluait avec certitude à une contrefaçon. Enfin, dans un troisième rapport du 18 mars 2019, la même cellule de la police aux frontières a examiné le certificat de naissance délivré en octobre 2018 par les autorités de son pays, après la délivrance du passeport, et a conclu à un avis très défavorable et à un doute sur l'authenticité de la délivrance de ce document qui a pu être obtenu sur présentation du passeport qui est lui-même acquis sur présentation d'un faux certificat de naissance.

10. Ainsi, le passeport du 28 septembre 2018 et l'extrait d'acte de naissance d'octobre 2018, établis à partir d'un acte de naissance de décembre 2015 qui ne peut être regardé comme authentique, ne sauraient permettre d'établir de manière certaine l'identité de M. D... et en particulier son âge.

11. En se bornant à faire état du dysfonctionnement des services d'état civil de son pays qui pourrait expliquer des erreurs sur les actes d'état civil et de l'absence de poursuites pénales à son encontre qui démontrerait l'absence de fraude, M. D... ne remet pas sérieusement en cause l'analyse de la cellule de la fraude documentaire qui a relevé des irrégularités. Par ailleurs, en l'absence de doute quant au caractère inauthentique des actes présentés, aucune saisine des autorités sierra léonaises n'était nécessaire. Enfin, la circonstance que M. D... ait été confié à la direction de la solidarité et de la santé publique du département de la Haute-Saône par le juge des tutelles ne permet pas davantage d'établir qu'il avait entre seize et dix-huit ans au moment de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance. Par suite, le préfet de la Haute-Saône a pu, sans entacher son arrêté d'erreur de fait, ni d'erreur de droit, estimer que les actes d'état civil fournis par le requérant étaient dépourvus de valeur probante.

12. Or, ainsi qu'il est dit au point 5 du présent arrêt, pour délivrer un titre de séjour à M. D... sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet devait d'abord vérifier que M. D... était dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire et qu'il avait été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans.

13. Par suite, alors même que le préfet de la Haute-Saône ne pouvait se fonder sur le fait que M. D... ne démontrait pas une absence de lien avec sa famille dans son pays, qu'il n'aurait pas sollicité l'avis de la structure d'accueil et qu'il aurait dû, selon le requérant, lui laisser un délai de 6 mois pour poursuivre sa formation qualifiante avant de se prononcer sur son droit au séjour, il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision de refus de titre de séjour s'il s'était fondé sur le seul motif tiré de ce que les actes d'état civil produits par M. D... ne permettaient pas d'établir son âge et, en conséquence, de justifier qu'il avait été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize et dix-huit ans.

14. Par suite, le préfet, en refusant à M. D... un titre de séjour sur le fondement de l'article L.313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas commis d'erreur de droit ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé au regard de son pouvoir de régularisation. Par suite, le moyen doit être écarté.

15. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. "

16. M. D..., qui se prévaut essentiellement de sa formation qualifiante et du décès de sa famille du fait du virus Ebola en Sierra Léone, au demeurant sans l'établir, ne justifie d'aucun motif exceptionnel ou humanitaire, au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

17. Le requérant fait valoir que le préfet a entaché sa décision d'un défaut d'examen sérieux de sa situation au regard de la menace à l'ordre public qu'il constituerait au motif que la décision portant refus de séjour contredirait celle portant interdiction de retour sur le territoire français. Toutefois quand bien même le préfet aurait retenu des qualifications différentes pour les mêmes faits, cette circonstance n'est pas de nature à révéler un défaut d'examen particulier de sa situation dès lors que l'arrêté préfectoral comporte des éléments précis et circonstanciés des faits. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation du requérant.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

18. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". L'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

19. Le requérant n'apportant aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal administratif de Besançon sur ce moyen, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne la légalité de la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français :

20. En vertu du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative, par une décision motivée, peut assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français en tenant compte, pour fixer la durée de cette interdiction de retour, de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.

21. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., qui était présent en France depuis moins de deux ans à la date de la décision attaquée, est célibataire et sans attache familiale en France et qu'il a fait usage d'un acte de naissance falsifié. Ainsi, eu égard à la durée de présence en France de M. D... et des conditions de son séjour, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation en prononçant une interdiction de retour en France d'une durée d'un an.

22. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2019 du préfet de la Haute-Saône. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Saône.

2

N° 20NC00887


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00887
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Textes applicables.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : BERTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-20;20nc00887 ?
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