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29/09/2020 | FRANCE | N°20NC00677

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 29 septembre 2020, 20NC00677


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 juin 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement no 1905920 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête,

enregistrée le 16 mars 2020, M. D... E..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 17 juin 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement no 1905920 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, M. D... E..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 octobre 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 juin 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son certificat de résidence algérien, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête est recevable.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- la compétence du signataire de la décision n'est pas établie ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la compétence du signataire de la décision n'est pas établie ;

- elle doit être annulée en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il peut se prévaloir d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la compétence du signataire de la décision n'est pas établie ;

- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 3 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire enregistré le 13 août 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant algérien, né en 1968, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2013. L'intéressé a sollicité son admission au séjour pour raison de santé. Il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour renouvelée jusqu'au 17 avril 2015. Il a de nouveau sollicité un certificat de résidence algérien en se prévalant de son état de santé le 4 avril 2016. Le préfet du Bas-Rhin lui a d'abord délivré une autorisation provisoire de séjour, puis un certificat de résidence valable du 9 décembre 2016 jusqu'au 8 décembre 2017. L'intéressé a sollicité, le 20 novembre 2017, le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 17 juin 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine dans un délai de trente jours. M. E... fait appel du jugement du 16 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions contestées :

2. M. E... reprend en appel le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges qui n'appellent aucune précision.

En ce qui concerne la décision portant refus de certificat de résidence :

3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Il ressort des pièces du dossier que dans un avis du 5 septembre 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. E... nécessite une prise en charge dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.

6. M. E..., qui est atteint d'une spondylarthrite ankylosante compliquée d'une coxite fusionnante, d'un diabète et souffre d'une dépression avec anxiété majeure, fait valoir qu'il ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dès lors qu'il doit régulièrement bénéficier d'un traitement à base d'anti-TNF Remicade/infliximab qui est indisponible en Algérie tout comme la Metformine, le Diamicron, l'Arava, le trulicity. Toutefois, le certificat médical d'un médecin de famille algérien se bornant à mentionner que l'intéressé ne pourra pas être pris en charge en Algérie compte tenu de la " pénurie de médicaments spécialisés " n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'OFII. En outre, il ressort des pièces du dossier, notamment du certificat médical confidentiel destiné au médecin de l'OFII chargé d'établir un rapport destiné au collège de médecins, que la spondylarthrite ankylosante pouvait être traitée par la prise de remicade ou d'un autre immunosuppresseur apparenté. Ni les autres pièces médicales, qui se bornent à mentionner que l'intéressé reçoit régulièrement un traitement intraveineux qu'il convient de poursuivre, ni les articles de presse sur la pénurie de médicaments et de psychiatres en Algérie ne sont de nature à démontrer que le requérant ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine, même si le système de soins dans ce pays est moins performant que celui de la France. Dans ces conditions, le préfet du Bas-Rhin a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser de délivrer un certificat de résidence à M. E....

7. M. E... soutient qu'il est présent en France depuis environ sept ans et qu'il s'est intégré. Toutefois, le requérant est célibataire et sans enfant. S'il s'est engagé en 2019 dans un parcours d'insertion professionnelle et justifie avoir noué quelques liens en France, il n'établit pas être dépourvu d'attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante-quatre ans. Par suite, la décision en litige n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. E....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'a pas établi l'illégalité de la décision de refus de certificat de résidence. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ne peut qu'être écarté.

9. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui a été indiqué au point 6 que M. E... n'a pas établi devoir bénéficier d'un certificat de résidence de plein droit sur le fondement de l'article 6- 7 de l'accord franco-algérien. Par suite, en prononçant à son encontre une mesure d'éloignement, le préfet du Bas-Rhin n'a pas entaché sa décision d'une erreur de droit.

11. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

12. M. E... soutient qu'un retour en Algérie aura des conséquences sur son état de santé dès lors qu'il ne peut pas voyager et y bénéficier d'un traitement approprié. Toutefois, il n'apporte aucun élément pour établir qu'il ne pourra pas voyager. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été mentionné au point 6 qu'il peut bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé. Par suite, en fixant l'Algérie comme pays de destination, le préfet du Bas-Rhin n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par le requérant à fin d'injonction et d'astreinte et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

N° 20NC00677 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00677
Date de la décision : 29/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-29;20nc00677 ?
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