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22/09/2020 | FRANCE | N°19NC02543

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 19NC02543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté, en date du 11 février 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence algérien, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902016 du 3 juillet 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e et des mémoires, enregistrés le 5 août 2019 et le 25 août 2020 Mme B... A..., représentée par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté, en date du 11 février 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence algérien, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1902016 du 3 juillet 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 5 août 2019 et le 25 août 2020 Mme B... A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 3 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté, en date du 11 février 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de délivrance d'un certificat de résidence algérien, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résident algérien valable dix ans ou, à défaut, un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 400 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet n'ayant examiné sa demande, ni sur le fondement des articles 6, 5) et 7 bis, b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni en vertu de son pouvoir discrétionnaire, alors qu'elle avait présenté subsidiairement sa demande sur l'ensemble de ces fondements ;

- elle a méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la saisine de la commission du titre de séjour dès lors qu'elle aurait dû bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en qualité d'ascendant à charge ;

- le caractère collégial de la délibération du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'est pas établi, les trois médecins rendant en réalité leur avis individuellement et à des dates différentes, compte tenu de leur éloignement géographique ;

- la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle avait présenté une première demande de titre de séjour dès son arrivée sur le territoire français et que sa seconde demande date du 8 mars 2018, le 31 mai 2018 correspondant à la date de son rendez-vous au guichet de la préfecture ;

- le préfet n'établit pas que les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ont rendu leur avis en respectant les orientations générales fixées par le ministre de la santé dans son arrêté en date du 5 janvier 2017 ; la charge de la preuve ne peut incomber à la requérante dès lors qu'elle n'a pas la possibilité d'accéder librement à la base de données BISPO, laquelle est mise à disposition des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration pour leur permettre d'apprécier la condition d'accès aux soins effectifs, en contradiction avec les dispositions de l'article L. 312-1-1 du code des relations entre le public et l'administration ; le rapport médical établi pour l'instruction de sa demande à destination du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est incomplet et entaché de contradiction ; les signatures de l'avis du collège des médecins qui apparaissent comme des images insérées numériquement en bas de page ne sont pas régulières dès lors qu'elles ne peuvent être regardées comme des signatures électroniques au sens de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005, de l'article 1367 du code civil, de l'article 1er du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017 et du règlement n° 910/2014 du Parlement et du Conseil du 23 juillet 2014 ;

- elle a méconnu les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ainsi que celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle a méconnu les stipulations de l'article 7 bis, b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle devait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour.

Un mémoire a été enregistré le 1er septembre 2020 qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens, il n'a pas été communiqué.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2020, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les observations de Me C..., avocat représentant Mme B... A....

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions d'annulation de l'arrêté du 11 février 2019 :

1. La demande d'admission au séjour de Mme B... A..., ressortissante algérienne née le 31 mars 1944, a été examinée par le préfet du Bas-Rhin sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêté en date du 11 février 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 3 juillet 2019, dont Mme B... A... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Pour la première fois en appel, la requérante produit la copie de sa demande de titre de séjour datée du 6 décembre 2017, adressée par son conseil et réceptionnée le 8 mars 2018 par les services de la préfecture du Bas-Rhin, laquelle a donné lieu au rendez-vous du 31 mai 2018 visé par le préfet du Bas-Rhin dans l'arrêté attaqué comme la date de la demande d'admission au séjour. Il ressort de ces pièces, corroborées par le courrier adressé à la préfecture par son conseil le 22 octobre 2018, que Mme B... A..., sollicitait la délivrance d'un certificat de résidence algérien, à titre principal, sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 à raison de son état de santé et, à titre subsidiaire, sur le fondement des articles 6, 5) et 7 bis, b) de ce même accord, au titre du pouvoir discrétionnaire du préfet et sur le fondement des articles L. 313-11, 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont les conditions de séjour sont régies par l'accord franco-algérien, le préfet aurait dû s'estimer saisi d'une demande de certificat de résident sur le fondement d'une part de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, pendant des dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'autre part de son pouvoir de régularisation, au titre duquel il était d'ailleurs déjà saisi.

3. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet a examiné la demande de Mme B... A... sur le fondement de l'article 6, 7) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 mais pas sur ceux des articles 6, 5) et 7 bis, b) de cet accord, ni au titre de son pouvoir discrétionnaire. Il en résulte qu'en omettant d'examiner la demande de certificat de résidence sur ces derniers fondements, le préfet a commis une erreur de droit. Quelles que soient les conditions dans lesquelles la requérante a obtenu un rendez-vous au guichet et dès lors que l'administration était saisie d'une demande de titre de séjour sur plusieurs fondements contenue dans une seule lettre, la préfète ne peut sérieusement soutenir en défense que tous les fondements de la demande ont été examinés mais que certains d'entre eux auraient été rejetés par une décision implicite de rejet. Par suite, le refus de titre de séjour édicté à l'encontre de Mme B... A... est entaché d'une erreur de droit et doit être annulé pour ce motif, de même que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions d'injonction sous astreinte :

5. Le présent arrêt, par lequel la cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B... A..., n'implique cependant pas, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce que lui soit délivré un certificat de résidence algérien doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressée dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, sur le fondement de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais de l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme B... A... de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1902016 en date du 3 juillet 2019 du tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté en date du 11 février 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté la demande de certificat de résidence algérien présentée par Mme B... A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est fait injonction à la préfète du Bas-Rhin de procéder à un nouvel examen de la situation de Mme B... A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B... A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de Mme B... A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

2

N° 19NC02543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02543
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Mariannick BOURGUET-CHASSAGNON
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BOUKARA

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-22;19nc02543 ?
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