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23/07/2020 | FRANCE | N°19NC03483-19NC03485

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 23 juillet 2020, 19NC03483-19NC03485


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 13 novembre 2015 du directeur départemental des finances publiques du Haut Rhin rejetant sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer des cotisations de taxe foncière auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2012 à 2015 et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de prononcer la décharge de ces impositions ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation.

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ar un jugement n° 1600346 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Strasbo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 13 novembre 2015 du directeur départemental des finances publiques du Haut Rhin rejetant sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer des cotisations de taxe foncière auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2012 à 2015 et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de prononcer la décharge de ces impositions ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1600346 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 13 novembre 2015 du directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin rejetant sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti avec son épouse depuis le 1er avril 2012 et, d'autre part, d'enjoindre à l'administration de prononcer la décharge de ces impositions ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1600349 du 6 février 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I.) Par une décision du 27 novembre 2019, enregistrée sous le n° 19NC03483 le 28 novembre 2019 au greffe de la cour, le Conseil d'État statuant au contentieux a transmis à la cour la requête présentée par M. B... A....

Par une requête sommaire et un mémoire, enregistrés respectivement au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 6 avril et 5 juillet 2018, M. A..., représenté par la SCP Rousseau - Tapie, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n°1600346 du 6 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 novembre 2015 du directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin rejetant sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer des cotisations de taxe foncière auxquelles il a été assujetti avec son épouse depuis le 1er avril 2012 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de prononcer la décharge de ces impositions ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'audience n'a pas été publique ;

- le jugement a omis de répondre à sa demande d'annulation de la décision attaquée au regard de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

- les règles relatives à la décharge de l'obligation de solidarité entre les époux, prévues par l'article 1691 bis du code général des impôts, sont applicables aux cotisations de taxe foncière ;

- sa demande présentée le 28 septembre 2015 aux services fiscaux ne l'a pas été sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts comme le tribunal administratif l'a retenu mais tendait à l'application de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales.

Par un mémoire en défense, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 9 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

II.) Par une décision du 27 novembre 2019, enregistrée sous le n° 19NC03485 le 28 novembre 2019 au greffe de la cour, le Conseil d'État statuant au contentieux a transmis à la cour la requête présentée par M. B... A....

Par une requête sommaire et un mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'État les 6 avril et 5 juillet 2018, M. A..., représenté par la SCP Rousseau - Tapie, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n°1600349 du 6 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 13 novembre 2015 du directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin rejetant sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti avec son épouse depuis le 1er avril 2012 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à l'administration de prononcer la décharge de ces impositions ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière dès lors que l'audience n'a pas été publique ;

- le jugement a omis de répondre à sa demande d'annulation de la décision attaquée au regard de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

- la cotisation d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre de l'année 2011 est assise également sur les revenus déclarés par son ex-épouse ;

- sa demande présentée le 28 septembre 2015 aux services fiscaux ne l'a pas été sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts comme le tribunal administratif l'a retenu mais tendait à l'application de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales ;

- à titre subsidiaire, il est fondé à solliciter le bénéfice de l'article 1691 bis du code général des impôts sans que la circonstance que les cotisations d'impôt sur le revenu en litige ont été établies exclusivement sur ses revenus personnels puisse lui être opposée alors que seul l'état de fortune doit être pris en compte.

Par un mémoire en défense, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 9 août 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 16 mars 2020, M. A... conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Il soutient en outre qu'il a justifié d'une disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale à la date de la demande et sa situation financière et patrimoniale nette de charges.

Vu :

- les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les deux requêtes de M. A... sont dirigées contre des jugements se prononçant sur des demandes d'annulation de la même décision et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. Par une lettre du 28 septembre 2015, portant comme objet " Demande en décharge de responsabilité ", M. A... a demandé à l'administration fiscale de le " décharger de toute responsabilité " concernant l'impôt sur le revenu, la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe d'habitation auxquelles il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2012, 2013, 2014 et 2015, en conséquence du jugement du 23 juin 2015 par lequel le tribunal de grande instance de Mulhouse a prononcé son divorce avec effet au 1er avril 2012. Par une décision du 13 novembre 2015, le directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin a rejeté cette demande, qu'il a analysée comme présentée sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts. Le 16 février 2016, l'administration a prononcé le dégrèvement de la cotisation à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre de l'année 2015. Par un arrêt du 27 novembre 2019, le Conseil d'Etat a jugé que les jugements du 6 février 2018 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les demandes de M. A... dirigées contre la décision du directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin du 13 novembre 2015 étaient susceptibles d'appel en application de l'article R. 811-1 du code de justice administrative et attribué à la cour administrative d'appel de Nancy le jugement des requêtes de M. A....

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des requêtes :

Sur la régularité des jugements :

3. En premier lieu, il ne ressort pas des mentions des jugements du 6 février 2018 dont M. A... fait appel que les requêtes de l'intéressé auraient été appelées à une audience non publique du tribunal administratif de Strasbourg. Par suite, M. A..., qui n'apporte aucune précision à l'appui de son moyen, n'est pas fondé à soutenir que les jugements du tribunal administratif de Strasbourg seraient entachés d'irrégularité faute de publicité de l'audience.

4. En second lieu, il ressort des jugements attaqués que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par le demandeur au soutien de ses moyens, a répondu, avec une motivation suffisante, au moyen tiré de ce que la décision attaquée serait entachée d'illégalité au regard des dispositions de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales. Le moyen tiré du défaut de réponse à ce moyen doit être écarté.

Sur la demande de décharge de solidarité au paiement :

5. Aux termes de l'article 1691 bis du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Les époux et les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont tenus solidairement au paiement : 1° De l'impôt sur le revenu lorsqu'ils font l'objet d'une imposition commune ; 2° De la taxe d'habitation lorsqu'ils vivent sous le même toit. / II. - 1. Les personnes divorcées ou séparées peuvent demander à être déchargées des obligations de paiement prévues au I ainsi qu'à l'article 1723 ter-00 B lorsque, à la date de la demande : a) Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé ; (...) / 2. La décharge de l'obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur. Elle est alors prononcée selon les modalités suivantes : / a) Pour l'impôt sur le revenu, la décharge est égale à la différence entre le montant de la cotisation d'impôt sur le revenu établie pour la période d'imposition commune et la fraction de cette cotisation correspondant aux revenus personnels du demandeur et à la moitié des revenus communs du demandeur et de son conjoint ou de son partenaire de pacte civil de solidarité. (...) III. - Les personnes en situation de gêne et d'indigence qui ont été déchargées de l'obligation de paiement d'une fraction des impôts, conformément au II, peuvent demander à l'administration de leur accorder une remise totale ou partielle de la fraction des impositions mentionnées aux 1° et 2° du I restant à leur charge. (...) ".

6. L'article 1691 bis du code général des impôts institue un droit à décharge de la solidarité au bénéfice des contribuables qui remplissent les conditions qu'il énonce.

7. En premier lieu, il résulte de l'instruction que par jugement du 23 juin 2015, le tribunal de grande instance de Mulhouse a prononcé le divorce de M. A... avec effet au 1er avril 2012. Par une lettre du 28 septembre 2015, portant comme objet " Demande en décharge de responsabilité ", M. A... a demandé à l'administration fiscale de le " décharger de toute responsabilité " concernant l'impôt sur le revenu, la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe d'habitation auxquelles il a été assujetti avec son épouse depuis le 1er avril 2012 en informant l'administration fiscale du prononcé de son divorce et en produisant ledit jugement à l'appui de sa demande. Il n'a fait état dans ce courrier d'aucune difficulté financière et ne sollicite pas la bienveillance de l'administration quant à la mise en oeuvre des modalités de recouvrement. Par une décision du 13 novembre 2015, le directeur départemental des finances publiques du Haut-Rhin a rejeté cette demande, qu'il a analysée à bon droit comme présentée sur le fondement de l'article 1691 bis du code général des impôts. Ainsi, les demandes présentées par M. A... au tribunal administratif de Strasbourg doivent être regardées comme tendant à la décharge de l'obligation solidaire de paiement incombant aux époux en vertu du I de l'article 1691 bis du code général des impôts, présentées sur le fondement du II du même article, quand bien même il se prévalait, dans ses écritures devant le tribunal, des dispositions de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales.

8. En deuxième lieu, M. A... soutient que la décision du 13 novembre 2015 est illégale en tant qu'elle rejette sa demande de décharge de l'obligation solidaire de payer les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2012 à 2015 au motif que l'article 1691 bis du code général des impôts ne serait pas applicable. Il résulte des dispositions précitées de l'article 1691 bis du code général des impôts que les impositions pouvant bénéficier de la procédure de décharge de solidarité sont limitativement visées au I et n'incluent pas la taxe foncière sur les propriétés bâties. Par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions pour demander la décharge de l'obligation solidaire de payer les cotisations litigieuses de taxes foncière sur les propriétés bâties.

9. En troisième lieu, il ressort des travaux parlementaires préalables à l'adoption de l'article 9 de la loi n°2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 dont sont issues les dispositions de l'article 1691 bis du code général des impôts précité, que l'objectif poursuivi par le législateur était de pallier les difficultés financières d'un des conjoints ayant disposé de revenus plus modestes que l'autre et devant assurer seul la totalité de l'imposition calculée sur les revenus d'ensemble du foyer fiscal postérieurement au prononcé du divorce. L'esprit de la loi, tel qu'il résulte de ces travaux parlementaires, repose sur le principe que le montant de la cotisation d'impôt établie au titre de la période d'imposition commune fasse l'objet d'une répartition entre les anciens conjoints au prorata de la part de leurs revenus dans le revenu global du ménage.

10. Il résulte de l'instruction que l'avis d'imposition sur les revenus de l'année 2011 mentionne des revenus perçus par M. A... à hauteur de 193 566 euros au titre des traitements et salaires. Cet avis d'imposition n'indique aucun revenu déclaré par son épouse au titre de cette année 2011. Ces éléments sont confirmés par l'ordonnance de non conciliation prise par le tribunal de grande instance de Mulhouse du 3 octobre 2012 produite par le requérant. Au regard de ces seuls éléments, M. A... n'établit pas que son épouse aurait perçu des revenus au titre des années 2011 à 2015. Dans ces conditions et eu égard à ce qui a été dit au point 9, le requérant n'est pas fondé à se prévaloir de sa situation financière et patrimoniale afin d'obtenir la décharge de l'obligation solidaire de paiement des cotisations d'impôt sur le revenu calculées au titre des années 2011 à 2015 sur la base de ses seuls revenus.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes. Les conclusions à fin d'injonction doivent en conséquence être rejetées.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC03483, 19NC03485


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03483-19NC03485
Date de la décision : 23/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-05-02-01 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Paiement de l'impôt. Solidarité entre époux.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP JEROME ROUSSEAU et GUILLAUME TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-23;19nc03483.19nc03485 ?
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