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23/07/2020 | FRANCE | N°19NC00742

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 23 juillet 2020, 19NC00742


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 15 janvier 2019 par lesquels le préfet du Doubs a décidé de son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence dans le Doubs pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1900199 du 12 février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

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r une requête, enregistrée le 11 mars 2019, M. C... B..., représenté par Me D..., demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 15 janvier 2019 par lesquels le préfet du Doubs a décidé de son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence dans le Doubs pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1900199 du 12 février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mars 2019, M. C... B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 15 janvier 2019 par lesquels le préfet du Doubs a décidé de son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence dans le Doubs pour une durée de quarante-cinq jours ;

2°) d'annuler ces arrêtés du 15 janvier 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur l'arrêté de transfert :

- l'arrêté est insuffisamment motivé et est entaché d'un défaut d'examen particulier ;

- la décision méconnaît l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur l'assignation à résidence :

- il est excipé de l'illégalité de l'arrêté décidant son transfert.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2019, le préfet du Doubs conclut au non-lieu à statuer.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 juin 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., né en 1993 et de nationalité afghane, serait entré irrégulièrement en France le 2 décembre 2018 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. La consultation du fichier Eurodac a montré qu'il avait déposé une demande d'asile en Allemagne le 26 janvier 2015. Le préfet du Doubs a alors, en application des articles 18 et 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, saisi les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Celles-ci ayant accepté cette reprise en charge le 13 décembre 2018, le préfet du Doubs a décidé, par des arrêtés du 15 janvier 2019, d'une part, de remettre M. B... aux autorités allemandes et, d'autre part, de l'assigner à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... relève appel du jugement du 12 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés du 15 janvier 2019.

Sur l'exception de non-lieu à statuer :

2. Si le préfet du Doubs fait valoir que la décision de remise aux autorités allemandes attaquée du 15 janvier 2019 a été entièrement exécutée le 7 mars 2019, cette décision a cependant produit des effets et son exécution n'a donc pas privé d'objet les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B.... Le préfet du Doubs n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il n'y aurait ainsi plus lieu à statuer.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté portant transfert auprès des autorités allemandes :

3. En premier lieu, le requérant reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance, tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué, du défaut de motivation de la décision litigieuse et du défaut d'examen particulier. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par le tribunal administratif de Besançon.

4. En second lieu, aux termes du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque E tat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) " Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

5. M. B... soutient que son retour en Afghanistan l'exposerait à des risques de mauvais traitements eu égard à la situation dans son pays, en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 précités.

6. L'arrêté attaqué a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Allemagne et non dans son pays d'origine. Si les autorités allemandes ont rejeté la demande d'asile présentée par le requérant le 19 avril 2018 et lui ont ordonné de quitter le territoire allemand, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette circonstance ferait obstacle à ce que l'intéressé conteste, devant les juridictions allemandes compétentes, la légalité de cette décision d'éloignement, ni qu'il puisse demander auprès des autorités allemandes un nouvel examen de sa situation au regard du droit d'asile. En outre, en se bornant à citer des rapports et articles de presse relatifs aux taux d'expulsions et de protections accordées par l'Allemagne en comparaison à la France, le requérant n'établit ni que les autorités allemandes feraient structurellement ou systématiquement obstacle à l'enregistrement et au traitement d'une nouvelle demande d'asile, ni qu'une telle demande ne serait pas examinée par ces mêmes autorités dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Dans ces conditions, le requérant n'établit, par ses seules allégations, ni que son transfert vers l'Allemagne entraînerait automatiquement son retour vers l'Afghanistan, ni les conséquences d'une exceptionnelle gravité d'un tel retour. Par suite, doivent être écartés les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet en ne faisant pas usage de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions de l'article 17 du règlement européen du 26 juin 2013.

Sur l'arrêté portant assignation à résidence :

7. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré par le requérant de ce que l'arrêté portant assignation à résidence devrait être annulé, par voie de conséquence de l'illégalité de l'arrêté portant transfert auprès des autorités allemandes, ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 19NC00742


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00742
Date de la décision : 23/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : MAILLARD-SALIN

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-23;19nc00742 ?
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