Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Rondot a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la délibération du 8 juillet 2017 par laquelle le conseil municipal de Saint-Hippolyte a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune.
Par un jugement n° 1701605 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a annulé la délibération du 8 juillet 2017 en tant qu'elle prévoit l'ouverture à l'urbanisation de 5,7 hectares de terrains dans le secteur de Plainchamp.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 19NC00065 le 11 janvier 2019, complétée par un mémoire enregistré le 19 février 2020, la commune de Saint-Hippolyte, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 13 novembre 2018 ;
2°) de mettre à la charge du GAEC Rondot le versement d'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération litigieuse n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en tant qu'elle classe une partie du secteur de Plainchamp en zone AU ;
- les autres moyens soulevés en première instance doivent être écartés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2020, le GAEC Rondot, représenté par Me C..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, à titre subsidiaire, à l'annulation de l'intégralité de la délibération du 8 juillet 2017.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Favret, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour la commune de Saint-Hippolyte.
Considérant ce qui suit :
1. Le conseil municipal de Saint-Hippolyte (Doubs) a prescrit la révision du plan d'occupation des sols (POS) de la commune et sa transformation en plan local d'urbanisme (PLU), par une délibération du 27 juin 2014. Le projet de PLU a été arrêté par une délibération du 30 septembre 2016, et soumis à enquête publique du 13 mars au 14 avril 2017. Le PLU a été approuvé par une délibération du 8 juillet 2017. Le groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) Rondot, titulaire d'un bail rural pour exploiter plusieurs parcelles situées dans le secteur agricole de Plainchamp, désormais classé en zone à urbaniser, a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler cette délibération. La commune de Saint-Hippolyte fait appel du jugement du 13 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif a annulé la délibération du 8 juillet 2017, en tant qu'elle prévoit l'ouverture à l'urbanisation de 5,7 hectares de terrains situés notamment dans ce secteur de Plainchamp.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :
2. Le tribunal administratif de Besançon a estimé, par le jugement attaqué, qu'en prévoyant l'ouverture à l'urbanisation du secteur de Plainchamp, la commune de Saint-Hippolyte avait entaché le PLU contesté d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que " les besoins en logement de la commune apparaissent surévalués compte tenu, d'une part, de la surestimation des objectifs démographiques et, d'autre part, de la sous-estimation des possibilités de densification des parties déjà urbanisées ".
3. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
4. Il ressort du rapport de présentation et du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) de la commune de Saint-Hippolyte, que parmi les objectifs poursuivis par les auteurs du PLU, figuraient notamment ceux de conforter le rôle de centre bourg de Saint-Hippolyte pour préserver ses services publics, de porter la population de la commune à 1 015 habitants en 2032, de préserver une offre de logement diversifiée, pour accueillir des familles à tous les stades de la vie, de mobiliser quatre-vingt-cinq logements, dont soixante-quinze à construire et d'en réaliser dix-sept dans des zones déjà urbanisées (dents creuses) et le reste dans les zones ouvertes à l'urbanisation par le nouveau PLU. Les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) du PLU contesté définissent deux secteurs à vocation d'habitat et s'agissant du secteur de Plainchamp dont la plus grande partie correspond à des prairies de fauche, l'OAP1 mentionne qu'environ 3,4 ha sont aménageables pour la construction de cinquante-sept logements.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que contrairement aux indications démographiques portées dans le PADD, la population de Saint-Hippolyte n'a pas, selon les données officielles de l'INSEE qui sont versées au dossier, cessé de baisser depuis 1968, passant de 1 277 habitants en 1968 à 1 179 en 1982, 1 045 en 1999, 917 en 2009, 909 en 2014 et 907 en 2015. Ni la circonstance que la commune aurait investi 1,5 M d'euros pour la restructuration en maison de jeunesse et des rencontres de la " maison Prélot ", située à 2,8 km du plateau de Plainchamp, ni la circonstance que des logements construits à Saint-Hippolyte au cours des dernières années auraient facilement trouvé preneurs, ne sont de nature à inverser l'évolution démographique de cette commune, telle qu'elle est révélée par les statistiques officielles. L'objectif de population de 1 015 habitants à l'horizon 2032, à partir duquel a été, notamment, retenu le parti d'aménagement retenu par les auteurs du PLU contesté pour ouvrir certains secteurs naturels à l'urbanisation doit donc être regardé comme reposant sur des hypothèses non réalistes.
5. En second lieu, il ressort du rapport de présentation que s'agissant du potentiel de développement de l'urbanisation dans la commune, 0,42 ha de dents creuses seraient déjà constructibles, sous conditions, dans des secteurs concernés par des aléas faibles, au sens des plans de prévention des risques naturels en vigueur (chemin du Lods, rue Sous la Roche et chemin de la Rechole) et que 9,3 ha de dents creuses stratégiques sont disponibles dans le secteur de la rue de la Gare et dans le secteur Pré au Port. En outre, si la commune requérante soutient que seuls dix logements vacants seraient mobilisables dans le centre ancien, " après analyse ", l'INSEE a recensé soixante-trois logements vacants sur l'ensemble du territoire de la commune. Dans ces conditions, le parti des auteurs du PLU contesté de rendre constructibles de nouvelles superficies afin de réaliser sur le site de Plainchamp, 57 des 85 logements programmés, alors que ce secteur comporte des espaces agricoles à la fois de bonne et de moyenne valeur agronomique, notamment des prés de fauche labellisés AOP pour la fabrication de fromage, doit, compte tenu du potentiel déjà disponible de terrains constructibles et de la circonstance que les terrains agricoles ont déjà représenté, entre 2000 et 2015, 89,5 % des espaces artificialisés en vue du développement de l'habitat, être regardé comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Hippolyte n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé la délibération du 8 juillet 2017, en tant qu'elle prévoit l'ouverture à l'urbanisation des terrains agricoles situés dans le secteur de Plainchamp.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du GAEC Rondot, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Saint-Hippolyte demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Hippolyte le versement au GAEC Rondot d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Saint-Hippolyte est rejetée.
Article 2 : La commune de Saint-Hippolyte versera au GAEC Rondot une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Hippolyte et au GAEC Rondot.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
N° 19NC00065 2