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23/07/2020 | FRANCE | N°18NC02180

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 23 juillet 2020, 18NC02180


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI des Galmouches a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1602546 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 2 août

2018 et le 25 juin 2020, la SCI des Galmouches, représentée par Me Brancaleoni, demande à la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI des Galmouches a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011, 2012 et 2013 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1602546 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 2 août 2018 et le 25 juin 2020, la SCI des Galmouches, représentée par Me Brancaleoni, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son activité de location ne concerne pas des logements meublés mais des logements nus ;

- c'est à tort que l'administration a tenu compte des indications erronées figurant dans les contrats de baux conclus avec MM. E..., H..., C..., rédigés par la gérante de l'agence WKG Conseil ; la durée de location de trois ans mentionnée dans ces contrats s'oppose à la qualification de location meublée, conformément aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs ; ces contrats ont tous été annulés comme en témoigne l'attestation de l'ancienne gestionnaire du patrimoine ;

- l'attestation d'un membre actif de l'association Contact pour l'Espoir révèle que les trois studios loués par cette association pour les mettre à disposition de MM. E..., H..., C... n'étaient que partiellement équipés et que l'association a dû y rajouter la literie, les chaises et la vaisselle pour les rendre habitables ;

- si, concernant la location à M. A..., les deux contrats de location du 1er août 2007 et du 10 décembre 2009, transmis à l'administration, font état de quelques éléments mobiliers présents, M. A... atteste qu'il a dû ajouter au studio la literie, une table, des chaises et de la vaisselle ;

- une attestation de la CAF démontre que le contrat conclu avec M. B... portait sur une location nue ;

- l'administration ne démontre pas que les prix pratiqués pour la location des studios en litige sont supérieurs à ceux pratiqués pour des studios dont le caractère de locaux nus n'est pas contesté ;

- aucun bien mobilier n'a été inscrit au titre des immobilisations à l'actif de la SCI ;

- les quelques biens immobiliers présents dans les studios loués ne permettent pas de les qualifier de logements meublés au sens de l'article 25-4 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SCI les Galmouches ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Stenger,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. La SCI Les Galmouches, qui exerçait une activité de location de terrains et de biens immobiliers, a fait l'objet d'un contrôle sur place puis d'une vérification de comptabilité après avoir transmis à l'administration fiscale des contrats de bail portant sur des locaux meublés. Par deux propositions de rectification du 12 décembre 2014 et du 23 avril 2015, établies selon la procédure de rectification contradictoire, elle a été assujettie à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013. Elle relève appel du jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes de l'article 8 du code général des impôts : " Sous réserve des dispositions de l'article 6, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. En cas de démembrement de la propriété de tout ou partie des parts sociales, l'usufruitier est soumis à l'impôt sur le revenu pour la quote-part correspondant aux droits dans les bénéfices que lui confère sa qualité d'usufruitier. Le nu-propriétaire n'est pas soumis à l'impôt sur le revenu à raison du résultat imposé au nom de l'usufruitier./Il en est de même, sous les mêmes conditions :/1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées au 1 de l'article 206 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ;(...) ". Aux termes de l'article 206 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 ter, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt, même lorsqu'elles ne revêtent pas l'une des formes visées au 1, si elles se livrent à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35. ". Aux termes de l'article 34 du même code : " Sont considérés comme bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par des personnes physiques et provenant de l'exercice d'une profession commerciale, industrielle ou artisanale. ".

3. Une société civile donnant habituellement en location des locaux garnis de meubles doit être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts et, par suite, est passible de l'impôt sur les sociétés par application du 2 de l'article 206 du même code et de la contribution additionnelle à cet impôt prévue par l'article 235 ter ZA de ce code.

4. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a assujetti la SCI Les Galmouches à l'impôt sur les sociétés après que cette dernière lui eut communiqué un classeur contenant notamment les contrats de bail qu'elle avait conclus avec M. A..., M. E..., M. H..., M. B..., M. C... et M. F..., portant sur la location de locaux meublés. L'administration a considéré que la société requérante s'était ainsi livrée à une activité de nature commerciale la plaçant dans le champ d'application des dispositions précitées des article 34 et 206 du code général des impôts, ce qui entraînait son assujettissement à l'impôt sur les sociétés. La SCI Les Galmouches conteste le caractère meublé des locaux précités et soutient qu'il s'agissait en réalité de location de biens nus.

5. En premier lieu, la société requérante soutient que les trois contrats de bail qu'elle a conclus avec MM. E..., H... et C..., rédigés par l'agence WKG Conseil, étaient des " brouillons " et présentaient des mentions erronées, notamment en ce qu'ils indiquaient qu'ils portaient sur des studios meublés. Il résulte toutefois de l'instruction que ces trois contrats, produits à l'instance, ont été paraphés par les co-contractants. Ils mentionnent clairement dans leurs intitulés et leurs descriptifs respectifs qu'ils portent sur des studios meublés. Contrairement à ce que soutient la société requérante, l'attestation de l'ancienne gestionnaire du patrimoine de l'agence WKG Conseil, produite à l'instance, ne saurait être regardée comme apportant la preuve que ces locaux étaient en réalité vides de meubles dès lors qu'elle se borne à indiquer que les contrats ont été annulés au motif que le gérant de la SCI n'avait pas signé le mandat de gestion locative. En outre, si la SCI fait valoir que la durée de location de trois ans indiquée dans les trois contrats précités s'oppose à la qualification de location meublée, elle ne démontre pas, par les pièces qu'elle produit, notamment le document présentant les conditions générales d'un contrat de location, non signé ni paraphé, que les contrats en litige, non produits aux débats, portaient sur une telle durée. Par ailleurs, l'attestation d'un membre actif de l'association " Contact pour l'Espoir " indiquant que les trois studios loués par cette association pour les mettre à disposition des personnes précitées n'étaient que partiellement équipés n'est pas probante dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que cette association ait pris à bail les locaux concernés. Par suite, c'est à bon droit que ces logements ont été regardés par l'administration comme des locaux meublés.

6. En deuxième lieu, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 25-4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs dès lors que cet article, qui précise qu' " un logement meublé est un logement décent équipé d'un mobilier en nombre et en qualité suffisants pour permettre au locataire d'y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante ", a été créé par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (dite ALUR), intervenue postérieurement aux années en litige. Par ailleurs, la circonstance qu'aucun élément mobilier n'est inscrit à l'actif de la société requérante ne saurait suffire à démontrer que les locaux en litige étaient nus. Ces moyens doivent donc être écartés.

7. En troisième lieu, s'agissant des locaux loués à M. A..., l'attestation de ce dernier précisant qu'il a dû y installer plusieurs éléments mobiliers, telles que literie, table, chaises et vaisselle n'est pas probante dès lors qu'il ressort des descriptifs mentionnés dans les baux produits par la société elle-même que ces locaux présentaient pour le studio les caractéristiques suivantes : " coin repas et salle de bains avec douche, lavabos, WC. 1 frigo, 1 plaque électrique double, 1 clic-clac, 1 armoire, 1 meuble micro-onde, 1 meuble TV " et pour la chambre : " chambre et salle de bains, 1 évier, 1 table 3 chaises 1 fauteuil ". Par ailleurs, et comme le fait valoir le ministre en défense, les dates des contrats de bail invoqués par la SCI, signés les 1er août 2007 et 10 décembre 2009 sont en partie incohérentes avec celles des contrats qu'elle a produits, datés du 1er août 2007 et du 10 décembre 2007, et celles énoncées dans l'attestation de M. A... qui fait référence à deux périodes allant d'août 2007 à juin 2009 et de novembre 2009 à juillet 2013. Par suite, c'est à bon droit que ces logements ont été regardés comme des locaux meublés par l'administration.

8. En quatrième lieu, concernant le local loué à M. B..., l'attestation de la caisse d'allocations familiales produite par la société requérante ne saurait être regardée comme prouvant qu'il n'était pas meublé dès lors qu'elle a été renseignée et signée par la SCI Les Galmouches elle-même, qu'elle ne comporte pas la date d'effet du bail et qu'elle ne se prononce pas sur le caractère meublé ou non du logement. Par suite, c'est à bon droit que ce logement a été regardé par l'administration comme un local meublé.

9. En cinquième lieu, s'agissant du local loué à M. F..., le contrat produit à l'instance, au demeurant non signé, indique clairement dans son descriptif qu'il proposait " 1 armoire deux portes, 1 meuble bas blanc, 1 séjour avec coin repas équipé, 1 table, 2 chaises, 1 frigo, 1 plaque électrique 2 feux, 1 hotte ; 1 armoire de toilette, 1 salle de bain avec cabine de douche ". Par suite, c'est également à bon droit que ce logement a été regardé comme un meublé par l'administration.

10. En sixième et dernier lieu, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration ne démontre pas que les loyers pratiqués pour la location des studios en litige sont supérieurs à ceux pratiqués pour des studios dont le caractère de locaux nus n'est pas contesté dès lors d'une part, que la commission départementale a indiqué dans son avis que les loyers pratiqués par la SCI étaient bien supérieurs aux prix pratiqués pour la location de studios vides de meubles et d'autre part, que, si la société requérante soutient qu'elle a intégré dans le prix des loyers les charges locatives et les charges privatives, tels qu'électricité, eau, assurance du logement et abonnement internet, elle ne le démontre pas.

11. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que l'administration a considéré que la société requérante, en louant des locaux meublés, s'était livrée à une exploitation commerciale au sens de l'article 34 du code général des impôts, la rendant passible de l'impôt sur les sociétés en application du 2 de l'article 206 du code général des impôts.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Les Galmouches n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de la SCI Les Galmouches est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Galmouches et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 18NC02180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02180
Date de la décision : 23/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : CABINET FILOR - JURI-FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-23;18nc02180 ?
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