Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté non daté par lequel le préfet de l'Aube lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d'office à la frontière.
Par un jugement n° 1902851 du 29 janvier 2020, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2020, et un mémoire complémentaire, enregistré le 16 juin 2020, M. C... D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1902851 du 29 janvier 2020 du président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler l'arrêté non daté du préfet de l'Aube ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de condamner l'Etat aux dépens et de mettre à sa charge le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige n'est pas daté ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que les dispositions du second alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2020, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D... est un ressortissant malien né le 25 juin 1993. Il a déclaré être irrégulièrement entré en France le 21 septembre 2018. Le 2 avril 2019, il a présenté une demande d'asile, qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 17 mai 2019, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 14 octobre 2019. En conséquence de ces refus, le préfet de l'Aube, par un arrêté du 8 novembre 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de de son éventuelle reconduite d'office à la frontière. M. D... a saisi le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2019. Il relève appel du jugement n° 1902851 du 29 janvier 2020, qui rejette sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, l'arrêté en litige énonce, dans ses visas et motifs, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Il est ainsi suffisamment motivé au regard des exigences de l'article L. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait et il ne peut, dès lors, qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, il ressort des motifs de l'arrêté en litige que le préfet de l'Aube a procédé un examen particulier de la situation personnelle de M. D.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'un tel examen ne peut qu'être écarté.
4. En troisième lieu, la circonstance que l'ampliation de l'arrêté du 8 novembre 2019, qui a été régulièrement notifiée au requérant le 16 novembre suivant, ne soit pas datée est sans incidence sur la régularité de l'acte contesté. Par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant.
5. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... aurait saisi le préfet de l'Aube d'une demande d'admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite et alors que le préfet de l'Aube n'a pas examiné d'office si l'intéressé pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions en cause, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté comme inopérant.
6. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. D... se prévaut de la présence en France de son père, de nationalité française, qui l'héberge, et de sa participation à des ateliers sociolinguistiques au titre de l'année 2018-2019. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant n'est entré sur le territoire français que le 21 décembre 2018. Il est célibataire et sans enfant à charge. Il n'est pas isolé dans son pays d'origine, où vivent notamment sa mère et ses cinq frères et soeurs. Par suite et alors que le caractère indispensable de la présence de l'intéressé auprès de son père âgé ne ressort pas des pièces du dossier, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
8. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que précédemment, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle au regard du pouvoir de régularisation du préfet.
9. En septième lieu, le moyen tiré de l'erreur de droit n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé. Il ne peut, par suite, qu'être écarté.
10. En huitième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
11. Si M. D... fait valoir qu'il risque d'être exposé, en cas de retour au Mali, à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et par le second alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il se borne à produire, en dehors de son propre récit, des documents généraux sur la situation au Mali, qui ne sont pas de nature à étayer ses allégations. Par suite et alors que, au demeurant, la demande d'asile du requérant a été rejetée par l'Office française de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et des dispositions en cause doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Aube du 8 novembre 2019. Par suite, il n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
N° 20NC00529 2