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18/06/2020 | FRANCE | N°18NC01411

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 18 juin 2020, 18NC01411


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Gestion analyse informatique a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1601096 du 10 avril 2018, le tribunal a

dministratif de Strasbourg a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Gestion analyse informatique a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2014, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1601096 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer à hauteur de 18 032 euros et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2018, la société anonyme (SA) Gestion analyse informatique, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge partielle des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2014, et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le tribunal a retenu à tort l'irrecevabilité de sa demande tendant à la décharge du rehaussement à hauteur de 20 618 euros au titre de l'année 2011 ;

- le tribunal a omis de répondre à sa demande tendant à la décharge du rehaussement correspondant à la provision de 30 804 euros correspondant à un protocole amiable dans le cadre d'un litige prud'homal ;

Sur le bien-fondé des impositions :

- les frais de location de salles de réception auprès du Manoir Théas constituent bien des dépenses engagées dans l'intérêt de la société dès lors que les locaux sont utilisés pour accueillir des clients et y tenir des réunions de travail ;

- les frais des déplacements en litige sont déductibles de l'impôt sur les sociétés au titre des charges ;

- les factures des interventions de la société Except sont déductibles au titre de l'année au cours de laquelle la dépense a été engagée ;

- la constitution d'un passif relatif aux prestations de la société Except est justifiée ;

- le passif constitué par les charges sociales au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2011 est justifié ;

- la provision de 30 804 euros correspondant à un protocole amiable dans le cadre d'un litige prud'homal est déductible du chiffre d'affaires ;

- la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la location de salles auprès du Manoir Théas est déductible.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SA Gestion analyse informatique ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la SA Gestion analyse informatique.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme (SA) Gestion analyse informatique, qui a pour activité le traitement et l'hébergement de données informatiques, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité. Par proposition de rectification du 12 décembre 2014, l'administration lui a notifié dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos au 30 septembre 2011, 2012 et 2013 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2010 au 31 juillet 2014, ainsi que des pénalités correspondantes. La SA Gestion analyse informatique relève appel du jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir constaté un non-lieu à statuer partiel, a rejeté le surplus de sa demande de décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales : " L'administration, ainsi que le contribuable dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peuvent faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction. (...) " Aux termes du deuxième alinéa l'article R. 200-2 du même livre : " Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration. " Il résulte de ces dispositions que les prétentions d'un contribuable présentées pour la première fois devant le tribunal administratif ne peuvent être accueillies que dans la mesure où, ajoutées le cas échéant aux dégrèvements prononcés par l'administration ou aux réductions accordées par le juge, elles ne conduisent pas à un dégrèvement supérieur à celui qui avait été demandé dans la réclamation.

3. Il résulte de l'instruction que dans sa réclamation préalable du 10 septembre 2015, la SA Gestion analyse informatique a contesté la mise en recouvrement de la somme de 122 138 euros au titre de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des pénalités correspondantes. La proposition de rectification du 12 décembre 2014 a mis à la charge de la SA Gestion analyse informatique des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de cette même somme de 122 138 euros en droits et en pénalités. Par suite, la SA Gestion analyse informatique était recevable à présenter devant le tribunal administratif des conclusions tendant à la décharge d'un chef de rectification, en l'occurrence relatif à un passif injustifié de charges sociales, pour lequel elle n'a pas présenté d'observations dans sa réclamation préalable, dès lors que ces conclusions ne conduisaient pas à un dégrèvement supérieur au montant de 122 138 euros demandé dans la réclamation préalable. Il s'ensuit que la SA Gestion analyse informatique est fondée à soutenir qu'en lui opposant l'irrecevabilité de ses conclusions contestant le rehaussement de 20 618 euros au titre de l'exercice clos en 2011 alors que sa demande restait dans la limite du quantum total d'imposition contesté dans cette réclamation, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité. En conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen touchant à sa régularité, le jugement attaqué doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SA Gestion analyse informatique devant le tribunal administratif de Strasbourg et sur ses conclusions présentées en appel.

Sur l'étendue du litige :

5. Par une décision du 3 juin 2016, postérieure à l'introduction de la demande devant le tribunal administratif, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles la SA Gestion analyse informatique a été assujettie à concurrence d'une somme de 16 073 euros en droits et de 1 959 euros en pénalités au titre de l'exercice clos en 2013. Les conclusions à fin de décharge de la SA Gestion analyse informatique sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

6. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, la régularité d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs.

7. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 12 décembre 2014 adressée à la SA Gestion analyse informatique indique le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal, les années d'imposition concernées et les motifs justifiant les rectifications. La proposition de rectification est ainsi suffisamment motivée. La SA Gestion analyse informatique n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification ne démontre pas le caractère anormal de la gestion de l'entreprise et le défaut de justification des charges engagées par la société dès lors que le caractère suffisant de la motivation d'une proposition de rectification ne dépend pas de son bien-fondé. Par suite, contrairement à ce que soutient la société requérante, la proposition de rectification contestée répondait à l'exigence de motivation résultant des dispositions précitées du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de l'impôt sur les sociétés :

Sur les charges déductibles :

8. En premier lieu, aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : /1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

9. A l'issue de la vérification de comptabilité de la SA Gestion analyse informatique, l'administration a remis en cause la déductibilité de trois factures relatives à la location de salle de réception réglées au Manoir Théas au titre des exercices clos en 2012 et 2013 pour des montants annuels de 6 000 euros hors taxes. Le service a considéré que ces dépenses n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise.

10. La SA Gestion analyse informatique soutient qu'elle loue un bureau au Manoir Théas, situé à Barraute-Camu dans le département des Pyrénées-Atlantiques, afin d'y réaliser des travaux à façon, comprenant de la saisie-exploitation de documents comptables au profit du cabinet d'expertises comptables Fidec. Elle indique que les travaux sont réalisés au profit de clients situés dans le Béarn représentant un chiffre d'affaires de 35 000 euros par an. Pour justifier de l'intérêt de la location de ce bureau pour son activité, la SA Gestion analyse informatique produit également des photographies du local et se prévaut des déplacements de son président directeur général dont la déductibilité des frais de transport a été admise par l'administration.

11. Il résulte cependant de l'instruction que les frais de déplacements de M. D..., président directeur général de la société requérante, ont été admis en déduction au titre de ses trajets entre son domicile à Barraute-Camu et son lieu de travail à Eckbolsheim, siège de la SA Gestion analyse informatique. Si la société requérante indique que M. D... n'a établi son domicile à Barraute-Camu qu'à partir de l'année 2015, il n'est pas contesté qu'il disposait d'une résidence au cours des années en litige et qu'il effectuait des trajets réguliers à titre personnel entre les Pyrénées-Atlantiques et le Bas-Rhin pour se rendre au siège de sa société. En outre, si la SA Gestion analyse informatique justifie de la réalité des travaux réalisés pour le compte de clients béarnais par l'intermédiaire du cabinet d'expertises comptables Fidec, elle n'établit pas que ces travaux de saisie informatique ont été réalisés à partir du bureau situé au Manoir Théas et non à distance dans ses locaux dans le Bas-Rhin. Les seules photographies produites ne suffisent pas à établir une présence physique de la SA Gestion analyse informatique dans le bureau loué au Manoir Théas. Il n'est en effet pas démontré notamment que ce bureau n'est pas utilisé pour la gestion des chambres d'hôtes du Manoir Théas, M. D... en étant le dirigeant et détenant la totalité du capital avec son épouse et ses enfants. La SA Gestion analyse informatique n'apporte aucun élément probant attestant la réalité des rendez-vous qu'elle aurait eus avec des clients à Barraute-Camu, les factures produites portant d'ailleurs uniquement sur des travaux à façon au seul bénéfice de la société Fidec. Dans ces conditions, la SA Gestion analyse informatique ne fournit pas suffisamment d'éléments justificatifs permettant de rattacher les factures litigieuses à des dépenses exposées dans son intérêt. Par suite, l'administration fiscale était fondée à réintégrer ces sommes dans son résultat imposable.

12. En deuxième lieu, la SA Gestion analyse informatique conteste la remise en cause de la déductibilité de certains frais de déplacements au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013. En se bornant à produire la carte grise du véhicule utilisé par M. D... et des factures d'entretien portant l'adresse du Manoir Théas, ainsi qu'une liste de trajets entre Strasbourg et Barraute-Camu avec des mentions sommaires relatives à l'objet de ces déplacements, la société requérante n'apporte pas d'élément suffisamment probant attestant le motif professionnel et de l'intérêt de ces déplacements pour la seule SA Gestion analyse informatique. Il s'ensuit que c'est à bon droit que l'administration n'a pas regardé ces sommes comme ayant un lien avec l'exploitation de la SA Gestion analyse informatique.

13. En troisième lieu, aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. ". Il résulte de ces dispositions que les charges doivent normalement être déduites des résultats de l'exercice au cours duquel elles peuvent être considérées comme engagées par l'existence d'une dette certaine dans son principe et dans son montant, quelle que soit la date de paiement ou d'exigibilité de celle-ci

14. La SA Gestion analyse informatique conteste la réintégration dans son chiffre d'affaires imposables au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 des frais de maintenance de ses serveurs et matériels informatiques qui auraient été réglés à la société Except. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la vérification de comptabilité, la SA Gestion analyse informatique a transmis au vérificateur le 28 octobre 2014 trois courriers des 6 octobre 2011, 9 octobre 2012 et 7 octobre 2013 adressés par la société Except mentionnant le montant approximatif des prestations et indiquant qu'une situation définitive sera établie ultérieurement. Des fiches de travail y étaient jointes. L'administration précise, sans être contestée, que ces fiches ne mentionnent ni le nombre d'heures de travail réalisées ni le tarif et la nature des prestations concernées. Le 18 novembre 2014, la SA Gestion analyse informatique a fourni au vérificateur trois factures des 27 octobre et 5 novembre 2014 relatives aux prestations réalisées en 2011, 2012 et 2013 établies durant la vérification de comptabilité. Par ailleurs, dans le cadre d'un droit de communication exercé auprès de la société Except, le service a obtenu la copie du grand livre de cette dernière ainsi que l'ensemble des factures émises pour la SA Gestion analyse informatique. Le compte client des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 ne mentionne pas les trois factures produites en 2014. Il résulte de ce qui précède que la SA Gestion analyse informatique ne justifie pas de l'existence d'une dette certaine dans son principe et dans son montant à la clôture de chacun des trois exercices en litige. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans le bénéfice imposable.

Sur les passifs injustifiés :

15. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) / 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. (...) ". Il appartient au contribuable, pour l'application de ces dispositions, de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise.

16. En premier lieu, lors des opérations de contrôle, l'administration a constaté dans la comptabilité de la SA Gestion analyse informatique un solde créditeur du compte de la société Except de 37 862, 91 euros au 30 septembre 2010. A la suite de l'exercice d'un droit de communication auprès de la société Except, l'administration a obtenu une copie du compte client de la SA Gestion analyse informatique extrait du grand livre, qui fait apparaître un solde débiteur de 12 924, 36 euros au 30 septembre 2010. L'administration a considéré que la différence de solde à hauteur de 24 938,45 euros constituait un passif injustifié et a réintégré cette somme dans le bénéfice imposable de la société requérante. La SA Gestion analyse informatique soutient qu'elle a évalué le montant des prestations de la société Except lors des années en litige et a constaté la charge au crédit du compte 408 " Factures non parvenues " en l'absence de justificatif. Elle argue qu'elle n'a pu régulariser la situation qu'en 2014, lors de la réception des factures comme il a été déjà indiqué au point 14.

17. Il résulte de l'instruction que la SA Gestion analyse informatique ne justifie pas de la différence entre le solde constaté au 30 septembre 2010 dans sa comptabilité au compte fournisseur de la société Except avec celui enregistré à la même date dans la comptabilité de la société Except à son compte client. La régularisation dans la comptabilité de la SA Gestion analyse informatique à la suite de l'émission des factures par la société Except les 27 octobre et 5 novembre 2014 d'un montant de 66 050 euros hors taxe ne saurait expliquer la différence de solde de 24 938,45 euros constatée par l'administration dès lors que les courriers des 6 octobre 2011, 9 octobre 2012 et 7 octobre 2013 adressés par la société Except mentionnaient un coût approximatif des prestations de 65 000 euros. Quant au compte d'attente " Factures non parvenues ", la société requérante n'apporte aucun élément justifiant les écritures qu'elle aurait passées sur ce compte. Il s'ensuit que l'administration était fondée à réintégrer dans son bénéfice imposable en 2011 le montant correspondant à la différence de solde de 24 938,45 euros observée caractérisant un passif injustifié.

18. En second lieu, l'administration a relevé qu'à l'ouverture de l'exercice au 1er octobre 2010, le compte 431 " charges sociales sur primes " présentait un solde créditeur de 57 818,73 euros. Le 17 septembre 2014, la SA Gestion analyse informatique a passé des écritures comptables de régularisation au titre de l'exercice clos au 30 septembre 2011. La société a débité la somme de 20 618, 73 euros du compte 431 " charges sociales sur primes " pour l'inscrire au crédit du compte " 421 Avances et acomptes ". L'administration en a inféré que la somme de 20 618, 73 euros, déduite en tant que charges des résultats de l'année 2011 au titre des sommes dues aux organismes sociaux, constitue, à la suite des écritures passées le 17 septembre 2014, un profit exceptionnel imposable à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011.

19. La société requérante se borne à alléguer que les charges sociales correspondant au rehaussement étaient dues, quand bien même les primes correspondantes n'ont pas été versées à M. D.... Il résulte cependant de l'instruction qu'en décidant le 17 septembre 2014 de débiter le compte " 431 charges sociales sur prime " de la somme de 20 618, 73 euros au titre de son exercice clos en 2011, la SA Gestion analyse informatique a nécessairement minoré le montant de ses charges déductibles de son résultat, sans que la circonstance que ces charges sociales étaient dues n'ait d'incidence sur ses choix comptables. Dans ces conditions, eu égard notamment aux explications fournies par le contribuable, l'administration a pu regarder cette somme comme un profit exceptionnel au titre de l'exercice clos en 2011 résultant de la diminution du montant de ses charges.

Sur la provision pour risques et charges :

20. La SA Gestion analyse informatique conteste la remise en cause d'une provision pour risques et charges ayant donné lieu à un rehaussement d'un montant de 30 084 euros. Le ministre indique en défense, sans être contesté, que ce rehaussement a été abandonné et a donné lieu au dégrèvement susmentionné prononcé par décision du 3 juin 2016. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur cette demande, laquelle est dépourvue d'objet comme il a été constaté au point 5.

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

21. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : /a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au même code : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". Aux termes de l'article 206 de la même annexe : " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission/(...) IV. - 1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. /2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants :/ 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise (...) 3° Lorsque le bien est cédé sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à son prix normal, notamment à titre de commission, salaire, gratification, rabais, bonification, cadeau, quelle que soit la qualité du bénéficiaire ou la forme de la distribution, sauf quand il s'agit de biens de très faible valeur".

22. Il résulte de ce qui a été dit au point 11 que les dépenses de location d'un local au Manoir Théas ayant donné lieu aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible en litige n'étaient pas nécessaires à l'exploitation de la SA Gestion analyse informatique. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que la taxe sur la valeur ajoutée correspondante ne pouvait être déduite par la société requérante.

23. Il résulte de tout ce qui précède que le surplus des conclusions à fin de décharge de la SA Gestion analyse informatique doit être rejeté.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 10 avril 2018 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu, compte tenu de la décision de dégrèvement du 3 juin 2016, de statuer sur les conclusions à fin de décharge de la SA Gestion analyse informatique en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes auxquelles la SA Gestion analyse informatique a été assujettie à concurrence d'une somme de 16 073 euros en droits et de 1 959 euros en pénalités au titre de l'exercice clos en 2013.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par la SA Gestion analyse informatique devant le tribunal administratif de Strasbourg et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Gestion analyse informatique et au ministre de l'action et des comptes publics.

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N° 18NC01411


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